La politique et la société saoudiennes sont fréquemment analysées à l'aune du wahhabisme. Ce mouvement religieux apparu au milieu du xviii e siècle se voit ainsi érigé en grand principe d'ordonnancement idéologique des lois et pratiques du royaume et de sa politique étrangère, aujourd'hui comme hier. Toutefois, le wahhabisme reste encore trop souvent mal compris et pour une large part fantasmé. Il occulte en outre d'autres variables qui permettent elles aussi de comprendre l'Arabie saoudite .
Depuis l'unification de 1990, le Yémen a été marqué par un champ partidaire dynamique et divers, donnant naissance à une formule politique originale. La phase de transition qui a suivi le soulèvement révolutionnaire de 2011 et la chute du Président Saleh a eu un effet ambivalent sur la place et le rôle des partis politiques. Elle a été marquée par une surprenante stabilité du paysage puis par une relégation apparente des formations politiques institutionnalisées, en particulier du parti al-Islah, branche yéménite des Frères musulmans. Ce processus s'est indéniablement produit au bénéfice d'acteurs armés : la rébellion houthiste, le mouvement sudiste et les jihadistes. La guerre qui a débuté en mars 2015, marquée notamment par l'implication saoudienne, semble avoir approfondi une telle dynamique de marginalisation des partis. Pourtant ce processus n'est encore une fois pas univoque. À la lumière du cas yéménite, l'objet de cet article est d'interroger le devenir et la résilience des partis dans un contexte marqué par la faillite des transitions institutionnelles, la violence et le maintien des structures autoritaires.
L'avatar yéménite des «Printemps arabes» a initialement donné lieu à un processus de transition politique enthousiasmant. Celui-ci s'est toutefois rapidement gâté, débouchant sur une guerre et le délitement des institutions étatiques. Comment expliquer cette détérioration? Ce court article se focalise sur deux dynamiques de segmentarisation et de polarisation identitaires qui semblent saper les bases et ressources de l'État yéménite, entre Nord et Sud(s), entre sunnites et chiites. Il entend également tracer les prémices de l'émergence d'une tierce identité, structurée autour de la ville de Taëz, qui permet de dépasser les impasses de la polarisation. ; La reincarnazione yemenita delle «primavere arabe» ha inizialmente dato luogo ad un processo di transizione politica entusiasmante. Questo si è tuttavia rapidamente deteriorato, approdando ad una guerra e alla deliquescenza delle istituzioni statuali. Come spiegare questo deterioramento ? Questo breve articolo mette l'accento su due dinamiche di segmentarizzazione e polarizzazione identitarie, che sembrano minare le basi e le risorse dello Stato yemenita, tra Nord e Sud(s), tra sunniti e sciiti. Si intendono ugualmente tracciare le premesse di una identità 'terza', strutturata intorno alla città di Taëz, che permetta di superare le impasse di questa polarizzazione.
Résumé L'effet de contexte contre l'effet « domino ». Au Yémen, la montée en force des mouvements protestataires et des contestations internes s'agrègent au morcellement des formes de pouvoir pour expliquer la nouveauté relative que constitue le mouvement du début 2011. Des formes revendicatives émanant de populations jeunes, qui par bien des aspects rappellent les mouvements sociaux égyptiens et tunisiens, sont rattrapées par la fragmentation des sources d'expression plus ancienne du séparatisme ou de la contestation religieuse. Pour autant, dans une situation encore très instable, le chemin d'une conciliation pourrait être trouvé, sans doute dans un dépassement des formes claniques d'allégeance et des idéologies.
L'actuelle République du Yémen est née le 22 mai 1990 de la réunion de la République démocratique et populaire du Yémen (au Sud) et de la République arabe du Yémen (au Nord). Après une phase pluraliste (notamment marquée par les élections législatives de 1993 et la participation du parti islamiste al-Islâh (Rassemblement yéménite pour la réforme) au gouvernement de 1993 à 1997, le pouvoir s'est progressivement engagé dans un processus de monopolisation croissante des ressources institutionnelles, économiques et symboliques. Le contexte de la lutte antiterroriste a sans doute accéléré, tout en la légitimant, la disparition d'une formule politique originale fondée sur un partage du pouvoir et un faible niveau de répression. Durant les années 1990, cette formule avait indéniablement singularisé le pays à l'échelle régionale. Or, depuis l'attentat d'octobre 2000 contre le navire de guerre américain USS Cole dans le port d'Aden et les attentats du 11 septembre 2001, l'obsession sécuritaire qui structure l'essentiel des relations du gouvernement yéménite non seulement avec les États-Unis et les pays européens mais aussi, depuis peu, avec le voisin saoudien a provoqué un dérèglement des équilibres politiques. [Premier paragraphe]
Yemen today finds itself confronted with multiple fronts, the significance of which is often misunderstood. Although the terrorist threat linked to al-Qaida has monopolized attention, the Sa'dah war which has shaken the country's north since 2004 undeniably deserves to be better understood. Its duration and violence as well as the growing involvement of international actors make this conflict a significant source of instability at the local and regional levels. The complexity of the conflict has significantly increased over the course of six phases of combat, multiplying the potential levels of understanding. As a result, the interpretation that sees the conflict as a "classic" confrontation between the government of President Ali Abdallah Saleh and a Shiite rebellion led by the al-Houthi clan appears to be inadequate. Given the degree to which Yemen sometimes seems to be marked by the specificities of its history, society and political system, the Sa'dah conflict is no doubt for many incomprehensible. The roots and issues at stake in this war should thus be put into context by taking its singularities into consideration as well as by underscoring the extent to which this eruption of violence is itself symptomatic of transformations in the international system and the operation of political regimes at the level of the Arab world. Adapted from the source document.
L'actuelle République du Yémen est née le 22 mai 1990 de la réunion de la République démocratique et populaire du Yémen (au Sud) et de la République arabe du Yémen (au Nord). Après une phase pluraliste (notamment marquée par les élections législatives de 1993 et la participation du parti islamiste al-Islâh (Rassemblement yéménite pour la réforme) au gouvernement de 1993 à 1997, le pouvoir s'est progressivement engagé dans un processus de monopolisation croissante des ressources institutionnelles, économiques et symboliques. Le contexte de la lutte antiterroriste a sans doute accéléré, tout en la légitimant, la disparition d'une formule politique originale fondée sur un partage du pouvoir et un faible niveau de répression. Durant les années 1990, cette formule avait indéniablement singularisé le pays à l'échelle régionale. Or, depuis l'attentat d'octobre 2000 contre le navire de guerre américain USS Cole dans le port d'Aden et les attentats du 11 septembre 2001, l'obsession sécuritaire qui structure l'essentiel des relations du gouvernement yéménite non seulement avec les États-Unis et les pays européens mais aussi, depuis peu, avec le voisin saoudien a provoqué un dérèglement des équilibres politiques. [Premier paragraphe]