La faveur de l'opinion publique britannique pour une sorte de Welfare State, attestée par les sondages Gallup des années 1940, a poussé les conservateurs à accepter, pour l'essentiel, les mesures travaillistes de l'après-guerre. Les attentes de l'opinion ont été satisfaites en matière d'emploi, d'aide sociale et surtout de santé, beaucoup moins en matière de logement. Le Welfare State, en revanche, marque un certain retard sur l'opinion s'agissant de la condition féminine et de la famille.
Dix ans après la mise en place du Welfare State par le gouvernement travailliste de l'après-guerre, les observateurs qualifient volontiers de «société d'abondance» la Grande-Bretagne des années cinquante. Des voix discordantes s'élèvent pourtant, dans des revues qui deviennent rapidement la voix d'un mouvement plus large, la «nouvelle gauche». Les inégalités et la pauvreté n'ont pas disparu, et le Welfare State ne peut pas être considéré comme une étape décisive vers une transformation socialiste de la société: c'est ce que la «nouvelle gauche» cherche à démontrer en examinant les réalisations du Welfare State dans les domaines du logement, de l'éducation, de la santé et de la lutte contre la pauvreté, et dans le financement même de ces mesures. Au mieux, le Welfare State ne peut qu'être la manifestation d'un capitalisme amélioré.
In: Lien social et politiques: revue internationale et interdisciplinaire de sciences humaines consacrée aux thèmes du lien social, de la sociabilité, des problèmes sociaux et des politiques publiques, Heft 36, S. 151
La presse britannique, qui a soutenu sans réserve l'effort national au cours des années de guerre et a pris une part active à la campagne pour les élections de 1945, joue, au lendemain de la guerre, un rôle essentiel dans l'évolution des mentalités. C'est elle qui structure très largement les perceptions du public pendant la période de reconstruction. Au moment où le gouvernement Attlee jette les bases du système d'assurance national et tente de résoudre le problème du logement et de remédier à la pénurie alimentaire, on relève dans la presse nationale trois attitudes nettement différenciées. Le Daily Mirror voit dans les différentes mesures décidées par le gouvernement travailliste les voies d'un renouvellement des rapports sociaux, auquel la population doit être associée de façon concrète dans sa vie quotidienne. A l'inverse, le Daily Telegraph donne à contrecœur son aval au programme d'action sociale tout en refusant d'en attribuer la paternité au seul gouvernement socialiste qui, au nom de l'idéologie, risque d'en pervertir l'application. Quant au News Chronicle, organe libéral, il apporte à l'expérience un soutien raisonné. Le Welfare State est ainsi perçu par la presse nationale, tantôt comme un système global cohérent, tantôt comme un ensemble de mesures isolées, parfois légitimes, mais a priori suspectes puisqu'elles sont le produit d'une idéologie jugée pernicieuse. The British press, which unstintingly supported the national war effort and took an active part in the campaign for the 1945 general elections, played an essential role in shaping the public's perceptions in the reconstruction period. While the Attlee government was setting up the bases of the National Insurance Scheme and trying to solve both the housing and food shortage problems, three distinctly different positions emerged in the national press. The Daily Mirror saw in the Labour government's measures ways for a renewal of social relations to which the population should be associated, daily and concretely. The Daily Telegraph gave half-hearted support to the social programme but refused to credit the socialist government alone for it, for fear that its socialist ideology would pervert its implementation. The Liberal News Chronicle provided a balanced support. The Welfare State was perceived by the national press either as a consistent global system or as a package of isolated, often legitimate, measures, but viewed by their very nature with suspicion because they were the product of an ideology judged harmful.
Le reaganisme a modifié le système politico-administratif américain. Il se traduit en effet par la mise en place d'un nouveau système d'intégration des politiques publiques rompant avec le modèle hérité du Welfare State. Les réformes (déréglementation, renouveau du management, nouveau fédéralisme) ont toutes porté atteinte aux mécanismes politiques des « triangles de fer ». À la nouvelle donne économique semble donc correspondre une nouvelle politique institutionnelle. Par ailleurs, le renforcement de la « présidence administrative » a permis de simplifier l'agenda et de concentrer les pouvoirs de l'exécutif. Cette stratégie s'est cependant heurtée à la crise profonde de la fonction publique. Au-delà des restrictions budgétaires, le reaganisme consacre en effet un changement profond dans la régulation des politiques publiques. S'appuyant sur une évolution sociale du long terme, il a accéléré la substitution de la régulation juridique par une régulation managériale.
Le reaganisme a modifié le système politico-administratif américain. Il se traduit en effet par la mise en place d'un nouveau système d'intégration des politiques publiques rompant avec le modèle hérité du Welfare State. Les réformes (déréglementation, renouveau du management, nouveau fédéralisme) ont toutes porté atteinte aux mécanismes politiques des « triangles de fer ». À la nouvelle donne économique semble donc correspondre une nouvelle politique institutionnelle. Par ailleurs, le renforcement de la « présidence administrative » a permis de simplifier l'agenda et de concentrer les pouvoirs de l'exécutif. Cette stratégie s'est cependant heurtée à la crise profonde de la fonction publique. Au-delà des restrictions budgétaires, le reaganisme consacre en effet un changement profond dans la régulation des politiques publiques. S'appuyant sur une évolution sociale du long terme, il a accéléré la substitution de la régulation juridique par une régulation managériale.
La fin du Welfare State aux États-Unis : le reaganisme et l'appareil d'État. Luc Rouban. Le reaganisme a modifié le système politico-administratif américain. Il se traduit en effet par la mise en place d'un nouveau système d'intégration des politiques publiques rompant avec le modèle hérité du Welfare State. Les réformes (déréglementation, renouveau du management, nouveau fédéralisme) ont toutes porté atteinte aux mécanismes politiques des « triangles de fer ». À la nouvelle donne économique semble donc correspondre une nouvelle politique institutionnelle. Par ailleurs, le renforcement de la « présidence administrative » a permis de simplifier l'agenda et de concentrer les pouvoirs de l'exécutif. Cette stratégie s'est cependant heurtée à la crise profonde de la fonction publique. Au-delà des restrictions budgétaires, le reaganisme consacre en effet un changement profond dans la régulation des politiques publiques. S'appuyant sur une évolution sociale du long terme, il a accéléré la substitution de la régulation juridique par une régulation managériale.
Since 2008, the European Union, and especially the Eurozone, is hit by a deep economic crisis that translates into rising unemployment, rising poverty rates, and rising inequalities. Even if some countries, like Italy, Greece, Portugal,and Spain, face more serious social challenges than others, similar trends occur almost everywhere. However, we should remember that even before the crisis the social situation was deteriorating in many European countries, despite the factthat an "open method of coordination" (OMC) on social inclusion had been launched by the European Commission in 2000.Of course, one could hardly deny the fact that the crisis actually amplifies these social problems. In this paper, I will nevertheless argue that it would be too simplistic to have an exclusive focus on the current economic downturn. Indeed, in order to think about new welfare strategies, we need to look at what has failed in the policies that have been designed so far. When they do so, an increasing number of researchers now conclude that some of the social policies that were implemented during the 2000s, i.e. during the first decade of the OMC on social inclusion, had a very limited impact – or even a negative impact – on social justice across Europe. My modest aim is to look at some of these policies, first at a general level (section 1), and second at a more specific level, through some illustrative examples in one member-state, Belgium (section 2). The following sections are not based on first-hand research, but are rather aimed at reviewing the most interesting features of the current academic discussion in Belgium. The paper relies especially – although not exclusively – on research conducted by experts at Belgium's most advanced research centre in social policy, the Herman Deleeck Centre for Social Policy at the University of Antwerp. ; Desde 2008, la Unión Europea, y en particular, la Eurozona, ha sido golpeada por una profunda crisis económica que se ha traducido en un crecimiento del desempleo, las tasas de pobreza y las desigualdades. Aunque algunos países como Italia, Grecia, Portugal y España hacen frente a cambios sociales más serios, éstos se están produciendo con idéntico sentido en todas partes. No obstante, se debe recordar que incluso antes de la crisis, la situación social se había deteriorado en muchos países europeos, a pesar de que "el método abiertode coordinación" (OMC) se había puesto en marcha por la Comisión Europea en el año 2000. Nadie puede negar que la crisis haya acentuado e intensificado estos problemas sociales. En este artículo, sin embargo, se tratará de argumentar que resulta demasiado simplista centrarse exclusivamente en la actual crisis. De hecho, de cara a idear nuevas estrategias de bienestar, es necesario saber qué es lo que ha fallado en las políticas diseñadas tiempo atrás. Muchos investigadores sostienen que algunas de las políticas sociales implementadas durante los 2000, esto es, durante la primera década del OMC sobre inclusión social, han tenido un impacto muy limitado o incluso unas consecuencias negativas en Europa. El modesto propósito de este trabajo, es analizar algunas de estas políticas, primero a nivel general (sección 1), y en segundo lugar a un nivel más específico, a través de ejemplos ilustrativos de un Estado miembro: Bélgica (sección 2). Este trabajo no está basado en investigaciones de primera mano, pero sí en las investigaciones más relevantes de la discusión académica que hoy está presente en Bélgica. El documento se basa especialmente - aunque no exclusivamente - en la investigación llevada a cabo por expertos en el centro de investigación en política social más avanzado de Bélgica, el Herman Deleeck Centre for Social Policy de la Universidad de Amberes.
Justice distributive et bienveillance: L'État-Providence en tant que réalisation pratique du contrat social libéral La bienveillance est la vertu humaniste par excellence. D'importantes théories de la justice « sous le voile d'ignorance », issues des principaux courants de l'éthique humaniste des Lumières, excluent la bienveillance de la liste des raisons et motifs individuels sur lesquels elles fondent leurs normes de justice. Ces normes de justice sont construites sur la base de préférences hypothétiques des individus, alors que les institutions de justice distributive des démocraties reposent, dans la réalité pratique de ces systèmes politiques, sur les préférences effectives des individus. Nous défendons l'idée que les normes de justice, pour être applicables en démocratie, doivent reposer sur les préférences effectives des citoyens, s'exprimant dans le cadre d'un fonctionnement politique obéissant à des normes adéquates de délibération et de communication dans l'action collective et par celle-ci. Ce sont des normes de justice bienveillante, au sens où elles reposent de manière significative sur les raisons et motifs altruistes des individus. Les États-Providence contemporains sont interprétés ici comme le résultat de la mise en œuvre pratique d'une norme de justice bienveillante de ce type, celle du contrat social libéral.
Résumé Les questions de redistribution sont récurrentes dans les travaux de Wicksell, Hayek et ceux de l'École de Stockholm, centrés sur les écarts entre taux d'intérêt et les déséquilibres induits de l'investissement et de l'épargne. Ces questions sont centrales dans la conception de politique économique de ce qu'on appellera le « modèle suédois ». À quelques exceptions près, l'analyse wicksellienne des interdépendances entre les mécanismes de transmission des impulsions monétaires et la répartition du revenu est étonnamment pauvre. L'article analyse les liens et les divergences dans les travaux d'inspiration wicksellienne relatifs à la répartition du revenu et aux questions monétaires. Il montre que les divergences sont d'abord relatives aux échecs des tentatives visant à dépasser la dichotomie néo-classique entre équilibre général et théorie monétaire, puis à la scission historique entre les régimes de politique économique dans l'avant et l'après-guerre. JEL classification : B22, D30, E40, E61
National audience since the 1930s, Sweden developed an original approach to social policy, considering it not as a cost, but as a productive investment that makes it possible to reconcile economic efficiency with social fairness. The rhetoric at European level and at the level of the Organisation for Economic Co-operation and Development on the prospect of social investment, which calls for a shift from 'passive' social expenditure to 'active' social expenditure, seems to be inspired by the policies implemented in the Nordic countries, particularly in Sweden. This article analyses the foundations and development of this Swedish productive social model in order to better understand what makes this model specific and successful, but also to inform the current guidelines at European level on the prospect of social investment. ; Since the 1930s Sweden has developed an original approach to social policy, considering it not as a cost but as a productive investment that can reconcile economic efficiency and social equity. Thus, the social investment discourse, which has become very popular today both at the European and OECD level, and which advocates a reorientation of resources from "passive" to "active" social expenditures, seems to find some of its inspiration in the policies that have been set up in the Nordic countries, and theorized in Sweden especially. This article analyses the foundations and the development of this Swedish productive social model in order to better understand the specificities of this model and its success, but also to put into perspective the current European orientations around the social investment perspective. ; National audience since the 1930s, Sweden developed an original approach to social policy, considering it not as a cost, but as a productive investment that makes it possible to reconcile economic efficiency with social fairness. The rhetoric at European level and at the level of the Organisation for Economic Co-operation and Development on the prospect of social investment, ...
In: Lien social et politiques: revue internationale et interdisciplinaire de sciences humaines consacrée aux thèmes du lien social, de la sociabilité, des problèmes sociaux et des politiques publiques, Heft 45, S. 189
Les études menées par Lumsdaine (1993) et Noël et Thérien (1995) montrent que les États-providence socialistes fournissent plus d'aide publique au développement que les autres types d'État-providence. Les États-providence sont généralement considérés comme l'institutionnalisation des valeurs de la justice distributive. Mais en tant qu'institutions, ils sont également sensés transmettre ces valeurs et influencer les dirigeant politiques et l'opinion publique. Cet article met à l'épreuve cette hypothèse grâce à une analyse de régression qui s'appuie sur une nouvelle base de données, indisponible jusqu'à ce jour. Cette analyse remet en question les résultats et le cadre théorique de Lumsdaine et Noël et Thérien. ; Lumsdaine (1993) and Noël and Thérien (1995) argue that socialist welfare states give more foreign aid than other types of welfare states. Socialist welfare states are seen as institutionalised values of distributive justice. But as institutions, they also said to re-transmit these values and have a conditioning effect on policy makers and public opinion. This paper tests these hypotheses with pooled cross-sectional time-series analysis based on new dataset that was previously unavailable. The analysis in this paper casts doubts over their original findings and theoretical framework.