L'article propose une articulation de différentes approches théoriques qui permettent d'aborder le partage des savoirs comme une tension entre savoirs formels et savoirs de l'expérience. Après avoir décrit quelques-uns des modèles de compréhension d'un « monde en incertitude », il présente une tentative de penser autrement la politique : le recours à la méthode de l'égalité (Rancière) permet de dépasser les adhésions consensuelles par l'expression des dissensus que les êtres humains entretiennent entre eux. À travers des hybridations qui sont l'expression d'un travail d'élaboration d'un monde commun dans lequel agir, le partage du sensible est approché comme la recherche d'un moment de partage d'humanité.
La loi 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge introduit un basculement radical de la pratique psychiatrique, en créant les conditions d'une transformation des équipes soignantes en une « police sanitaire psychiatrique ». Cette loi vient contredire et défaire le large mouvement de réflexions et de pratiques thérapeutiques, marqué par des figures comme celles de Pierre Bonnafé, Jean Oury, Fernand Deligny, qui s'est cristallisé dans l'expérience d'espaces institutionnels visant à accueillir les personnes en souffrance psychique dans des lieux qui soient des « lieux à vivre ». L'article dégage les enjeux de cette expérience au titre d'une conception du politique conçu comme lieu d'un lien et d'un écart, et invite à imaginer comment l'habiter des marges peut produire du monde commun au titre d'une humanité de la rencontre .
Qu'en est-il de la question de l'accompagnement sensuel et sexuel des personnes en situation de handicap en France aujourd'hui ? À travers une série de témoignages de personnes en situation de handicap et de professionnels de l'accompagnement, nous interrogeons la proximité entre l'assistant sexuel et le travailleur du sexe. Cette relation d'accompagnement se définit comme une recherche du commun soucieuse de ne pas enfermer les débats sur la sexualité des personnes en situation de handicap dans un « traitement à part » lié à « leur différence ». Elle renvoie chacun de nous à sa propre solitude dans sa relation avec l'autre et à notre capacité à construire ensemble une humanité de la rencontre .
What is the power of a health promotion politcs if it does not take the risk of walking in a democratic participation way, involving health care professionals and local people in a reciprocity manner? Today we are historically facing two representations that cause serious disruptions. The first one separates experts and laymen; the second, deepens the gap between politicians (the elected) and the citizen. We should then propose a "making together" in order to create the debate, the confrontation, to build a common world. From the perspective of the individual who transforming himself, changes his own world of uncertainties, this article aims to address the question of the "place" where the social action happens. How a place can be a "place of learning"? How the place participates of a collective action, as an expression of cultural identity and solidarity? A policy of health promotion can favorize the transforming action which proposes a exploration of the world based on learning, experimentation, deliberation and respect for plurality? ; Qual o poder de uma política de promoção da saúde se esta não se arrisca nos caminhos da participação democrática, envolvendo de maneira recíproca os profissionais de saúde e os habitantes locais? Estamos hoje, historicamente, diante de duas representações que provocam rupturas graves. A primeira separa especialistas e leigos; a segunda, aprofunda a distância entre os políticos (os eleitos) e os cidadãos comuns. Devemos então propor um "fazer juntos" para criar o debate, a confrontação, e assim construir um mundo comum. A partir da perspectiva do sujeito ativo que se transformando, modifica o mundo de incertezas que é o seu próprio, este artigo pretende abordar a questão do "lugar" onde se desenrola o agir social. Como um lugar pode ser um "lugar aprendente"? Como o lugar participa da ação coletiva, enquanto expressão de identidade cultural e de solidariedade? Uma política de promoção da saúde pode, então, favorecer a ação transformadora que propõe a exploração do mundo a partir da aprendizagem, da experimentação, da deliberação e do respeito à pluralidade? ; Que peut-être une politique de promotion de la santé si elle ne se risque pas dans des démarches de participation démocratique au titre des implications réciproques entre les professionnels et les habitants des lieux? Or, aujourd'hui, nous sommes face historiquement à deux délégations produisant deux coupures vives. La première qui sépare les spécialistes et des habitants profanes; la seconde qui creuse l'écart entre les politiciens (les élus) et les citoyens ordinaires. Il nous faut alors poser un "faire ensemble" pour créer du débat, de la confrontation pour construire un monde commun. Dans cette perspective d'un sujet actif qui se transforme lui-même tout en transformant le monde d'incertitudes qui est le sien, nous voulons aborder la question du "lieu" où se déploie l'agir social. Comment un lieu peut-il être un "lieu apprenant"? Comment le lieu participe-t-il de l'action collective comme expression d'identité culturelle et de solidarité collective? Une politique de promotion de la santé peut alors favoriser une pratique d'action de transformation qui pose l'exploration du monde commun, l'apprentissage, l'expérimentation, la délibération, dans le respect de la pluralité.