Les obstacles structurels et institutionnels au développement
In: Sociologie et sociétés, Band 2, Heft 2, S. 297-316
ISSN: 0038-030X
Plutôt que d'adopter une approche " culturaliste " des obstacles au développement ou de reprendre l'opposition " traditionnel-moderne " dans ses acceptions classiques d'échelle ou d'antinomie, l'auteur étudie le développement sous l'angle des combinaisons plus ou moins particulières auxquelles donne lieu l'interaction de différents modes de production dans une société donnée, ainsi que des obstacles résultant de cette même combinaison. Dans cette optique, F. H. Cardoso analyse tout d'abord la variation produite dans le mode de production qui prévalait au xixe siècle en Amérique latine par suite de la combinaison entre, d'une part, la prise de contrôle par l'étranger de l'économie d'exportation et une technologie plus développée et, d'autre part, les moyens de participation au pouvoir des groupes locaux et l'utilisation des richesses. Ainsi, dans les " économies d'enclave ", l'ancienne classe dirigeante exerce une domination proprement politique et, faute d'une couche locale d'entrepreneurs, l'édification d'une économie interne nécessite une révolution sociale et politique plus ou moins profonde et l'interventionnisme de l'État, alors qu'ailleurs le modèle reste plus libéral. Indépendamment de cette variante, dans tous les pays à industrialisation très tardive, le système de production national est dans une position de dépendance structurelle de par sa seule intégration à la société industrielle moderne : les caractéristiques qui lui sont imposées, en matière technologique par exemple, accentuent le phénomène de la marginalité et créent une nouvelle dualité au sein même du secteur industriel-urbain. C'est donc le modèle même de développement qui engendre ici ses obstacles et non la résistance d'institutions liées à la culture traditionnelle.