"How is energetical design done in urban development projects?" This question goes beyond curiosity, in line with current preoccupations. Facing the growing pressure of environment and energy challenges within urban fabric, urban development is trying to renew its practices. Such changes, however, need to address the general lack of understanding about the actual logics of collective action during urban development projects.Our research aims to better understand the generation processes of design choices in French urban development projects. We focus on the space of "maîtrise d'ouvrage urbaine" (local development authority), which stretches at the interface between strategic orientations of planning authorities and technical choices of formal designers. Moving away from the traditional division of labour, we assume that local development authorities are actually responsible for a design activity, which covers the generation and update of strategic orientations for urban development, the regulation of buildings, infrastructures and public spaces productions, and the organisation and management of collective design activity.Within this framework, this research first provides empirical insights of the urban development authority's energy design activity at Bordeaux Euratlantique, France. Through an extensive account of energy choices in this project, we document the various, intertwined design arenas, the processes for designing and updating design choices, and the instrumentation of urban development authority's design activity. To understand these phenomena from political, cognitive and managerial perspectives, we combine various theoretical frameworks derived from pragmatic approaches of organizational studies, science & technology studies and management sciences.The cross-analysis of our empirical account allows us to highlight the key role of collective action initiation and lock-in, which are embodied by the concept of decision. Decision then become a macro-objective for urban developers alongside quality, costs and delays. But the management of design activity from a decision-making perspective sometimes comes into conflict with the complexity of urban sociotechnical assemblages, which call for an integrated processing of interfaces and interdependencies. The thesis then concludes on the tension between the logic of "definition", which is steered by techno-economic performance objectives, and the logic of "implementation", which is steered by operational effectivity challenges ; « Comment sont opérés les choix énergétiques dans les projets d'aménagement ? » Cette question, de curiosité, s'inscrit par ailleurs dans des préoccupations d'actualité. Face à la montée en puissance des enjeux environnementaux et plus particulièrement énergétiques dans la fabrique urbaine, le monde de l'aménagement cherche en effet à renouveler ses manières de faire. Cependant, la mise en oeuvre de tels changements se heurte à une méconnaissance de la mécanique opérationnelle des projets d'aménagement. Dès lors, notre thèse s'est construite autour de la compréhension des mécanismes de production des choix d'aménagement dans les projets urbains français. Nous nous sommes plus précisément intéressés à l'espace d'action de la maîtrise d'ouvrage urbaine, qui s'étend à l'interface entre les orientations « stratégiques » de la planification (planning) et les choix « techniques » de la conception formelle (design). Nous écartant de la division artificielle des tâches entre maîtrise d'ouvrage et maîtrise d'oeuvre, nous postulons que la maîtrise d'ouvrage urbaine est responsable d'une véritable activité de conception qui se décline sous plusieurs formes :- la participation à l'élaboration et à l'actualisation des orientations stratégiques et des choix de programmation et de composition du projet d'aménagement ;- l'encadrement des couples maîtrise d'ouvrage/maîtrise d'oeuvre dans la fabrique des différentes composantes matérielles (bâtiments, infrastructures, espaces publics) de l'espace urbain ;- l'élaboration et le pilotage des dispositifs et des processus d'organisation de l'action collective.Dans ce cadre, la thèse propose d'abord de documenter empiriquement la « boîte noire » que constitue encore l'activité de conception de la maîtrise d'ouvrage urbaine. Nous appuyant sur une analyse approfondie des choix énergétiques opérés à l'occasion de l'opération d'intérêt national Bordeaux Euratlantique, il s'agit de traiter les questions suivantes : quelles sont les scènes de conception internes et externes à la maîtrise d'ouvrage urbaine et comment s'articulent-elles ? quels sont les processus qui aboutissent aux formulations et aux reformulations des choix d'aménagement au cours du projet ? et quelle instrumentation maîtrise d'ouvrage urbaine mobilise-t-elle dans son activité de conception ?Pour ce faire nous reconstruisons, sous forme de récit, les principales séquences d'action ayant abouti à la définition d'une stratégie énergétique et environnementale, à l'organisation de la prise en compte des aspects énergétiques dans la fabrique du bâti, et à la mise en place de systèmes d'approvisionnement en chaleur et en froid. Adoptant une approche pragmatique, nous combinons des grilles de lecture issues de différentes disciplines (sociologies des organisations et des techniques, sciences de gestion) pour interpréter chacune de ces séquences d'action en mettant en lumière leurs dimensions politique, cognitive et productive.La lecture transversale du récit nous permet ensuite de mettre en évidence le rôle primordial alloué à la décision, comprise comme un dispositif d'engagement et d'irréversibilisation de l'action collective. Comme la qualité, les coûts et les délais, la décision peut alors être considérée comme un macro-objectif qui guide la maîtrise d'ouvrage dans son activité de conception.Toutefois, le pilotage de la conception par la facilitation de la décision entre parfois en conflit avec la complexité des assemblages sociotechniques de la fabrique urbaine, caractérisés par des interdépendances qui poussent à un traitement intégré de certaines interfaces. La thèse se conclut donc par une relecture des objectifs de qualité-coûts-délais-décision au prisme d'une tension entre la logique du « définir », guidée par la performance technico-économique, et la logique du « faire advenir », guidée par l'effectivité opérationnelle
"How is energetical design done in urban development projects?" This question goes beyond curiosity, in line with current preoccupations. Facing the growing pressure of environment and energy challenges within urban fabric, urban development is trying to renew its practices. Such changes, however, need to address the general lack of understanding about the actual logics of collective action during urban development projects.Our research aims to better understand the generation processes of design choices in French urban development projects. We focus on the space of "maîtrise d'ouvrage urbaine" (local development authority), which stretches at the interface between strategic orientations of planning authorities and technical choices of formal designers. Moving away from the traditional division of labour, we assume that local development authorities are actually responsible for a design activity, which covers the generation and update of strategic orientations for urban development, the regulation of buildings, infrastructures and public spaces productions, and the organisation and management of collective design activity.Within this framework, this research first provides empirical insights of the urban development authority's energy design activity at Bordeaux Euratlantique, France. Through an extensive account of energy choices in this project, we document the various, intertwined design arenas, the processes for designing and updating design choices, and the instrumentation of urban development authority's design activity. To understand these phenomena from political, cognitive and managerial perspectives, we combine various theoretical frameworks derived from pragmatic approaches of organizational studies, science & technology studies and management sciences.The cross-analysis of our empirical account allows us to highlight the key role of collective action initiation and lock-in, which are embodied by the concept of decision. Decision then become a macro-objective for urban developers alongside quality, costs and delays. But the management of design activity from a decision-making perspective sometimes comes into conflict with the complexity of urban sociotechnical assemblages, which call for an integrated processing of interfaces and interdependencies. The thesis then concludes on the tension between the logic of "definition", which is steered by techno-economic performance objectives, and the logic of "implementation", which is steered by operational effectivity challenges ; « Comment sont opérés les choix énergétiques dans les projets d'aménagement ? » Cette question, de curiosité, s'inscrit par ailleurs dans des préoccupations d'actualité. Face à la montée en puissance des enjeux environnementaux et plus particulièrement énergétiques dans la fabrique urbaine, le monde de l'aménagement cherche en effet à renouveler ses manières de faire. Cependant, la mise en oeuvre de tels changements se heurte à une méconnaissance de la mécanique opérationnelle des projets d'aménagement. Dès lors, notre thèse s'est construite autour de la compréhension des mécanismes de production des choix d'aménagement dans les projets urbains français. Nous nous sommes plus précisément intéressés à l'espace d'action de la maîtrise d'ouvrage urbaine, qui s'étend à l'interface entre les orientations « stratégiques » de la planification (planning) et les choix « techniques » de la conception formelle (design). Nous écartant de la division artificielle des tâches entre maîtrise d'ouvrage et maîtrise d'oeuvre, nous postulons que la maîtrise d'ouvrage urbaine est responsable d'une véritable activité de conception qui se décline sous plusieurs formes :- la participation à l'élaboration et à l'actualisation des orientations stratégiques et des choix de programmation et de composition du projet d'aménagement ;- l'encadrement des couples maîtrise d'ouvrage/maîtrise d'oeuvre dans la fabrique des différentes composantes matérielles (bâtiments, infrastructures, espaces publics) de l'espace urbain ;- l'élaboration et le pilotage des dispositifs et des processus d'organisation de l'action collective.Dans ce cadre, la thèse propose d'abord de documenter empiriquement la « boîte noire » que constitue encore l'activité de conception de la maîtrise d'ouvrage urbaine. Nous appuyant sur une analyse approfondie des choix énergétiques opérés à l'occasion de l'opération d'intérêt national Bordeaux Euratlantique, il s'agit de traiter les questions suivantes : quelles sont les scènes de conception internes et externes à la maîtrise d'ouvrage urbaine et comment s'articulent-elles ? quels sont les processus qui aboutissent aux formulations et aux reformulations des choix d'aménagement au cours du projet ? et quelle instrumentation maîtrise d'ouvrage urbaine mobilise-t-elle dans son activité de conception ?Pour ce faire nous reconstruisons, sous forme de récit, les principales séquences d'action ayant abouti à la définition d'une stratégie énergétique et environnementale, à l'organisation de la prise en compte des aspects énergétiques dans la fabrique du bâti, et à la mise en place de systèmes d'approvisionnement en chaleur et en froid. Adoptant une approche pragmatique, nous combinons des grilles de lecture issues de différentes disciplines (sociologies des organisations et des techniques, sciences de gestion) pour interpréter chacune de ces séquences d'action en mettant en lumière leurs dimensions politique, cognitive et productive.La lecture transversale du récit nous permet ensuite de mettre en évidence le rôle primordial alloué à la décision, comprise comme un dispositif d'engagement et d'irréversibilisation de l'action collective. Comme la qualité, les coûts et les délais, la décision peut alors être considérée comme un macro-objectif qui guide la maîtrise d'ouvrage dans son activité de conception.Toutefois, le pilotage de la conception par la facilitation de la décision entre parfois en conflit avec la complexité des assemblages sociotechniques de la fabrique urbaine, caractérisés par des interdépendances qui poussent à un traitement intégré de certaines interfaces. La thèse se conclut donc par une relecture des objectifs de qualité-coûts-délais-décision au prisme d'une tension entre la logique du « définir », guidée par la performance technico-économique, et la logique du « faire advenir », guidée par l'effectivité opérationnelle
Increasing imports of dairy products, milk powder price volatility, as well as a significant gap between the growth of supply and demand are all drivers that contribute to a renewed interest in local milk production in Senegal. This trend reinforces claims for an intensification of livestock production systems. Far from being neutral, the concept of intensification has a long and controversial history in the Sahel. Combining an ethnographical fieldwork of twelve months in Senegal with a historical study of pastoral development interventions in African and Senegalese semi-arid environments, this thesis critically analyses the centrality of the notion of intensification in pastoral development policy in Africa. This work provides an ethnography of the encounter between, on one side, the techno-scientific culture underlying this development model and, on the other side, herders' rationalities and actions, observed in three major dairy development interventions implemented in Senegal.The data analysis shows that by conceiving dairy development as a technical issue, the policy framework hides several key dimensions such as local production and commercialization constraints, unfair competition from subsided imported powdered milk and the lack of a sector policy for the production and processing of local milk. Research results also suggest that the technical development models at work contribute to legitimize and depoliticize the subtraction of pastoral resources induced by land use policies. In a context of irrigated agriculture expansion, the substitution of natural pastures by costly agricultural residues and industrial livestock feeds is often proposed without taking into account its economic sustainability. The study of livestock production systems, analysed through the prism of three socio-technical objects – cattle breeds, animal feed and milk – provides insights to renew the policy framework for pastoral and dairy development in Senegal as well as in other Sahelian countries. The central role of local cattle breeds, including herders' cross-breeding strategies, appeals to reconsider the public management of bovine genetics, by including herders' views, knowledge and practices. The close relationship between animal feed practices and natural resources management calls on national and international development institutions to set up policies that enhance complementarities between agricultural and pastoral activities in ecologically diverse areas.In conclusion, the commercial value of local milk is important and dynamic but non-exclusive. The plurality of milk uses and values reflects the multifunctionality of livestock production systems and contributes to their social and economic reproduction. Moreover, my results suggest that this multifunctional dimension is likely to improve the herders' participation to the milk collection process. This contradicts the prescriptions of political models that consider productive specialization as a prerequisite to any development of dairy production. ; Au Sénégal, la progression du déficit commercial creusé par les importations de produits laitiers, la volatilité des prix de la poudre de lait, ainsi qu'un décalage important entre croissance de l'offre et de la demande sont autant de facteurs à l'origine d'un regain d'intérêt pour une production locale de lait. Ce renouvellement des enjeux du développement laitier se traduit par une série d'injonctions à l'intensification des systèmes d'élevage ; or, loin d'être neutre, le concept d'intensification a une histoire longue et controversée au Sahel. Cette thèse, fondée sur un travail ethnographique de douze mois au Sénégal et sur l'étude historique des interventions de développement pastoral en milieu semi-aride africain et sénégalais, questionne la place centrale qu'y occupe le paradigme d'intensification. Ce travail propose une ethnographie de la rencontre entre la culture technoscientifique qui légitime l'équation classique entre intensification et développement, et les logiques, les pratiques et les modes d'action de certains éleveurs, à partir de trois interventions emblématiques du développement de la production laitière au Sénégal.L'analyse montre qu'en concevant l'intensification laitière comme un enjeu et une construction techniques, le cadre d'action publique occulte les contraintes locales de production et commercialisation, la concurrence de la poudre de lait importée et détaxée, et l'absence de politique sectorielle de production et de transformation du lait local. D'autre part, les résultats suggèrent que la centralité des modèles techniques conduit à légitimer et dépolitiser la soustraction de ressources pastorales induite par les modèles d'aménagement de l'espace à l'œuvre, alors même que de nouvelles dynamiques d'aménagement agricole se profilent. Dans ce contexte, la substitution d'intrants payants aux ressources naturelles est souvent proposée sans aucune considération quant à sa viabilité économique. La mise en perspective des enquêtes sur les systèmes d'élevage, par le biais de trois objets socio-techniques – les races bovines, les aliments du bétail et le lait – dessine des pistes de renouveau de l'action publique de développement de l'élevage et de la production laitière. Le rôle irremplaçable des races locales, y compris dans les croisements entrepris localement, invite à reconsidérer la gestion publique de la génétique bovine, en intégrant les visions, les savoirs, les pratiques des éleveurs. Les liens étroits entre pratiques d'alimentation du bétail et politiques d'aménagement de l'espace appellent à la mise en place de politiques territoriales favorisant la préservation ou la construction de complémentarités entre les activités agricoles et pastorales dans des zones écologiquement diversifiées. La dimension marchande du lait local est importante et évolutive mais non exclusive. La pluralité des usages du lait reflète le caractère multifonctionnel des élevages, et participe à la reproduction des systèmes. Les résultats suggèrent que la multifonctionnalité des élevages peut contribuer à la durabilité d'un bassin laitier, contrairement à ce qui est préconisé par des modèles politiques identifiant la spécialisation productive comme préalable à tout développement laitier.
This thesis focuses on a historical definition given by Cesare Pavese, when he defined the 30s and 40s of the twentieth century as the translation's period par excellence in Italy. The previous studies have looked extensively on the translation of novels and most of these researches choose English or French as principal language sources. This Phd thesis concentrates instead the analysis first of all on poetic translation and also on writing poetry as well as on poetic criticism 'made' in the inter-war period until the late 40s. Poetry was incontestably the critical, translational and creative locus. Poetry was the main interest of the circles of Italian intellectuals in Florence and in Milan, in Parma, in Rome and in Turin also. Exchanges between artists, critics, poets and translators played mostly in the field of poetry, more or less without being particularly hampered by the fascist censorship, until the mid-30s. Poetry became a field of concrete action because it upsets language's syntactic order and this encourages a new conception and design of the reality, as well a way to fight every monolithic solution refusing opacity and incompleteness.Using an expression of Henri Meschonnic poetry is "against the maintenance of the order", and presents itself as a form of deep commitment (in order words a form of "engagement") that involves awareness and taking a stand against reality. In a poetic discourse the political element is closed involved. In fact we assume that "politics" is any attempt to fight for the welfare of man and every attempt to achieve the highest degree of freedom of every individual.The subject of criticism and translating poetry inevitably merge with poetry at all, and it is to consider that poetry is in any case always a translation. Poetry and its effects have become the axes of this study that tries to present consistently the voices of several people who were poets, translators and literary critics at the same time. The final part of this work concentrates on the birth of a new type of intellectual who is a poet, a translator, a critic and often also a publisher.We tried to show also what type of engagement may trigger the writing of poems and the practice of poetic translation, describing how deep and passionate activism may arise 'attending' poetry. Poetry is always proposed as a constellation of meaning constantly "building" as a presence never definitive. This enhancement of the unfinished contributes to the questioning of the subject's identity and to the pursuit of his salvation. Every poetic multiplication of hypotheses allows the opening of a lot of horizons. Offering her moving body poetry has been, even during Fascism, a lever of great indisciplinarity face to the rule settled by the dictatorship and it has been an unsuspected instrument of protest and resistance. ; Ce travail de thèse s'articule autour d'une définition historique qui a été formulée par Cesare Pavese, lorsqu'il a défini les années 30 et 40 du XXe siècle comme les deux décennies de la traduction par excellence. Si les études menées jusqu'à aujourd'hui se sont penchées de manière approfondie presque seulement sur la traduction des romans et cela en choisissant comme langue source privilégiée l'anglais ou le français, nous avons concentré notre analyse sur la traduction, l'écriture et la critique poétiques réalisées dans la période s'étalant de l'entre-deux-guerres jusqu'à la fin des années 40. La poésie était en effet le lieu critique, traductif et créatif le plus fréquenté. Un véritable besoin de poésie animait les cénacles des intellectuels italiens à Florence comme à Milan, à Parme, à Rome et également à Turin. Les échanges entre les artistes, critiques, poètes et traducteurs se jouaient pour la plupart sur le terrain de la poésie, sans être, au moins jusqu'au milieu des années 30, particulièrement entravés par la censure fasciste. En effet l'Italie devait, même aux yeux du fascisme, connaître un Baudelaire, un Rimbaud et un Eliot parlant italien. La poésie prenait une place sans précédents dans la vie culturelle et littéraire de l'époque et devint aussi un champ d'action concret : écrire en vers bouleverse autant l'ordre syntactique de la langue que l'habitude à concevoir la réalité de manière univoque et sans opacités.La poésie, pour reprendre une pensée d'Henri Meschonnic, est « contre le maintien de l'ordre », et se propose comme une forme d'engagement profond qui implique les consciences et leur prise de position face à la réalité. Dans une perspective plus large, le discours poétique s'entrelace avec le discours politique, si par politique on présuppose tout effort visant à garantir le bien-être de l'homme et la création des conditions qui permettent la réalisation au degré le plus haut de la liberté de tout individu.L'objet d'intérêt de la traduction poétique fusionne inévitablement avec la poésie tout court, ne serait-ce que parce que toute poésie est en tout cas toujours une traduction. Faire et construire en poésie sont devenus ainsi les axes de cette étude qui essaye de rendre compte constamment des voix de plusieurs personnalités qui étaient à la fois poètes, traducteurs et critiques littéraires. La partie finale de ce travail se concentre ainsi sur la naissance d'un nouveau type d'intellectuel qui est poète, traducteur et critique, et qui, très souvent, est aussi un éditeur. Sa participation à la vie sociale, politique et éditoriale du pays devient de plus en plus significative et fera de la poésie le sujet de plusieurs collections éditoriales et de nombreuses autres publications.Nous avons essayé de montrer quel type d'engagement peut émaner de l'écriture des poèmes et de la pratique de la traduction poétique, en décrivant quel militantisme profond et passionné peut surgir de la 'fréquentation' de la poésie, qui se propose comme une constellation de sens constamment "constructible", comme une présence jamais définitive. Cette mise en valeur de l'inachevé contribue à la mise en question de l'identité du sujet et à la poursuite de son salut, à la multiplication des hypothèses, et à l'ouverture des horizons. En se proposant avec son corps mouvant et émouvant, la poésie sera, pendant le fascisme, un levier d'indisciplinarité face à la règle, s'imposant comme un insoupçonnable instrument de contestation et de résistance.
Given the influence of two trends (a transitional character and the influence of a knowledge-based economy), it is of interest to study what demands places the current labour market on higher education graduates. The main objective of our study is, therefore, to shed light on the two key questions: In the context of transitional economy influenced by the global move towards a knowledge-based society what demands face graduates while entering and operating on the labour market and what competencies are they required to possess? To what extent does Russian higher education prepare young people to face these demands? We will first describe global trends on graduate labour markets in Europe, aiming at to reveal what competencies European graduates are required to possess. Afterwards, we will focus on the economic situation and particularities of the Russian labour market. The economic crises, political and ideological changes, occurred in the 90th, modified the society in its integrity. In order to understand the context in which young specialists live in at present, it is inevitable to make an analysis of the recent economic and social transformations. This is what we do in the second chapter. The third chapter deals with transformations and evolution in the system of higher education. In the fifth chapter, we describe the current graduate labour market in Russia. The sixth chapter aims at providing empirical evidence on competencies demanded on the labour market through the analysis of data obtained by a survey of 3,500 Russian higher education graduates in the capital and province regions of the country. In this part of our work we seek to found out what competencies are demanded and how they are rewarded on the Russian transitional labour market. We also seek to find out to what extent higher education studies contribute to development of these competencies. Further, we study what competencies are required on the labour market and how they are rewarded. We will also examine what factors on the side of labour supply, labour demand and job match appear to have an impact on graduate current income. It is of interest to consider in more details how professional mismatch influences graduate income. The phenomenon of professional mismatch has appeared on the Russian labour market in the yearly 90s and till now, no thorough research concerned the impact of professional mismatch on graduates' success on the labour market. In this chapter we also considerer differences between the private and the public sectors in terms of competencies required. We end up the last chapter by exploring the role of higher education in developing the required skills. We suppose that Russian higher education does manage to provide deep knowledge in a particular field and analytical thinking abilities, but it does not contribute to a sufficient extent to producing other essential qualities, like computer and Internet literacy, capacity to work in group and others. ; L'auteur s'interroge sur la nature des compétences demandées dans un pays en transition économique, comme la Russie. La question est de savoir : « Est-ce qu'en Russie, les défis auxquels doivent faire face les diplômés sont les mêmes que dans les autres pays de l'Europe ? Est-ce que les diplômés russes ont véritablement besoin de se procurer d'un éventail plus large des compétences afin de mieux réussir sur le marché du travail? ». Nous cherchons à savoir également si l'enseignement universitaire permet d'acquérir toutes les compétences demandées par les employeurs ? Nous avons mené une recherche visant à vérifier notre hypothèse qu'en Russie, actuellement, il ne suffit plus de posséder des bonnes connaissances dans un domaine particulier, mais il devient indispensable d'acquérir des compétences plus larges et variés, comme la capacité de gérer le stress, de travailler en équipe, de coordonner les activités des autres, etc. Afin de répondre à ces questions, nous avons mené une enquête auprès 3500 diplômés des 4 établissements d'enseignement supérieur, dans les deux régions de Russie: dans la région de Moscou et à Volgograd. Nous avons obtenue environ 300 réponses à Volgograd et 180 dans la région de Moscou. Cette enquête a été réalisée grâce à la participation financière de nombreux acteurs en Russie et à l'étranger, comme la Mairie de Dijon, le Ministère des affaires étrangères de France, l'Université de Volgograd, l'Académie de management social de Moscou, et également grâce au soutient méthodologique de l'IREDU et du projet européen « REFLEX » (« Flexible Professional in the Knowledge Society »). Dans en premier temps, nous avons procédé à une analyse générale de la situation des diplômés sur le marché du travail. Nous remarquons que les diplômés bénéficient d'une situation assez favorable sur le marché du travail. Le taux de chômage est très bas (2% à Volgograd, 4 fois inférieur au taux moyen de chômage dans la région ; 3% dans la région de Moscou, la moyenne régional étant de 4,2%). 60 % des diplômés à Volgograd, ainsi que dans la région de Moscou, n'ont jamais été au chômage depuis la fin de leurs études (depuis 2000 - 2001). La durée moyenne du chômage, pour ceux qui ont eu cette expérience, est de 2 mois. 65% des diplômés dans les deux échantillons sont satisfaits de leur emploi actuel. Les revenues des diplômés (après le contrôle de l'inflation) ont pratiquement doublés en 5 ans, entre 2000 (sortie des études) et 2005 (emploi actuel). Dans en deuxième temps, nous nous sommes focalisés sur les compétences avec un zoom sur les deux questions particulières: quelles compétences sont demandées sur le marché du travail et quel rendement salarial apportent-elles aux diplômés. Notre analyse est basée sur l'autoévaluation des compétences par les diplômés. Dans un troisième temps, nous avons examiné le rôle de l'enseignement supérieur dans le développement des compétences requises sur le marché. L'analyse des données montre que l'enseignement supérieur remplie bien sa fonction principale : apprendre les connaissances techniques dans un domaine particulier. En outre, il permet de développer la capacité d'analyse et la capacité d'apprendre rapidement des nouveaux savoirs. Cependant, on observe qu'il n'est pas suffisamment efficace pour aider à développer un certain nombre d'autres compétences requises par les employeurs, comme la capacité de manager le personnel, la maîtrise des outils informatiques (ordinateur, Internet), la maîtrise des langues étrangères, etc.
This study aims to give a general overview of the historical development, particularisms and main issues of the positive law of foreign direct investment, by looking at different areas of law, ranging from the history of law to the very content of foreign investment law, and through dispute settlement mechanisms for foreign investment. An exegetical study of laws and regulations on foreign investments is a necessary step for the understanding of the legal regime of foreign direct investment, but its knowledge of the law is not sufficient for an investor to succeed in his investment.Its development is undeniably linked to the elements of the political, cultural, social and economic aspects of the country. From the promotion of Marxist values of the Soviet system under the Mao Zedong period, to the adoption of legal pragmatism under the direction of Deng Xiaoping; from the policy of the planned economy to the market economy. In forty years, the government was able to create an entire legal system from almost nothing. However, the speed of legislative work is by no means a proof of its quality. Indeed, in order to catch up with the legal systems of the economically developed countries, the government had to implement foreign solutions, without carrying out any in-depth adaptation or harmonization work, thus reducing the value and the effectiveness of the law.Initially, the foreign direct investment law consisted only of three separate laws and their implementing regulations : Sino-Foreign EJV Law and its Implementing Regulation, the WFOE Law and its Implementing Regulation, and Sino-Foreign CJV and its Implementing Regulation. This was then competed by other laws and regulations, each governing only one specific form of foreign-invested enterprise.Litigation is part of everyday life which allows the legislator to measure the efficiency of justice within a State. Despite the fact that litigation is the ultimate means of testing the effectiveness a legal system, it is only a last resort, especially in states such as China, in which its history demonstrates a constant preference for alternative modes of dispute resolution to the detriment of contentious proceedings.After three decades of reform, China has become an integral part of the international scene. As a result, its practice of resolving disputes is increasingly aligned with international standards. The quest for effective dispute resolution is now similar to that of other Western states: ideally a dispute must be resolved in the short time frame, at a low cost and with as little stress as possible, but with an acceptable result.It is therefore essential to constantly follow legal news. Indeed, the two recent catalogs (2015 and 2017) illustrate a liberalizing trend of the national market by opening more sectors to foreign investments, and by introducing a system close to the "negative list". And the 2016 Reform replaced the authorization procedure for foreign direct investment projects with a simple registration system. While these recent developments have provided solutions to existing difficulties, due to the number of flaws in substantive law, a thorough reform is needed. The Draft Law on Foreign Investment, published by the Ministry of Commerce in 2015 for public commentary, has the potential to erase all the flaws of the current regime. However, despite the promises made by the government, its future remains very uncertain at the moment. ; Cette étude tente de donner un aperçu général du développement historique, des particularismes et des principales problématiques du droit positif des investissements directs étrangers. En effet, une étude exégétique des textes législatifs et règlements portant sur des investissements étrangers est, certes, nécessaire pour la compréhension du régime juridique des investissements directs étrangers, mais sa connaissance ne suffit pas pour qu'un investisseur puisse réussir son investissement sur le territoire chinois. Le régime juridique des investissements directs étrangers est le fruit d'un travail d'imitation législative de systèmes de droits étrangers. Son développement est indéniablement lié aux éléments de la vie politique, culturelle, sociale et économique du pays. De la politique de l'économie planifiée à l'économie de marché, en quarante ans, le gouvernement a pu créer un droit quasiment exhaustif à partir du vide. Cependant, la rapidité du travail législatif n'est nullement une preuve de sa qualité. En effet, dans le but de rattraper son retard sur les systèmes juridiques des pays économiquement développés, le gouvernement a dû implanter les solutions étrangères, sans pour autant effectuer un travail approfondi d'adaptation ou d'harmonisation, diminuant ainsi la qualité et l'efficacité des lois.Initialement, le droit des investissements directs étrangers était uniquement constitué de trois lois distinctes et des règlements d'application desdites lois. Il s'agissait de la Loi sur les EJV sino-étrangères et son règlement d'application, la Loi sur les WFOE et son règlement d'application, et CJV sino-étrangères et son règlement d'application. Ce régime est ensuite complété par d'autres textes, chacun régissant qu'une seule forme spécifique d'entreprise à participation étrangère.Les litiges font partie de la vie courante non seulement des personnes morales, mais, également des personnes physiques, et permettent de mesurer l'efficacité de la justice au sein d'un État. Malgré le fait que les litiges constituent le moyen ultime de tester l'efficacité de la loi ou d'un système de droit, ils ne surviennent qu'en dernier ressort, surtout dans les États tels que la Chine, où l'histoire démontre une préférence constante envers les modes informelles de résolution des différends au détriment de la procédure étatique contentieuse.Après trois décennies de réforme, la Chine fait désormais partie intégrante de la scène internationale. Par conséquent, ses pratiques portant sur la résolution des différends sont de plus en plus en harmonie avec les standards internationaux. En d'autres termes, la recherche d'une résolution efficace des différends est similaire de celle des autres États occidentaux : idéalement un différend doit être résolu dans le délai court, à un coût bas et avec moins de stress que possible, mais, arrivant tout de même à un résultat acceptable.Le droit chinois des investissements directs étrangers a subi le plus de réformes législatives en Chine. Il est donc primordial de suivre constamment l'actualité juridique. En effet, les deux catalogues récent (2015 et de 2017) illustrent une tendance libéralisatrice du marché national en ouvrant de plus en plus les secteurs d'industrie aux investissements étrangers, et en introduisant un système proche de la " liste négative ". Puis la Réforme de 2016 est venue remplacer la procédure d'autorisation des projets d'investissements directs étrangers par un simple système d'enregistrement. Certes, ces éléments récents ont su apporter des solutions à des difficultés existantes, mais en raison du nombre de vices du droit positif, une réforme en profondeur est nécessaire. Le Projet de loi des investissements étrangers, publié par le Ministère du Commerce en 2015, a le potentiel d'effacer tous les défauts du régime actuel. Cependant, malgré les promesses du gouvernement, son futur demeure très incertain à l'heure actuelle.
Since the fall of the Duvalier regime in 1986, Haiti has intended to be a democratic State in which the practices of territorial development put the emphasis on the involvement of the local actors. The principles of decentralization are therefore proclaimed, thus implying a will from the Haitian government to devolve powers and means to local authorities as part of community public services. Two phenomena have characterized the Haitian society from that date onward. The first phenomenon is the opening of the country to commercial trade – at international level – and the second one refers to the proliferation of NGOs and small local projects defined as development projects. These two phenomena reflect, by and large, the project-planning mentality at work on the Haitian territory on the basis of what is called "the international aid-project system." This thesis aims at two main objectives leading to two different yet interconnected models. The first objective is to investigate on the foundations of Haiti's political and economic dependence – and, to a larger extent, that of all the LDCs – in the context of the Official Development Assistance. It means taking into account the internal dynamics of its production system – based on the aid-project – on the ground of implemented choices made in terms of public policies for development. The second objective focuses on both geographic and socio-economic disparities which characterize the aid-project system itself. In order to study them, the approach is to investigate on the externalities generated by the system while highlighting the (geographic and organized) ties between projects and local actors. The geographic questions come from the assumption that actors or territories are affected by what goes on in their environment and even more so in their neighborhood. In this case, their proximity requires behaviors which are proportional to the variability of the factors. In other words, each (communal) territory that hosts a number of local projects reduces the opportunities for another territory to host them if the principle of assigning in the aid-project system is kept. It implies that projects have a tendency to concentrate in a small number of communal territories whereas their volume of activity is low elsewhere. Hence, local populations tend to migrate toward privileged territories or places, which aggravates territorial disparities and causes slums to grow. In a similar way, local actors specialize and become more efficient for attracting projects – or NGOs – by offering a pitiful image: misery replaces poverty. Though NGOs' proliferation has steadily increased in a country like Haiti since 1986, economic "take-off" has not really ensued. The geographic approach to the aid-project system brings about new thinking and new assumptions on the effects of aid distribution with respect to the reinforcement of – geographic and organized – ties between actors and their territories. It indicates that NGOs are mobile on the national territory and local projects will come together whenever a communal territory displays its condition of misery and provides the NGOs with good publicity in terms of image. In other cases, projects will be scattered. This constitutes a considerable contribution to the analysis of – direct or indirect – effects of the distribution of local projects regarding the issue of underdevelopment in Haiti. It is, then, possible to reason in terms of performance of the aid-project system in relation to this issue of territorialized development. ; Depuis la chute du régime des Duvalier en 1986, Haïti se veut un État démocratique dans lequel les pratiques du développement territorial insistent sur l'implication et la participation des acteurs locaux. Les principes de la décentralisation sont alors proclamés impliquant une volonté de l'État haïtien de transférer des compétences et des moyens aux collectivités territoriales, dans le cadre de services publics de proximité. Deux phénomènes allaient marquer la société haïtienne à partir de cette date. Le premier est l'ouverture du pays aux échanges commerciaux (à l'échelle internationale) et le second revoie à la prolifération des ONG et de petits projets locaux dits de développement. Ces deux phénomènes traduisent, dans un sens large, la mise en projet du territoire haïtien à partir de ce que l'on appelle « le système aide-projet international ». Cette thèse poursuit deux grands objectifs conduisant à deux modèles différents, mais interreliés. Le premier objectif est de s'interroger sur les fondements de la dépendance politico-économique d'Haïti (dans une large mesure tous les PMA) dans le contexte d'aide publique au développement. Il s'agit de prendre en compte les dynamiques internes de son système de production (basé sur l'aide-projet) à partir des choix de politiques publiques de développement appliqués. Le second objectif s'intéresse aux disparités, à la fois spatiales et socioéconomiques, qui caractérisent le système aide-projet lui-même. Pour les étudier, la démarche s'interroge sur les externalités générées par le système tout en mettant l'accent sur les liens de proximités (géographique et organisée) des projets par rapport aux acteurs territoriaux. Les questions spatiales partent du postulat que les acteurs ou les territoires sont affectés par ce qui se passe dans son environnement et davantage dans son voisinage. Dans ce cas, leur proximité impose des comportements qui sont proportionnels avec la variabilité des facteurs. Autrement dit, chaque territoire (communal), accueillant un nombre de projets locaux, diminue les chances d'un autre territoire de les accueillir si l'on maintient le principe d'affectation dans le système aide-projet. Cela implique que les projets ont tendance à se concentrer en un petit nombre de territoires communaux alors que leur volume d'activité est très faible ailleurs. De ce fait, les populations locales ont tendance à immigrer vers les territoires ou lieux privilégiés, ce qui accentue les disparités territoriales et entraîne l'élargissement des bidonvilles. De la même manière, les acteurs locaux se spécialisent et deviennent plus efficaces pour attirer des projets (ou des ONG) en offrant une image pitoyable : la misère remplace la pauvreté. Si la prolifération des ONG, dans un pays comme Haïti, a progressé de manière régulière depuis 1986, le décollage économique n'a pas véritablement suivi. L'approche spatiale du système aide-projet apporte de nouvelles réflexions et de nouvelles hypothèses, sur les effets de distribution de l'aide par rapport au renforcement des liens de proximités (géographique et organisée) entre les acteurs locaux et leurs territoires. Elle montre que les ONG sont mobiles sur le territoire national et les projets locaux vont se regrouper lorsqu'un territoire communal expose son état de misère et offre aux ONG une bonne publicité sur le plan d'image. Dans les cas contraires, les projets seront dispersés. Il s'agit là d'un apport considérable dans l'analyse des effets (directs ou indirects) de distribution des projets locaux par rapport à la problématique du sous-développement en Haïti. Alors, on peut raisonner en matière de rendements du système aide-projet par rapport à cette problématique de développement territorialisé.
As the world is preparing to scale up its efforts to combat global climate change, groups are increasingly recognizing the vital role forests play in maintaining ecological, social, economic and cultural well-being. They are beginning to affirm more that forest tenure plays a fundamental role in determining the fate of the world's forests. In many countries, questions are raised on whether tropical forests should be publicly, commonly or privately owned. For many countries the forest management policies will likely involve a combination of: i) protected areas of sufficient size to provide habitat protection, and in a contiguous pattern; ii) forest concessions with enforceable performance-based management criteria; iii) community forests and community forest concessions managed by communities and indigenous groups. The challenge is to undertake the land use planning commitment and implementation to achieve this in the face of pressure from internal and external interests. Forest concessions of various types are the dominant form of forest tenure in almost all the forest countries of West and Central Africa. They are also the dominant types of forest tenure in Asia (Malaysia, Indonesia, Papua New Guinea, and Cambodia). In South America, Peru and Bolivia introduced forest concession as a possible tenure model in the early 90's with the strong support of international NGOs. In Brazil, after two failed attempts, the government has passed its new forest management law in 2006. Bolivia and Brazil have much in common regarding forest tenure conflicts and challenges to enforce new rules in the forestry sector. Forest concession implementation in these countries has generated many expectations and investments in law changes.This research work focuses on the main barriers faced by Bolivian and Brazilian forest authorities in implementing forest concession on the scale initially planned. The studies required a mapping of the property rights regimes over forest and forest resources as well as a theoretical approach of economic sociology. This approach, which provides elements to evaluate the process of social market construction, is dependent upon four essential factors: property rights, governance structures, rules of exchange and conceptions of control. The political-cultural approach emphasizes the historic perspective of the markets to understand the role of dominant groups and challengers in action arenas. It also considers the participation of social actors like governments, firms and consumers, among others, and their incentives for cooperative actions based on the cognitive ties that bind them. This empiric study focused on each country's geographically-delimited regions of Amazon: in the Bolivian lowlands region and in the Brazilian Cuiabá-Santarém Highway (namely BR-163). That's because they are the main targets for forest concession implementation. We show in this study that under a tenure uncertainty scenario, in which there are battles for territorial pieces and political alliances are forged that prefer other land use (and forests uses also) patterns the forest concessions implementation on a large scale will be jeopardized in these territories. ; Les forêts (tempérées et tropicales) couvrent près de quatre milliards d'hectares de la planète (FAO, 2005, 2009). On estime que la plupart de ces forêts (75%) sont dans le domaine publique et sont administrées par les gouvernements nationaux, locaux ou régionaux (RRI et OIBT, 2009). Dans plusieurs pays, développés et en voie de développement, la concession forestière est un moyen d'accorder et de règler les droits de propriété sur ces forêts publiques (Gray, 2000, 2002, White et Martin, 2002). La concession est un acte juridique pris par une autorité publique qui attribue à une personne privée, un droit d'utilisation ou un privilège (FAO, 1999, p.8). Dans la législation brésilienne, ainsi que dans le droit français, cette définition comprend également l'idée que l'acte de concession porte sur la délégation des droits et des devoirs du gouvernement à un agent privé. Cette relation est médiatisée par un contrat et implique la nécessité d'un paiement pour le concessionnaire (Karsenty, 2007, Brésil, 2006). Au niveau international, les plus anciennes expériences de concessions forestières sont dans les pays de l'Afrique (de l'ouest et centrale). Dans ces régions, les études montrent l'adoption du modèle depuis la fin du XIXe siècle (Coquery-Vidrovitch, 2001). On estime qu'il y a environ 55 millions d'hectares de forêts publiques affectés dans six pays de la région d'Afrique centrale (Cameroun, Gabon, Congo, République Démocratique du Congo, la République Centrafricaine et Guinée Equatoriale) (Karsenty, 2007). En Asie, les concessions forestières couvrent 69 millions d'hectares. Sur ce total, 38 millions d'hectares sont situés en Indonésie (Gray, 2002, RRI, 2008, l'OIBT, 2005). Dans ce pays, les concessions sont devenues la principale méthode de répartition des droits sur les forêts pendant le régime de Suharto (Singer, 2009). Dans les forêts tropicales d'Amérique, les études rapportent l'existence de concessions sur une surface de 34 millions d'hectares de forêts (OIBT, 2005). Ces zones sont au Suriname, au Guyana, au Venezuela et au Guatemala (avec une prédominance des concessions aux communautés et seulement deux concessions industrielles), la Colombie, la Bolivie et le Pérou. Récemment, le Brésil, a adopté ce modèle pour gérer une partie de ses forêts publiques. L'évaluation globale de la mise en oeuvre du système est d'environ 158 millions d'hectares dans le cas des forêts tropicales. Par rapport aux forêts tempérées, les zones avec les plus grandes surfaces sur concession sont au Canada. Bien qu'étant l'un des principaux moyens d'attribuer les droits de propriété sur les forêts, un vif débat politique et académique persiste sur les avantages et les inconvénients de cette option (Hardner et Rice, 2000, Gray, 2002, Boscolo et Vincent, 2000, Karsenty et al., 2008). En dépit de l'investissement et de soutiens internes et externes, la Bolivie et le Brésil ont rencontré des difficultés à poursuivre la mise en oeuvre des concessions. La Bolivie a mené ses réformes juridiques et mis en oeuvre quelques concessions à la fin des années 90. Le Brésil, après deux tentatives avortées (dans les années 70 et au début de 2000) a reussi à faire des réformes et adopter une nouvelle loi sur la gestion forestière, y compris l'établissement de concessions, en 2006 (gouvernement de Luis Inacio Lula da Silva). Le plan initial du gouvernement bolivien était d'en affecter 22 millions ha principalement pour la production de bois. Cependant, sur cette même zone, les peuples indigènes ont déjà revendiqué une surface d'environ 20 millions ha pour la démarcation de leurs Terres Communautaires D'Origine (TCO). Selon les données officielles, en 2007 les concessions forestières attribuées aux industries de la Bolivie totalisaient un peu plus de 5 millions ha (attribués en une seule fois, en 1997, sans appel d'offre concurrentiel). Les concessions communautaires totalisaient un peu plus de 600.000 ha. En outre, les permis de déboiser dans les forêts privées se sont accrus et la délimitation des Terres Communautaires D'Origine a progressé. Au Brésil, les objectifs initiaux de l'attribution des concessions étaient ambitieux. Depuis 2002, le Programme Forestier National (PNF) a voulu étendre la surface sur l'amenagement forestier en Amazonie brésilienne comme stratégie pour combattre l'accroissement du déboisement. Au début des années 2000, l'objectif était d'atteindre une superficie de 15 millions ha sous gestion durable des forêts en Amazonie jusqu'à 2010. Une partie de cette zone était située dans les forêts nationales déjà classées. D'autres parties étaient dans les terres publiques couvertes par des forêts, mais souvent déjà occupées (terras devolutas da União e dos Estados). À la fin de 2009, le total des concessions forestières au Brésil s'élève à 96.000 ha de forêt attribués à trois entreprises dans une Forêt Nationale dans l'Etat de Rondonia. Au début de 2010 un deuxième et un troisième appel d'offre ont été lancés. Ces appel d'offre comprenait une surface d'environ 480.000 ha dans deux Forêts Nationales dans l'État du Pará. Face à cette situation de difficile application de la politique de concessions forestières dans les deux pays, ce travail demande: pourquoi la politique de concessions forestières en Bolivie et au Brésil, malgré les attentes et des investissements significatifs, est-elle si peu avancée par rapport aux objectifs de la mise en oeuvre prévue dans les deux pays? Le travail a impliqué la mobilisation de deux approches théoriques et méthodologiques. La première d'entre elles était l'application de la matrice d'analyse des modes d'appropriation et gestion du foncier et des ressources forestières. Cet outil , résulte de la réunion de deux cadres analytiques principalement de la contribution de Schlager et Ostrom (1992), et du travail d'un anthropologue du droit, Etienne Le Roy (1996). L'utilisation de la matrice a permis de réaliser une cartographie des modes d'appropriation et de gestion des forêts et un aperçu de la gamme des acteurs qui possèdent ou revendiquent des droits d'occupation et d'utilisation dans les deux études de cas. En complément, l'approche politique-culturelle, développée par le sociologue américain Neil Fligstein (1990, 1996, 2001) a fourni un cadre permettant de discerner l'organisation sociale de production de bois dans les deux cas étudiés et de trouver les acteurs et les dynamiques des groupes en compétition pour le territoire de l'Amazonie. Ce cadre théorique a permis également d'envisager comment ces acteurs mettent en forme les droits de propriété, les structures de gouvernance, les règles d'échange et les conceptions de contrôle qui régissent les relations sociales dans ces territoires. La conclusion principale de ce travail est que les gouvernements n'ont pas assez pris en compte la diversité des acteurs qui occupent, historiquement, le territoire forestier de la Bolivie et du Brésil. La modestie des réalisations en matière de développement des concessions est due aux meilleures compétences sociales et à la plus grande force politique des acteurs qui se positionnent contre le nouveau régime de concessions. Ainsi, ces acteurs cherchent à défendre leurs intérêts et à assurer leur position tandis que les acteurs favorables (les "challengers") ne sont pas assez fort politiquement pour changer le statu quo en ce qui concerne la manière d'occupation, d'utilisation et de gestion des terres forestières.
Thèse de socio-histoire comparée du politique rédigée entre 2002 et 2007 dans le cadre d'une co-tutelle franco-italienne. ; This PhD deals with the forms of public and political activism developed by conservative Catholic women in the Italian Unione fra le donne cattoliche d'Italia (UDCI) and the French Ligue patriotique des Françaises (LPDF) before the 1944 and 1945 that allows full citizenship to French and Italian women. It led me to explore in depth two distinct paths by which such organizations managed to mobilize, and politicize conservative women, despite their avowedly non-feminist and non-political ideologies stances. By examining individual political trajectories in the context of collective political stances, this research provides a new insight on processes of politicization at a moment of broader democratization in French and Italian politics (1902-19 in Italy, 1902-33 in France). I could identifyied a "liberal" path of politicization for the French organization: French Catholic Women officially supported the Republic and since 1902 enteredparticipated since 1902 in the political arena through financing and canvassing for male candidates. This path is quite different to the "instransigeant" Italian one. In Italy, since the suffrage was restricted, the Catholic Church forbade Catholic women to enter the political competition. In this perspective, the association used lobbying and cultural action to influence male politicians and led them to propose laws in favour of the Church and of women (i.e. mothers). ; Cette recherche historique qui croise les apports des études de genre, de la science politique et de la sociologie religieuse met en lumière la façon singulière dont les militantes d'action féminine catholique sont venues à la politique en France et en Italie durant les premières décennies du XXe siècle. Deux associations catholiques féminines de masse ont fait l'objet de cette analyse comparée : la Ligue patriotique des Françaises active de 1902 à 1933 et l'Unione fra le donne cattoliche d'Italia de 1909 à 1919. La thèse réalisée dans le cadre d'un doctorat en co-tutelle entre l'Ecole des hautes études en sciences sociales et l'Université de Rome 'La Sapienza' s'est appuyée sur différents fonds d'archives qui ont été dépouillés, pour certains d'entre eux intégralement, durant cinq ans. La problématique qui a guidé cette recherche est celle de l'activité politique féminine conservatrice dans des contextes d'exclusion des femmes du suffrage. Si l'activité des suffragistes, des féministes, des militantes socialistes de la période contemporaine est bien connue, les mobilisations conservatrices sont restées dans l'ombre de l'histoire, malgré leur caractère massif et durable. Le point de départ de mon travail a été de comprendre comment les femmes qui n'étaient pas féministes, dans le sens où ce terme est défini par les organisations féminines en faveur du suffrage et des femmes au début du siècle dernier, se sont mobilisées pour faire émerger une parole féminine conservatrice. Il fallait éclairer les modalités d'action de ces femmes, saisir le paradoxe de leur engagement à la fois conservateur sur le plan politique, religieux et social et en même temps porteur de redéfinition pratique des normes de genre. Tout en étant très attachées à un ordre social inégalitaire et à une hiérarchie des genres sous-tendus par la reconquête du terrain perdu par l'Église, certaines de ces femmes ont dans certains contextes pu faire preuve d'une contestation plus ou moins silencieuse des normes en vigueur dans l'Église et dans la société. La comparaison est centrale dans cette démarche. L'Italie et la France sont deux pays que les contextes de sécularisation et de séparation de l'Etat de l'Église catholique rapprochent. Leur système politique libéral repose sur l'exclusion des femmes du corps électoral d'abord sur des motifs juridiques – elles ne sont pas libres depuis le Code civil de 1804 en France et en Italie –, puis politiques – jugées trop proches de l'Église et sous la coupe du clergé. Mais dans ces contextes proches, la naissance de l'action catholique féminine prend des formes distinctes. La Ligue patriotique des Françaises voit le jour en 1902, en tant qu'entreprise électorale pourvoyeuse de subsides pour les candidats catholiques. Tandis qu'en Italie, ce ne sont pas les élections qui provoquent l'apparition d'une association de laïques organisées mais le congrès féministe de Rome en 1908. Le cas italien fait saillir les spécificités du rapport à la politique de l'association française. Bien que s'en défendant, en France, les femmes de la Ligue entrent dans l'arène politique, non pas pour voter directement mais pour prendre une part dans la division sexuelle du travail militant qu'elle justifient par les compétences supposées de leur sexe. A l'œuvre en 1902, lors des municipales de 1904, des législatives de 1906, elles diffusent les tracts des candidats catholiques, collent des affiches, gèrent les caisses électorales, nettoient les listes électorales dans les mairies, et même monnayer leur « devoir conjugal » contre une promesse de vote pour le bon candidat. Cette activité se poursuit de façon plus discrète après 1906, date à laquelle le pape Pie X leur interdit toute action politique. Tout autre est la situation italienne, où, parce que le non expedit du pape Pie IX déconseille la participation des catholiques italiens au jeu démocratique censitaire d'un Royaume d'Italie impie, les femmes catholiques n'ont pas vocation à contribuer à la rechristianisation du pays par les urnes. C'est l'articulation complexe de ces deux cas, auxquels vient s'ajouter un troisième acteur qu'est la hiérarchie vaticane, qui est au centre de l'analyse comparée. Ce travail s'est appuyé sur des archives mais aussi une littérature scientifique de différentes disciplines : outre les travaux d'histoire du catholicisme, d'histoire du genre, d'histoire sociale, d'histoire de l'éducation et d'histoire de la Grande Guerre, les ouvrages de science politique, de la sociologie des mobilisations sont venus enrichir le corpus des sources secondaires. Des sources inattendues pour l'histoire du genre aux sources inexploitées Plusieurs types de fonds dans chacun des trois pays – France, Italie, Vatican – ont été consultés. Des sondages ponctuels dans des fonds américains – Schlesinger Librairy, spécialisée sur l'histoire des femmes, et Boston College, université de la Compagnie de Jésus, à Boston ont complété ces consultations principales. Les fonds français sont constitués des fonds de l'association Ligue patriotique des Françaises (1902-1933), déposés à l'Action catholique des femmes ; des Archives historiques des archevêchés de Lyon et de Paris, des Archives départementales du Rhône, des Alpes-Maritimes, du Tarn, de l'Yonne – dont certains n'ont parfois rien donné -, des Archives nationales, série F7 « partis et associations politiques ». Ce dernier choix de ne prendre en considération que les documents identifiés comme relevant d'une activité politique était justifié par la volonté d'attester montrer qu'un engagement conservateur féminin avait existé et était identifié comme tel par les pouvoirs publics. La perception de la Ligue patriotique des Françaises sous l'angle de son activité politique indique une féminisation précoce de la profession politique par le biais de cette association connexe de l'Action libérale populaire. Une deuxième phase de dépouillement a été effectuée à Rome. Le fonds personnel de Cristina Giustiniani Bandini, première présidente et fondatrice de l'Unione fra le donne cattoliche d'Italia (U.D.C.I.) en 1909 a été intégralement dépouillé. Il est conservé près l'Archive général de l'ordre prêcheur (dominicains) en l'Église Sainte-Sabine de Rome. Les archives d'État de Rome (Archivio di stato di Roma) ont été sondées pour établir une comparaison dans la surveillance politique de ces associations catholiques féminines. La localisation des sources révèle ainsi que l'Action catholique féminine italienne n'est pas structurée comme une organisation à vocation politique ou sociale. Elle n'est pas déclarée auprès des autorités, il n'y a pas de trace aux Archives d'Etat en tant qu'association politique ou de bienfaisance. Enfin, les Archives secrètes vaticanes ont offert un regard inédit sur ces associations. Ces matériaux inexploités jusqu'ici – papiers du fonds personnel Pie XI, fonds Pie IX ouvert à la consultation depuis septembre 2006 – ou qui n'avaient jamais été consultés pour l'action catholique féminine française et italienne – fonds Secrétairie d'État pour les pontificats de Léon XIII, Pie X et Benoît XV ; Affaires ecclésiastiques extraordinaires France et Italie – ont été d'une importance majeure dans cette recherche. Ils permettent de comprendre le regard porté par l'institution sur ces associations mais aussi la complexité du rapport à l'autorité de ces organisations de laïques qui avaient un pied dans l'Église et un pied dans la société. La presse de ces deux associations a également été dépouillée. Organisation de la thèse L'exploitation du matériau a été organisée de façon thématique et chronologique. Trois parties scandent ce travail. La première porte sur l'émergence et le développement des deux organisations, la seconde s'intéresse à la citoyenneté sociale mise en œuvre par ces associations et enfin, une troisième partie examine l'élaboration complexe d'une citoyenneté politique qui ne passe pas nécessairement par le vote dans un premier temps puis qui intègre le suffrage féminin au lendemain de la Grande Guerre. La première partie de la thèse traite de la genèse du militantisme d'action catholique féminine de part et d'autre des Alpes. Elle éclaire la naissance, le développement et l'institutionnalisation de chacune des deux associations. Un premier chapitre retrace la naissance de la Ligue patriotique des Françaises à Paris, durant les derniers mois de l'année 1901. Il montre comment un premier noyau parisien composé de femmes consacrées sans toutefois qu'elles portent un habit religieux et d'« entrepreneuses » - comme certaines dirigeantes se définissent -, rompues à l'entreprise électorale de leur mari sous le Second Empire et la IIIe République, a créé une organisation de laïque qui gagne très vite la Province. Forte de 300 000 adhérentes dès son troisième anniversaire, la Ligue est d'abord une œuvre électorale, qui doit fournir aux candidats catholiques des subsides et des propagandistes zélées dans le contexte de structuration de l'offre politique par les partis. La loi de 1901 sur les associations, votée pour contrôler les congrégations religieuses offre alors une opportunité inattendue d'organisation pour ces catholiques. L'échec aux élections législatives de 1906 et l'évolution des positions pontificales vers un rejet de la démocratie chrétienne et de l'engagement politique des catholiques marque l'arrêt officiel de l'œuvre électorale pour les femmes. Dès 1907, l'action sociale et religieuse sont mises au premier plan : c'est par elles, et par elles seules, que les femmes referont la société chrétienne et non par les urnes. Dans la pratique cependant, l'interdit est contourné jusqu'en 1914. Peu de temps après, en 1909, est proclamée la naissance de l'Union entre les femmes catholiques d'Italie. Les cérémonies de béatification de Jeanne d'Arc en avril de cette même année sont l'occasion de lier les deux organisations qui se placent ainsi sous la protection de la sainte. La vierge guerrière symbolise le renouveau de l'apostolat féminin sous tendu par une spiritualité de combat qui prend tout son sens dans un contexte de laïcisation des institutions d'Etat. Le deuxième chapitre porte sur cette « petite sœur italienne » qui naît au lendemain du congrès féministe de Rome de mai 1908, qui avait vu des femmes catholiques prendre part au vote d'une motion supprimant le caractère obligatoire de l'instruction religieuse à l'école. Une aristocrate romaine proche du pape Pie X, la princesse Cristina Giustiniani Bandini, mobilise ses réseaux religieux et nobiliaires pour fonder une association de laïques sur le même modèle que la Ligue. Mais, contrairement aux Parisiennes, la dirigeante romaine se place dans une ligne intransigeante et refuse toute forme de participation politique féminine. Il n'est pas question de voir les Italiennes financer les candidats catholiques aux élections locales – les seules où ils sont autorisés à se présenter en tant que tels par la hiérarchie ecclésiale jusqu'en 1912, ni de réclamer le suffrage. La mise en conformité de la cité terrestre avec la cité céleste se fera par l'action religieuse, par les pèlerinages, par une piété féminine accrue et éventuellement par les œuvres de bienfaisance. Dans ces deux contextes, qui ont pour point commun l'affirmation de l'État nation sur des bases laïques et l'institution d'un régime démocratique fondé sur le citoyen masculin, la capacité des femmes catholiques à imposer leur programme politique dans le débat public se traduit donc par des modalités d'action différentes. Dirigées toutes deux par des aristocrates, défendant une hiérarchie sociale, une hiérarchie de genre et une hiérarchie religieuse ces femmes ont, pour certaines d'entre-elles, maintenu leur autonomie à travers ce militantisme conservateur. Une deuxième partie s'intéresse aux déclinaisons d'une citoyenneté sociale féminine. Elle montre comment au sein de ces associations l'acception restrictive de la citoyenneté politique identifiée au vote, attribut masculin en France et en Italie jusqu'en 1945, est contournée pour proposer une autre forme d'appartenance à la cité. Cette citoyenneté sociale est alors définie comme l'ensemble des droits et des devoirs assignés aux femmes en tant que mères biologiques ou spirituelles, afin de transposer à l'ensemble de la société les activités de soin, de prise en charge des œuvres sociales, aujourd'hui désignées sous le terme de care. Le troisième chapitre porte sur l'action sociale catholique. Il intègre de façon comparée les étapes du passage de la dame patronnesse à la militante d'action catholique. Il montre comment la résolution de la question sociale « les Évangiles à la main » se heurte à la différence des positions sociales des militantes : la solution corporatiste où patronnes et ouvrières sont réunies dans une même structure est difficilement envisageable dans les comités composés d'ouvrières. Si la Ligue délègue cette question délicate aux syndicats féminins chrétiens, l'Union italienne entend monopoliser l'encadrement des catholiques en contrôlant les syndicats des professions pensées comme féminines – infirmières, institutrices, téléphonistes.-. À travers l'organisation chrétienne de ces occupations féminines s'opère dans certains cas une professionnalisation de ces activités. Tant en France qu'en Italie, le brevet d'aptitude vient se substituer à la formation uniquement religieuse pour devenir enseignante ou infirmière d'Etat. Cette professionnalisation s'étend après la Grande Guerre à d'autres activités féminines : la formation professionnelle est proposée en France aux agricultrices, aux ouvrières. Elle est sous-tendue par l'idée que l'élite féminine militante doit d'abord être une élite de professionnelles. Cependant, la crise des années Trente met un frein à cette activité quand la mère au foyer devient le cheval de bataille de l'Église catholique. Une deuxième dimension de cette citoyenneté sociale est son enracinement dans l'expérience de la maternité qui est présentée par ces associations comme constitutive du genre féminin. Bien que la plupart des dirigeantes n'aient pas d'enfants – parce qu'elles sont vierges consacrées ou tertiaires - elles entendent néanmoins promouvoir la maternité. Se distinguant des associations natalistes plutôt républicaines en France, les catholiques s'inscrivent dans la mouvance familialiste. Mais, elles se singularisent par le fait que cette promotion de la maternité est faite par des femmes, pour des femmes. On observe alors des nuances importantes sur l'acception de la maternité : celle-ci peut être entendue comme la mise au monde des enfants mais aussi le maternage d'autres enfants dans le cadre d'un célibat chaste et consacré. En France, la Ligue établit parallèlement à d'autres institutions républicaines des institutions d'aide aux mères – gouttes de lait, consultation du nourrisson, mutualités maternelles et prix. Ainsi, la Ligue patriotique organise t-elle la fête des mères au mois de mai à partir de 1917 : le prix des mères méritantes est remis aux adhérentes de condition modeste, mères de famille nombreuse et d'observance religieuse rigoureuse. En Italie, c'est surtout la dimension religieuse de la maternité qui est privilégiée à travers la promotion de la dévotion mariale mais aussi de saintes du quotidien comme Anne Marie Taigi, mère de famille battue par son mari qui avait des extases dans ses activités domestiques. Sous le fascisme, un retour à l'action sociale s'opère quand l'Union rejoint les action de l'œuvre nationale de la maternité et de l'enfance et mène « l'apostolat du berceau » (1929). C'est également en tant que mères que ces femmes portent leurs revendications auprès des gouvernements. Le maternalisme catholique se décline de part et d'autre des Alpes et conduit parfois ces associations hostiles au féminisme à rejoindre les positions des féministes laïques sur la recherche en paternité ou la protection de la maternité. Cette acception de la maternité rompt avec l'idée que parce que les femmes mettent au monde un enfant, elles feront de bonnes mères. Au cœur de l'action de ces associations se trouve le projet d'une pédagogie maternelle chrétienne destinée à apprendre aux mères biologiques à être des éducatrices. C'est l'objet d'un cinquième chapitre. Cette pédagogie s'adresse en premier lieu aux ouvrières, redoublant la relation de maternage entre la patronne et ses employées par une relation de mère spirituelle à une mère biologique. Mais les mères de la petite bourgeoisie sont elles aussi invitées à devenir des éducatrices de leurs filles et à s'investir dans la formation des futurs citoyens chrétiens. Les éducatrices catholiques doivent prendre une place centrale dans la famille et dans la société soit en devenant des institutrices catholiques, soit en se fédérant dans des associations de pères et de mères de famille pour mener une activité de lobbying au nom de la défense de leurs enfants. En France, les ligueuses prennent une part active dans la guerre scolaire du début du siècle, tandis qu'en Italie, les aristocrates de l'Union qui font pression sur les hommes politiques de leur entourage pour maintenir l'instruction religieuse dans les écoles primaires en 1912. Elles parviennent ainsi à avoir un monopole sur les demandes d'instruction religieuse formulées par les parents dans les écoles de Rome et font office d'intermédiaire entre les parents d'élèves et les autorités municipales qui accordent cet enseignement dans les écoles. Dans une troisième partie, c'est le passage à la citoyenneté politique qui est analysé. Un sixième chapitre analyse l'épisode de la Grande Guerre comme un moment à la fois de rupture avec les positions de ces associations et d'accélération de certains processus d'inclusion des femmes catholiques dans la gestion des affaires publiques. La guerre ouvre une période d'élargissement de l'action publique pour les deux associations. La professionnalisation de certaines occupations comme les infirmières s'accélère. La matrice maternaliste de l'action collective légitime la prise en charge des enfants des classes populaires, des soldats mutilés etc. L'action des associations ne vise plus seulement à attirer les âmes d'élites mais véritablement à assumer l'œuvre d'assistance que les pouvoirs publics ne peuvent fournir. À la faveur de cette crise, le rôle des congrégations exilées est reconnu en France et celui des laïques de la L.P.D.F. sanctionné positivement par les décorations nationales et religieuses que reçoivent la plupart des dirigeantes, tant en France qu'en Italie. Les jeunes femmes non mariées, les mères célibataires deviennent aussi les cibles des politiques mises en place par la Ligue, tandis qu'en Italie, il semblerait que l'élargissement de l'action sociale suscite un rappel à l'ordre quant à la collaboration avec les non catholiques. La guerre ouvre la voie d'une réconciliation avec les autorités laïques qui passe avant tout par une action locale. S'appuyant sur les notables, sur les réseaux d'œuvres religieuses préexistantes, l'U.D.C.I. acquiert rapidement un rôle important dans les Comités d'assistance civile qui gèrent bon nombre de problèmes matériels liés à la guerre. En France, l'Union sacrée se fait aussi dans certaines communes, mais la reconnaissance de l'action civile des ligueuses sera d'avantage symbolique. Ainsi, nous voyons comment le contexte national structure la façon dont sera pensée et légitimée l'action civile des associations féminines catholiques. Elle passe par une reconnaissance locale puis nationale, en Italie, où l'U.D.C.I. se voit accorder la personnalité juridique au lendemain du conflit. En revanche, là où le poids des instances locales de représentation démocratique reste dominé par les institutions nationales, il s'agit plutôt d'une reconnaissance symbolique. Le dernier chapitre de la thèse montre comment les militantes d'action catholique ont participé aux premières consultations électorales sans pour autant détenir le droit de vote et ont ensuite abandonné ces pratiques une fois celui-ci admis comme un moyen de faire changer les lois. En Italie, en revanche, le rapport à la politique plus difficile évolue après la guerre vers des positions plus ouvertes au suffrage féminin. S'esquissent ainsi les linéaments d'une politisation féminine contrainte à la fois par le contexte politique et religieux national et par les propriétés sociales des dirigeantes dont le recrutement n'est pas identique dans chacun des pays. Définissant par la pratique tout autant que par les discours l'activité politique légitime pour des femmes catholiques, ces citoyennes catholiques se positionnent d'abord contre le suffrage féminin, manifestant leur appartenance à la communauté politique et nationale par les œuvres sociales et religieuses. S'appuyant sur leur mission d'apôtres du XXe siècle, pour résoudre la question sociale « l'Évangile à la main », les militantes revendiquent un rôle d'expertise de plus en plus important dans le travail social. De la dame patronnesse aristocrate du début du siècle à la travailleuse sociale qualifiée d'origine plus modeste de l'entre-deux-guerres s'est amorcé un processus de politisation féminine et de professionnalisation. La préparation des femmes au suffrage devient alors une activité importante de la Ligue, qui organise des conférences de préparation civique, qui publie des brochures et veut inciter les femmes à adopter le suffrage familial dans un premier temps, puis individuel dans un second temps. En Italie, en 1925 le bref épisode de l'autorisation du vote pour les femmes de plus de trente ans, mères et épouses de soldats, voit l'Union intervenir pour solliciter les inscriptions sur les listes électorales. Celles-ci ne purent cependant voter jusqu'en 1946. Cette thèse contribue ainsi à repenser les catégories de citoyenneté habituellement définies en rapport avec le suffrage et à comprendre la façon dont les associations de femmes catholiques ont contribué à l'apprentissage de la vie politique durant les premières décennies du XXe siècle en France et en Italie. La citoyenneté telle que l'entendent ces associations est d'abord une citoyenneté sociale, fondée par l'expérience de la maternité spirituelle ou biologique, et vécue à travers la mise en œuvre d'institutions sociales. La citoyenneté politique qui se manifeste par le vote n'est pas considérée, dans un premier temps, comme une pratique légitime pour les femmes catholiques dans chacun des pays. Toutefois, l'intervention dans les affaires politique et la façon dont les femmes de ces associations se pensent comme des sujets politiques et interviennent en leur nom dans les affaires publiques attestent de la volonté de contourner le suffrage masculin. En France, dans un contexte de ralliement de l'Église catholique à la République et de suffrage universel, même les femmes sont invitées à participer de façon indirecte à la compétition électorale. En Italie, un modèle de politisation intransigeante domine : les catholiques hommes et femmes sont invités à se tenir à distance de la compétition électorale. Au terme de la Grande guerre, ces prises de positions se rejoignent. Dans cette évolution, la Grande Guerre a constitué un moment d'accélération plus que de rupture et a ouvert une période de réconciliation entre ces associations catholiques et les pouvoirs publics laïcs. Ce travail invite à une compréhension plus large de l'engagement féminin en intégrant ces associations de masse qu'ont été les associations catholiques. Prises entre la nécessité de se distinguer des féministes et des hommes catholiques, ces associations ont défini des cadres d'action légitimes pour des femmes conservatrices, attachées aux normes de genre inégalitaires mais soucieuses de se ménager des marges d'autonomie. Cette recherche permet de mieux saisir la complexité des rapports sociaux de sexe et de classe en adoptant des questionnements de science politique et de sociologie. Malgré leur conservatisme et leur hostilité au suffrage, ces associations ont été des lieux de socialisation politique et religieuse qui ont marqué les premières générations d'électrices tant en France qu'en Italie. Et on ne peut comprendre pourquoi le vote féminin a d'abord été un vote démocrate-chrétien sans s'intéresser à la façon dont ces milliers de femmes ont appris à « bien voter » durant les premières décennies du siècle dernier.
From July 1915 onwards, leave granted to the front fighters allowed them to spend a few days in the rear. From 6 days in 1915, these leaves increased to 7 days in 1916, then to 10 days in October 1917. Approached from a global perspective, this research seeks to link the social and cultural history of war through the methods of cultural anthropology of social facts, without neglecting the political or military dimensions. The plan followed articulates three levels of analysis, the real, the symbolic and the imaginary, using a very varied corpus of sources. The research is based in particular on the analysis of 200 directories of police station reports in Paris (known as "mains courantes"), which have made it possible to build up a database of some 6,000 pass-holders and 6,000 deserters. Analyses of the social and cultural phenomena linked to permission in the capital use the quantitative study of this abundant source, which provides information on many aspects of the lives of individuals and Parisian neighbourhoods, and is not limited to delinquency. This source thus makes it possible to place the reflection in the perspective of social changes over time. The database has also made it possible to map certain phenomena, such as prostitution, desertion or the relations of soldiers on leave with civilians, women or allied soldiers. Finally, the police reports, which are often consistent, give flesh to an individualised social micro-history.The first part retraces the military, political and administrative construction of the permissions, as well as the logistical stakes of their transport by train, which is also studied from an anthropological perspective. It uses mainly classical military and political sources, but integrates testimonies and representations. The permissions regime set up in 1915 in France was marked throughout the war by permanent improvisation, but evolved and underwent a major reform in October 1916 when the French HQG made permissions a statutory allowance of seven days granted three times a year. Although decisions on permissions were the responsibility of the High Command, citizens and politicians played an important role in successive reforms by putting pressure on the government to grant fairer and longer permissions to men. The ideological stakes of permissions are evident in committees or in debates in the Assembly, in which left-wing MPs give a speech on the rights of republican citizens and the social stakes of recreational leave, which reinforces F. Bock's conclusions on the involvement of parliamentarians in the conduct of the war. At the individual level, the combatants have become involved through demands which show that for them there is a close relationship between the rights and duties of soldiers, and that their sacrifice is not without retribution, if only symbolic. In the context of a dehumanizing industrial war, leave had a great role to play in sustaining combatant morale over the long term. The calamitous management of the permissions in 1915 and 1916 explains the place taken by the permissions in the claims of the mutinees during Spring 1917, whereas they were now more regular and distributed with equity: it is especially as a symbol of the condition of the citizen-soldier and of his rights and duties that they are brandished by some combatants, confirming the study of L.V. Smith on the Vth ID. In this respect, leave is part of the evolution of the relations between the Army, the Republic and the citizens.It should be pointed out here that the theoretical weight of discipline is constantly called into question by the transgressive practices of furloughers, which are particularly evident during train journeys: defying authority, ridiculing employees, travelling first class in disregard of regulations, or seeking to illegally extend their leave.In the long term of the war, furloughs also provided a waiting horizon for a long overdue peace, and played a decisive role in men's ability to endure the war. The cycle of anticipation, experience and recollection of leave thus feeds into family letters or conversations between soldiers, and allows individuals to develop plans, even if the leaves arouse very ambivalent feelings. The second part focuses on the experience of being on leave in the capital, where Parisians rediscover a familiar world, while uprooted and isolated combatants from invaded regions, colonies or allied countries discover a mythical city as tourists. Paris was thus the main centre for furloughs in France, and probably of all the countries at war, receiving about 100,000 men per month, for a cumulative total of about 4 million furloughs between 1915 and 1918. The study conducted is based primarily on a statistical analysis of the directories of the minutes of the Paris police stations. The combatants' stay in the capital reveals the entrenchment of the combatant identity, confirming what is known about the importance of a specific culture born of shared experience, but it also combines with the signs of a lingering civilian identity. While political or working communities have not been studied, the strength of family ties, domestic habits, work gestures or neighbourhood sociability indicate that men are resettling into a familiar daily routine, despite the upheavals caused by the war in Paris. The subject lends itself to an analysis of gender identities through the reunion of couples and the confrontation of male and female communities. Relations between men and women have remained good, mainly thanks to the women in the family, but those of the couples are more tense, due to the suspicion that hangs over the companions. Generally speaking, male-female relations are part of banal practices whose cyclical dimension is mainly reflected in the symbolism surrounding certain gestures or words. The study of leave has also shown that female emancipation is limited, as indicated by women's resistance to the sexual solicitations of those on leave. Finally, the demographic stakes of furloughs can be seen in their impact on nuptiality, but their effects are more modest on the birth rate, which they do not compensate for. The relations of the soldiers on leave with the various components of Parisian society during the war (women, foreigners, allied soldiers) testify to the great credit enjoyed by the soldiers at the rear, even if the importance of theatricalization in Parisian space led them to sometimes violent transgressions of the social order, particularly towards police officers, underlining the redefinition of moral standards while invalidating the thesis of widespread "brutalization", since these practices were part of long-term conscriptive and popular Parisian traditions.The soldiers' stay was also an opportunity to identify the social and cultural circulation between the front and the rear, which contributed to the renewal of the distended links between civilians and combatants between 1914 and 1915. The expression of a need for recognition by the soldiers is coupled with a desire to forget the war, which underlines the complexity of individual reactions to the tension of war. Soldiers on leave sought to become exhilarated and to enjoy the pleasures of Parisian life such as the cinema, café-concert and prostitution, behaviours that contrasted with the puritanical norms of wartime. Permissions take their place here in the movement for the democratisation of leisure and holidays that has been underway since the end of the 19th century and confirm the relevance of drawing a parallel between the world of work and the war from the point of view of combatant mobilization factors. This question was explored in depth through the role of furlough in the mobilization of civilians and combatants. The stay of combatants in the rear presented risks from the point of view of controlling public opinion and the movements of soldiers. However, the complexity of the political and military stakes, particularly in 1917, the conditions for carrying out surveys on the state of mind of the Parisian population, and the weight of rumours during the war, made the study of public opinion delicate. On the other hand, permissions do appear to be one of the ways of desertion during the war, even if police sources do not allow for an exhaustive study of this subject, which is still poorly documented in France. The motivations put forward by the suspects indicate the wide variety of conditions in which men became deserters and it is difficult to say what effect the fear of punishment had on their actions. Police sources also make it possible to trace the modalities of the desertion experience, as well as the social profile of late deserters. The third part is devoted to the representations of furlough and furlough-holders that it confronts with the realities described above, based on the study of the press from the rear and the "newspapers from the front", postcards, novels, plays or songs, and with an emphasis on distinguishing the effects of transmitter and medium on the images produced. The stereotype of the combatant perceptible through the images of permission thus contributes to structuring the gap between civilians and combatants in a Parisian setting that crystallizes ambivalent representations. Indeed, soldiers on leave played an important role in the evolution of the wartime system of social representations by embodying the relationship between the combatant community and the civilian community. The figure of the permissionnaire illustrates the fundamental role of ethics in the identity processes of the First World War and in the construction of a social and cultural field specific to "combatants". The logics of civilian guilt on the one hand, and the need for recognition of combatants on the other, are articulated to give substance to combatant stereotypes. In many cases, the relationship of representation is perverted when the values for which combatants are recognized at the rear differ from those to which they aspire. Numerous, highly stereotypical and enduring, civilian representations carry the myths of heroism and virility attributed to warriors. Those constructed by the combatants are more intermittent and deferred, but their persuasive force is usually greater, due to the weight of the testimony between 1914 and 1918, which is perpetuated after the war, carried by the veterans' speeches. Several systems of representation thus coexist, become contaminated and evolve over the course of the war. In all cases, there is a great contrast between combatant myths and the social practices of the furloughers, particularly in their relations with women. ; A partir de juillet 1915, des permissions accordées aux combattants du front leur permettent de passer quelques jours à l'arrière. D'une durée de 6 jours en 1915, ces congés passent à 7 jours en 1916, puis à 10 jours en octobre 1917. Abordé dans une perspective globale, ce travail cherche à relier l'histoire sociale et l'histoire culturelle de la guerre grâce aux méthodes de l'anthropologie culturelle des faits sociaux, sans négliger les dimensions politiques ou militaires. Le plan suivi articule trois niveaux d'analyse, le réel, le symbolique et l'imaginaire, en utilisant un corpus de sources très varié. Celui-ci s'appuie en particulier sur l'analyse de 200 répertoires de procès-verbaux des commissariats parisiens (connus sous le nom de "mains courantes"), qui ont permis la constitution d'une base de données d'environ 6 000 permissionnaires et 6 000 déserteurs. Les analyses des phénomènes sociaux et culturels liés à la permission dans la capitale utilisent l'étude quantitative de cette source foisonnante, qui renseigne sur de nombreux aspects de la vie des individus et des quartiers parisiens, et ne se limite pas à la délinquance. Cette source permet ainsi d'inscrire la réflexion dans la perspective du temps long des évolutions sociales. La base de données a aussi permis la cartographie de certains phénomènes, comme la prostitution, la désertion ou les relations des permissionnaires avec les civils, les femmes ou les soldats alliés. Enfin, les comptes-rendus de la police, souvent consistants, donnent chair à une micro-histoire sociale individualisée.La première partie retrace la construction militaire, politique et administrative des permissions, ainsi que les enjeux logistiques de leur transport en train, qui est aussi étudié dans une perspective anthropologique. Elle utilise principalement des sources militaires et politiques classiques, mais intègre témoignages et représentations. Le régime des permissions mis en place en 1915 est marqué pendant toute la guerre par une improvisation permanente, mais évolue et connaît une réforme majeure en octobre 1916 lorsque le GQG fait des permissions une allocation réglementaire de sept jours accordée trois fois par an. Bien que les décisions en matière de permissions relèvent du Haut Commandement, les citoyens et les politiques ont joué un rôle important dans les réformes successives en faisant pression sur le gouvernement pour accorder des permissions plus équitables et plus longues aux hommes. Les enjeux idéologiques des permissions sont évidents dans les commissions ou lors des débats à l'Assemblée, au sein desquels les députés de gauche portent un discours sur les droits des citoyens républicains et les enjeux sociaux des congés de détente, qui conforte les conclusions de F. Bock sur la participation des parlementaires à la conduite de la guerre. A l'échelle individuelle, les combattants se sont impliqués par des revendications qui témoignent qu'il y a pour eux une relation étroite entre les droits et les devoirs des soldats, et que leur sacrifice ne va pas sans rétributions, ne seraient-elles que symboliques. Dans le contexte d'une guerre industrielle déshumanisante, les permissions avaient un grand rôle à jouer pour soutenir le moral combattant dans la durée. La gestion calamiteuse des permissions en 1915 et 1916 explique la place prise par les permissions dans les revendications des révoltés du printemps 1917, alors même qu'elles étaient désormais plus régulières et distribuées avec équité : c'est surtout comme symbole de la condition du soldat-citoyen et des droits et des devoirs de celui-ci qu'elles sont brandies par certains combattants, confirmant l'étude de L.V. Smith sur la Vème DI. A ce titre, les permissions s'inscrivent dans l'évolution des relations entre l'Armée, la République et les citoyens.Il faut souligner ici que le poids théorique de la discipline est constamment remis en cause par les pratiques transgressives des permissionnaires, qui sont particulièrement manifestes pendant les trajets en train : défiant l'autorité, tournant en ridicule les employés, voyageant en première classe au mépris des règlements, ou cherchant à prolonger illégalement leur permission.Dans le long terme de la guerre, les permissions ont aussi constitué un horizon d'attente qui s'est substitué à celui d'une paix qui se faisait attendre, et ont joué un rôle décisif dans la capacité des hommes à "tenir". Le cycle de l'anticipation, de l'expérience et de la remémoration des permissions alimente ainsi les lettres familiales ou les conversations entre soldats, et permet aux individus d'élaborer des projets, même si les permissions suscitent des sentiments très ambivalents. La seconde partie s'attache à l'expérience de la permission dans la capitale, où les Parisiens retrouvent un univers familier, tandis que les combattants déracinés et isolés, originaires des régions envahies, des colonies ou des pays alliés, découvrent en touristes une ville mythique. Paris est ainsi le principal centre de permissionnaires en France, et vraisemblablement de tous les pays en guerre, accueillant environ 100 000 hommes par mois, soit un total cumulé d'environ 4 millions de permissionnaires entre 1915 et 1918. L'étude s'appuie ici principalement sur l'analyse statistique des répertoires des procès-verbaux des commissariats parisiens. Le séjour des combattants dans la capitale révèle l'enracinement de l'identité combattante, confirmant ce que l'on sait de l'importance d'une culture spécifique née d'une expérience partagée, mais celle-ci se combine aussi aux signes d'une identité civile rémanente. Si les communautés politiques ou de travail n'ont pas été étudiées, la force des liens familiaux, les habitudes domestiques, les gestes du travail ou la sociabilité de voisinage, indiquent que les hommes se réinstallent dans un quotidien familier, malgré les bouleversements occasionnés par la guerre à Paris. Le sujet se prête à une analyse des identités de genre à travers les retrouvailles des couples et la confrontation des communautés masculines et féminines. Les relations entre hommes et femmes sont restées bonnes, principalement grâce aux femmes de la famille, mais celles des couples sont plus tendues, en raison du soupçon qui pèse sur les compagnes. D'une manière générale, les relations hommes – femmes s'inscrivent dans des pratiques banales dont la dimension conjoncturelle se traduit surtout par la symbolique qui entoure certains gestes ou paroles. L'étude des permissions a aussi permis de montrer que l'émancipation féminine est limitée, comme l'indiquent les résistances des femmes aux sollicitations sexuelles des permissionnaires. Enfin, les enjeux démographiques des permissions se manifestent dans l'incidence de celles-ci sur la nuptialité, mais leurs effets sont plus modestes sur la natalité, dont elles ne permettent pas de compenser la chute. Les relations des permissionnaires avec les différentes composantes de la société parisienne du temps de guerre (femmes, étrangers, militaires alliés) témoignent du grand crédit dont bénéficient les soldats à l'arrière, même si l'importance de la théâtralisation dans l'espace parisien les conduit à des transgressions parfois violentes de l'ordre social, notamment envers les agents de police, soulignant la redéfinition des normes morales tout en infirmant la thèse d'une "brutalisation" généralisée, puisque ces pratiques s'inscrivent dans des traditions conscriptives et des traditions populaires parisiennes de long terme. Le séjour des soldats est aussi l'occasion de repérer les circulations sociales et culturelles entre le front et l'arrière, qui contribuent à renouer entre civils et combattants des liens distendus entre 1914 et 1915. L'expression d'un besoin de reconnaissance par les soldats se double d'une volonté d'oublier la guerre qui souligne la complexité des réactions individuelles à la tension de la guerre. Les permissionnaires cherchent à se griser et à profiter des plaisirs de la vie parisienne comme le cinéma, le café-concert ou la prostitution, des comportements qui contrastent avec les normes puritaines du temps de guerre. Les permissions prennent ici place dans le mouvement de démocratisation des loisirs et des vacances engagé depuis la fin du XIXème siècle et confirment la pertinence d'une mise en parallèle du monde du travail et de la guerre du point de vue des ressorts de la mobilisation combattante. Cette question a été approfondie à travers le rôle de la permission dans la mobilisation des civils et des combattants. Le séjour de combattants à l'arrière présentait des risques du point de vue du contrôle de l'opinion publique et des mouvements des soldats. La complexité des enjeux politiques et militaires, notamment en 1917, les conditions de réalisation des enquêtes sur l'état d'esprit de la population parisienne ou encore le poids des rumeurs pendant la guerre, rendent toutefois l'étude des opinions publiques délicates. En revanche, les permissions apparaissent bien comme une des voies de la désertion pendant la guerre, même si les sources policières ne permettent pas une étude exhaustive de ce sujet, encore peu documenté dans le cas français. Les motivations avancées par les suspects indiquent la grande diversité des conditions dans lesquelles les hommes deviennent déserteurs et il est difficile de se prononcer sur l'effet de la peur de la sanction sur leurs actes. Les sources policières permettent aussi de retracer les modalités de l'expérience de la désertion, ainsi que le profil social des permissionnaires en retard. La troisième partie est consacrée aux représentations de la permission et des permissionnaires qu'elle confronte aux réalités précédemment décrites en se fondant sur l'étude de la presse de l'arrière et des "journaux du front", des cartes postales, des romans, des pièces de théâtre ou des chansons et en s'attachant à distinguer les effets d'émetteur et de support sur les images produites. Le stéréotype du combattant perceptible à travers les images de la permission contribue ainsi à structurer le fossé entre civils et combattants dans un cadre parisien qui cristallise des représentations ambivalentes. En effet, les permissionnaires jouent un rôle important dans l'évolution du système de représentations sociales du temps de guerre en incarnant les relations de la communauté combattante à la communauté civile. La figure du permissionnaire illustre le rôle fondamental de l'éthique dans les processus identitaires de la Première Guerre mondiale et dans la construction d'un champ social et culturel propre aux "combattants". Les logiques de la culpabilité des civils d'une part, et du besoin reconnaissance des combattants, d'autre part, s'articulent pour donner corps aux stéréotypes combattants. Dans bien des cas, la relation de représentation est pervertie quand les valeurs pour lesquelles les combattants sont reconnus à l'arrière diffèrent de celles auxquelles ils aspirent. Nombreuses, très stéréotypées et durables, les représentations civiles drainent avec elles tout le poids des mythes de l'héroïsme et de la virilité attribués aux guerriers. Celles construites par les combattants sont davantage intermittentes et différées, mais leur force de persuasion est a priori plus grande, en raison du poids du témoignage entre 1914 et 1918, qui se perpétue après guerre, porté par les discours anciens combattants. Plusieurs systèmes de représentations coexistent donc, se contaminent et évoluent au fil de la guerre. Dans tous les cas, on relève un grand contraste entre les mythes combattants et les pratiques sociales des permissionnaires, en particulier dans leurs relations avec les femmes.
From Cybercultural studies to new Web science, Media and Communication theory engage in analyzing scientific models of the Internet that are mostly homogeneous : models built on the faith in the universal language of networked information and tending to creating norms and/or rules for network communication. There are new cultural, economical and even political institutions appearing that rely on a vehicular model that is widely accepted, although criticized.In my thesis I come back to the sources of this criticism by opening a vernacular perspective, which is a concept borrowed from socio-linguistics and reinterpreted under the light of network culture. It allows to think about the relation between values (the vulgar, the popular, the trivial) and media practices of groups manifested as Internet folklore. From the point of view of a local theory (Jacques Perriault), the vernacular perspective opens a field of analysis understood as composite (Joëlle Le Marec), that is a complex of unstable relations between discourse and matter, technologies and their uses, practices, representations and norms. Folklore, by definition formalist and traditional, transforms itself within network culture to become a media process based on appropriation and commentary, two of the most crucial characteristics of the Internet thought of as meta-medium (Philip Agre). Folklore and vernacular provide important elements to sketch a cultural theory of information and communication in terms of « triviality »' (Yves Jeanneret) – a culture defined by is mediations and transformations. This thesis, by investigating archeologically the archives of Internet's micro-history to dig out its folklore, analyzes dynamically contexts that have allowed the social information of contemporary network culture.Studying two periods of network history that are defined partly by the tools of access to the Internet (Usenet in the 80's and early 90's and the Web 1.0 in the 90's and the 2000's), my research takes a close look at how Internet folklore is invented, experiment, produced and reproduced interacting with content-management media (emailing and newsgroups, homepages, blogs). These apparatuses are seen as « architexts » (following French semiology in media interfaces), which content cannot be understood without an analysis of their system and forms (their « metaforms ») and the process of computer and cultural codes that defined their context of production.A first series of case studies dig out the roots of Internet folklore, its emergence within the first large-scale virtual community : Usenet – and in particular the alt. newsgroup hierarchy. From ASCII Art to Flame Wars and through the pantheon of Net.legends, I show how the leisure and experimental use of communication and information processing rules allow the users to confront the difficulties and dead-ends of collective regulation. The Usenet public, celebrating and participating in network folklore, is testing instruments that give power in writing and expressing opinions. These situations are named « metatexts » : they develop commentaries and folkloric theories on the complex problem of « metarules ». From an Internet micro-historical point of view, they are the basis of a sub-culture that reinvented public discourse within a network context : commenting, conversing, evaluating and filtering, all through the computer media.A second series of case studies approaches network folklore from another angle. Through and experience of participant-observation, I borrow the outlook of two generations of Internet artists on Web popular creativity. The first generation, net.art, considered as pioneer in art happening on the Web in the mid-90's, starts a process of valuing and mediating amateur creativity in the homepages. The second generation, the surfclubs, recipient to the net.art heritage in the context of Web 2.0, give a new understanding and context to network cultural practices within collective blog networks inspired from image forums, the new territories of emergence for network folklore. The eye of Net art channels the observation of a specific evolution of network vernacular : conflicts about the value and the legitimation of this cultural « popular » matter seem to resolve in the new mainstream tendencies of the social Web. New leisure figures appear, between amateur and professional network practices, inspired by the aesthetic and the informational value of Internet folklore. This issue opens up new discussion on the socio-economics of network culture.The vernacular perspective updates the conflictual relations between, technology, society and culture that have built the Internet and marked its history. Its shows that they are dialogic articulations between users' creativity and institutional norms that structure the network environment. It uncovers little known archives that reveal the voices of the actors of this cultural micro-history. it signals epistemological problems about material and methods for network culture analysis by suggesting that this should be handled from the bottom up, accompanying the emergence of media practice in the cultural economy of today's Web. ; De la perspective cyberculturelle aux nouvelles sciences du Web, les Sciences de l'Information et de la Communication étudient des modèles scientifiques d'Internet marqués par une forme d'homogénéité : celle portée par la croyance en un langage universel de l'information et tendant vers la normalisation et/ou la régulation des outils de la communication en réseau. Ainsi, les nouvelles tendances à l'institutionnalisation de la culture, de l'économie voire de la politique des réseaux reposent sur un modèle véhiculaire prégnant et généralement accepté, bien que souvent critiqué.Je propose de revenir aux sources de ces critiques en les envisageant sous la dimension du vernaculaire, notion empruntée à la socio-linguistique et réinterprétée sous l'angle de la médiation de culture informatique en réseau. Dans ce cadre, cette notion permet de penser l'articulation entre des valeurs (le vulgaire, le populaire, le trivial) et des pratiques médiatiques de groupes qui se manifestent dans un « folklore Internet ». Attachée à une théorie locale des usages techniques (J. Perriault), la perspective vernaculaire ouvre un terrain d'analyse placé sous le sceau du composite (J. Le Marec), c'est-à-dire les relations instables et complexes d'artefacts faits de discours et de matière.Le folklore, par définition formel et traditionnel, se transforme au sein de la culture de réseau pour devenir un processus de médiation fondé sur l'appropriation et le commentaire, deux des grandes caractéristiques d'Internet pensé comme méta-médium (P. Agre). Folklore et vernaculaire fournissent des éléments importants pour envisager une théorie culturelle de l'information et de la communication en termes de « trivialité » (Y. Jeanneret) – une culture définie par ses médiations et ses transformations. Cette thèse se propose, en allant faire l'archéologie des archives de la micro-histoire d'Internet pour y retrouver son folklore, d'analyser de manière dynamique les contextes qui ont permis l'information sociale de la culture de réseau contemporaine.A partir de deux périodes de l'histoire des réseaux marquées par deux réseaux privilégiés d'accès à Internet (Usenet, années 1980-1990 ; le Web, années 1990-2000), j'analyse les contextes de communication dans lesquels un folklore Internet s'invente, s'expérimente, se produit et se reproduit en interaction avec des dispositifs de médiation de contenu en réseau (messagerie, pages personnelles, blogs). Adoptant un point de vue « architextuel » (empruntant à la sémiotique des interfaces et des médiations informatisées), mes études s'intéressent tout aussi bien aux contenus qu'aux formes et métaformes ainsi qu'aux processus de codification informatiques et culturels de ces contextes.Une première série d'études de cas se penche sur les racines du folklore Internet, son émergence au sein de la première communauté virtuelle de grande ampleur, Usenet – en particulier dans la hiérarchie alt. du groupe. De l'art ASCII aux flame wars en passant par le panthéon des célébrités de Usenet, je montre comment l'usage ludique et expérimental des règles de communication et du transfert d'information sur le réseau permettent aux usagers d'affronter les difficultés et les apories de la régulation collective. Le public Usenet, dans la célébration et sa participation au folklore de réseau, teste des instruments qui lui donne un pouvoir d'écriture et d'opinion. Ces situations, je les nomme « métatextes » : des commentaires ludiques et des théories folkloriques sur la question complexe des « métarègles ». En terme de micro-histoire de l'Internet, elles sont fondamentales pour comprendre, à partir de ce qui était à l'origine une sous-culture, le développement culturel du commentaire et de la conversation, de l'évaluation et du filtrage de l'informatique sur le réseau actuel.Une deuxième série approche le folklore de réseau sous une autre forme, et dans une perspective différente. J'emprunte, dans le cadre d'une expérience d'observation-participante, le regard de deux générations d'artistes Internet portées sur la création populaire du Web. Le net.art, pionnier de l'art sur le Web dans les années 1990 (Web 1.0), valorise et médiatise la créativité amateur des pages personnelles. Les surfclubs, héritiers directs dans le cadre du web social des années 2000 (Web 2.0), recontextualisent ces pratiques au sein de réseaux de blogs et s'inspirent des forums d'images, nouveaux lieux d'émergence du folklore Web. L'oeil du Net art permet d'observer une évolution particulière du vernaculaire de réseau : les conflits de légitimation de cette matière culturelle « populaire » semblent se résoudre dans les nouvelles tendances du Web social pour donner lieu à de nouvelles figures du loisir en ligne. Apparaissent alors des professionnels qui s'inspirent de l'esthétique et des pratiques informationnelles des amateurs et les remédiatisent. Cette « résolution » est en fait l'entrée dans de nouveaux enjeux, socio-économiques cette fois, qui pour être compris devront être analysés à partir de cette généalogie historique du vernaculaire Internet.L'approche vernaculaire permet de mettre à jour les conflits techniques, sociaux et culturels ayant joué un rôle crucial dans l'histoire d'Internet : elle éclaire l'articulation dialogique entre la créativité des usagers et les normes institutionnelles qui structurent l'environnement-réseau. Elle fait découvrir des archives peu connus qui révèlent les voix des acteurs micro-historique du réseau des réseaux. Elle signale une série de problèmes épistémologiques sur les matériaux et les méthodes d'analyse de la culture d'Internet en proposant une vision d' »en bas » (« bottom up ») qui accompagne l'émergence des médiations de l'économie culturelle du Web d'aujourd'hui.
From Cybercultural studies to new Web science, Media and Communication theory engage in analyzing scientific models of the Internet that are mostly homogeneous : models built on the faith in the universal language of networked information and tending to creating norms and/or rules for network communication. There are new cultural, economical and even political institutions appearing that rely on a vehicular model that is widely accepted, although criticized.In my thesis I come back to the sources of this criticism by opening a vernacular perspective, which is a concept borrowed from socio-linguistics and reinterpreted under the light of network culture. It allows to think about the relation between values (the vulgar, the popular, the trivial) and media practices of groups manifested as Internet folklore. From the point of view of a local theory (Jacques Perriault), the vernacular perspective opens a field of analysis understood as composite (Joëlle Le Marec), that is a complex of unstable relations between discourse and matter, technologies and their uses, practices, representations and norms. Folklore, by definition formalist and traditional, transforms itself within network culture to become a media process based on appropriation and commentary, two of the most crucial characteristics of the Internet thought of as meta-medium (Philip Agre). Folklore and vernacular provide important elements to sketch a cultural theory of information and communication in terms of « triviality »' (Yves Jeanneret) – a culture defined by is mediations and transformations. This thesis, by investigating archeologically the archives of Internet's micro-history to dig out its folklore, analyzes dynamically contexts that have allowed the social information of contemporary network culture.Studying two periods of network history that are defined partly by the tools of access to the Internet (Usenet in the 80's and early 90's and the Web 1.0 in the 90's and the 2000's), my research takes a close look at how Internet folklore is invented, experiment, produced and reproduced interacting with content-management media (emailing and newsgroups, homepages, blogs). These apparatuses are seen as « architexts » (following French semiology in media interfaces), which content cannot be understood without an analysis of their system and forms (their « metaforms ») and the process of computer and cultural codes that defined their context of production.A first series of case studies dig out the roots of Internet folklore, its emergence within the first large-scale virtual community : Usenet – and in particular the alt. newsgroup hierarchy. From ASCII Art to Flame Wars and through the pantheon of Net.legends, I show how the leisure and experimental use of communication and information processing rules allow the users to confront the difficulties and dead-ends of collective regulation. The Usenet public, celebrating and participating in network folklore, is testing instruments that give power in writing and expressing opinions. These situations are named « metatexts » : they develop commentaries and folkloric theories on the complex problem of « metarules ». From an Internet micro-historical point of view, they are the basis of a sub-culture that reinvented public discourse within a network context : commenting, conversing, evaluating and filtering, all through the computer media.A second series of case studies approaches network folklore from another angle. Through and experience of participant-observation, I borrow the outlook of two generations of Internet artists on Web popular creativity. The first generation, net.art, considered as pioneer in art happening on the Web in the mid-90's, starts a process of valuing and mediating amateur creativity in the homepages. The second generation, the surfclubs, recipient to the net.art heritage in the context of Web 2.0, give a new understanding and context to network cultural practices within collective blog networks inspired from image forums, the new territories of emergence for network folklore. The eye of Net art channels the observation of a specific evolution of network vernacular : conflicts about the value and the legitimation of this cultural « popular » matter seem to resolve in the new mainstream tendencies of the social Web. New leisure figures appear, between amateur and professional network practices, inspired by the aesthetic and the informational value of Internet folklore. This issue opens up new discussion on the socio-economics of network culture.The vernacular perspective updates the conflictual relations between, technology, society and culture that have built the Internet and marked its history. Its shows that they are dialogic articulations between users' creativity and institutional norms that structure the network environment. It uncovers little known archives that reveal the voices of the actors of this cultural micro-history. it signals epistemological problems about material and methods for network culture analysis by suggesting that this should be handled from the bottom up, accompanying the emergence of media practice in the cultural economy of today's Web. ; De la perspective cyberculturelle aux nouvelles sciences du Web, les Sciences de l'Information et de la Communication étudient des modèles scientifiques d'Internet marqués par une forme d'homogénéité : celle portée par la croyance en un langage universel de l'information et tendant vers la normalisation et/ou la régulation des outils de la communication en réseau. Ainsi, les nouvelles tendances à l'institutionnalisation de la culture, de l'économie voire de la politique des réseaux reposent sur un modèle véhiculaire prégnant et généralement accepté, bien que souvent critiqué.Je propose de revenir aux sources de ces critiques en les envisageant sous la dimension du vernaculaire, notion empruntée à la socio-linguistique et réinterprétée sous l'angle de la médiation de culture informatique en réseau. Dans ce cadre, cette notion permet de penser l'articulation entre des valeurs (le vulgaire, le populaire, le trivial) et des pratiques médiatiques de groupes qui se manifestent dans un « folklore Internet ». Attachée à une théorie locale des usages techniques (J. Perriault), la perspective vernaculaire ouvre un terrain d'analyse placé sous le sceau du composite (J. Le Marec), c'est-à-dire les relations instables et complexes d'artefacts faits de discours et de matière.Le folklore, par définition formel et traditionnel, se transforme au sein de la culture de réseau pour devenir un processus de médiation fondé sur l'appropriation et le commentaire, deux des grandes caractéristiques d'Internet pensé comme méta-médium (P. Agre). Folklore et vernaculaire fournissent des éléments importants pour envisager une théorie culturelle de l'information et de la communication en termes de « trivialité » (Y. Jeanneret) – une culture définie par ses médiations et ses transformations. Cette thèse se propose, en allant faire l'archéologie des archives de la micro-histoire d'Internet pour y retrouver son folklore, d'analyser de manière dynamique les contextes qui ont permis l'information sociale de la culture de réseau contemporaine.A partir de deux périodes de l'histoire des réseaux marquées par deux réseaux privilégiés d'accès à Internet (Usenet, années 1980-1990 ; le Web, années 1990-2000), j'analyse les contextes de communication dans lesquels un folklore Internet s'invente, s'expérimente, se produit et se reproduit en interaction avec des dispositifs de médiation de contenu en réseau (messagerie, pages personnelles, blogs). Adoptant un point de vue « architextuel » (empruntant à la sémiotique des interfaces et des médiations informatisées), mes études s'intéressent tout aussi bien aux contenus qu'aux formes et métaformes ainsi qu'aux processus de codification informatiques et culturels de ces contextes.Une première série d'études de cas se penche sur les racines du folklore Internet, son émergence au sein de la première communauté virtuelle de grande ampleur, Usenet – en particulier dans la hiérarchie alt. du groupe. De l'art ASCII aux flame wars en passant par le panthéon des célébrités de Usenet, je montre comment l'usage ludique et expérimental des règles de communication et du transfert d'information sur le réseau permettent aux usagers d'affronter les difficultés et les apories de la régulation collective. Le public Usenet, dans la célébration et sa participation au folklore de réseau, teste des instruments qui lui donne un pouvoir d'écriture et d'opinion. Ces situations, je les nomme « métatextes » : des commentaires ludiques et des théories folkloriques sur la question complexe des « métarègles ». En terme de micro-histoire de l'Internet, elles sont fondamentales pour comprendre, à partir de ce qui était à l'origine une sous-culture, le développement culturel du commentaire et de la conversation, de l'évaluation et du filtrage de l'informatique sur le réseau actuel.Une deuxième série approche le folklore de réseau sous une autre forme, et dans une perspective différente. J'emprunte, dans le cadre d'une expérience d'observation-participante, le regard de deux générations d'artistes Internet portées sur la création populaire du Web. Le net.art, pionnier de l'art sur le Web dans les années 1990 (Web 1.0), valorise et médiatise la créativité amateur des pages personnelles. Les surfclubs, héritiers directs dans le cadre du web social des années 2000 (Web 2.0), recontextualisent ces pratiques au sein de réseaux de blogs et s'inspirent des forums d'images, nouveaux lieux d'émergence du folklore Web. L'oeil du Net art permet d'observer une évolution particulière du vernaculaire de réseau : les conflits de légitimation de cette matière culturelle « populaire » semblent se résoudre dans les nouvelles tendances du Web social pour donner lieu à de nouvelles figures du loisir en ligne. Apparaissent alors des professionnels qui s'inspirent de l'esthétique et des pratiques informationnelles des amateurs et les remédiatisent. Cette « résolution » est en fait l'entrée dans de nouveaux enjeux, socio-économiques cette fois, qui pour être compris devront être analysés à partir de cette généalogie historique du vernaculaire Internet.L'approche vernaculaire permet de mettre à jour les conflits techniques, sociaux et culturels ayant joué un rôle crucial dans l'histoire d'Internet : elle éclaire l'articulation dialogique entre la créativité des usagers et les normes institutionnelles qui structurent l'environnement-réseau. Elle fait découvrir des archives peu connus qui révèlent les voix des acteurs micro-historique du réseau des réseaux. Elle signale une série de problèmes épistémologiques sur les matériaux et les méthodes d'analyse de la culture d'Internet en proposant une vision d' »en bas » (« bottom up ») qui accompagne l'émergence des médiations de l'économie culturelle du Web d'aujourd'hui.
Since Japan's pop culture worldwide rising up at the beginning of the 2000s, the number of university students wishing to study it steadily grown, and so go the number of papers on the matter. Nonetheless, research itself in the West has, by all accounts, progressed very little if at all since then, as papers' quality in Japan and in the West varies to an unbelievable extent. Thus, only specialized researched held in Japanese can take those topics on a higher level as it has stood until then.While research on the field reached a stalemate in the West, research regarding "Otaku culture" (オタク文化) in Japan did move fairly further in spite of steady popular opinion. This paper intents to look up at the field's latest papers and essays, and discusses how it evolved discursively and culturally within the Japanese society since forty years, not forgetting the latest 20 years which are often set aside regarding most papers on this subject.With regard to this basis, it has been discussed here the particular case of "yuri" genre within the said "Otaku-culture", a genre which could be mostly described as being a kind of story that tells tight relationship (or perhaps even love relationship) between two female characters in comics, cartoons and novels. It has often be confused with a Japanese counterpart to a LGBT-style lesbian narrative within popular culture, which happens not to be the case in most occasions. One could speak on this matter of an "apparent similarity" on the field of discourse, happening because of a lack of cultural understanding on the raison d'être of the genre within Japanese culture and how it is held and understood since its unveiling in the 90s, and further on the 2000s. I especially wish to point out the fact that emergence of the yuri genre in the 90s and take off of the Otaku culture since the 80s are inseparable incidents, and that yuri itself cannot be explained without discussing Otaku culture, the latter being in fact the condition of possibility for its existence. As many papers in the West regarding yuri and BL (its male counterpart) has been focused on studying them within the discourse field of gender studies, I take account that it results of discursive inducted misguidance because of apparent similarity, while, in fact, one must study the yuri genre not as an isolated genre, but as an extension of the Otaku culture, which can be understand only regarding its story and internal system of values, as the public happen to be mainly the same between products associated to the "Otaku culture" and consumers of the Yuri genre.Regarding this, the paper discusses in its first juncture the Japanese discourse regarding "Otaku culture", its codes and its emergence in the Japanese society. It sticks as much as possible to the Japanese discourse on the subject, and holds up to most of the recognized Japanese writers in this field. It also uses Pierre Bourdieu's idea of "(social) field [champ]" to explain the Otaku culture, and enacts it as a cultural field just like there is a "literature field" . It also criticizes Adorno beliefs regarding mass culture, and discusses that Otaku culture happens to be rather horizontal than vertical in its structure, with massive participation of consumers in the construction process. I happen to discuss also the "Cool Japan" diplomacy of Japan's government, and how Otaku culture understood as subcultural process and Otaku culture understood as political inducted means must be distinguished. I In this regard refer to Miyadai Shinji's account of Otakus (as social phenomenon and specific population within the Japanese society) being discursively "orientalized" in most papers, in the West but in Japan as well, which he calls "Otaku orientalism".The second half of the paper discusses yuri genre as it emerges within the Otaku culture, as well as the Japanese discourse over it. I also discuss the BL genre which happens to be often put in parallel to the yuri genre, and demonstrate that superficial similarities set aside, both public and the genre's narrative happen to be strongly dissimilar. I then discuss the recent evolution of the yuri genre, its extension inside and outside the Otaku cluster, and prospects on its future.I hope thus that, not only regarding studies on the Yuri genre, but also regarding studies on the "Otaku culture" and its field, this paper could be considered as substantial part of the progress on research in the West regarding those topics, especially for people who cannot read Japanese but would nonetheless need to read specialized papers on this matter. As Otaku culture knows limited extension in the West, one must remember that its spread within eastern Asia is important, influencing other Asian countries, and then influencing Japan back – and inasmuch, such a topic cannot be overlooked. ; Depuis l'essor de la pop-culture japonaise, qui connut un retentissement mondial à l'orée des années 2000, le nombre d'étudiant s'intéressant à cette question semble avoir proportionnellement augmenté. Pourtant, la recherche elle-même n'a que peu avancée, car le nombre de ces étudiants continuant en recherche est peu nombreux, et car la documentation trouvable hors du Japon est d'une rare inégalité en terme de qualité.Pourtant au Japon même, ce que certains nomment maintenant la « culture Otaku » (オタク文化) commence à être prise au sérieux par certains essayistes et chercheurs, même si l'opinion publique n'a pas beaucoup changé. Considérant qu'il s'agit de l'ouverture d'un champ d'étude propre à la société japonaise, les études vues de l'étranger concernant le Japon ne sauraient demeurer étrangères à ces aurores.Il a été question dans le mémoire du genre « yuri », qualifiant l'usage dans les récits d'amours homosexuels féminins, sujet qui a déjà été souvent étudié ensemble avec son équivalent de l'homosexualité masculine (« BL »). Pourtant, nous a intéressé ici le fait qu'il ait toujours été abordé dans la documentation occidentale du point de vue de l'étude de genre ou de l'étude de l'orientation sexuelle, non du point de vue de son « champ » culturel d'apparition qui en est sa condition de possibilité, c'est-à-dire la « culture Otaku », et pourquoi il s'y intègre de façon logique et inséparable.La première partie du mémoire parle donc de la « culture Otaku » dans un sens généraliste, et espère représenter une forme de résumé non-exhaustif de l'état de l'art du point de vue japonais, en y intégrant les dernières innovations de la recherche de la décennie 2010 et les évolutions récentes de la société japonaise. Il mobilise les auteurs les plus importants de la critique de cette culture au Japon. En étendant des recherches que l'auteur a mené depuis plusieurs années, la notion bourdieusienne de « champ » est utilisée pour expliquer de façon structurelle la dynamique de la « culture Otaku », et pourquoi le mot de « culture » lui est associé. Il présente aussi une critique du schéma adornien de la culture populaire de masse (nécessairement « verticale ») dans le cas de la culture Otaku, et lui préfère une étude sociologique en partant de Tarde et de la théorie de l'opinion. Il s'agit d'étudier la spécificité culturelle japonaise à ce sujet sans recourir à l'essentialisme, ce que nous avons nommé « l'orientalisme sur les Otakus » (Miyadai Shinji). L'usage depuis quelques années de la pop-culture japonaise à des fins de propagande (« Cool japan ») par le gouvernement japonais fut également examiné. La seconde partie aborde le discours japonais sur l'apparition et l'histoire du « yuri », et l'image qui prédomine à ce sujet. Nous examinons la comparaison souvent faite avec le BL, et pensons prouver que les deux sont parfaitement dissemblables en dehors d'une analogie superficielle.La dernière partie enfin examine l'articulation philosophique et sociale du « yuri » comme part intégrante de la « culture Otaku » japonaise avec ses participants, ceux que j'ai appelés les « consommateur-producteurs », inséparables dans l'évolution qui nous mène à l'état actuel de l'industrie culturelle japonaise. Il examine également les grandes tendances que l'on peut voir tant dans le genre que dans la « culture Otaku » elle-même au cours des décennies 2010, et ce que l'on peut présupposer de l'avenir à ce sujet.Par ce travail, j'espère non seulement désenclaver les études sur le « yuri » par une approche différente de celles ayant prévalu jusqu'alors, mais aussi, en donnant une légitimité scientifique aux études sur la « culture Otaku » que j'ai acquise sous la direction de mes enseignants à l'université de Meiji, de montrer que nous avons affaire à un objet social et culturel proprement japonais qui s'étend aujourd'hui sur d'autres pays d'Asie, lesquels influent en retour le Japon, ce qui exige d'être examiné avec sérieux. ; 2000年代以来、いわゆる「オタク文化」は人気が高まるに連れて、世界中のポップカルチャーに多大なる影響を与えたとされている。かつてはそれを研究すること自体がタブーだった反面、年月を経て現在はポップカルチャーを研究したいという学生の声が益々聞かれることになった。その希望にうまく応えることができないのは、日本の大学であれ欧米の大学であれ同じ状況だと言えるだろう。しかし筆者は日本語の知識が欠けている欧米のほうがよりいっそう研究が停滞しているのではないかという懸念を抱いている。斯くして、日本の中に現れる様々な研究者や評論家、或いは作家の発言を用いて、日本の最先端研究をコーパスとする論文が必要とされているのではないかと、現在考えられる。本論文は確かにその過程の一端として書かれていた面がある。だがそれに留まらず、更に仮説を立てて、新しい視点から「百合」というジャンルの歴史を読む試みとしても執筆された。「百合」とは、すでに古典的と言える熊田一雄の主張よれば、「非レズビアンの立場から書かれた非ポルノの女性同性愛(もしくはそれに近いもの)のストーリー」だとされている。そのせいか、日本と欧米を問わず「同性愛」という点から注目を集めた百合ジャンルは、研究面では概ねジェンダー・スタディーズの視点から研究されており、オタク系文化と切り離された自律的な存在として解釈されていた傾向があるのではないだろうか。それに反して本論文は、百合ジャンルはオタク系文化の一環として研究せざるを得ないと主張しており、両方は表裏一体だという立場から論じている。特に00年代と10年代には、百合ジャンルは裾野を広げてより知られており、オタク系の作品によく現れて消費されているように見える。受容者はほぼ一定と考えられる以上、百合ジャンルについての言説をオタク系文化の視点から検証する必要があるのではないかと考えられる。それを補完するべく、本論文はまずオタク系文化の由来と今までの歴史と通説について論じている。ヒューリスティクスの観点では、ピエール・ブルデューの「界」(Champ)という概念を活用して如何にしていわゆる「オタク系の文化」が文学界と同じく「界」として理解できるのかを検討する。そして、その界に見られる活動と受容者の関与関係が取り上げられる。その一部は「先端研究」とは言えないが、基本知識から百合ジャンルとオタク系文化の繋がりを理解するために必要とされている。そして後半では、如何にして百合ジャンルが歴史的に、そして言説として成立してきたのかを問いただし、オタク系文化との不可欠な繋がりについて論じている。その一環として、BLとの比較を取り上げることにより、BLと百合が似て非なるものであるということも明らかにされている。10年代も忘れずに、ジャンルの進化とあり得る未来についても語れられている。この論文によって、筆者は百合ジャンルだけではなく、ポップカルチャー研究に対して質的な貢献が果たされたものと考える。また、欧米にはオタク系文化の影響はやはり僅かだと見做すべきであるとはいえ、東アジアには影響力は強く、そしてその人気が現在の日本の産業界にも影響を及ぼしている。それを鑑みると、いまやこのような研究には現実的な価値があるとするべきである。
Since Japan's pop culture worldwide rising up at the beginning of the 2000s, the number of university students wishing to study it steadily grown, and so go the number of papers on the matter. Nonetheless, research itself in the West has, by all accounts, progressed very little if at all since then, as papers' quality in Japan and in the West varies to an unbelievable extent. Thus, only specialized researched held in Japanese can take those topics on a higher level as it has stood until then.While research on the field reached a stalemate in the West, research regarding "Otaku culture" (オタク文化) in Japan did move fairly further in spite of steady popular opinion. This paper intents to look up at the field's latest papers and essays, and discusses how it evolved discursively and culturally within the Japanese society since forty years, not forgetting the latest 20 years which are often set aside regarding most papers on this subject.With regard to this basis, it has been discussed here the particular case of "yuri" genre within the said "Otaku-culture", a genre which could be mostly described as being a kind of story that tells tight relationship (or perhaps even love relationship) between two female characters in comics, cartoons and novels. It has often be confused with a Japanese counterpart to a LGBT-style lesbian narrative within popular culture, which happens not to be the case in most occasions. One could speak on this matter of an "apparent similarity" on the field of discourse, happening because of a lack of cultural understanding on the raison d'être of the genre within Japanese culture and how it is held and understood since its unveiling in the 90s, and further on the 2000s. I especially wish to point out the fact that emergence of the yuri genre in the 90s and take off of the Otaku culture since the 80s are inseparable incidents, and that yuri itself cannot be explained without discussing Otaku culture, the latter being in fact the condition of possibility for its existence. As many papers in the West regarding yuri and BL (its male counterpart) has been focused on studying them within the discourse field of gender studies, I take account that it results of discursive inducted misguidance because of apparent similarity, while, in fact, one must study the yuri genre not as an isolated genre, but as an extension of the Otaku culture, which can be understand only regarding its story and internal system of values, as the public happen to be mainly the same between products associated to the "Otaku culture" and consumers of the Yuri genre.Regarding this, the paper discusses in its first juncture the Japanese discourse regarding "Otaku culture", its codes and its emergence in the Japanese society. It sticks as much as possible to the Japanese discourse on the subject, and holds up to most of the recognized Japanese writers in this field. It also uses Pierre Bourdieu's idea of "(social) field [champ]" to explain the Otaku culture, and enacts it as a cultural field just like there is a "literature field" . It also criticizes Adorno beliefs regarding mass culture, and discusses that Otaku culture happens to be rather horizontal than vertical in its structure, with massive participation of consumers in the construction process. I happen to discuss also the "Cool Japan" diplomacy of Japan's government, and how Otaku culture understood as subcultural process and Otaku culture understood as political inducted means must be distinguished. I In this regard refer to Miyadai Shinji's account of Otakus (as social phenomenon and specific population within the Japanese society) being discursively "orientalized" in most papers, in the West but in Japan as well, which he calls "Otaku orientalism".The second half of the paper discusses yuri genre as it emerges within the Otaku culture, as well as the Japanese discourse over it. I also discuss the BL genre which happens to be often put in parallel to the yuri genre, and demonstrate that superficial similarities set aside, both public and the genre's narrative happen to be strongly dissimilar. I then discuss the recent evolution of the yuri genre, its extension inside and outside the Otaku cluster, and prospects on its future.I hope thus that, not only regarding studies on the Yuri genre, but also regarding studies on the "Otaku culture" and its field, this paper could be considered as substantial part of the progress on research in the West regarding those topics, especially for people who cannot read Japanese but would nonetheless need to read specialized papers on this matter. As Otaku culture knows limited extension in the West, one must remember that its spread within eastern Asia is important, influencing other Asian countries, and then influencing Japan back – and inasmuch, such a topic cannot be overlooked. ; Depuis l'essor de la pop-culture japonaise, qui connut un retentissement mondial à l'orée des années 2000, le nombre d'étudiant s'intéressant à cette question semble avoir proportionnellement augmenté. Pourtant, la recherche elle-même n'a que peu avancée, car le nombre de ces étudiants continuant en recherche est peu nombreux, et car la documentation trouvable hors du Japon est d'une rare inégalité en terme de qualité.Pourtant au Japon même, ce que certains nomment maintenant la « culture Otaku » (オタク文化) commence à être prise au sérieux par certains essayistes et chercheurs, même si l'opinion publique n'a pas beaucoup changé. Considérant qu'il s'agit de l'ouverture d'un champ d'étude propre à la société japonaise, les études vues de l'étranger concernant le Japon ne sauraient demeurer étrangères à ces aurores.Il a été question dans le mémoire du genre « yuri », qualifiant l'usage dans les récits d'amours homosexuels féminins, sujet qui a déjà été souvent étudié ensemble avec son équivalent de l'homosexualité masculine (« BL »). Pourtant, nous a intéressé ici le fait qu'il ait toujours été abordé dans la documentation occidentale du point de vue de l'étude de genre ou de l'étude de l'orientation sexuelle, non du point de vue de son « champ » culturel d'apparition qui en est sa condition de possibilité, c'est-à-dire la « culture Otaku », et pourquoi il s'y intègre de façon logique et inséparable.La première partie du mémoire parle donc de la « culture Otaku » dans un sens généraliste, et espère représenter une forme de résumé non-exhaustif de l'état de l'art du point de vue japonais, en y intégrant les dernières innovations de la recherche de la décennie 2010 et les évolutions récentes de la société japonaise. Il mobilise les auteurs les plus importants de la critique de cette culture au Japon. En étendant des recherches que l'auteur a mené depuis plusieurs années, la notion bourdieusienne de « champ » est utilisée pour expliquer de façon structurelle la dynamique de la « culture Otaku », et pourquoi le mot de « culture » lui est associé. Il présente aussi une critique du schéma adornien de la culture populaire de masse (nécessairement « verticale ») dans le cas de la culture Otaku, et lui préfère une étude sociologique en partant de Tarde et de la théorie de l'opinion. Il s'agit d'étudier la spécificité culturelle japonaise à ce sujet sans recourir à l'essentialisme, ce que nous avons nommé « l'orientalisme sur les Otakus » (Miyadai Shinji). L'usage depuis quelques années de la pop-culture japonaise à des fins de propagande (« Cool japan ») par le gouvernement japonais fut également examiné. La seconde partie aborde le discours japonais sur l'apparition et l'histoire du « yuri », et l'image qui prédomine à ce sujet. Nous examinons la comparaison souvent faite avec le BL, et pensons prouver que les deux sont parfaitement dissemblables en dehors d'une analogie superficielle.La dernière partie enfin examine l'articulation philosophique et sociale du « yuri » comme part intégrante de la « culture Otaku » japonaise avec ses participants, ceux que j'ai appelés les « consommateur-producteurs », inséparables dans l'évolution qui nous mène à l'état actuel de l'industrie culturelle japonaise. Il examine également les grandes tendances que l'on peut voir tant dans le genre que dans la « culture Otaku » elle-même au cours des décennies 2010, et ce que l'on peut présupposer de l'avenir à ce sujet.Par ce travail, j'espère non seulement désenclaver les études sur le « yuri » par une approche différente de celles ayant prévalu jusqu'alors, mais aussi, en donnant une légitimité scientifique aux études sur la « culture Otaku » que j'ai acquise sous la direction de mes enseignants à l'université de Meiji, de montrer que nous avons affaire à un objet social et culturel proprement japonais qui s'étend aujourd'hui sur d'autres pays d'Asie, lesquels influent en retour le Japon, ce qui exige d'être examiné avec sérieux. ; 2000年代以来、いわゆる「オタク文化」は人気が高まるに連れて、世界中のポップカルチャーに多大なる影響を与えたとされている。かつてはそれを研究すること自体がタブーだった反面、年月を経て現在はポップカルチャーを研究したいという学生の声が益々聞かれることになった。その希望にうまく応えることができないのは、日本の大学であれ欧米の大学であれ同じ状況だと言えるだろう。しかし筆者は日本語の知識が欠けている欧米のほうがよりいっそう研究が停滞しているのではないかという懸念を抱いている。斯くして、日本の中に現れる様々な研究者や評論家、或いは作家の発言を用いて、日本の最先端研究をコーパスとする論文が必要とされているのではないかと、現在考えられる。本論文は確かにその過程の一端として書かれていた面がある。だがそれに留まらず、更に仮説を立てて、新しい視点から「百合」というジャンルの歴史を読む試みとしても執筆された。「百合」とは、すでに古典的と言える熊田一雄の主張よれば、「非レズビアンの立場から書かれた非ポルノの女性同性愛(もしくはそれに近いもの)のストーリー」だとされている。そのせいか、日本と欧米を問わず「同性愛」という点から注目を集めた百合ジャンルは、研究面では概ねジェンダー・スタディーズの視点から研究されており、オタク系文化と切り離された自律的な存在として解釈されていた傾向があるのではないだろうか。それに反して本論文は、百合ジャンルはオタク系文化の一環として研究せざるを得ないと主張しており、両方は表裏一体だという立場から論じている。特に00年代と10年代には、百合ジャンルは裾野を広げてより知られており、オタク系の作品によく現れて消費されているように見える。受容者はほぼ一定と考えられる以上、百合ジャンルについての言説をオタク系文化の視点から検証する必要があるのではないかと考えられる。それを補完するべく、本論文はまずオタク系文化の由来と今までの歴史と通説について論じている。ヒューリスティクスの観点では、ピエール・ブルデューの「界」(Champ)という概念を活用して如何にしていわゆる「オタク系の文化」が文学界と同じく「界」として理解できるのかを検討する。そして、その界に見られる活動と受容者の関与関係が取り上げられる。その一部は「先端研究」とは言えないが、基本知識から百合ジャンルとオタク系文化の繋がりを理解するために必要とされている。そして後半では、如何にして百合ジャンルが歴史的に、そして言説として成立してきたのかを問いただし、オタク系文化との不可欠な繋がりについて論じている。その一環として、BLとの比較を取り上げることにより、BLと百合が似て非なるものであるということも明らかにされている。10年代も忘れずに、ジャンルの進化とあり得る未来についても語れられている。この論文によって、筆者は百合ジャンルだけではなく、ポップカルチャー研究に対して質的な貢献が果たされたものと考える。また、欧米にはオタク系文化の影響はやはり僅かだと見做すべきであるとはいえ、東アジアには影響力は強く、そしてその人気が現在の日本の産業界にも影響を及ぼしている。それを鑑みると、いまやこのような研究には現実的な価値があるとするべきである。