La diplomatie belgo-liégeoise à l'épreuve: étude sur les relations entre les Pays-Bas autrichiens et la principauté de Liège au XVIIIe siècle
In: Études sur le XVIIIe siècle 30
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In: Études sur le XVIIIe siècle 30
In: Études sur le XVIIIe siècle
Au XVIIIe siècle, quelques jours, parfois une dizaine à la mauvaise saison, étaient nécessaires pour accomplir le trajet entre Bruxelles et Vienne, lequel passait le plus souvent par Cologne, Francfort, Nuremberg, Ratisbonne, Passau et Linz. On peut penser que, ne quittant à aucun moment les terres d'Empire à l'occasion de ce périple, et en un temps où le cosmopolitisme des élites était une réalité, renforcée encore par l'usage commun de la langue française, les voyageurs n'avaient que peu d'occasions de ressentir un véritable dépaysement. Ce serait sans compter, cependant, avec le caractère très particulier des Pays-Bas au sein de l'ensemble habsbourgeois. Farouchement attachés à leurs privilèges, tant locaux que principautaires, ces derniers avaient laissé, en effet, au très lucide prince de Kaunitz, qui y séjourna longuement au cours des années 1730 et 1740, une impression peu favorable quant à leur aptitude à accepter la politique de centralisation qu'il allait pourtant bientôt se charger de mettre en oeuvre, depuis Vienne, au côté des souverains. C'est donc dans le contexte d'une permanente tension entre les velléités centralisatrices viennoises et le particularisme « belgique » que de nombreux serviteurs de « la Monarchie » furent amenés à se déplacer d'une capitale à l'autre tout au long des huit décennies du régime autrichien. On peut s'étonner, d'ailleurs, de ce qu'avant le très autocrate et très inquisiteur Joseph II, aucun souverain viennois n'ait jugé utile de séjourner dans cette « plus belle province de la Monarchie », pourtant régulièrement vantée par Marie-Thérèse. À proximité de Paris tout comme des îles britanniques, autre centre important des Lumières, Bruxelles était à même d'offrir à Vienne – capitale est-européenne quelque peu excentrée et pas encore promue alors à ce rang de métropole culturelle qu'elle occupera brillamment lors des décennies suivantes – un contact avec toutes les nouveautés provenant notamment de la galaxie parisienne. On le devine, danseurs, comédiens et musiciens circulaient alors sans frein entre les deux capitales, tout comme les goûts et les modes. Mais les idées paraissent, quant à elles, avoir eu un peu plus de difficultés à franchir les frontières.
In: Études sur le XVIIIe siècle
Sans doute peu de lecteurs du XXIe siècle répondraient-ils positivement à la question posée en tête de ce volume. Et le fait même de la formuler pourra paraître incongru à certains. Ce serait ignorer, cependant, qu'en plein siècle des Lumières, de nombreuses voix se sont élevées afin de mettre en doute les progrès dont on se targuait généralement dans les différents domaines de la connaissance, des arts, ou de la littérature. Et ces voix n'émanaient pas que des anti-Philosophes, loin de là ! Dans le camp philosophique lui-même, en effet, les plus grands auteurs – Rousseau, bien sûr, mais aussi Voltaire ou Montesquieu, par exemple – n'ont pas manqué de comparer défavorablement leur propre époque aux précédentes, jugées plus fastes, plus sages, ou comme ayant fait preuve d'un goût plus sûr. L'Antiquité, cela va sans dire, se taille la part du lion dans ces flatteuses appréciations, mais aussi, notamment, un XVIIe siècle que l'éclat du Roi-Soleil nimbe encore d'un énorme prestige. Tour à tour, tous les domaines de la vie sociale sont passés au crible par les censeurs des turpitudes du siècle : décadence des mœurs et de l'art de gouverner, laxisme des couvents, recul de la musique religieuse « inspirée » devant un art désormais voué au seul plaisir, vogue dangereuse du « trop facile » roman, utopies aventureuses menaçant l'ordre social, etc. Face à ce constat plutôt inquiétant, nombreux sont les auteurs qui finissent par se résigner à imputer aux "lois de l'histoire", ou même parfois à celles de l'évolution de l'espèce humaine, cette "décadence" somme toute inévitable puisqu'elle se trouve en germe dans tous les apogées. On se convainc par conséquent, en lisant ce volume, que derrière le masque optimiste des Lumières et le rêve qu'elles portent d'un avenir meilleur, les hommes du dix-huitième siècle pressentaient avec acuité, mais non sans trouble, l'approche d'une impasse sociétale qui allait bientôt conduire aux bouleversements que l'on sait. Entre nostalgie d'un passé déjà révolu et anticipations audacieuses d'un futur encore espéré, la tension était manifestement devenue trop forte. À l'appel du Groupe d'étude du XVIIIe siècle de l'Université libre de Bruxelles, une quinzaine de chercheurs belges, français et italiens se sont penchés sur ce thème, sans doute trop peu étudié jusqu'à présent.