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La contribution réagit de manière critique à la thèse de W. Herzog postulant l'instrumentalisation de la science par la politique dans le processus de réforme actuelle de l'école en Suisse. Elle décèle dans le texte de Herzog une pensée dichotomique qui conçoit le politique comme instance technocratique d'instrumentalisation, et qui oppose une école artisanale romantique à une vision de l'école comme entreprise standardisée, et une vision d'une science critique pure à une vision de la science soumise aux demandes du politique. Tout en intégrant des dimensions critiques du discours de Herzog, la contribution décrit les contradictions inhérentes aux entités qu'il aborde: le politique, l'école, la profession et la science. Ces contradictions sont le moteur du développement de ces entités et définissent les lieux possibles, multiples, d'interventions pour les acteurs. (DIPF/Orig.)

This open access book offers a critical analysis of the history of the International Bureau of Education (IBE) from its founding in 1925 to its integration into UNESCO in January 1969. Based on the conceptual and methodological tools of the transnational turn and on archives, fully exploited for the first time by the research team, this book enriches knowledge of the phenomena of globalization. It does so in a field, education, which is currently one of those most invested in globalization, but whose sociogenesis in the era of its first period of institutionalization remains to be explored more profoundly. The authors do this by analyzing how the actors of the IBE tried to realize their aspiration towards universal aims in education, the contradictions they were confronted with, the causes they invested in, their operating mode and the governments and international organizations with which they cooperated.

Si Piaget accepte, en 1929, de devenir directeur du Bureau lnternational d'Éducation (BIE) - destiné à construire la paix sur terre via la science et l'éducation - c'est en concordance avec ses réflexions menées dès sa jeunesse. ll forge alors des outils conceptuels sur le jugement moral et l'éducation que le BIE intègre et diffuse. Nous démontrons que les principes de réciprocité et coopération, neutralité et objectivité, fondement d'un universalisme politique, définissent le mode opératoire des Conférences internationale de l'lnstruction publique du BIE (1934-1968) réunissant, non sans compromis, les gouvernements de Ia planète pour construire une charte universelle de l'éducation.

Préserver la paix sur terre par la science et l'éducation : telle est l'ambition des fondateurs du Bureau international de l'éducation de Genève (1925), convaincus d'avoir la légitimité de s'imposer comme plateforme de l'internationalisme éducatif. Leur ambition expansionniste est battue en brèche par d'autres organismes concurrents. Notre analyse examine les reconfigurations successives du régime de leur entreprise dont les seuls principes de travail seraient la neutralité et l'objectivité. Une fois le Bureau instauré en une agence inter-gouvernementale, son centre de gravité réside dans des Conférences annuelles où sont conviés tous les pays de la planète. Dans le contexte tendu des années 1930, son directeur, Jean Piaget, affûte ses stratégies pour convaincre, sans compromission, les régimes politiques aussi bien républicains qu'autoritaires des bénéfices d'une coopération éducative. C'est en diplomate officiel que Piaget redéfinit le rôle du BIE aux côtés de la « nouvelle autorité mondiale » qu'est l'Unesco créée en 1946, qui, après avoir concédé au BIE « tous les honneurs du "père" de l'Unesco », le configure désormais « en son petit frère ».

Tirant parti de la riche historiographie disponible, cet article propose une rétrospective transnationale des premières institutionnalisations de la pédagogie – science(s) de l'éducation aux xixe et xxe siècles, centrée sur les contrées occidentales avec lesquelles ses représentants francophones interagissent. À l'interface d'autres champs sociaux et disciplinaires, ce nouveau champ de savoir sur l'éducation – un terrain convoité et controversé – est puissamment déterminé par le contexte social, politique, économique, culturel dans lequel il s'insère, contribuant en retour à le transformer. Mettant en lumière trois strates de cette construction, l'analyse examine les contradictions vives du processus, postulant que celles-ci constituent des ressorts ayant de longue date et en moult contrées questionné et conditionné ce que nous dénommons aujourd'hui, en francophonie, les sciences de l'éducation.

Comment comprendre l'immense popularité de Paulo Freire ? Après avoir montré cette popularité à travers une analyse quantitative, nous nous efforçons, dans cet essai critique, de cerner le contexte dans lequel son œuvre a été élaborée puis réappropriée par différents mouvements sociaux et courants intellectuels. Nous tirons parti pour ce faire d'une ample littérature disponible sur la trajectoire intellectuelle et les engagements militants de Freire. Esquissant une périodisation de son parcours, nous examinons la manière dont ce pédagogue réformiste se positionne au regard d'autres écoles de pensée, via notamment une analyse de l'évolution des références citées dans son œuvre. Nous tentons ainsi de saisir la capacité de Freire de s'inspirer d'une sensibilité politique, qui pourrait fournir des éléments d'explication du succès actuel du pédagogue. Prolongeant le questionnement des professeurs de l'Université qui nous ont invités à discuter le freirisme, nous nous interrogeons in fine sur les outils que Freire apporte aux pédagogues pour penser les problèmes auxquels l'école d'aujourd'hui est confrontée.

During the nineteenth century many European countries proclaimed sovereignty of the people and simultaneously founded their national educational systems. In order to provide public schooling, free and compulsory education was established. Political and sociocultural revolutions led to the ride of nation states, based on democratic or democratic-inspired aspirations, that then turned into "teacher states". Mass schooling and the worldwide – and furthermore enforced – dissemination of this schooling model characterize the nineteenth and the twentieth centuries. How can one best describe the concrete process of mass schooling? How should it be analyzed, and what are the appropriate concepts to do so? How did nations contribute to its dissemination? By tacking these issues from a historical perspective and discussing, in particular, two concepts often addressed for understanding certain aspects of mass schooling – "school form" and "grammar of schooling" – the contribution of this volume shed a new light on the matter.

The international conferences and the official publications of the International Bureau of Education (IBE) comprise a platform where a growing number of governments exposed their considerations and concerns with the purpose of building up a better world through education. The resulting recommendations foster the basis of an 'international code for public education'. The voluminous archives of the IBE comprise a particularly fertile source for understanding 'the variants and invariants', and of course also the purposes of school organisations and curricula as promoted by these organisations. The paradoxes of this effort carried out during the first forty years represent both the challenges for its survival and the outline of this article: (a) giving up on all obligations and political statements so as to ensure effective actions at governmental level; (b) documenting local needs so as to establish a world chart; (c) supporting mass schooling through state involvement for promoting individual emancipation; (d) promoting curricula designed on separate subjects so as to guarantee harmonious complete personal growth; (e) advocating scientific objectivity for spreading the methods and principles of New Education; (f) acting upon public schooling, the reserved hunting grounds of nations, for building up international education.

Notre contribution présente un volet d'une recherche de plus grande envergure qui étudie la manière dont évolue la fabrique des savoirs dans le champ pédagogique depuis le milieu du 19e jusqu'à la fin du 20e siècle. L'enjeu est de dégager l'évolution du profil des acteurs individuels et collectifs (émanant des champs pratiques, administratifs, politiques, scientifiques) qui contribuent à la construction des savoirs en éducation et de cerner l'évolution de leur activité intellectuelle (notamment sur la base de leurs publications). Nous postulons l'existence de trois strates : la montée des praticiens, l'essor des sciences de l'éducation puis l'emprise de l'expertise. Cette contribution se focalise sur la deuxième strate, en concentrant l'analyse sur l'évolution des personnes spécialisées dans la recherche éducationnelle et œuvrant dans le cadre d'institutions créées à cet effet (instituts et universités). L'enquête porte sur l'ensemble des sites universitaires suisses où les sciences de l'éducation se déploient durant la période concernée. A la confluence de traditions académiques contrastées, la Suisse constitue un laboratoire privilégié pour dégager des configurations contrastées en fonction des contextes historiques et culturels.