As in other areas in the Sahel, scarcities and famines are recurrent in the land of the Soninke. Food crises are, however, experienced as failures and times of hardship, and can lead people to question the socio-political order. To survive, the members of noble families might adopt behaviours usually reserved for craftsmen or slaves and thus risk losing their social status, whence their reluctance, afterwards, to mention these trying times. Nonetheless, famines do figure in certain oral sources, such as songs and historical narratives. They might emphasize the relations between having food and holding religious or political power. In other cases, references to a famine, though partly true, might serve to cover up an unfavourable balance of power, whether during the pre-colonial period or at the start of the French conquest. By referring to problems of subsistence, these oral traditions voice social and political issues and express a relation to history. ; Comme dans d'autres régions sahéliennes, disettes et famines sont un phénomène récurrent en pays soninké. Les graves crises alimentaires sont néanmoins vécues comme des échecs et des périodes de grande perturbation, susceptibles de remettre en cause l'ordre socio-politique. Pour survivre, les membres des familles nobles peuvent en effet être amenés à avoir des comportements réservés habituellement aux gens de métiers ou aux esclaves. Avec le risque de perdre leur position sociale, ce qui explique leur réticence à évoquer par la suite ces années difficiles. Les famines sont cependant mises en avant dans certaines sources orales, telles que chants et récits historiques. Elles peuvent alors souligner les liens entre détention de nourriture et pouvoir politique ou religieux. Dans d'autres cas, la référence à une période de famine, tout en ayant une part de réalité, peut servir aussi à masquer un rapport de forces défavorable, qu'il s'agisse de la période précoloniale ou des débuts de la conquête française. A travers différentes évocations du problème des subsistances, ces traditions orales expriment des enjeux politiques et sociaux ainsi qu'un certain rapport à l'histoire.
As in other areas in the Sahel, scarcities and famines are recurrent in the land of the Soninke. Food crises are, however, experienced as failures and times of hardship, and can lead people to question the socio-political order. To survive, the members of noble families might adopt behaviours usually reserved for craftsmen or slaves and thus risk losing their social status, whence their reluctance, afterwards, to mention these trying times. Nonetheless, famines do figure in certain oral sources, such as songs and historical narratives. They might emphasize the relations between having food and holding religious or political power. In other cases, references to a famine, though partly true, might serve to cover up an unfavourable balance of power, whether during the pre-colonial period or at the start of the French conquest. By referring to problems of subsistence, these oral traditions voice social and political issues and express a relation to history. ; Comme dans d'autres régions sahéliennes, disettes et famines sont un phénomène récurrent en pays soninké. Les graves crises alimentaires sont néanmoins vécues comme des échecs et des périodes de grande perturbation, susceptibles de remettre en cause l'ordre socio-politique. Pour survivre, les membres des familles nobles peuvent en effet être amenés à avoir des comportements réservés habituellement aux gens de métiers ou aux esclaves. Avec le risque de perdre leur position sociale, ce qui explique leur réticence à évoquer par la suite ces années difficiles. Les famines sont cependant mises en avant dans certaines sources orales, telles que chants et récits historiques. Elles peuvent alors souligner les liens entre détention de nourriture et pouvoir politique ou religieux. Dans d'autres cas, la référence à une période de famine, tout en ayant une part de réalité, peut servir aussi à masquer un rapport de forces défavorable, qu'il s'agisse de la période précoloniale ou des débuts de la conquête française. A travers différentes évocations du problème des ...
As in other areas in the Sahel, scarcities and famines are recurrent in the land of the Soninke. Food crises are, however, experienced as failures and times of hardship, and can lead people to question the socio-political order. To survive, the members of noble families might adopt behaviours usually reserved for craftsmen or slaves and thus risk losing their social status, whence their reluctance, afterwards, to mention these trying times. Nonetheless, famines do figure in certain oral sources, such as songs and historical narratives. They might emphasize the relations between having food and holding religious or political power. In other cases, references to a famine, though partly true, might serve to cover up an unfavourable balance of power, whether during the pre-colonial period or at the start of the French conquest. By referring to problems of subsistence, these oral traditions voice social and political issues and express a relation to history. ; Comme dans d'autres régions sahéliennes, disettes et famines sont un phénomène récurrent en pays soninké. Les graves crises alimentaires sont néanmoins vécues comme des échecs et des périodes de grande perturbation, susceptibles de remettre en cause l'ordre socio-politique. Pour survivre, les membres des familles nobles peuvent en effet être amenés à avoir des comportements réservés habituellement aux gens de métiers ou aux esclaves. Avec le risque de perdre leur position sociale, ce qui explique leur réticence à évoquer par la suite ces années difficiles. Les famines sont cependant mises en avant dans certaines sources orales, telles que chants et récits historiques. Elles peuvent alors souligner les liens entre détention de nourriture et pouvoir politique ou religieux. Dans d'autres cas, la référence à une période de famine, tout en ayant une part de réalité, peut servir aussi à masquer un rapport de forces défavorable, qu'il s'agisse de la période précoloniale ou des débuts de la conquête française. A travers différentes évocations du problème des subsistances, ces traditions orales expriment des enjeux politiques et sociaux ainsi qu'un certain rapport à l'histoire.
As in other areas in the Sahel, scarcities and famines are recurrent in the land of the Soninke. Food crises are, however, experienced as failures and times of hardship, and can lead people to question the socio-political order. To survive, the members of noble families might adopt behaviours usually reserved for craftsmen or slaves and thus risk losing their social status, whence their reluctance, afterwards, to mention these trying times. Nonetheless, famines do figure in certain oral sources, such as songs and historical narratives. They might emphasize the relations between having food and holding religious or political power. In other cases, references to a famine, though partly true, might serve to cover up an unfavourable balance of power, whether during the pre-colonial period or at the start of the French conquest. By referring to problems of subsistence, these oral traditions voice social and political issues and express a relation to history. ; Comme dans d'autres régions sahéliennes, disettes et famines sont un phénomène récurrent en pays soninké. Les graves crises alimentaires sont néanmoins vécues comme des échecs et des périodes de grande perturbation, susceptibles de remettre en cause l'ordre socio-politique. Pour survivre, les membres des familles nobles peuvent en effet être amenés à avoir des comportements réservés habituellement aux gens de métiers ou aux esclaves. Avec le risque de perdre leur position sociale, ce qui explique leur réticence à évoquer par la suite ces années difficiles. Les famines sont cependant mises en avant dans certaines sources orales, telles que chants et récits historiques. Elles peuvent alors souligner les liens entre détention de nourriture et pouvoir politique ou religieux. Dans d'autres cas, la référence à une période de famine, tout en ayant une part de réalité, peut servir aussi à masquer un rapport de forces défavorable, qu'il s'agisse de la période précoloniale ou des débuts de la conquête française. A travers différentes évocations du problème des subsistances, ces traditions orales expriment des enjeux politiques et sociaux ainsi qu'un certain rapport à l'histoire.
International audience ; Periods of plenty with alternating periods of famine have always characterized the history of the Sahelian region in the long term. Faced with difficult ecological conditions, Sahelian societies and in particular the Soninke have had to develop different ways of balancing resources by limiting the risk factors and distributing production in space and time. In order to cope with food crises the Soninke developed different survival strategies: these varied with the socioeconomic situation, the social status of the people concerned, and the intensity of the food shortage. Subsistence and survival strategies belong to two different patterns of behavior but the underlying reality is the same "regulation system."' We can speak of the precolonial food crises in terms of "subsistence crises," as we do for preindustrial Europe; that is to say, they were crises in the supply of a vital product, cereals. that the population could not successfully manage by regulation mechanisms. They were accompanied by commercial and social crises and, in some cases, by high mortality.' Colonial domination from the middle of the nineteenth century onward and its resulting socioeconomic and political changes greatly affected the frequency, components, and implications of these crises. If we can speak of "subsistence crises" until the 1960s, as local agricultural production still constituted the main part of food resources, we must also consider them as crises of a new type insofar as they were linked with the progressive integration of the Soninke society in the market economy. The evolution of survival strategies clearly shows the modifications. These same strategies allow us not only to analyse the famines but to observe the organization and reproduction of this society-its cleav-ages, forces of cohesion, and deep changes-from a particularly revealing point of view. ; L'alternance de périodes d'abondance et de pénurie est un élément structurel de l'histoire des sociétés sahéliennes et de la société soninkée en particulier. La reproduction de cette société sur la longue durée a reposé sur la mise en oeuvre de stratégies d'adaptation à un environnement contraignant, qui ont pu permettre une expansion économique et démographique en temps de prospérité, et de stratégies de survie en temps de famine. L'évolution de ces dernières depuis le milieu du dix-neuvième siècle traduit les transformations de la période coloniale. A côté de réponses anciennes, dont certaines se sont maintenues jusque dans les années 1950, de nouvelles se sont mises en place. C'est le cas, en particulier, des migrations masculines de travail : stratégies économiques liées principalement à la monétarisation de l'impôt à la fin du dix-neuvième siècle, elles ont constitué aussi des stratégies de survie en période de famine. Elles ont joué un rôle décisif en permettant de combler autrement les déficits vivriers, mais ont rendu cette société de plus en plus dépendante des revenus extérieurs. Aujourd'hui, une pénurie agricole ne devient une crise alimentaire pour une partie de la population que si elle s'accompagne d'une crise migratoire. La question de la « survie » se pose donc en des termes nouveaux pour les Soninkés, partagés entre une activité productive à l'étranger et le maintien d'une vie sociale au pays.
International audience ; Periods of plenty with alternating periods of famine have always characterized the history of the Sahelian region in the long term. Faced with difficult ecological conditions, Sahelian societies and in particular the Soninke have had to develop different ways of balancing resources by limiting the risk factors and distributing production in space and time. In order to cope with food crises the Soninke developed different survival strategies: these varied with the socioeconomic situation, the social status of the people concerned, and the intensity of the food shortage. Subsistence and survival strategies belong to two different patterns of behavior but the underlying reality is the same "regulation system."' We can speak of the precolonial food crises in terms of "subsistence crises," as we do for preindustrial Europe; that is to say, they were crises in the supply of a vital product, cereals. that the population could not successfully manage by regulation mechanisms. They were accompanied by commercial and social crises and, in some cases, by high mortality.' Colonial domination from the middle of the nineteenth century onward and its resulting socioeconomic and political changes greatly affected the frequency, components, and implications of these crises. If we can speak of "subsistence crises" until the 1960s, as local agricultural production still constituted the main part of food resources, we must also consider them as crises of a new type insofar as they were linked with the progressive integration of the Soninke society in the market economy. The evolution of survival strategies clearly shows the modifications. These same strategies allow us not only to analyse the famines but to observe the organization and reproduction of this society-its cleav-ages, forces of cohesion, and deep changes-from a particularly revealing point of view. ; L'alternance de périodes d'abondance et de pénurie est un élément structurel de l'histoire des sociétés sahéliennes et de la société soninkée en ...
International audience ; Periods of plenty with alternating periods of famine have always characterized the history of the Sahelian region in the long term. Faced with difficult ecological conditions, Sahelian societies and in particular the Soninke have had to develop different ways of balancing resources by limiting the risk factors and distributing production in space and time. In order to cope with food crises the Soninke developed different survival strategies: these varied with the socioeconomic situation, the social status of the people concerned, and the intensity of the food shortage. Subsistence and survival strategies belong to two different patterns of behavior but the underlying reality is the same "regulation system."' We can speak of the precolonial food crises in terms of "subsistence crises," as we do for preindustrial Europe; that is to say, they were crises in the supply of a vital product, cereals. that the population could not successfully manage by regulation mechanisms. They were accompanied by commercial and social crises and, in some cases, by high mortality.' Colonial domination from the middle of the nineteenth century onward and its resulting socioeconomic and political changes greatly affected the frequency, components, and implications of these crises. If we can speak of "subsistence crises" until the 1960s, as local agricultural production still constituted the main part of food resources, we must also consider them as crises of a new type insofar as they were linked with the progressive integration of the Soninke society in the market economy. The evolution of survival strategies clearly shows the modifications. These same strategies allow us not only to analyse the famines but to observe the organization and reproduction of this society-its cleav-ages, forces of cohesion, and deep changes-from a particularly revealing point of view. ; L'alternance de périodes d'abondance et de pénurie est un élément structurel de l'histoire des sociétés sahéliennes et de la société soninkée en particulier. La reproduction de cette société sur la longue durée a reposé sur la mise en oeuvre de stratégies d'adaptation à un environnement contraignant, qui ont pu permettre une expansion économique et démographique en temps de prospérité, et de stratégies de survie en temps de famine. L'évolution de ces dernières depuis le milieu du dix-neuvième siècle traduit les transformations de la période coloniale. A côté de réponses anciennes, dont certaines se sont maintenues jusque dans les années 1950, de nouvelles se sont mises en place. C'est le cas, en particulier, des migrations masculines de travail : stratégies économiques liées principalement à la monétarisation de l'impôt à la fin du dix-neuvième siècle, elles ont constitué aussi des stratégies de survie en période de famine. Elles ont joué un rôle décisif en permettant de combler autrement les déficits vivriers, mais ont rendu cette société de plus en plus dépendante des revenus extérieurs. Aujourd'hui, une pénurie agricole ne devient une crise alimentaire pour une partie de la population que si elle s'accompagne d'une crise migratoire. La question de la « survie » se pose donc en des termes nouveaux pour les Soninkés, partagés entre une activité productive à l'étranger et le maintien d'une vie sociale au pays.
International audience ; Periods of plenty with alternating periods of famine have always characterized the history of the Sahelian region in the long term. Faced with difficult ecological conditions, Sahelian societies and in particular the Soninke have had to develop different ways of balancing resources by limiting the risk factors and distributing production in space and time. In order to cope with food crises the Soninke developed different survival strategies: these varied with the socioeconomic situation, the social status of the people concerned, and the intensity of the food shortage. Subsistence and survival strategies belong to two different patterns of behavior but the underlying reality is the same "regulation system."' We can speak of the precolonial food crises in terms of "subsistence crises," as we do for preindustrial Europe; that is to say, they were crises in the supply of a vital product, cereals. that the population could not successfully manage by regulation mechanisms. They were accompanied by commercial and social crises and, in some cases, by high mortality.' Colonial domination from the middle of the nineteenth century onward and its resulting socioeconomic and political changes greatly affected the frequency, components, and implications of these crises. If we can speak of "subsistence crises" until the 1960s, as local agricultural production still constituted the main part of food resources, we must also consider them as crises of a new type insofar as they were linked with the progressive integration of the Soninke society in the market economy. The evolution of survival strategies clearly shows the modifications. These same strategies allow us not only to analyse the famines but to observe the organization and reproduction of this society-its cleav-ages, forces of cohesion, and deep changes-from a particularly revealing point of view. ; L'alternance de périodes d'abondance et de pénurie est un élément structurel de l'histoire des sociétés sahéliennes et de la société soninkée en particulier. La reproduction de cette société sur la longue durée a reposé sur la mise en oeuvre de stratégies d'adaptation à un environnement contraignant, qui ont pu permettre une expansion économique et démographique en temps de prospérité, et de stratégies de survie en temps de famine. L'évolution de ces dernières depuis le milieu du dix-neuvième siècle traduit les transformations de la période coloniale. A côté de réponses anciennes, dont certaines se sont maintenues jusque dans les années 1950, de nouvelles se sont mises en place. C'est le cas, en particulier, des migrations masculines de travail : stratégies économiques liées principalement à la monétarisation de l'impôt à la fin du dix-neuvième siècle, elles ont constitué aussi des stratégies de survie en période de famine. Elles ont joué un rôle décisif en permettant de combler autrement les déficits vivriers, mais ont rendu cette société de plus en plus dépendante des revenus extérieurs. Aujourd'hui, une pénurie agricole ne devient une crise alimentaire pour une partie de la population que si elle s'accompagne d'une crise migratoire. La question de la « survie » se pose donc en des termes nouveaux pour les Soninkés, partagés entre une activité productive à l'étranger et le maintien d'une vie sociale au pays.
International audience ; Cet article analyse tout d'abord l'organisation sociale, économique et politique de l'Etat soninké du Gajaaga au début du 19e siècle : agriculture, artisanat et commerce, aristocratie guerrière et familles islamisées, hiérarchie des groupes statutaires, rapports de dépendance et contre-pouvoirs. Il envisage ensuite l'impact de l'expansion commerciale française sur cette société, qui l'a profondément perturbée avant même la conquête coloniale de 1858 : mise en place d'un nouveau système commercial et « traite légitime », exaspération des conflits au Gajaaga et dans tout le haut Sénégal, lutte contre El Haaj Umar et les Soninké qui se sont, partiellement, ralliés au jihad.
International audience ; Cet article analyse tout d'abord l'organisation sociale, économique et politique de l'Etat soninké du Gajaaga au début du 19e siècle : agriculture, artisanat et commerce, aristocratie guerrière et familles islamisées, hiérarchie des groupes statutaires, rapports de dépendance et contre-pouvoirs. Il envisage ensuite l'impact de l'expansion commerciale française sur cette société, qui l'a profondément perturbée avant même la conquête coloniale de 1858 : mise en place d'un nouveau système commercial et « traite légitime », exaspération des conflits au Gajaaga et dans tout le haut Sénégal, lutte contre El Haaj Umar et les Soninké qui se sont, partiellement, ralliés au jihad.
International audience ; Cet article analyse tout d'abord l'organisation sociale, économique et politique de l'Etat soninké du Gajaaga au début du 19e siècle : agriculture, artisanat et commerce, aristocratie guerrière et familles islamisées, hiérarchie des groupes statutaires, rapports de dépendance et contre-pouvoirs. Il envisage ensuite l'impact de l'expansion commerciale française sur cette société, qui l'a profondément perturbée avant même la conquête coloniale de 1858 : mise en place d'un nouveau système commercial et « traite légitime », exaspération des conflits au Gajaaga et dans tout le haut Sénégal, lutte contre El Haaj Umar et les Soninké qui se sont, partiellement, ralliés au jihad.