L'Afrique centrale porte le deuxième massif de forêt tropicale humide du monde. Selon les pays de la sous-région, de 10% à 15% (Nasi, Cassagne, Billand, 2006) de la superficie des forêts sont couverts par des aires protégées. Les forêts de production, représentant 65% du massif, offrent un potentiel très important pour la conservation de la biodiversité. Le rôle important des forêts de production dans le maintien de la biodiversité devrait être rendu plus effectif par l'extension des forêts dotées d'un plan d'aménagement qui doit tenir compte des différentes fonctions de la forêt. La FAO et le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD) réalisent un état des lieux de la prise en compte de la biodiversité et souhaitent identifier les difficultés rencontrées dans ce domaine. L'étude repose sur de la recherche bibliographique, de la lecture de plans d'aménagements, de règlementations, de guides nationaux et sur une enquêtes auprès de professionnels (administration, sociétés forestières, bureaux d'étude, ONG et certificateurs) qui s'est déroulée de mai à juin 2008 dans cinq pays d'Afrique Centrale. Suite à l'analyse des informations et leur validation, des actions concertées et un canevas de programme seront proposés afin de renforcer et d'harmoniser les pratiques pour une meilleure prise en compte de la biodiversité dans les forêts de production en Afrique Centrale.
Central Africa is home to the world's second largest contiguous tropical rainforest, after Amazon. Depending on countries in the sub-region, between 10% to 15% (Nasi, Cassagne, Billand, 2006) of the forests' surface area is occupied by protected areas. Production forests represent 65% of the forests and have an enormous potential for biodiversity conservation. The important role played by production forests in maintaining biodiversity should be improved through increasing the percentage of forests that have management plans that take into account the different functions of the forest. FAO and CIRAD (the he status of integration of biodiversity and are striving to identify the difficulties encountered in this area. This study is based on bibliographic research, documents such as management plans, forest regulations, national guidelines and a survey of professionals (administration, logging companies, consulting firms, NGOs and forest certification agencies) carried out from May to June 2008 in five countries of Central Africa. Following analysis of the collected information and their validation, concerted actions and a set of programmes will be proposed to reinforce and harmonize practices for better integration of biodiversity conservation concerns in production forests of Central Africa subregion.
En Afrique centrale, pour de nombreuses familles rurales, la chasse constitue une source de nourriture souvent primordiale et la vente des excédents de gibier, une source complémentaire de revenus monétaires. Cependant, avec l'accroissement démographique soutenu, la demande en viandes par les pôles de consommation (villages, villes secondaires, métropoles) augmente progressivement, avec, pour conséquence, une exploitation accrue et non durable de nombreuses populations animales sauvages. La quantité de viandes sauvages consommée annuellement dans le bassin du Congo est importante et représenterait 4 à 5 millions de tonnes métriques, soit approximativement l'équivalent de la moitié de la production bovine de l'Union européenne. À défaut d'alternatives efficaces et durables, et compte tenu de l'impossibilité d'interdire la consommation des viandes sauvages, un consensus émerge progressivement sur la nécessité de mettre en place en Afrique centrale les conditions d'une exploitation durable des espèces sauvages pour promouvoir simultanément la conservation de la biodiversité, la sécurité alimentaire et les moyens de subsistance locaux. En d'autres termes, autoriser (en dehors des aires protégées) l'exploitation des espèces les plus résilientes par et pour les communautés locales, et en promouvoir la commercialisation au sein de filières formelles (en maintenant simultanément des restrictions sur les espèces vulnérables) pourraient permettre de donner l'impulsion nécessaire à une gestion plus durable des espèces sauvages. C'est dans ce contexte que quatre pays (Gabon, République centrafricaine, République du Congo et République démocratique du Congo) ont sollicité l'assistance de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et du Fonds pour l'Environnement Mondial (FEM) pour conduire des tests pilotes de gestion participative de la faune et de la chasse, documenter et capitaliser les leçons apprises en vue de garantir la duplication des modèles jugés pertinents. Un projet sur 5 ans intitulé "Gestion durable de la faune et du secteur de la viande de brousse en Afrique centrale" a été lancé en fin 2012. Le présent ouvrage s'inscrit dans le cadre général de la documentation des expériences et des leçons apprises du projet. Il comprend trois parties distribuées en treize chapitres. La première partie introduit le questionnement et le contexte abordant les aspects économiques, nutritionnels et juridiques liés à la chasse dite "villageoise" et à l'utilisation de la faune sauvage par les populations locales. Dans une deuxième partie, les acteurs impliqués dans la mise en oeuvre du projet "Gestion durable de la faune et du secteur de la viande de brousse en Afrique centrale" décrivent les retours d'expérience dans les sites pilotes du projet en République du Congo, République démocratique du Congo et République du Gabon. Ces sites représentent des conditions socio-économiques et écologiques très diverses que l'on retrouve dans la zone forestière de l'ensemble des pays du bassin du Congo, ils sont à ce titre riches d'enseignements pour le gestionnaire ou le responsable des orientations politiques. Enfin la troisième partie est une tentative de synthèse des expériences venues du terrain et de l'analyse de la littérature qui met en exergue les possibles voies qui s'ouvrent pour une gestion plus durable de la faune sauvage par les communautés locales dans le bassin du Congo. L'ensemble des expériences présentées dans cet ouvrage propose des réponses concrètes pour le futur de la gestion durable de la chasse villageoise en Afrique centrale. Premièrement, le cadre juridique et réglementaire doit évoluer pour permettre une participation active des communautés locales, voire une gestion locale négociée de la faune sauvage, tout en restant suffisamment flexible pour s'accommoder aux divers autres objectifs de gestion et aux diverses formes de gouvernance locale, les mieux adaptées à chaque contexte. Deuxièmement, le secteur des viandes sauvages en Afrique centrale doit sortir de l'informel et devenir officiellement partie intégrante des politiques gouvernementales de réduction de la pauvreté et de sécurité alimentaire. À court terme, le développement de systèmes alimentaires durables en Afrique centrale doit explicitement inclure la contribution des produits carnés sauvages (fauniques et halieutiques). Troisièmement, toute démarche visant à rendre les communautés locales responsables et redevables de la gestion de la faune est vouée à l'échec si elle n'est pas associée à une volonté politique et à un processus d'accompagnement vers la décentralisation de la gestion des ressources fauniques et de renforcement de la société civile. La dévolution des droits et responsabilités doit se faire par étapes et prendra du temps. Quatrièmement, la gestion durable de la faune ne peut être une réussite que si l'ensemble des parties prenantes parvient à coconstruire un objectif de gestion consensuel sur ces espaces multifonctionnels et multiusagers. Enfin, un changement de paradigme est nécessaire, afin que les parties prenantes à la gestion de la faune acceptent de travailler sur la base d'une démarche adaptative, où le droit à l'erreur existe, mais où les risques sont anticipés, pour mieux répondre aux défis continuellement changeants. Loin de proposer un recueil de solutions miracles, cet ouvrage rapporte des leçons apprises qui sont autant de piliers posés pour poursuivre l'appui à l'émergence d'une gestion locale et participative de la faune et de la chasse en Afrique centrale. Nous espérons que les recommandations émises dans cet ouvrage pourront inspirer les décideurs, les gestionnaires et les bailleurs de fonds, pour continuer de tracer un chemin qui reste long.
Choosing and adapting wildlife management options ideally requires appropriate and affordable information on trends in animal populations and offtakes over several years. In African tropical forests, most studies have been documenting separately wildlife abundance, offtake and consumption of bushmeat. In addition, most site-level assessments were so far implemented using different methodologies, thus limiting the potential for meta-analysis at inter-site level. Yet, measuring concurrently spatial patterns of wildlife occurrence and hunting activities at different sites along gradients of human pressure (land conversion, human density) may provide a useful basis to identify indicators of non-sustainability of hunting, and to help predict temporal trends at site level. In this study, we implemented a standard protocol aiming at assessing bushmeat use and availability over 6 hunting grounds located in the Congo Basin (Gabon, Congo, and Democratic Republic of Congo). This preliminary diagnostic was conducted to evaluate the feasibility of testing community-based hunting approaches in the framework of a FAO/GEF project. For this purpose, we mapped the contours and the principal features of every hunting ground, and characterized the management rules, wildlife resources, hunting practices, offtakes and consumption. Results of the comparison between sites show how indicators of game species availability (e.g. species diversity, abundance indices, etc.) and resource use (e.g. catch per unit effort, ratio between small and large body-sized species, composition of the catch, etc.) vary in contexts of contrasted hunting pressure. We discuss their respective relevance as a basis for implementing evidence-based wildlife management strategies through adaptive management.
Les viandes d'animaux sauvages terrestres ou semi-terrestres, dénommées "viandes de brousse", sont une composante essentielle de la sécurité alimentaire et des moyens de subsistance dans les zones rurales d'Afrique centrale. Cependant, la pression croissante de la chasse a des effets tangibles sur la faune et est susceptible d'avoir des incidences à long terme sur les écosystèmes forestiers. Il devient donc nécessaire de s'assurer que l'utilisation de la faune se pratique dans les limites de la durabilité. Certaines expériences pratiques nous montrent que plus les communautés locales sont impliquées dans le développement du processus de gestion, plus les chances de succès sont élevées. Le premier guide de cette boîte à outils presente les composantes essentielles à la phase de diagnostic préliminaire approfondi qui permet de comprendre le système de chasse dans son état initial. Le deuxième guide qui fait l'objet de ce document, s'adresse aux gestionnaires qui souhaitent développer et mettre en oeuvre un plan de gestion participative de la chasse villageoise en Afrique centrale. Il propose une vue d'ensemble de l'approche participative qui peut être suivie, en décrivant les différentes étapes et aspects à prendre en compte pour le succès de la gestion dans le long terme. Par contre, nous ne prescrivons pas une méthodologie pas à pas, car nous pensons que le détail méthodologique doit émerger des réflexions de l'équipe de gestion locale et non pas être imposé de façon externe et prédéfinie. De nombreux aspects de la gestion dépendent par exemple de l'objectif de gestion fixé et différeront en fonction des contextes en privilégiant plus ou moins les objectifs de conservation, de sécurité alimentaire, de gestion du territoire, du renforcement de la gouvernance locale, de génération de revenus commerciaux, etc… Nous espérons que ce guide, inspiré du projet "Gestion de la faune et du secteur de la viande de brousse en Afrique centrale" pourra inspirer la mise en oeuvre de nouvelles initiatives en Afrique centrale.
En Afrique centrale comme dans d'autres parties du monde, différentes formes d'inclusion des acteurs dans la gestion et la politique des forêts se sont développées au cours des vingt dernières années : les exemples de gestion communautaire et communale, et plus généralement d'une consultation des intéressés aux décisions concernant la forêt, se sont multipliés. Pourtant, en dépit de certains succès, les changements apportés par cette foresterie participative et communautaire restent la plupart du temps encore faibles. Le partenariat public-privé a peu avancé, et le droit des parties prenantes demeure encore mal assuré. Qu'on parle de gestion comme de politique, l'administration en charge des forêts reste le plus souvent la seule à prendre les décisions finales, avec ou sans participation des intéressés. Cet ouvrage collectif, fruit de la collaboration d'une trentaine de chercheurs et praticiens du développement forestier, s'attache à dresser un constat des forces et faiblesses de la gestion participative et communautaire des forêts d'Afrique centrale. Mobilisant leurs disciplines respectives pour construire ensemble un constat global, spécialistes de la gestion et de l'administration, économistes, sociologues, juristes et politologues vont au plus près du terrain, et en produisent une évaluation contrastée de la situation en Afrique centrale. Des pistes d'amélioration, en forme parfois de recommandations, constituent le résultat de cette analyse critique. Elles portent principalement sur une plus grande prise en compte des aspects fonciers, sur la nécessité de penser les formules d'inclusion en termes d'économie sociale, sur l'intérêt de considérer l'association des acteurs locaux en rapport avec la réforme du système des concessions, ainsi que sur un changement des modalités de décisions dans le cadre de plateformes multiacteurs regroupant l'État et les autres intérêts.
In a context of global biodiversity threat, overexploitation of wildlife populations through hunting is of major concern. Subsistence hunting, as a source of protein and incomes, is however a major component of livelihood for some local communities. The Congo basin in Central Africa is emblematic of these challenges, with rapidly declining wildlife populations in this biodiversity hotspot and the presence of rural populations relying on the exploitation of natural resources. The elaboration of sustainable hunting and management strategies is crucial but hampered by the lack of information on the impact of hunting on the status of wildlife populations. Measuring concurrently spatial patterns of wildlife occurrence and hunting activities at different sites along a gradient of hunting pressure may provide an important basis to identify indicators of non-sustainability of hunting. In this study, we implemented a standard protocol aiming at assessing the relationship between hunting practices and wildlife occurrence over 6 hunting grounds in the Congo Basin (Gabon, Congo, and Democratic Republic of Congo). Camera traps were deployed for a month over >300 sampling stations to detect the presence of elusive forest dwelling species. Socio-economic surveys were concurrently conducted in villages to map the contours and the principal features of every hunting ground, and characterize the management rules, hunting practices, offtakes and bushmeat consumption. The data collected by the camera traps were analysed using statistical models that estimate probabilities of occurrence of focal wildlife species at each station. Our analysis identified the environmental and hunting related drivers of small- and large-scale spatial variations in occurrence for species belonging to these different indicator categories. Different categories of species were distinguished according to their potential as indicators of hunting pressure or practices. We discuss their respective relevance as a basis for implementing evidence-based wildlife management strategies through adaptive management. (Texte intégral)