Travaux pratiques d'« Ecologisation » des politiques publiques : les MAE "résultat" sur surfaces herbagères
En juin 2007, le premier concours des « prairies fleuries » a rencontré un franc succès auprès des agriculteurs du Massif des Bauges (Alpes du Nord). Il a récompensé le meilleur équilibre agri-écologique de prairies naturelles exploitées par des éleveurs producteurs de lait et de fromages labellisés. Ce concours est dérangeant à tous égards. Il a été organisé par le Parc Naturel Régional que les agriculteurs baujus considèrent comme une institution « environemmentaliste ». Ce qualificatif renvoie à l'histoire de la protection de la nature dans le Massif qui a profondément marqué la mémoire de ses habitants. Dans les années 1950, les éleveurs et leurs troupeaux ont été bannis de la plupart des alpages du massif afin d'y créer un sanctuaire dédié à la conservation d'espèces sauvages emblématiques de la flore et de la faune alpine. Ce concours a d'autre part été conçu comme un test pour expérimenter un nouveau type de contrat agri-environnemental : les pratiques imposées sont abandonnées au profit d'une obligation de résultat écologique. Celui-ci est défini de façon très simple : la présence d'au moins 4 fleurs figurant dans une liste établie régionalement dans chacun des 3 tiers de la parcelle. Cette proposition, portée par des naturalistes, a été validée dans le catalogue des mesures agri-environnementales du nouveau plan de développement rural hexagonal 2007-2013. En 2008, une MAE dites « Prairies fleuries » ont été mises en place pour la première fois dans et en dehors des aires protégées (sites Natura 2000), à l'échelle d'un territoire de PNR.Ce concours des « Prairies fleuries » peut être analysé comme une dynamique qui transgresse le grand partage historique entre espaces protégés et espaces dédiés à la production sans l'administration moderne de la nature et des hommes. On montrera ici comment des naturalistes ont décidé de « faire sortir la nature des réserves et des zonages » pour étendre leurs activités de conservation de la biodiversité dans l'espace agricole en s'emparant des instruments les plus puissants de la politique de modernisation de l'agriculture française : le concours d'excellence professionnelle et les ressources institutionnelles de la PAC. Des agriculteurs de montagne peuvent également trouver dans ces contrats « prairies fleuries » une légitimation sociale de leur activité en tant que producteurs de lait et de biodiversité