Corine MAITTE Le réformisme éclairé et les corporations: l'abolition des Arts en Toscane Si l'abolition des corporations en Toscane est bien connue de l'historiographie italienne, cet épisode n'a que peu bénéficié du renou~vellement récent des études sur le monde des corporations et, bien que fortement lié aux discussions européennes sur les mérites et sur~tout les démérites des organisations institu~tionnelles du travail, la précocité de l'abolition toscane reste mal connue en dehors de l'Italie. Cet article réexamine donc les modalités de la suppression, en replaçant les discussions tos~canes à la fois dans le contexte de réforme du début du règne de Pierre Léopold et dans l'en~semble des discussions européennes. Il étudie également la portée et la signification des mesures prises,en prenant l'exemple des déci~sions concernant l'Art de la Laine, tant à Florence que dans l'un des centres textiles les plus dynamiques du Grand Duché, Prato, qui avait conservé ses propres corporations. On constate alors que les discussions concernant les corporations n'étaient pas le privilège des seuls administrateurs gravitant autour du nou~veau Grand Duc et que, dès la Régence, des avis très contrastés s'étaient opposés.
L'histoire d'Italie et d'Europe tout entière vient finir à Prato, en chiffons.Pour qui s'occupe de textile et d'industrie, Prato évoque deux époques et deux réalités totalement différentes : d'une part, l'entreprise médiévale de Francesco di Marco Datini, qui propageait, en même temps que son nom et celui de sa ville, quelques draps de la production locale, dans l'Europe commerçante du temps ; d'autre part, un district industriel typique de la « troisième » Italie dont la croissance — toujours fondée sur le textile — lit crier au miracle économique dans l'après-guerre et continue de susciter une féconde réflexion sur un développement différent du « modèle fordien ». Entre ces deux images fortes, un vide relatif.