Les réunions entre femmes constituent des piliers des mobilisations féministes. Revenir sur l'histoire de ces pratiques militantes permet de dépasser les idées reçues qui persistent à leur sujet.
Cet article interroge la façon dont les sentiments et les émotions affectent les carrières militantes d'hommes engagés dans des collectifs féministes depuis les années 1970 en France. À partir d'une enquête par entretiens et archives, il montre que les « dispositifs de sensibilisation » et le « travail émotionnel » de certains collectifs féministes contribuent à comprendre le passage à l'engagement et le maintien du militantisme. Mais si les sentiments des hommes, et en particulier la souffrance, constituent un puissant moteur à l'engagement, ils peuvent aussi nourrir les processus de désengagement. Cette attention à la place des sentiments dans les carrières militantes ne prend néanmoins sens qu'en restituant les engagements dans les contextes historiques et organisationnels et en les ré-encastrant dans les positions et trajectoires sociales.
À partir d'une enquête auprès d'hommes engagés dans des collectifs féministes, cet article propose une analyse des réponses collectives et individuelles face à la reproduction, même partielle, des rapports sociaux de sexe au sein des groupes féministes. Il montre ainsi que l'engagement des hommes implique des ajustements organisationnels visant à réduire l'expression de la domination masculine. Du côté des militants, la prise en compte de leur exercice individuel de la domination masculine est potentiellement déstabilisatrice de l'engagement : l'euphémisation de leur participation à la reproduction des rapports sociaux de sexe permet alors d'assurer le maintien de l'engagement tandis que la volonté affichée de s'y confronter fragilise le militantisme et conduit, bien souvent, au désengagement.
This dissertation examines an uncommon, socially unlikely form of activism: the involvement of men in French feminist movements, from their political emergence in the early times of the Third Republic to the present day (1870-2010). The research draws on a set of biographical interviews with male feminist activists as well as on a wide array of archives, and mobilizes both gender and social movements theories. Using the concept of " activist career ", I argue that men's feminist activism should be understood by paying close attention to their individual dispositions, their socialization experiences, their integration in political networks and the organizational context they are confronted with. I then distinguish between two main forms of men's activism in feminist groups: the humanist model, which is based on the idea of a universalistic political subject, and the identity model, which rests on the refusal of gender assignations. In both models, men's participation rests on the vision that feminism can be detached from women's specific experiences. This study therefore contributes to a better understanding of the political subject of feminism as well as, more broadly, of the political subject of identity-based movements. ; Cette thèse prend pour objet un militantisme statistiquement minoritaire et socialement improbable : l'engagement des hommes dans les mouvements féministes en France, depuis leur émergence politique à l'aube de la Troisième République jusqu'à la période contemporaine (1870-2010). À partir d'entretiens biographiques avec des militants et de sources d'archives diversifiées, elle se propose d'analyser ces engagements à la lumière de la sociologie du genre et de la sociologie du militantisme. En mobilisant la notion de " carrière militante ", ce travail montre que le militantisme féministe des hommes se saisit à partir de l'articulation de dispositions individuelles, d'expériences de socialisation, de positions dans des réseaux et de contextes organisationnels. L'analyse permet alors de distinguer deux principales modalités d'engagement des hommes dans des collectifs féministes : le registre humaniste, qui fonde les revendications au nom d'un individu universel, et le registre identitaire, mobilisé à partir d'un refus des assignations de genre. Dans l'un et l'autre cas, l'engagement des hommes n'est possible qu'au prix d'une appréhension du féminisme comme un mouvement désindexé de la seule expérience des femmes. Cette thèse contribue ainsi à la compréhension du sujet politique du féminisme, mais aussi plus largement, du sujet politique des mobilisations identitaires.
This dissertation examines an uncommon, socially unlikely form of activism: the involvement of men in French feminist movements, from their political emergence in the early times of the Third Republic to the present day (1870-2010). The research draws on a set of biographical interviews with male feminist activists as well as on a wide array of archives, and mobilizes both gender and social movements theories. Using the concept of " activist career ", I argue that men's feminist activism should be understood by paying close attention to their individual dispositions, their socialization experiences, their integration in political networks and the organizational context they are confronted with. I then distinguish between two main forms of men's activism in feminist groups: the humanist model, which is based on the idea of a universalistic political subject, and the identity model, which rests on the refusal of gender assignations. In both models, men's participation rests on the vision that feminism can be detached from women's specific experiences. This study therefore contributes to a better understanding of the political subject of feminism as well as, more broadly, of the political subject of identity-based movements. ; Cette thèse prend pour objet un militantisme statistiquement minoritaire et socialement improbable : l'engagement des hommes dans les mouvements féministes en France, depuis leur émergence politique à l'aube de la Troisième République jusqu'à la période contemporaine (1870-2010). À partir d'entretiens biographiques avec des militants et de sources d'archives diversifiées, elle se propose d'analyser ces engagements à la lumière de la sociologie du genre et de la sociologie du militantisme. En mobilisant la notion de " carrière militante ", ce travail montre que le militantisme féministe des hommes se saisit à partir de l'articulation de dispositions individuelles, d'expériences de socialisation, de positions dans des réseaux et de contextes organisationnels. L'analyse permet alors de ...
This dissertation examines an uncommon, socially unlikely form of activism: the involvement of men in French feminist movements, from their political emergence in the early times of the Third Republic to the present day (1870-2010). The research draws on a set of biographical interviews with male feminist activists as well as on a wide array of archives, and mobilizes both gender and social movements theories. Using the concept of " activist career ", I argue that men's feminist activism should be understood by paying close attention to their individual dispositions, their socialization experiences, their integration in political networks and the organizational context they are confronted with. I then distinguish between two main forms of men's activism in feminist groups: the humanist model, which is based on the idea of a universalistic political subject, and the identity model, which rests on the refusal of gender assignations. In both models, men's participation rests on the vision that feminism can be detached from women's specific experiences. This study therefore contributes to a better understanding of the political subject of feminism as well as, more broadly, of the political subject of identity-based movements. ; Cette thèse prend pour objet un militantisme statistiquement minoritaire et socialement improbable : l'engagement des hommes dans les mouvements féministes en France, depuis leur émergence politique à l'aube de la Troisième République jusqu'à la période contemporaine (1870-2010). À partir d'entretiens biographiques avec des militants et de sources d'archives diversifiées, elle se propose d'analyser ces engagements à la lumière de la sociologie du genre et de la sociologie du militantisme. En mobilisant la notion de " carrière militante ", ce travail montre que le militantisme féministe des hommes se saisit à partir de l'articulation de dispositions individuelles, d'expériences de socialisation, de positions dans des réseaux et de contextes organisationnels. L'analyse permet alors de ...
Cet article explore les manières dont les élites masculines de l'administration s'ajustent aux nouvelles normes égalitaires portées par les politiques publiques. Il montre d'abord que le modèle du « bon dirigeant » continue de rétribuer fortement la position que les hommes, plus particulièrement ceux des fractions supérieures de l'espace social, occupent dans le système de genre. Ensuite, si la plupart des cadres expriment une adhésion de principe à la rhétorique d'égalité portée par les élites réformatrices, ils manifestent à son encontre des résistances multiformes. Enfin, le regard placé sur la minorité de cadres des plus jeunes générations qui affirment ouvertement leur attachement à l'égalité met au jour les contradictions et les limites de la « masculinité égalitaire ». L'enquête montre que leurs aspirations démocratiques ne remettent que marginalement en cause les privilèges qu'ils tirent du système de genre, et souligne les avantages associés à l'expression de cet ethos dirigeant dans le contexte de « modernisation » de l'administration et de diffusion des principes égalitaires.
En prenant appui sur les travaux de plusieurs sous-champs des sciences sociales, cet article plaide pour une microsociologie des appropriations des idées politiques à travers l'exemple des idées féministes. La notion d'appropriation, empruntée à la socio-histoire de la lecture, permet d'envisager les reformulations et transformations des idées politiques à l'occasion de leurs circulations dans différents espaces sociaux. Elle conduit également à prêter une attention particulière aux conditions et modalités de réception ordinaire des idées politiques et aux logiques de politisation au principe de ces processus. À ce titre, les idées féministes constituent un terrain d'investigation particulièrement éclairant au regard de la multiplicité des formes de diffusion dont elles ont fait l'objet depuis les années 1970.