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RéSUMé Cet article propose, à la lumière d'un exemple particulier – l'abandon de la croyance en l'existence du Père Noël –, de tester différents scénarios théoriques de la rupture cognitive. L'exemple choisi, en raison de ses spécificités, ne peut prétendre invalider un modèle ou en confirmer définitivement un autre, mais il souhaite être une contribution au débat sur la base d'un matériau empirique rarement réuni en cette matière. Les 142 entretiens mobilisés permettent d'appréhender dans le détail divers aspects de l'abandon de cette croyance : est-elle le fait d'incohérences internes ? de dissonances externes ? d'une concurrence cognitive ? est-elle suivie d'une crise ?

RéSUMé. — L'article défend l'idée que le fanatisme politique ou religieux ne relève pas nécessairement de l'irrationalité. Au contraire, un modèle fondé sur la rationalité permet d'assurer une continuité descriptive des manifestations axiologiques sans pour autant tomber dans le piège du relativisme.

Il a été montré que les individus qui disent croire à des théories du complot peuvent adhérer à des versions contradictoires de ces théories et/ou fonder leur croyance sur des arguments mutuellement incompatibles. Le présent article développe l'idée que cet aspect des croyances complotistes découle du fait que l'activité conspirationniste est davantage orientée vers la contradiction de la « version officielle » des faits, plutôt que vers la constitution d'un récit alternatif clair et cohérent. Les croyances complotistes consistent dès lors souvent en ce que l'on pourrait appeler des proto-croyances, c'est-à-dire des dispositions à croire selon un cadre général, du type « On nous ment ! », qui n'est pas (encore) figé en une narration précise offrant des inférences spécifiques. L'article montre que cela aboutit à l'émergence de mille-feuilles argumentatifs qui rendent la pensée complotiste particulièrement résistante à la contradiction.

Gérald Bronner, professeur de sociologie à l'Université Paris-Diderot, est l'auteur de nombreux livres sur les croyances collectives, les erreurs de raisonnement et leurs conséquences sociales. Il vient de publier La planète des Hommes. Réenchanter le risque , et auparavant La démocratie des crédules (2013) et L'inquiétant principe de précaution (2010), entre autres, tous parus aux Presses universitaires de France.

International audience ; This exploratory study aims at identifying macro-social factors associated with the international variance of belief in conspiracy theories. We computed a Conspiracy Index for 22 Western and non-Western countries based on the results of an online survey on conspiratorial beliefs. Stepwise regression analyses show that more than 70% of the international variance of this Conspiracy Index is explained by the following three national variables: the level of democracy, the unemployment rate, and the perceived level of public sector corruption. Conspiracy theories thus appear to be more commonly endorsed in countries where people cannot take an active part in the political life of their country (low level of democracy), where they may feel socially threatened (high unemployment rate), and where institutions and authorities are perceived as untrustworthy (high perception of public sector corruption). ; Cette étude exploratoire entend identifier les facteurs macro-sociaux associés à la variance internationale du niveau de croyance dans les théories du complot. Nous avons construit un indice de complotisme pour 22 pays occidentaux et non-occidentaux à partir des résultats d'un sondage en ligne sur les croyances conspirationnistes. Une analyse de régression pas à pas montre que plus de 70 % de la variance internationale de cet indice peut être expliquée par les trois variables nationales suivantes : le niveau de démocratie, le taux de chômage et le niveau perçu de corruption du secteur public. Les théories du complot semblent ainsi être plus communément admises dans les pays où la population n'est pas en mesure de prendre activement part à la vie politique (faible niveau de démocratie), où elle se sent socialement menacée (taux de chômage élevé) et dans lesquels les institutions et les autorités sont perçues comme n'étant pas dignes de confiance (secteur public perçu comme corrompu).

International audience ; This exploratory study aims at identifying macro-social factors associated with the international variance of belief in conspiracy theories. We computed a Conspiracy Index for 22 Western and non-Western countries based on the results of an online survey on conspiratorial beliefs. Stepwise regression analyses show that more than 70% of the international variance of this Conspiracy Index is explained by the following three national variables: the level of democracy, the unemployment rate, and the perceived level of public sector corruption. Conspiracy theories thus appear to be more commonly endorsed in countries where people cannot take an active part in the political life of their country (low level of democracy), where they may feel socially threatened (high unemployment rate), and where institutions and authorities are perceived as untrustworthy (high perception of public sector corruption). ; Cette étude exploratoire entend identifier les facteurs macro-sociaux associés à la variance internationale du niveau de croyance dans les théories du complot. Nous avons construit un indice de complotisme pour 22 pays occidentaux et non-occidentaux à partir des résultats d'un sondage en ligne sur les croyances conspirationnistes. Une analyse de régression pas à pas montre que plus de 70 % de la variance internationale de cet indice peut être expliquée par les trois variables nationales suivantes : le niveau de démocratie, le taux de chômage et le niveau perçu de corruption du secteur public. Les théories du complot semblent ainsi être plus communément admises dans les pays où la population n'est pas en mesure de prendre activement part à la vie politique (faible niveau de démocratie), où elle se sent socialement menacée (taux de chômage élevé) et dans lesquels les institutions et les autorités sont perçues comme n'étant pas dignes de confiance (secteur public perçu comme corrompu).