Alors que l'histoire intellectuelle française a tendance à se cantonner aux mêmes objets et que les sciences sociales accordent une priorité souvent excessive aux questions de méthode, le parcours transversal de Pierre Grémion éclaire de manière originale les mutations de la France d'après guerre. En présentant un volume qui lui est consacré, Philippe Urfalino montre ici les axes de lecture d'un travail où le sens de la responsabilité politique est inséparable d'une grande liberté d'investigation.
Les trois articles qui suivent ont une caractéristique remarquable : le médicament est au coeur de leur objet et de leur questionnement. La chose n'est plus exceptionnelle mais elle reste rare. Il y a encore peu de temps, le médicament ne bénéficiait d'un intérêt marqué parmi les sciences sociales ou humaines que chez les économistes et les juristes. Si l'on se cantonne à la sociologie de langue française, l'absence du médicament, non seulement comme objet d'études mais même comme simple élément pertinent d'une réalité plus vaste, dans deux récents manuels de sociologie de la médecine et des maladies1 indique combien la littérature dont ils restituent les principaux apports a pu faire l'impasse sur le remède, aussi bien comme partie prenante des pratiques que comme source d'interrogations et de mobilisations. L'accent dominant, depuis les années 1960, mis par la sociologie de la médecine et de la santé sur les organisations, les interactions et les professions, n'a pas facilité, semble-t-il, l'intérêt pour un objet à la fois industriel, marchand et scientifique, mobile au point de n'être circonscrit à aucun espace institutionnel ou professionnel spécifique.
Résumé Apparemment, l'autorisation de mise sur le marché du médicament est une intervention ponctuelle de la puissance publique dans l'histoire d'un médicament qui, à un moment donné, fait un partage entre un pouvoir que s'arroge la puissance publique et la vie de la molécule sur le marché. En fait, l'articulation entre le marché et les soucis de la puissance publique ne se limite pas à cette bipartition. Au contraire, à tout moment dans le processus d'AMM, à différents niveaux, il y a articulation constante entre souci sanitaire et problème économique, stratégies commerciale et industrielle. L'article montre l'intrication du sanitaire et de l'économique dans les trois composantes du dispositif français d'AMM : la commission d'AMM ; les critères et référents de l'évaluation ; la place de l'AMM. dans la chaîne de décisions publiques relatives au médicament.
Public Action, Private Creation. In spite of the recent blossoming of cultural sponsoring by private business, artistic creation in France is still dominated by public action. Comparing with the IIIrd Republic only reinforces this view ; in those times public/private duality was founded on a clear and well - balanced separation between the two sectors. The present situation is more complex, and examining it shows that there is no real reason to fear the seizure of culture by the State. In fact, the wearing out of cultural democratization as a way of legitimizing public action, leads government to redefine it's role in integrating market requirements.
La philosophie de l'Etat esthétique. Philippe Urfalino. [20-35] Cet article examine la singularité de la «politique culturelle» française en explicitant les différentes caractéristiques qui font de la création du ministère des Affaires culturelles par André Malraux une rupture fondatrice. Il analyse l'une de ses caractéristiques : la philosophie de l'action culturelle ou de «l'Etat esthétique», indissociablement politique et esthétique, qui a orienté les initiatives du nouveau ministère. Cette philosophie fait de l'Etat le promoteur d'un nouveau rapport entre les œuvres et le public. Fondée sur le rejet de l'éducation et la sublimation de l'engagement politique, la «politique culturelle» fut érigée en équivalent fonctionnel, dans l'action publique et administrative, de la figure de l'intellectuel français.
study of the stages of the emergence of the American cultural bugbear within the Socialist Parly sheds light on how the party's internal and external struggles made culture a major theme of the 1981 election campaign and of the first months of the new government. The vitalist philosophy which underpinned this condemnation of cultural imperialism dissolved the oppositions which defined the normative framework of the cultural policies valid until 1982-1983. The history of this framework since ils appearance under André Malraux explains the success and the impact of the Langian cultural vitalism by the timing of its public diffusion.