Dans son Traité des Images, Théodulphe, évêque d'Orléans au IXe siècle, a parfaitement exprimé l'ambiguïté du signe pictural : sans légende écrite, nous courons le danger de prendre toute image d'une belle femme portant son enfant pour la Madone, et par conséquent de l'adorer. Fort opportunément, à défaut de légende, nimbes et auréoles, attributs des martyrs et autres repères nous évitent les faux-pas. La piété commune et le code figuratif entretenu par la mémoire collective ont permis, pendant des siècles, de reconnaître immédiatement nombre de schémas illustrés.A partir de la fin du Moyen Age, l'image fut, à la faveur des fables antiques, largement sécularisée ; la gravure la diffusa généreusement, puis les procédés de reproduction de l'époque contemporaine. Vint enfin le détournement de sens systématiquement pratique par la poétique du hasard, puis par le cynisme commercial et publicitaire. Brusquemen oaven, multiplié à l'infini, le code figuratif occidental comporte, depuis la Renaissance, un vocabulaire aussi riche et aussi mal connu que peut l'être celui d'un dictionnaire encyclopédique par rapport au langage usuel.
Précédé d'une flatteuse rumeur, un grand livre, fondé sur des sources exceptionnelles et consacré à un grand sujet, est enfin là, tenu sur les fonds baptismaux de l'histoire par Ph. Wolff. Le parrain est formel : un seuil est maintenant franchi dans le secteur de l'anthropologie historique, et rien ne sera plus comme avant.En effet, dans un champ de vision que la rareté des travaux de synthèse ou l'imprécision des documents rend aussi confus que le brouillard vu par un myope, la Toscane de D. Herlihy et de Ch. Klapisch offre soudain un paysage social d'une grande netteté, comme si les auteurs avaient promené une loupe sur leur chemin. La' perfection des détails, saisis dans un vaste panorama, tient à la fois à la qualité des sources qui se prêtaient aux comptages, et à la volonté de deux historiens qui ont choisi de traiter par l'informatique les données d'un recensement des biens et des personnes, le catasto (cadastre) florentin de 1427.
Consacré à cent cinquante ans d'histoire d'un carrefour commercial, le livre de Henri Dubois ne se présente pas pour autant dans la série des travaux d'histoire régionale française, habituellement dédiés à une ville, à une province ou à un grand apanage. Son propos est à la fois plus étroit et plus ambitieux. Plus étroit, car il ne se propose pas de traiter dans tous ses aspects économiques et sociaux de l'histoire des pays bourguignons à la fin du Moyen Age; plus ambitieux, parce qu'il se présente comme une contribution à la connaissance des échanges européens à partir d'une documentation vaste et précise.