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La Grèce est depuis plusieurs années au cœur de l'actualité en raison de la crise qui touche ses finances publiques, ainsi que de sa position sur les routes migratoires méditerranéennes. Ces nouveaux phénomènes s'inscrivent pourtant dans la continuité des périodes précédentes, où tensions géopolitiques comme immigration soudaine ont contribué à donner de ce pays une image d'altérité manifeste en Europe, et à développer au sein de sa société un sentiment de marginalité voire d'exclusion. Par la présentation d'enquêtes menées ces dix dernières années en Grèce, cet ouvrage rend compte de ces transformations à partir du renforcement, généralement vu comme une réaction à la mondialisation, du recours au passé et à la mémoire dans le fonctionnement de ses territoires. Différents exemples, pris dans les régions frontalières du pays, permettent ainsi d'illustrer comment la mondialisation y est allée de pair avec le renforcement apparemment paradoxal d'une multitude de liens et de réseaux qui se fondent sur un passé particulier. Sans ramener inexorablement vers les questions de permanences sociales ou de tradition, qui ont contribué à réduire la Grèce, les Balkans comme la Méditerranée à des lieux d'ethnicisation, de conservatisme ou de pratiques anticiviques, cet ouvrage rappelle que le Sud-Est européen demeure un laboratoire pertinent pour mener une analyse des relations passé/présent dans l'Europe contemporaine

Dans son histoire récente, la région de Thesprotie (nord-ouest du territoire grec) a été le théâtre de violences interreligieuses entre communautés chrétienne orthodoxe et musulmane sur fond de contentieux frontalier entre Grèce et Albanie. Ces tensions se sont achevées à la fin des années 1940 avec le départ des musulmans et l'avènement de la guerre froide qui a positionné ces deux pays de part et d'autre du rideau de fer. Un demi-siècle plus tard, à partir de 1990, la nouvelle situation de contact entre les sociétés grecque et albanaise procédant de l'ouverture de la frontière semble avoir conduit localement à une réactualisation de la mémoire de ce contentieux et des violences qu'il a occasionnées il y a plusieurs décennies. Cette nouvelle dynamique prend place dans un ensemble de processus qui touche cette province périphérique du territoire grec et questionne les interprétations que peuvent avoir ses habitants de ce passé comme de leur identité.

Au cours des premières décennies du xx e siècle, et malgré un passé pluriséculaire, la force de l'émigration, les persécutions puis la déportation ont eu raison de la communauté juive de Rhodes. Pourtant, au début des années 2000, la mémoire de cette présence a retrouvé une certaine vitalité sous l'impulsion de différents acteurs. C'est ainsi que la dernière synagogue de l'île, le Kahal Kadosh Shalom , se trouve désormais être au cœur au centre de nouvelles pratiques et de commémorations. Elle a même connu des transformations matérielles importantes qui l'ont placée au centre d'un véritable « complexe de mémoire », en prise avec le contexte local mais aussi avec des réseaux internationaux à dimensions planétaires.

Résumé La communauté juive de Rhodes a complètement disparu du lieu qu'elle habitait depuis de nombreux siècles après sa déportation quasi totale par l'armée allemande en 1944. Pourtant, les descendants des survivants ou des branches ayant quitté Rhodes avant guerre conservent souvent le souvenir de cette origine. En étudiant particulièrement les agencements spatiaux des dispositifs de mémoire, cet article vise à analyser les modalités de sa transmission entre les générations.

Since 2008, Greece has been at the centre of European current affairs due to the financial and economic crisis. However, it should not be forgotten that before the current crisis the political upheavals of the early 1990s and the collapse of Marxist-inspired regimes had already radically transformed the face of the country. These transformations have been seen as a return of the Balkans' question, raising issues of border disputes and migration, minorities and national inclusion. They have had far-reaching consequences on the relations between Greek society and its peripheries, and what some have deemed to be its destabilising diversity. In this context, the material presented in this book examines the strengthening of discourses of belonging which draw legitimacy from a glorification of the past and tradition. The fieldwork carried out over the past 15 years on the fringes of Greece has focused on groups who were stigmatised and distanced from standard definitions of Greekness. It provides an original perspective on the changes that the country has undergone in recent decades. The question of the nation-state's future is raised through close observation on the local scale, leading to a debate about the relationship between areal and reticular territory within the framework of globalisation. This book also aims to provide non-Francophone readers with access to research carried out on these issues in France, shifting the focus of Balkan Anglophone specialists for whom French publications remain a distant province.

Since 2008, Greece has been at the centre of European current affairs due to the financial and economic crisis. However, it should not be forgotten that before the current crisis the political upheavals of the early 1990s and the collapse of Marxist-inspired regimes had already radically transformed the face of the country. These transformations have been seen as a return of the Balkans' question, raising issues of border disputes and migration, minorities and national inclusion. They have had far-reaching consequences on the relations between Greek society and its peripheries, and what some have deemed to be its destabilising diversity. In this context, the material presented in this book examines the strengthening of discourses of belonging which draw legitimacy from a glorification of the past and tradition. The fieldwork carried out over the past 15 years on the fringes of Greece has focused on groups who were stigmatised and distanced from standard definitions of Greekness. It provides an original perspective on the changes that the country has undergone in recent decades. The question of the nation-state's future is raised through close observation on the local scale, leading to a debate about the relationship between areal and reticular territory within the framework of globalisation. This book also aims to provide non-Francophone readers with access to research carried out on these issues in France, shifting the focus of Balkan Anglophone specialists for whom French publications remain a distant province.

Durant les années 1990 et 2000, la Grèce devient une destination majeure pour des migrants venus des pays balkaniques, au premier rang desquels de nombreux Albanais. Passant du statut de pays d'émigration à celui de pays d'immigration et après avoir signé les accords de Schengen, la Grèce a fait évoluer son arsenal législatif en conséquence. Entre règlements communautaires et particularités nationales, la construction du dispositif de contrôle des frontières du nord de ce pays illustre la concomitance de dynamiques continentales et d'autres influencées sur le long cours par des représentations en lien avec les processus de construction nationale dans la région.

International audience ; In the 1990's, Greece became an important destination for migrants from other Balkan countries, and mostly from Albania. Moving from emigration to immigration country, Greece had to adapt its legal framework regarding this new context. Between EU community regulations and national particularities, the building of a dispositive of border control in Northern Greece illustrates the coexistence of continental dynamics and others influenced by social representations connected to the long term nation-building processes prevailing in this area. ; Durant les années 1990 et 2000, la Grèce devient une destination majeure pour des migrants venus des pays balkaniques, au premier rang desquels de nombreux Albanais. Passant du statut de pays d'émigration à celui de pays d'immigration et après avoir signé les accords de Schengen, la Grèce a fait évoluer son arsenal législatif en conséquence. Entre règlements communautaires et particularités nationales, la construction du dispositif de contrôle des frontières du nord de ce pays illustre la concomitance de dynamiques continentales et d'autres influencées sur le long cours par des représentations en lien avec les processus de construction nationale dans la région.

International audience ; In the 1990's, Greece became an important destination for migrants from other Balkan countries, and mostly from Albania. Moving from emigration to immigration country, Greece had to adapt its legal framework regarding this new context. Between EU community regulations and national particularities, the building of a dispositive of border control in Northern Greece illustrates the coexistence of continental dynamics and others influenced by social representations connected to the long term nation-building processes prevailing in this area. ; Durant les années 1990 et 2000, la Grèce devient une destination majeure pour des migrants venus des pays balkaniques, au premier rang desquels de nombreux Albanais. Passant du statut de pays d'émigration à celui de pays d'immigration et après avoir signé les accords de Schengen, la Grèce a fait évoluer son arsenal législatif en conséquence. Entre règlements communautaires et particularités nationales, la construction du dispositif de contrôle des frontières du nord de ce pays illustre la concomitance de dynamiques continentales et d'autres influencées sur le long cours par des représentations en lien avec les processus de construction nationale dans la région.

International audience ; Traversés de points de passages aléatoires et de frontières fermées et militarisées, les pays des Balkans se trouvent au coeur de la route que tentaient d'emprunter les réfugiés durant la crise migratoire de l'été 2015. Les Etats balkaniques ont géré leur position géographique stratégique entre une adaptation aux règles de la coopération migratoire européenne et le replu sur des logiques nationalistes et exculsives. Résultat, l'espace de transit balkanique représente un nouveau limes, une frontière extérieure, lointaine et mouvante, désormais quasi infranchissable. Multiplilant les murs, cette zone tampon est devenue le repoussoir de l'Europe.

International audience ; Traversés de points de passages aléatoires et de frontières fermées et militarisées, les pays des Balkans se trouvent au coeur de la route que tentaient d'emprunter les réfugiés durant la crise migratoire de l'été 2015. Les Etats balkaniques ont géré leur position géographique stratégique entre une adaptation aux règles de la coopération migratoire européenne et le replu sur des logiques nationalistes et exculsives. Résultat, l'espace de transit balkanique représente un nouveau limes, une frontière extérieure, lointaine et mouvante, désormais quasi infranchissable. Multiplilant les murs, cette zone tampon est devenue le repoussoir de l'Europe.