Quand le ministre est irresponsable. L'exemple du département de la Maison du roi sous la Restauration
International audience ; « La Restauration (…) a gardé l'organisation impériale mais elle a nettement distingué ce qui se confondait sous l'empire, à savoir : le ministère et la cour, le pouvoir responsable et le pouvoir souverain ». Gustave PLANCHE, « Du ministère et de la Cour, considérés dans leurs rapports avec les arts », L'artiste, 1831, t. II, p. 201. L'histoire de la responsabilité ministérielle en France est aujourd'hui un champ de recherche aux perspectives largement renouvelées. Le mérite en revient en dernier lieu à la thèse stimulante de Nathalie Havas qui consacre une part substantielle de son étude à l'histoire des responsabilités politique et pénale des ministres au XIX e siècle 1. Pour notre part, nous voudrions ici apporter modestement notre pierre à l'édifice en abordant la question méconnue de l'(la) (ir)responsabilité du ministre de la Maison du roi sous la Restauration. D'emblée, on mesure la curiosité, pour ne pas dire l'incongruité, d'une telle titulature : à compter du 25 mai 1814, les Bourbons, en même temps qu'ils renouent la chaîne des temps, font revivre l'institution surannée de la Maison 2. Jusqu'alors, une simple intendance générale a assuré la gestion des intérêts matériel et financier de la Couronne impériale, subsumés sous le vocable de « Liste civile », i.e. les deux dotations pécuniaire et domaniale octroyées annuellement par l'Etat à l'empereur pour lui permettre de soutenir ses dépenses personnelles ainsi que la splendeur du trône 3. Apparue dès 1789 4-pour aussitôt disparaître en 1792 et réapparaître en 1804-, la Liste civile est une institution-clé du constitutionnalisme moderne en ce qu'elle sonne le glas du système juridique ancien fondé sur l'union intime entre le roi et l'Etat. En 1814, le retour des Lys dans le cadre institutionnel de la Charte s'accommode de ce mécanisme révolutionnaire de salariat de la fonction royale : la rente est généreuse 5 , les domaines et forêts fort nombreux, les palais richement remeublés par l'usurpateur, les bijoux de la Couronne ...