Donner ou prendre ? L'obligation de rendre dans l'économie de la puissance
In: Politique et sociétés, Band 37, Heft 1, S. 75-101
ISSN: 1703-8480
Depuis l'oeuvre de Mauss sur le don, l'obligation de rendre ce qui est donné est décrite dans la littérature anthropologique comme condition primordiale de toute institution humaine. Sur cette base, et suivant l'analyse spinoziste de Frédéric Lordon, nous suggérons que toute production anthropologique soit l'effet d'un certain intérêt, que nous disons essentiel, dont nous découvrons les structures et les affects dans les divers schèmes de la reddition, des sociétés qui pratiquent le don rituel aux sociétés de marché ou à État. À partir d'un examen de la réception des thèses de Mauss, nous arguons que ces schèmes de reddition, à commencer par les mises en scènes des jeux de don/contre-don, ne s'expliquent pas par la fonction d'institution symbolique du social qu'ils assurent effectivement, mais par le travail de marquage des corps qu'ils effectuent. En nous situant à l'intersection de Marx et de Nietzsche, nous exposons l'économie de la puissance qu'exigent les différentes effectuations historiques de l'endettement primordial, tel qu'il est établi par une pensée spinoziste de l'intérêt.