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L'Algérie et sa Constitution, l'impossible rendez-vous ?
In: Maghreb, Machrek: revue trimestrielle = al- Maġrib wa-ʾl-mašriq, Band 244, Heft 2, S. 51-62
ISSN: 2271-6815
Le mouvement populaire engagé à travers toute l'Algérie en février 2019 ne poursuit, dans ses expressions individuelles ou ses manifestations collectives, qu'un seul but : obtenir du pouvoir qu'il mette fin aux atteintes portées depuis trop longtemps à l'intégrité de tous et de chacun et qu'il cède la place à un État de droit. Cette contribution est à la fois l'occasion d'un retour sur l'histoire constitutionnelle heurtée de l'Algérie et d'une réflexion sur les conditions d'instauration d'un État de droit robuste et durable.
L´Algérie et sa constitution, l´impossible rendez-vous?
In: Maghreb, Machrek: revue trimestrielle = al- Maġrib wa-ʾl-mašriq, Heft 244, S. 51-62
ISSN: 1762-3162, 0336-6324, 1241-5294
World Affairs Online
L'imitation du modèle de l'Union Européenne dans d'autres contextes régionaux
International audience ; L'Union européenne a-t-elle effectivement essaimé ? Cela pose le problème de l'identification des (éventuels) canaux d'imprégnation. Sans doute parce que la migration ou le transfert, même partiel, du modèle s'opère fréquemment au moyen de vecteurs extra-juridiques : un imaginaire, parfois honteusement, partagé. Plus que le fruit d'une démarche d'acquisition plus ou moins achevée ou assumée, les expériences d'intégration conduites ailleurs qu'en Europe n'illustrent-elles pas plutôt cette vérité selon laquelle des préoccupations comparables (fermer une parenthèse historique ; jeter les bases d'une transition politique…) produisent des résultats tendanciellement similaires ? Dit autrement, il y aurait des « invariants » de l'intégration régionale se manifestant quelles que soient les circonstances considérées. Il s'agirait donc moins de décrire un processus de mimétisme réfléchi que de vérifier l'hypothèse selon laquelle la réunion d'un certain nombre de facteurs suscite immanquablement une convergence spontanée. Finalement, il est sans doute plus aisé de montrer en quoi l'imitation du modèle européen est pour l'essentiel pour ne pas dire toujours inachevée.
BASE
Intérêt général et droit de l'Union européenne – Réflexions cursives sur une notion "indéfinissable"
International audience ; L'intérêt général est partout, « colonisant » toujours plus d'espaces juridiques et politiques . Au principe même de l'autorité de l'Union , son identification pourtant reste singulièrement difficile. Objet nimbé de mystère, ses contours sont ici comme ailleurs souvent tenus pour « indéfinissables » . A y regarder plus attentivement, moins qu'indéfinissable l'intérêt général est ce que l'on appellerait en chimie un élément « instable ». En effet, il reste par complexion « contingent » tant il dépend des « circonstances de temps et de lieu et des choix politiques » . Son énonciation est, en outre, obérée par le fait que nous nous plaçons ici dans une perspective qui n'est plus étroitement nationale mais bien européenne. Cette dimension du sujet ne peut évidemment rester sans conséquence sur la façon dont est pensé l'intérêt général de l'Union. Par la nature et la diversité des acteurs qu'elle implique, sa formulation ne peut jamais être que le produit d'une transaction complexe. Au-delà, l'intérêt général se voit assignés des fonctions essentielles qui en soulignent un peu plus encore la centralité.
BASE
L'identité de l'Union européenne
International audience ; L'Union at -elle acquis sa propre identité ? Telle est « l'inquiétante question » que posait récemment un observateur attentif de la vie institutionnelle et juridique européenne 1. Sans doute convient-il avant que d'aller plus loin de lever une hypothèque et d'énoncer quelques éléments de définition. De quoi parle-ton exactement ? L'identité européenne ou l'identité de l'Union européenne ? Deux concepts proches mais distincts. Tout le monde s'accorde à le souligner mais beaucoup finissent par l'oublier, comme s'ils finissaient par s'absorber. Ce glissement est probablement lié à la confusion sémantique baignant ces notions 2. On estime généralement que l'identité se compose d'éléments distinctifs permettant de reconnaître un individu ou une collectivité sans confusion possible avec un ou une autre. On ne pourrait se « poser qu'en s'opposant ou du moins si la formule a quelque chose de choquant qu'en se différenciant ou en se distinguant » 3. On peut aussi considérer, sur un mode plus positif, que l'identité est un élément indispensable à la constitution de cet « univers mental partagé », cette « coalition des cultures » qu'est une civilisation 4. L'identité révèle ainsi une « conscience de l'identique et donc un sentiment d'appartenance à la collectivité ou au groupe » 5. En tout état de cause, Il est illusoire d'imaginer que les éléments fondant l'identité d'un groupe puissent être figés pour l'éternité, les civilisations ayant elles aussi leurs « saisons » 6. La fixité ne pourrait être ici que le présage d'une destinée tragique. Il ne saurait en aller différemment pour l'Europe 7. Il y a sans doute autant de perceptions de l'identité européenne qu'il y a d'auteurs à s'être intéressés au sujet. Sans nullement prétendre à l'exhaustivité, nous n'en évoquerons ici que quelques-uns. Ainsi, pour G. Steiner 8 , on peut obtenir les jalons essentiels de la « notion d'Europe » en tenant compte principalement de cinq éléments. A cet effet, il convient d'abord de dessiner la « carte des cafés », ces lieux de rendezvous et de complot, de débat intellectuel et de commérage, place du flâneur, du poète ou du métaphysicien armé de son carnet. Quand l'Europe plonge dans les ténèbres, Jaurès est assassiné dans un café. L'Europe est également un continent de pérégrins jouissant de la fluidité d'un espace que ne strie aucun obstacle naturel infranchissable. Les grands pèlerinages « tracent les routes de l'Europe au-dessus des frontières ethniques ou politiques » 9. L'émergence de pôles universitaires (Paris, Bologne…) tisse des liens d'échanges intellectuels et favorise le rayonnement du savoir 10. L'Europe est la 1-P. Mengozzi, « La contribution du droit à la détermination de l'identité de l'Union européenne », RDUE, 1/2012, p. 16. 2-Il est vrai que selon la langue utilisée, la situation est susceptible de varier. 3-C. Blumann, "Citoyenneté européenne et champ d'application personnel du droit communautaire", RAE-LEA 2003-2004 nº 1, p. 77. 4-Y. Ben Achour, Le rôle des civilisations dans le système international, droit et relations internationales, Bruylant, 2003, p. 15. 5-R. Franck, « Conclusions », Relations internationales, 2009/4, nº 140, p. 113. 6-ibid., p. 18. 7-Braudel ne considérait-il pas que l'identité française a constamment évolué au point que cette que cette évolutivité ait fini par en constituer la principale caractéristique.
BASE
Principe majoritaire et création d'organisations européennes d'intégration
International audience ; Principe majoritaire et création de d'organisations européennes d'intégration Rostane MEHDI, Professeur à l'Université d'Aix-Marseille et au Collège d'Europe de Bruges Chaire Jean Monnet ad personam Directeur de Sciences Po Aix Que l'on nous pardonne d'ouvrir cette courte contribution par l'énoncé d'une cascade de questions. Il faut y voir moins le signe d'un inconfort intellectuel que l'indice de la (réjouissante) curiosité que suscite le sujet soumis à notre réflexion. S'agit-il de découvrir au fondement des organisations européennes d'intégration (nous parlerons ici principalement de la famille « communautaire » ce qui n'exclura pas quelques évocations du Conseil de l'Europe) l'expression d'un principe majoritaire ? Du reste, de quelle majorité parle-ton ? Une majorité au sein de la communauté des Etats membres ? Une majorité au sein de la communauté des citoyens ? Il est vrai que l'Union est à la fois une « fédération d'Etats », une « fédération de citoyens » et une fédération démocratique 1 ce qui laisse pressentir l'emprise qui sera celle du principe majoritaire sur son fonctionnement entendu ici au plus large. Au-delà, quel rapport le principe majoritaire entretient-il au processus d'intégration ? Une relation étroite bien que partielle. Pour dire les choses autrement, le principe majoritaire semble être au point de tension entre deux méthodes de construction juridique et politique de l'intégration. La réalisation du projet procède de la mobilisation de méthodes variant en fonction du degré d'ambition collective ou, à l'inverse, du souci que les Etats membres auraient de maîtriser la dynamique d'européanisation sectorielle. A ce titre, la méthode « communautaire » associe instances nationales et institutions européennes ; favorise une prise de décision collaborative ; privilégie le recours de principe à la majorité (qualifiée), suppose une acceptation par les Etats de leur possible (quoique, en pratique, hautement improbable) mise en minorité ; réserve à une sorte de « tiers objectif », la Commission, le soin d'exercer, au moins nominalement, la fonction d'initiative législative. Cette méthode est un puissant dissolvant des divergences et un facteur de réduction de l'impact de rapports de puissance circonstanciels sur les processus de décision. Il n'y est toutefois recouru que dans un nombre limité d'hypothèses ; celles où les Etats membres jugent qu'un intérêt commun prime leurs préoccupations singulières. Aussi, coexiste-t-elle, notamment pour ce qui concerne les questions proches du noyau dur de la souveraineté, avec une stratégie de coopération intergouvernementale plus conforme aux règles traditionnellement en usage dans les organisations internationales classiques. Sans entrer dans un débat récurrent, nous considérons toutefois que celle-ci poursuit en réalité, le même objectif que la précédente, mais selon un rythme et des moyens sensiblement plus respectueux de l'indépendance (relative) des Etats membres. Il s'agit, dans cette perspective, de rapprocher et de coordonner des politiques dont les motivations initiales et les ressorts demeurent substantiellement nationaux. Par sa progressivité, elle permet de susciter chez des gouvernements parfois rétifs à la perspective d'un transfert plus poussé de compétences une logique de convergence consentie.
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Intérêt général et droit de l'Union européenne – Réflexions cursives sur une notion "indéfinissable"
International audience ; L'intérêt général est partout, « colonisant » toujours plus d'espaces juridiques et politiques . Au principe même de l'autorité de l'Union , son identification pourtant reste singulièrement difficile. Objet nimbé de mystère, ses contours sont ici comme ailleurs souvent tenus pour « indéfinissables » . A y regarder plus attentivement, moins qu'indéfinissable l'intérêt général est ce que l'on appellerait en chimie un élément « instable ». En effet, il reste par complexion « contingent » tant il dépend des « circonstances de temps et de lieu et des choix politiques » . Son énonciation est, en outre, obérée par le fait que nous nous plaçons ici dans une perspective qui n'est plus étroitement nationale mais bien européenne. Cette dimension du sujet ne peut évidemment rester sans conséquence sur la façon dont est pensé l'intérêt général de l'Union. Par la nature et la diversité des acteurs qu'elle implique, sa formulation ne peut jamais être que le produit d'une transaction complexe. Au-delà, l'intérêt général se voit assignés des fonctions essentielles qui en soulignent un peu plus encore la centralité.
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L'identité de l'Union européenne
International audience ; L'Union at -elle acquis sa propre identité ? Telle est « l'inquiétante question » que posait récemment un observateur attentif de la vie institutionnelle et juridique européenne 1. Sans doute convient-il avant que d'aller plus loin de lever une hypothèque et d'énoncer quelques éléments de définition. De quoi parle-ton exactement ? L'identité européenne ou l'identité de l'Union européenne ? Deux concepts proches mais distincts. Tout le monde s'accorde à le souligner mais beaucoup finissent par l'oublier, comme s'ils finissaient par s'absorber. Ce glissement est probablement lié à la confusion sémantique baignant ces notions 2. On estime généralement que l'identité se compose d'éléments distinctifs permettant de reconnaître un individu ou une collectivité sans confusion possible avec un ou une autre. On ne pourrait se « poser qu'en s'opposant ou du moins si la formule a quelque chose de choquant qu'en se différenciant ou en se distinguant » 3. On peut aussi considérer, sur un mode plus positif, que l'identité est un élément indispensable à la constitution de cet « univers mental partagé », cette « coalition des cultures » qu'est une civilisation 4. L'identité révèle ainsi une « conscience de l'identique et donc un sentiment d'appartenance à la collectivité ou au groupe » 5. En tout état de cause, Il est illusoire d'imaginer que les éléments fondant l'identité d'un groupe puissent être figés pour l'éternité, les civilisations ayant elles aussi leurs « saisons » 6. La fixité ne pourrait être ici que le présage d'une destinée tragique. Il ne saurait en aller différemment pour l'Europe 7. Il y a sans doute autant de perceptions de l'identité européenne qu'il y a d'auteurs à s'être intéressés au sujet. Sans nullement prétendre à l'exhaustivité, nous n'en évoquerons ici que quelques-uns. Ainsi, pour G. Steiner 8 , on peut obtenir les jalons essentiels de la « notion d'Europe » en tenant compte principalement de cinq éléments. A cet effet, il convient d'abord de dessiner la « carte des cafés », ces lieux de rendezvous et de complot, de débat intellectuel et de commérage, place du flâneur, du poète ou du métaphysicien armé de son carnet. Quand l'Europe plonge dans les ténèbres, Jaurès est assassiné dans un café. L'Europe est également un continent de pérégrins jouissant de la fluidité d'un espace que ne strie aucun obstacle naturel infranchissable. Les grands pèlerinages « tracent les routes de l'Europe au-dessus des frontières ethniques ou politiques » 9. L'émergence de pôles universitaires (Paris, Bologne…) tisse des liens d'échanges intellectuels et favorise le rayonnement du savoir 10. L'Europe est la 1-P. Mengozzi, « La contribution du droit à la détermination de l'identité de l'Union européenne », RDUE, 1/2012, p. 16. 2-Il est vrai que selon la langue utilisée, la situation est susceptible de varier. 3-C. Blumann, "Citoyenneté européenne et champ d'application personnel du droit communautaire", RAE-LEA 2003-2004 nº 1, p. 77. 4-Y. Ben Achour, Le rôle des civilisations dans le système international, droit et relations internationales, Bruylant, 2003, p. 15. 5-R. Franck, « Conclusions », Relations internationales, 2009/4, nº 140, p. 113. 6-ibid., p. 18. 7-Braudel ne considérait-il pas que l'identité française a constamment évolué au point que cette que cette évolutivité ait fini par en constituer la principale caractéristique.
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Principe majoritaire et création d'organisations européennes d'intégration
International audience ; Principe majoritaire et création de d'organisations européennes d'intégration Rostane MEHDI, Professeur à l'Université d'Aix-Marseille et au Collège d'Europe de Bruges Chaire Jean Monnet ad personam Directeur de Sciences Po Aix Que l'on nous pardonne d'ouvrir cette courte contribution par l'énoncé d'une cascade de questions. Il faut y voir moins le signe d'un inconfort intellectuel que l'indice de la (réjouissante) curiosité que suscite le sujet soumis à notre réflexion. S'agit-il de découvrir au fondement des organisations européennes d'intégration (nous parlerons ici principalement de la famille « communautaire » ce qui n'exclura pas quelques évocations du Conseil de l'Europe) l'expression d'un principe majoritaire ? Du reste, de quelle majorité parle-ton ? Une majorité au sein de la communauté des Etats membres ? Une majorité au sein de la communauté des citoyens ? Il est vrai que l'Union est à la fois une « fédération d'Etats », une « fédération de citoyens » et une fédération démocratique 1 ce qui laisse pressentir l'emprise qui sera celle du principe majoritaire sur son fonctionnement entendu ici au plus large. Au-delà, quel rapport le principe majoritaire entretient-il au processus d'intégration ? Une relation étroite bien que partielle. Pour dire les choses autrement, le principe majoritaire semble être au point de tension entre deux méthodes de construction juridique et politique de l'intégration. La réalisation du projet procède de la mobilisation de méthodes variant en fonction du degré d'ambition collective ou, à l'inverse, du souci que les Etats membres auraient de maîtriser la dynamique d'européanisation sectorielle. A ce titre, la méthode « communautaire » associe instances nationales et institutions européennes ; favorise une prise de décision collaborative ; privilégie le recours de principe à la majorité (qualifiée), suppose une acceptation par les Etats de leur possible (quoique, en pratique, hautement improbable) mise en minorité ; réserve à une sorte de « tiers objectif », la Commission, le soin d'exercer, au moins nominalement, la fonction d'initiative législative. Cette méthode est un puissant dissolvant des divergences et un facteur de réduction de l'impact de rapports de puissance circonstanciels sur les processus de décision. Il n'y est toutefois recouru que dans un nombre limité d'hypothèses ; celles où les Etats membres jugent qu'un intérêt commun prime leurs préoccupations singulières. Aussi, coexiste-t-elle, notamment pour ce qui concerne les questions proches du noyau dur de la souveraineté, avec une stratégie de coopération intergouvernementale plus conforme aux règles traditionnellement en usage dans les organisations internationales classiques. Sans entrer dans un débat récurrent, nous considérons toutefois que celle-ci poursuit en réalité, le même objectif que la précédente, mais selon un rythme et des moyens sensiblement plus respectueux de l'indépendance (relative) des Etats membres. Il s'agit, dans cette perspective, de rapprocher et de coordonner des politiques dont les motivations initiales et les ressorts demeurent substantiellement nationaux. Par sa progressivité, elle permet de susciter chez des gouvernements parfois rétifs à la perspective d'un transfert plus poussé de compétences une logique de convergence consentie.
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Intérêt général et droit de l'Union européenne – Réflexions cursives sur une notion "indéfinissable"
International audience ; L'intérêt général est partout, « colonisant » toujours plus d'espaces juridiques et politiques . Au principe même de l'autorité de l'Union , son identification pourtant reste singulièrement difficile. Objet nimbé de mystère, ses contours sont ici comme ailleurs souvent tenus pour « indéfinissables » . A y regarder plus attentivement, moins qu'indéfinissable l'intérêt général est ce que l'on appellerait en chimie un élément « instable ». En effet, il reste par complexion « contingent » tant il dépend des « circonstances de temps et de lieu et des choix politiques » . Son énonciation est, en outre, obérée par le fait que nous nous plaçons ici dans une perspective qui n'est plus étroitement nationale mais bien européenne. Cette dimension du sujet ne peut évidemment rester sans conséquence sur la façon dont est pensé l'intérêt général de l'Union. Par la nature et la diversité des acteurs qu'elle implique, sa formulation ne peut jamais être que le produit d'une transaction complexe. Au-delà, l'intérêt général se voit assignés des fonctions essentielles qui en soulignent un peu plus encore la centralité.
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L'identité de l'Union européenne
International audience ; L'Union at -elle acquis sa propre identité ? Telle est « l'inquiétante question » que posait récemment un observateur attentif de la vie institutionnelle et juridique européenne 1. Sans doute convient-il avant que d'aller plus loin de lever une hypothèque et d'énoncer quelques éléments de définition. De quoi parle-ton exactement ? L'identité européenne ou l'identité de l'Union européenne ? Deux concepts proches mais distincts. Tout le monde s'accorde à le souligner mais beaucoup finissent par l'oublier, comme s'ils finissaient par s'absorber. Ce glissement est probablement lié à la confusion sémantique baignant ces notions 2. On estime généralement que l'identité se compose d'éléments distinctifs permettant de reconnaître un individu ou une collectivité sans confusion possible avec un ou une autre. On ne pourrait se « poser qu'en s'opposant ou du moins si la formule a quelque chose de choquant qu'en se différenciant ou en se distinguant » 3. On peut aussi considérer, sur un mode plus positif, que l'identité est un élément indispensable à la constitution de cet « univers mental partagé », cette « coalition des cultures » qu'est une civilisation 4. L'identité révèle ainsi une « conscience de l'identique et donc un sentiment d'appartenance à la collectivité ou au groupe » 5. En tout état de cause, Il est illusoire d'imaginer que les éléments fondant l'identité d'un groupe puissent être figés pour l'éternité, les civilisations ayant elles aussi leurs « saisons » 6. La fixité ne pourrait être ici que le présage d'une destinée tragique. Il ne saurait en aller différemment pour l'Europe 7. Il y a sans doute autant de perceptions de l'identité européenne qu'il y a d'auteurs à s'être intéressés au sujet. Sans nullement prétendre à l'exhaustivité, nous n'en évoquerons ici que quelques-uns. Ainsi, pour G. Steiner 8 , on peut obtenir les jalons essentiels de la « notion d'Europe » en tenant compte principalement de cinq éléments. A cet effet, il convient d'abord de dessiner la « carte des cafés », ces lieux de rendezvous et de complot, de débat intellectuel et de commérage, place du flâneur, du poète ou du métaphysicien armé de son carnet. Quand l'Europe plonge dans les ténèbres, Jaurès est assassiné dans un café. L'Europe est également un continent de pérégrins jouissant de la fluidité d'un espace que ne strie aucun obstacle naturel infranchissable. Les grands pèlerinages « tracent les routes de l'Europe au-dessus des frontières ethniques ou politiques » 9. L'émergence de pôles universitaires (Paris, Bologne…) tisse des liens d'échanges intellectuels et favorise le rayonnement du savoir 10. L'Europe est la 1-P. Mengozzi, « La contribution du droit à la détermination de l'identité de l'Union européenne », RDUE, 1/2012, p. 16. 2-Il est vrai que selon la langue utilisée, la situation est susceptible de varier. 3-C. Blumann, "Citoyenneté européenne et champ d'application personnel du droit communautaire", RAE-LEA 2003-2004 nº 1, p. 77. 4-Y. Ben Achour, Le rôle des civilisations dans le système international, droit et relations internationales, Bruylant, 2003, p. 15. 5-R. Franck, « Conclusions », Relations internationales, 2009/4, nº 140, p. 113. 6-ibid., p. 18. 7-Braudel ne considérait-il pas que l'identité française a constamment évolué au point que cette que cette évolutivité ait fini par en constituer la principale caractéristique.
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Principe majoritaire et création d'organisations européennes d'intégration
International audience ; Principe majoritaire et création de d'organisations européennes d'intégration Rostane MEHDI, Professeur à l'Université d'Aix-Marseille et au Collège d'Europe de Bruges Chaire Jean Monnet ad personam Directeur de Sciences Po Aix Que l'on nous pardonne d'ouvrir cette courte contribution par l'énoncé d'une cascade de questions. Il faut y voir moins le signe d'un inconfort intellectuel que l'indice de la (réjouissante) curiosité que suscite le sujet soumis à notre réflexion. S'agit-il de découvrir au fondement des organisations européennes d'intégration (nous parlerons ici principalement de la famille « communautaire » ce qui n'exclura pas quelques évocations du Conseil de l'Europe) l'expression d'un principe majoritaire ? Du reste, de quelle majorité parle-ton ? Une majorité au sein de la communauté des Etats membres ? Une majorité au sein de la communauté des citoyens ? Il est vrai que l'Union est à la fois une « fédération d'Etats », une « fédération de citoyens » et une fédération démocratique 1 ce qui laisse pressentir l'emprise qui sera celle du principe majoritaire sur son fonctionnement entendu ici au plus large. Au-delà, quel rapport le principe majoritaire entretient-il au processus d'intégration ? Une relation étroite bien que partielle. Pour dire les choses autrement, le principe majoritaire semble être au point de tension entre deux méthodes de construction juridique et politique de l'intégration. La réalisation du projet procède de la mobilisation de méthodes variant en fonction du degré d'ambition collective ou, à l'inverse, du souci que les Etats membres auraient de maîtriser la dynamique d'européanisation sectorielle. A ce titre, la méthode « communautaire » associe instances nationales et institutions européennes ; favorise une prise de décision collaborative ; privilégie le recours de principe à la majorité (qualifiée), suppose une acceptation par les Etats de leur possible (quoique, en pratique, hautement improbable) mise en minorité ; réserve à une sorte de « tiers objectif », la Commission, le soin d'exercer, au moins nominalement, la fonction d'initiative législative. Cette méthode est un puissant dissolvant des divergences et un facteur de réduction de l'impact de rapports de puissance circonstanciels sur les processus de décision. Il n'y est toutefois recouru que dans un nombre limité d'hypothèses ; celles où les Etats membres jugent qu'un intérêt commun prime leurs préoccupations singulières. Aussi, coexiste-t-elle, notamment pour ce qui concerne les questions proches du noyau dur de la souveraineté, avec une stratégie de coopération intergouvernementale plus conforme aux règles traditionnellement en usage dans les organisations internationales classiques. Sans entrer dans un débat récurrent, nous considérons toutefois que celle-ci poursuit en réalité, le même objectif que la précédente, mais selon un rythme et des moyens sensiblement plus respectueux de l'indépendance (relative) des Etats membres. Il s'agit, dans cette perspective, de rapprocher et de coordonner des politiques dont les motivations initiales et les ressorts demeurent substantiellement nationaux. Par sa progressivité, elle permet de susciter chez des gouvernements parfois rétifs à la perspective d'un transfert plus poussé de compétences une logique de convergence consentie.
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Intérêt général et droit de l'Union européenne – Réflexions cursives sur une notion "indéfinissable"
International audience ; L'intérêt général est partout, « colonisant » toujours plus d'espaces juridiques et politiques . Au principe même de l'autorité de l'Union , son identification pourtant reste singulièrement difficile. Objet nimbé de mystère, ses contours sont ici comme ailleurs souvent tenus pour « indéfinissables » . A y regarder plus attentivement, moins qu'indéfinissable l'intérêt général est ce que l'on appellerait en chimie un élément « instable ». En effet, il reste par complexion « contingent » tant il dépend des « circonstances de temps et de lieu et des choix politiques » . Son énonciation est, en outre, obérée par le fait que nous nous plaçons ici dans une perspective qui n'est plus étroitement nationale mais bien européenne. Cette dimension du sujet ne peut évidemment rester sans conséquence sur la façon dont est pensé l'intérêt général de l'Union. Par la nature et la diversité des acteurs qu'elle implique, sa formulation ne peut jamais être que le produit d'une transaction complexe. Au-delà, l'intérêt général se voit assignés des fonctions essentielles qui en soulignent un peu plus encore la centralité.
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L'imitation du modèle de l'Union Européenne dans d'autres contextes régionaux
International audience ; L'Union européenne a-t-elle effectivement essaimé ? Cela pose le problème de l'identification des (éventuels) canaux d'imprégnation. Sans doute parce que la migration ou le transfert, même partiel, du modèle s'opère fréquemment au moyen de vecteurs extra-juridiques : un imaginaire, parfois honteusement, partagé. Plus que le fruit d'une démarche d'acquisition plus ou moins achevée ou assumée, les expériences d'intégration conduites ailleurs qu'en Europe n'illustrent-elles pas plutôt cette vérité selon laquelle des préoccupations comparables (fermer une parenthèse historique ; jeter les bases d'une transition politique…) produisent des résultats tendanciellement similaires ? Dit autrement, il y aurait des « invariants » de l'intégration régionale se manifestant quelles que soient les circonstances considérées. Il s'agirait donc moins de décrire un processus de mimétisme réfléchi que de vérifier l'hypothèse selon laquelle la réunion d'un certain nombre de facteurs suscite immanquablement une convergence spontanée. Finalement, il est sans doute plus aisé de montrer en quoi l'imitation du modèle européen est pour l'essentiel pour ne pas dire toujours inachevée.
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