"A thoroughly biblical and compassionate approach to addressing issues of poverty, Jesus' Economy shows how individuals and churches can best alleviate the plight of the impoverished in their communities and nations; it presents a holistic plan for creating jobs, planting churches, and meeting basic needs, while focusing on community development and sustainability for lasting change, globally and locally"--
An acclaimed historian and "New York Times"-bestselling author offers a revelatory look at how Roger Williams shaped the nature of religion, political power, and individual rights in America
Après leurs victoires sur les puissances de l'Axe en 1945, les États-Unis sont devenus hégémon à l'échelle du globe, se posant en gardiens de la liberté du monde. Or, si on suit Gramsci, toute hégémonie est « cuirassée de coercition ». Aujourd'hui, alors que l'Amérique ne gagne plus de guerres majeures, le Pentagone mise sur la « communication stratégique », un champ de bataille cognitif, pour vaincre sur le terrain et dans les opinions.
« Je vais vous dire ce qu'est la guerre », confie le général américain Curtis LeMay dans un entretien après la Seconde Guerre mondiale : « Vous devez tuer des gens, et quand vous en avez assez tué, ils s'arrêtent de se battre. » La formule de Clausewitz, devenue lieu commun, ouvre cependant la perspective d'un autre horizon, mais qui est paradoxal. Car bien que la guerre prolonge la politique par d'autres moyens, elle s'en distingue. Le recours à la force, afin d'atteindre une finalité politique qui ne serait pas la guerre, doit réaliser en quelque sorte son contraire, c'est-à-dire la paix. Aujourd'hui plus que jamais, les guerres sont devenues, non pas des affrontements entre deux armées permanentes, dans un duel de puissance de feu, mais des guerres de légitimité, des guerres sur qui peut revendiquer le monopole de la violence légitime dans une communauté politique. La politique, source et cause des conflits armés, serait-elle aussi le seul recours contre la guerre de tous contre tous ?
Dans nos démocraties, l'inscription dans un territoire est nécessaire à l'exercice de la citoyenneté : le territoire politique est une circonscription délimitée, lieu d'expression de la volonté politique et de la souveraineté. Paradoxe de l'histoire, dans le passage de la propriété individuelle ancrée dans un territoire, qui a présidé aux premiers pas de la démocratie libérale, à la propriété dématérialisée financière globalisée, se déliterait la souveraineté effective des citoyens inscrits dans un lieu. Que deviennent en effet les affaires communes dont le citoyen territorialisé devait avoir la charge, droits et obligations à l'ère d'une économie politique transnationale ?
Depuis la guerre déclarée contre le terrorisme, l'état d'exception prend l'ascendant sur l'État de droit. Surveillance tous azimuts des citoyens comme ennemis potentiels et virtuels au nom de la sécurité de tous. Conjointement, la polarisation inégalitaire croissante des sociétés mises à mal par les politiques néolibérales au service d'une finance transnationale fait dire au rapport du Forum économique de Davos 2014 qu'elle « sape la stabilité intérieure des pays et devient une menace globale pour la sécurité à l'échelle du monde ». Le concept de dangerosité et de prévention qu'introduit le paradigme sécuritaire fait sauter la distinction entre menace intérieure et menace extérieure, et annonce à l'échelle internationale, la transformation de la guerre clausewitzienne en opération de police qui, dans sa forme la plus radicale, mène à la chasse à l'homme avec des drones armés.
« Pour trouver l'aiguille dans la meule de foin, il faut prendre toute la meule », dira le général Keith Alexander directeur de la nsa de 2005 à 2014. Le rêve de la nsa de pouvoir collecter, traquer, espionner la moindre communication électronique à l'échelle planétaire est une ambition visant à éliminer toute notion de communication confidentielle et trahit la volonté d'instaurer le premier État de surveillance globalisée de l'histoire. Elle sera dénoncée par Edward Snowden comme « une architecture de l'oppression » qui rejoint ce rêve d'omniscience que le panoptisme de Jeremy Bentham, il y a plus de deux siècles, avait dessiné. « Je ne veux pas vivre dans un monde où tout ce que je dis, tout ce que je fais, toute personne à qui je parle, toutes mes expressions de créativité, d'amour ou d'amitié sont enregistrés. Ce n'est pas quelque chose que je suis prêt à soutenir, ce n'est pas quelque chose à quoi je veux contribuer et ce n'est pas quelque chose à quoi je veux assujettir ma vie. […] Quiconque s'oppose à ce genre de monde a une obligation d'agir. » En dévoilant des milliers de documents de la nsa , Edward Snowden a voulu nous alerter du danger. Quand l'État de droit démocratique s'efface derrière l'État d'exception et la tyrannie, il reste encore à l'individu son refus catégorique de l'inacceptable, son honneur et son estime de soi. Snowden, par son geste téméraire, nous l'affirme.
Après l'hécatombe de 1914-1918 et son postlude 1939-1945, les Européens ne veulent plus faire la guerre. Tout au plus des opérations de police avec des forces de sécurité professionnelles. Le sacrifice collectif exigé des peuples n'a pas disparu pour autant. L'État charismatique qui incarnait, à tort ou à raison, la nation, et inspirait jadis ferveur patriotique et sacrifice s'est vu remplacé par un nouveau Moloch, la finance transnationale, qui ne connaît ni patrie ni morale ni politique autres que celles de sa propre nature jamais satisfaite, et qui exige qu'on lui sacrifie le monde entier.
Déployée à flux tendu pendant plus d'une décennie sur deux théâtres d'opérations, l'Afghanistan et l'Irak, l'armée américaine est aujourd'hui exsangue. 20 % de son corps expéditionnaire est ou sera atteint du syndrome de stress post-traumatique ( ptsd ). Ce désordre psychologique, qui prend aujourd'hui les apparences d'une véritable « épidémie » dans la société américaine, ne trouvera son sens que dans une analyse d'un désordre structurel qui le dépasse. Il s'agira en quelque sorte de « politiser » le symptôme du ptsd au lieu de le médicaliser. Ce qui donne sens aux sacrifices, à la mission, c'est la politique. À défaut de le faire, le soldat, qui affronte la mortification de la chair et la menace de la mort, le paiera par un tourment solitaire et morbide qui ne cessera pas de le poursuivre, bien après les combats.