La découverte du philosophe anglais J.L. AUSTIN de l'existence d'actions qui peuvent être accomplies par la seule force du langage entretient des liens évidents avec la pratique juridique. La présente contribution a pour objet de tenter d'illustrer la résonance toute particulière que trouve, dans le domaine du droit, cette thèse austinienne. Il y a en effet dans la théorie consacrée à la découverte de la vertu performative du langage ordinaire quelque chose d'immédiatement convaincant ou d'évident pour le juriste. Quelques-unes des raisons qui paraissent à même d'expliquer cet attrait particulier des juristes seront exposées dans la première partie du texte. La seconde partie s'attache à décrire, sous forme d'illustrations jurisprudentielles, comment la théorie des actes de langage peut, non sans une certaine harmonie, s'articuler à la pratique judiciaire ; Peer reviewed
Demander dans quelle mesure l'injonction du brigand qui exige « la bourse ou la vie ! » peut être comparée à la norme de comportement édictée par un Etat sous la forme d'une loi, c'est poser la sempiternelle question de la frontière qui sépare le droit du non-droit, tout au moins dans une perspective juspositiviste, en tant que cette école de théorie du droit refuse de définir le phénomène juridique en se référant à une valeur ou un ensemble de valeurs. La frontière du droit et du non-droit est en effet particulièrement difficile à tracer, nonobstant plusieurs siècles de discussions philosophiques à ce sujet. Lorsque, fatigué de parcourir les chemins, le brigand décide de s'installer en ville pour s'y adonner au racket des commerçants du quartier et qu'il s'adjoint ensuite le concours d'autres bandits, c'est un gang de malfaiteurs qui voit le jour. Si, ultérieurement, ce gang se concerte avec d'autres bandes de truands pour s'épauler mutuellement dans les exactions auxquelles ils se livrent sur leurs territoires respectifs, il prend alors la forme d'une organisation criminelle ou, au sens large du terme, d'une « mafia ». Le cinéma de Francis Ford Coppola, Martin Scorsese, Brian De Palma, Sergio Leone ou bien encore Matteo Garrone, entre autres, dépeint, souvent avec réalisme, la genèse et le fonctionnement de telles organisations criminelles. La communication a proposé, au moyen d'illustrations tirées des films de ces grands cinéastes, une analyse de microscopie juridique du crime organisé. Une description serrée de la particule élémentaire du phénomène juridique, identifiée par Lucien François dans son ouvrage de théorie du droit Le cap des Tempêtes sous l'appellation de « jurème », met en lumière une indéniable proximité entre les techniques de pouvoir utilisées respectivement par le brigand isolé, la bande organisée et l'Etat souverain. En remontant ensuite vers la structure plus complexe d'un système étatique, on se demandera si, en fin de compte, dans la vision juspositiviste poussée au bout de sa logique par Lucien François, l'Etat ne pourrait être réduit, d'un point de vue ontologique, à un pouvoir de fait comparable, par les techniques de contrainte qu'il exerce sur ses sujets, à une organisation criminelle – abstraction faite des valeurs promues ou poursuivies par tel ou tel appareil étatique. ; Peer reviewed
Les années de plomb en Italie ont révélé le développement d'une activité à prétention juridictionnelle dans le chef d'organisations subversives qui cherchaient à renverser l'État. En réponse, ce dernier a mis en place un ensemble de dispositifs procéduraux dérogatoires au droit pénal commun. Le cinéma italien a su tirer profit du potentiel narratif de ces événements en interrogeant l'acte de juger dans ses dimensions respectivement révolutionnaire et répressive. L'activité juridictionnelle apparaît alors comme une forme de violence juridiquement organisée, quelle que soit l'origine du pouvoir au nom duquel elle s'exerce. Le corpus filmique examiné illustre ainsi la théorie de la pluralité des ordres juridiques de Santi Romano, en montrant comment, entre les différents pouvoirs impliqués (ordres terroristes, ordre étatique « ordinaire », ordre étatique « extraordinaire »), se nouent des rapports non seulement de négation ou de combat, mais aussi de prise en considération, voire de collaboration. ; Peer reviewed
Commentaire du jugement du tribunal de commerce de Gand (section Oudenaarde) du 1er octobre 2015 concernant la décharge d'un débiteur dont l'entreprise a été transférée dans sa totalité sur pied de l'article 67 LCE, à l'exception des dettes sursitaires extraordinaires garanties par une hypothèque sur son logement familial. La note expose ensuite en détails les conditions de la décharge prévue par l'article 70LCE et la compare avec le mécanisme semblable de l'exclusabilité du failli. ; Commentaar van het vonnis van de rechtbank van koophandel van Gent (afd. Oudenaarde) van 1 oktober 2015 over de ontlasting van de schuldenaar wier onderneming in zijn geheel werd overgedragen op grond van artikel 67 van de wet betreffende de continuïteit van de ondernemingen (WCO), met uitzondering van de buitengewone schuldvorderingen in de opschorting gewaarborgd door een hypotheek op de gezinswoning. De nota presenteert daarna de voorwaarden van de ontlasting als bedoeld in artikel 70 WCO en vergelijkt deze met de vergelijkbare mechanisme van verschoonbaarheid van de gefailleerde. ; Comment of the judgment of the Commercial Court of Ghent (Oudenaarde section), October 1st 2015, concerning the discharge of a debtor whose business has been fully transferred on the basis of Article 67 of the Law on Business Continuity (LBC), excluding the extraordinary debts in the moratorium secured by a mortgage on the family home. The paper then explains in detail the conditions of the discharge provided under Article 70 LBC and compares it with the similar mechanism of the bankrupt's excusability. ; Peer reviewed
La présente contribution a une double ambition : d'une part, étudier, illustrations cinématographiques à l'appui, l'acte de juger et ses prodromes (enquêtes, procédures, interrogatoires, etc.), dans un contexte géographique et historique bien déterminé – en l'espèce, l'Italie des années de plomb – ; d'autre part, examiner les situations ainsi rencontrées à la lumière d'une théorie du droit – en l'occurrence, la théorie de la pluralité des ordres juridiques de Santi Romano – particulièrement éclairante pour comprendre les ressorts de la lutte à laquelle se livrèrent, dans ce cadre, organisations subversives, voire terroristes, et forces étatiques, aussi bien d'un point de vue historique que dans les représentations plus ou moins fidèles qui en ont été faites dans le corpus cinématographique retenu pour les besoins de la démonstration. ; Peer reviewed