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Située au nord-est du pays, non loin de la frontière polonaise, Kassa (aujourd'hui Kosice en Tchécoslovaquie) était l'une des grandes villes de la Hongrie du xvie siècle. Entre 1450 et 1600, la stabilité des cadres de la vie urbaine, celle de la population (3 000 habitants sur quarante-trois hectares) paraissent témoigner d'une sorte d'équilibre, remarquable dans un pays en plein bouleversement. Les marchands tiraient de bons profits du monopole qu'ils exerçaient sur le commerce avec Cracovie (où ils acquéraient des draps et exportaient, depuis la fin du xve siècle, du vin de Tokaj). Les artisans étaient relativement nombreux. Les activités urbaines, à Kassa comme dans toute la Hongrie, semblent avoir suscité la formation d'une couche de consommateurs qui encourageait à son tour l'artisanat et les échanges. Depuis le début du xve siècle, des institutions coutumières avaient fixé un ordre social urbain. Équilibre temporaire, bientôt remis en cause par le temps des troubles qui suit la défaite de Mohâcs ( 15 2 6) : le jeu social et les luttes de pouvoir qui deviennent alors visibles invitent à s'interroger sur les structures sociales plus profondes de la ville. Or des sources, exceptionnelles pour la Hongrie, permettent d'avancer quelques réponses.

« Plus on observe avec attention, et plus on acquiert la preuve constante de l'uniformité de la marche de la nature dans la mortalité et la reproduction ; conséquemment, en rassemblant beaucoup de faits et en les combinant sous tous les rapports qui leur sont analogues, on peut, comme en algèbre, à l'aide de quantités connues, arriver à la connaissance des inconnues.».Chevalier des Pommelles, 1789Excusez-nous, monsieur l'Historien, de vous emmener promener dans le désert pétrifié des chiffres I Pardon, monsieur le Démographe, de fouler vos plates-bandes d'un pied téméraire I Nous n'allons pas ici décrire une société vivante, des hommes de chair et sang, mais raisonner sur des nombres et des proportions, mettre une population en ordinateur, comme l'entomologiste observe des mouches en bocal; et chercher à dégager quelques lois concernant la typologie des familles, leurs dimensions et leur répartition; tenter de montrer que ces caractères n'ont rien de magique, qu'ils sont nécessairement déterminés par le régime et l'histoire de la population elle-même.

« A uno pane e uno vino » : cette expression traduit-elle une expérience exceptionnelle dans la Toscane du début du Quattrocento ? On en doute à l'entendre si souvent dans la bouche des contribuables ou des scribes du Catasto de 1427, pour décrire des familles, « élargies » ici à une vieille mère, un oncle, un frère ou un parent isolé, et là à des couples, à des familles entières, rassemblées sous le même toit en vastes agrégats.La réponse n'est pas sans importance, puisque certains voient dans la fin du Moyen Age le moment où l'on est peut-être passé en Europe occidentale d'un modèle « médiéval » des structures matrimoniales et familiales, à un modèle « européen » — mariages différés, célibat définitif important, familles conjugales restreintes …Nous nous proposons d'examiner dans ces pages si la Toscane, province méridionale de cette Europe en mutation, suit le modèle proposé pour des régions situées plus au nord.

Alexandre Moreau de Jonnes attribuait au choléra, qui existait seulement sur quelques points du Bengale en 1817, 50 millions de victimes en l'espace de 14 ans. Jusqu'en mai 1831, l'épidémie s'était déclarée plus de 650 fois, selon le London and Paris Observer, tant en Asie qu'en Europe, détruisant plus du tiers de la population dans les villes arabes envahies, et seulement le vingtième en Russie. Terrible fléau originaire d'Asie, surgi du fond des temps, d'une puissance émotionnelle et suggestive telle qu'il a inspiré médecins, fonctionnaires, romanciers, caricaturistes. En se limitant à la France, tout département concerné, toute localité menacée suscitèrent études, recherches et brochures, gigantesque bibliographie dans la veine des travaux du XIXe siècle ; la quantification, avec ses tentatives parfois maladroites, fut appelée régulièrement à la rescousse. Quelques ouvrages et articles fort intéressants sur les épidémies de choléra à Paris, Marseille, Aix-en-Provence, en Seine-et-Oise… ont paru au cours de ces dernières années.

La collaboration entre l'équipe belge et l'équipe française permet ici de comparer des exemples de villes industrielles et de villes traditionnelles. On constate le net retard de la transition épidémiologique et sanitaire des premières par rapport aux secondes (et par rapport à la situation moyenne de chaque pays). Le retard est en particulier caractérisé par le maintien, voire l'aggravation, d'une très forte mortalité enfantine jusqu'au dixième anniversaire. Celle-ci dépendant par ailleurs de l'ancienneté de l'implantation des parents dans la ville et de leur degré de connaissance du monde industriel. En outre, cet article analyse de façon détaillée les relations complexes entre l'immigration massive et les caractéristiques de la mortalité. Il met notamment en évidence une sous-mortalité des immigrants adultes et ses facteurs principaux : une double sélection des immigrants, au départ des villages puis à l'arrivée dans la ville industrielle.

Les fluctuations météorologiques du XVIe siècle ont déjà fait l'objet de divers travaux. Pour une élucidation systématique de celles-ci, les méthodes fondées sur la phenologie et notamment sur l'étude des dates de vendanges demeurent d'un intérêt capital. Nous nous bornons à rappeler brièvement, à ce propos, des faits bien connus : toutes choses égales d'ailleurs, les dates de vendanges tardives sont révélatrices d'une période de végétation de la vigne (mars-avril à septembre-octobre) au cours de laquelle les températures, en moyenne, ont été plutôt froides. Les vendanges précoces, au contraire, indiquent, pendant le même intervalle saisonnier (printemps-été), des moyennes thermiques relativement hautes. Les fluctuations thermométriques se lisent donc de façon grossièrement approximative, mais indubitable sur la courbe des dates de récolte du raisin.

L'exposé qui suit représente une analyse cartographique et factorielle des statistiques tirées des « comptes numériques et sommaires » du recrutement de l'armée pour les années 1819-1830. Ces statistiques intéressent d'une part 85 départements (l'Aveyron manque) ; et d'autre part 78 variables qui concernent les professions, la stature, les maladies, l'alphabétisation, etc. Par ailleurs (et sur ce point la présente étude innove par rapport à notre livre), nous sommes descendus dans notre analyse au niveau de l'information non plus seulement départementale, mais cantonale (il y a 85 départements dont les données sont connues de nous ; et, sur cette base, 2 882 cantons). L'existence de cantons urbains et de cantons ruraux permet ensuite de discerner, au-delà du cadre départemental lui-même, les informations relatives aux villes, et celles relatives aux campagnes. Cette distinction entre les cités et le plat pays réduit à néant, ou peu s'en faut, les objections qu'on fait d'habitude contre toute étude de ce genre, généralement faite en France à partir des départements ; ceux-ci étant accusés à juste titre d'écraser la distinction villes-campagnes, pourtant fondamentale.