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Cet article étudie la façon dont la gestion a phagocyté les savoirs économiques critiques à l'université. En nous appuyant sur le cas d'un département, l'analyse révèle que l'intensification de la concurrence entre formations économiques et la réorientation des flux étudiants sont au principe d'un déclin structural de l'institution qui a été interprété par les enseignants comme une crise des vocations pour l'économie critique. Combinées aux recompositions du corps enseignant (liées aux modes de génération des générations), ces transformations permettent de comprendre plusieurs conversions à la gestion et donc pourquoi les prises de position sur l'enseignement ne sont pas nécessairement ajustées aux orientations scientifiques et politiques des économistes.

Résumé Comme chaque réforme de l'enseignement supérieur en France, la récente loi sur la « responsabilité » des universités (LRU) fut l'occasion de remettre en question la non-sélection à l'entrée à l'université. Experts patentés du monde académique, spécialistes des « spécificités françaises », ou encore essayistes « déclinologues », nous ont expliqué que ce principe, inscrit dans le décret Savary de 1984, serait aujourd'hui « inefficace » et conduirait à un « immense gâchis », dont les premières victimes seraient les étudiants. Si ce message a l'efficacité de la simplicité, il n'en est pas moins fondé sur un postulat largement faux qui permet, au passage, de substituer la question de la « compétitivité » de notre système d'enseignement supérieur à celle de la démocratisation scolaire.