Résumé Rousseau propose une reformulation du concept d'économie qui peut éclairer le débat contemporain consacré aux rapports entre éthique et économie. Sa philosophie permet de redéfinir l'économie selon des catégories éthiques : valeurs éthiques et valeurs économiques entrent dans un système d'échange ; l'économie vise à la prospérité mais elle est animée par des règles éthiques et des motivations compassionnelles ou bienveillantes. L'éthique est également pensée de façon "économique". L'économie morale de Rousseau est un art de jouir qui comprend à la fois la jouissance matérielle et la jouissance morale.
Spinoza a fait un retour remarqué dans la philosophie politique contemporaine, figurant même comme le penseur de référence, à la place laissée vide par Marx, pour contrer l'influence libérale. Quelle est donc cette conception du pouvoir où les « multitudes » remplacent le peuple pour définir un sujet politique ouvert au pluralisme et aux différences ?
International audience ; Dans les cours au Collège de France réunis dans Naissance de la biopolitique, Foucault soutient qu'une science économico-juridique est rigoureusement impossible. Or cette thèse radicale mérite discussion, à partir d'un auteur trop souvent ignoré des historiens de la genèse de l'économie politique. Montesquieu, à sa façon, contribue à la constitution de ce savoir économico-juridique, susceptible de penser ensemble sujet d'intérêt et sujet de droit. L'esprit de cette étude ne sera pas de critiquer Foucault en montrant que Montesquieu ne « rentre » pas dans l'opposition de ses paradigmes, mais plutôt de tenter de mesurer l'originalité d'une pensée qui conçoit des échanges entre propriété et liberté qui ont pour effet d'unifier rationalité économique et rationalité juridique.
International audience ; Dans les cours au Collège de France réunis dans Naissance de la biopolitique, Foucault soutient qu'une science économico-juridique est rigoureusement impossible. Or cette thèse radicale mérite discussion, à partir d'un auteur trop souvent ignoré des historiens de la genèse de l'économie politique. Montesquieu, à sa façon, contribue à la constitution de ce savoir économico-juridique, susceptible de penser ensemble sujet d'intérêt et sujet de droit. L'esprit de cette étude ne sera pas de critiquer Foucault en montrant que Montesquieu ne « rentre » pas dans l'opposition de ses paradigmes, mais plutôt de tenter de mesurer l'originalité d'une pensée qui conçoit des échanges entre propriété et liberté qui ont pour effet d'unifier rationalité économique et rationalité juridique.
International audience ; Montesquieu considère que plutôt que par une construction juridique commune, la paix,en Europe, peut être obtenue par le mécanisme immanent du « doux commerce ». Troisparadoxes constituent ainsi l'origine de notre enquête :1) Quoique Montesquieu, contre Hobbes, fasse de la paix la première loi de nature entre leshommes, il persiste à penser l'état de guerre entre les nations, et la pérennité d'un rapport deforces que le droit des gens peut suspendre, mais jamais abolir. Malgré la critique du militarismeet des ambitions belliqueuses de Louis XIV, l'idée de paix perpétuelle se trouve de la sortecongédiée (et non réfutée).2) Connu pour sa théorie de la distribution des pouvoirs, source de liberté politique, L'Esprit deslois ne reconduit pas cette thèse dans les relations internationales : en Europe, la « balance » despouvoirs, loin de constituer un modèle, est disqualifiée comme perpétuation de l'état de guerre.3) Bien qu'il se donne, dans les temps modernes, comme le « sectateur de l'abbé de Saint-Pierre », celui qui aurait, à l'instar de Saint-Pierre (et non de Locke), tenté de fonder la sciencepolitique nouvelle occultée depuis les Anciens, Montesquieu ne le suit nullement dans le projetqui l'a rendu célèbre à travers les siècles, le Projet de Paix perpétuelle qui sera au coeur des réflexionsde Rousseau et de Kant. Ce sont les raisons de cette occultation que nous tenterons de mettre àjour, afin de cerner l'apparition d'une conception de l'Europe comme société civile régie par le« doux commerce ».
International audience ; Montesquieu considère que plutôt que par une construction juridique commune, la paix,en Europe, peut être obtenue par le mécanisme immanent du « doux commerce ». Troisparadoxes constituent ainsi l'origine de notre enquête :1) Quoique Montesquieu, contre Hobbes, fasse de la paix la première loi de nature entre leshommes, il persiste à penser l'état de guerre entre les nations, et la pérennité d'un rapport deforces que le droit des gens peut suspendre, mais jamais abolir. Malgré la critique du militarismeet des ambitions belliqueuses de Louis XIV, l'idée de paix perpétuelle se trouve de la sortecongédiée (et non réfutée).2) Connu pour sa théorie de la distribution des pouvoirs, source de liberté politique, L'Esprit deslois ne reconduit pas cette thèse dans les relations internationales : en Europe, la « balance » despouvoirs, loin de constituer un modèle, est disqualifiée comme perpétuation de l'état de guerre.3) Bien qu'il se donne, dans les temps modernes, comme le « sectateur de l'abbé de Saint-Pierre », celui qui aurait, à l'instar de Saint-Pierre (et non de Locke), tenté de fonder la sciencepolitique nouvelle occultée depuis les Anciens, Montesquieu ne le suit nullement dans le projetqui l'a rendu célèbre à travers les siècles, le Projet de Paix perpétuelle qui sera au coeur des réflexionsde Rousseau et de Kant. Ce sont les raisons de cette occultation que nous tenterons de mettre àjour, afin de cerner l'apparition d'une conception de l'Europe comme société civile régie par le« doux commerce ».
International audience ; L'analyse des rapports entre religion et politique dans l'oeuvre de Montesquieu a récemment fait l'objet d'une réappréciation majeure : alors que le consensus sur le machiavélisme de Montesquieu semblait établi (moyennant une évolution de la manipulation rusée ou de l'instrumentalisation des croyances à une théorie du bon usage de la religion en vue des fins immanentes de la société civile, le dernier ouvrage de Thomas Pangle entend contrer ce credo : loin de contribuer à la modération et à la douceur des moeurs modernes, le christianisme, selon Montesquieu, ne serait qu'un instrument d'oppression. Elaborant une philosophie anti-chrétienne en son principe, l'auteur de L'Esprit des lois aurait usé des ressorts de son art d'écrire pour assimiler insidieusement la papauté au despotisme et le catholicisme à la servitude.Or en deçà de cette réflexion sur les rapports entre religion et politique, l'analyse des croyances à laquelle procède Montesquieu est étrangement passée sous silence. En quel sens L'Esprit des lois invente-t-il une histoire naturelle des religions, en quel sens renouvelle-t-il la problématique classique de la religion naturelle ? Cette contribution se propose de montrer que l'originalité de Montesquieu réside en premier lieu dans la rationalisation du fait religieux qu'il propose : la religion peut être reconduite à ses raisons, qui sont aussi ses causes. A ce titre, la réflexion sur l'accusation portée par les censeurs (Montesquieu serait « sectateur de la religion naturelle ») doit être réexaminée : L'Esprit des lois propose une histoire naturelle de la religion qui, à l'instar de celles de Mandeville et de Hume, remonte à l'enracinement des croyances dans la nature de l'homme. Ainsi ne saurait-on s'en tenir à une conception de la religion naturelle comme produit d'un « sentiment intérieur » ou de motifs rationnels de croire. La naturalisation des croyances ne se fonde pas sur l'argument du dessein, qui conduit de l'observation de l'ordre du monde ou du « spectacle de la ...
International audience ; L'analyse des rapports entre religion et politique dans l'oeuvre de Montesquieu a récemment fait l'objet d'une réappréciation majeure : alors que le consensus sur le machiavélisme de Montesquieu semblait établi (moyennant une évolution de la manipulation rusée ou de l'instrumentalisation des croyances à une théorie du bon usage de la religion en vue des fins immanentes de la société civile, le dernier ouvrage de Thomas Pangle entend contrer ce credo : loin de contribuer à la modération et à la douceur des moeurs modernes, le christianisme, selon Montesquieu, ne serait qu'un instrument d'oppression. Elaborant une philosophie anti-chrétienne en son principe, l'auteur de L'Esprit des lois aurait usé des ressorts de son art d'écrire pour assimiler insidieusement la papauté au despotisme et le catholicisme à la servitude.Or en deçà de cette réflexion sur les rapports entre religion et politique, l'analyse des croyances à laquelle procède Montesquieu est étrangement passée sous silence. En quel sens L'Esprit des lois invente-t-il une histoire naturelle des religions, en quel sens renouvelle-t-il la problématique classique de la religion naturelle ? Cette contribution se propose de montrer que l'originalité de Montesquieu réside en premier lieu dans la rationalisation du fait religieux qu'il propose : la religion peut être reconduite à ses raisons, qui sont aussi ses causes. A ce titre, la réflexion sur l'accusation portée par les censeurs (Montesquieu serait « sectateur de la religion naturelle ») doit être réexaminée : L'Esprit des lois propose une histoire naturelle de la religion qui, à l'instar de celles de Mandeville et de Hume, remonte à l'enracinement des croyances dans la nature de l'homme. Ainsi ne saurait-on s'en tenir à une conception de la religion naturelle comme produit d'un « sentiment intérieur » ou de motifs rationnels de croire. La naturalisation des croyances ne se fonde pas sur l'argument du dessein, qui conduit de l'observation de l'ordre du monde ou du « spectacle de la nature » à l'intelligence suprême qui l'a créé. Elle propose d'analyser les croyances en terme de « sentiments », si bien que la religion s'ancre à la fois dans des « motifs réprimants » et dans des « motifs d'attachement », selon les deux modalités de la crainte et de l'amour. Le paradoxe est là : Montesquieu ne se contente pas d'une sociologie des religions qui fait abstraction de la question de la nature de l'homme et des besoins de l'âme, ni d'une politique de la religion qui l'examine du point de vue des « intérêts politiques » – le bien de la société civile plutôt que le salut, l'utilité sociale des dogmes plutôt que leur valeur de vérité. Il propose, en amont, une théorie de la religion fondée sur la nature de l'homme conçue en situation.
"Au XXIe siècle, l'Europe ne fait plus rêver: son modèle est contesté, tant sur le plan économique qu'intellectuel et politique. Face à ces désillusions, il est urgent d'interroger les origines de l'idée d'Europe: quand et comment la notion d'Europe s'est-elle définie? L'ouvrage dirigé par Antoine Lilti et Céline Spector propose un détour par les Lumières. Si l'Europe peut s'enorgueillir d'une longue histoire, c'est bien au XVIIIe siècle qu'elle est devenue un enjeu philosophique, historique et politique majeur. De Montesquieu à Kant, de Voltaire à Burke ou à Robertson, l'idée d'Europe est au cœur des controverses sur le droit international comme sur l'économie politique, sur la légitimité de l'expansion coloniale comme sur les espoirs d'un monde pacifié. Véritable enquête collective conduite par des historiens et des philosophes, Penser l'Europe au XVIIIe siècle aborde trois éléments majeurs autour desquels gravite le concept naissant d'Europe: l'empire, le commerce et la civilisation. Après avoir décrit la manière dont l'ordre européen a été conçu, les auteurs examinent la question de l'expansion commerciale et coloniale de l'Europe, ainsi que les théories de la civilisation, qui permettent d'interroger le statut de l'exceptionnalisme européen. Le siècle des Lumières ne nous présente pas un idéal européen à ressusciter, mais un champ d'interrogations dont nous ne sommes jamais véritablement sortis."--Back cover
L'invasion de l'Ukraine par la Russie constitue un moment de vérité pour l'Union européenne : est-elle en mesure d'agir en tant que puissance ? Peut-elle le faire sans trahir ses principes fondateurs ? En amont des élections européennes de juin 2024, ce dossier, coordonné par Anne-Lorraine Bujon et Céline Spector, prend acte de l'ascension de l'extrême droite et pose les bases d'un projet démocratique, social et écologique pour l'Europe.