L'article s'intéresse à la façon dont, dans une ancienne colonie de peuplement en voie de décolonisation, la Nouvelle-Calédonie, la question sociale des violences faites aux femmes au sein des couples et des familles, qui touche davantage les Kanakes que les autres Calédoniennes, a été constituée en problème public. Après avoir rappelé l'ampleur de ces violences et examiné les caractéristiques des féminicides, qui révèlent des normes de genre très inégalitaires, le texte montre comment les formes de l'action publique diffèrent selon que celle-ci est initiée dans une perspective féministe ou familialiste. L'analyse du spectre des réponses politiques met en lumière le poids d'un familialisme rétrograde en lien avec l'héritage missionnaire et sa longue histoire d'hostilité au divorce.
En Nouvelle‑Calédonie, de 2007 à 2013, des tenants du pluralisme juridique réussirent à renvoyer les victimes de statut coutumier kanak pour l'indemnisation devant une juridiction civile avec assesseurs coutumiers, censée appliquer des principes de masculinité et de séniorité. Cette mesure différentialiste qui défavorisait surtout les filles et les femmes kanak victimes de violences genrées fut dénoncée par des associations de victimes et de femmes. Elle donna lieu à une controverse juridico‑politique que l'article retrace.
Des mobilisations féministes radicales ont tenté d'imposer, au début des années 1980, la lutte contre les dominations masculines à l'agenda politique de l'indépendantisme kanak. Si elles ont en partie échoué, leur audience s'est néanmoins élargie dans les années 1990 à travers le mouvement associatif. La période récente voit pourtant leur voix s'amoindrir dans un contexte qui semble inciter à mettre au second plan les divergences internes et à ne pas prêter le flanc aux instrumentalisations racistes de l'idéal d'égalité entre les sexes. Cette hiérarchisation des priorités pourrait s'avérer risquée, en particulier si l'écriture d'un droit coutumier kanak en venait à officialiser la différenciation des rôles sexués.
Résumé À partir de l'ethnographie d'une discothèque afro-antillaise à Paris, où se rencontrent des hommes « noirs » et des femmes « blanches » plus âgées qu'eux, l'article s'intéresse à une forme d'échanges économico-sexuels où le sens habituel de la transaction est renversé : les femmes fournissent la compensation économique pour les prestations affectives et sexuelles des hommes. Il montre une imbrication spécifique des normes de genre, d'âge, des stéréotypes racistes et des préjugés de classe ainsi que la force d'imposition des conceptions normatives de genre dans l'assujettissement des femmes.
Sommaire :Déwé Gorodé Wëibë nî ! Wëibë nî ! Wëibë nî ! • Alban Bensa • Vers l'émancipation • Paul Néaoutyine L'indépendance au présent • Louis-José Barbançon Des accords de Matignon à l'accord d'Ouvéa • Michel Naepels L'ordre et la morale • Mélissa Nayral Les événements d'Ouvéa : parler ou se taire ? • Marie-Adèle Jorédié L'école populaire kanak trente ans après • Adrian Muckle & Benoît Trépied Les transformations de la question métisse • Samuel GorohunaInégalités ethniques sur le marché de l'emploi • Nidoïsh NaisselineInégalités sociales et incarcération • Christine Demmer De la diversité des enjeux du nickel • Christine Salomon L'emploi des femmes kanak à Vavouto • Sonia Grochain La constitution de l'identité VPK • Marie Salaün L'autochtonie kanak au miroir québécois • Mélissa Nayral Des femmes à la mairie • Nathalie Cartacheff La troupe du Wetr • François Bensignor Le Kaneka • Léonie Marin Les images de Kanaky sur Facebook • Tate LeFevre « Nous ne sommes pas des délinquants » • Paul Wamo Kanaky junior. ; International audience ; Depuis bientôt trois décennies bien des choses ont changé pour les Kanak : conséquences du rééquilibrageéconomique et social, la montée en puissance de l'industrie, l'essor de l'urbanisation, le niveau de diplômes et maintenant l'entrée dans la mondialisation et la connexion numérique généralisée ont bouleversé les habitudes de travail, les formes de vie, de communication et d'expression artistique dans un archipel du Pacifique par ailleurs en mouvement institutionnel depuis toujours. De la prise de possession du pays kanak en 1853 à l'accord de Nouméa en 1998, que de transformations ! L'emprise coloniale mortifère absolue (1853-1946), la renaissance par l'accès à la citoyenneté mais sous contrôle des Eglises (1946-1970), et depuis l'exigence de décolonisation ardemment défendue ont rebattu les cartes de la condition kanak avec tant de force que le curseur qui séparait le présent du passé, le moderne de l'ancien, n'a cessé de se déplacer. Ce numéro d'Ethnies, après avoir replanté le décor de la lutte kanak (ses conditions d'émergence, ses objectifs, les traces qu'elle a pu laisser parmi ses protagonistes), se consacre ensuite à des problématiques très contemporaines. Ecrits par des auteurs kanak et non kanak, les textes qui composent ce numéro permettent d'apprécier la part des héritages sociaux kanak tout en soulignant l'émergence de nouvelles attitudes sociales que les conditions de vie actuelles en Nouvelle-Calédonie ont rendues possibles. Au moment où se négocie une pleine souveraineté politique, il n'est pas sans intérêt de se pencher sur les volontés d'émancipation à l'échelle ordinaire des gens, celles dont témoignent de nouvelles pratiques et qui font naître des espérances jusqu'alors inédites. Tout particulièrement, ce volume témoigne d'aspirations la plupart inexprimées jusque-là et peu perceptibles avant les années 1980 mais qui font bouger les frontières des rapports sociaux de sexe et d'âge. Faut-il y voir des innovations radicales qui menaceraient l'édifice social tout entier ou bien des développements qui, comme les précédents, inscrivent résolument les Kanak dans une histoire longue ? Manifestement, à l'instar de toute société, celle des Kanak se transforme, sans entamer pour autant leur sentiment de posséder leur manière propre d'être au monde. Et cela ne bride pas non plus leur souci de l'exprimer. Loin des élaborations identitaires à visée juridique et politique, il n'est qu'à se tourner vers les manifestations artistiques kanak auxquelles le présent recueil rend hommage, pour prendre connaissance des certitudes et aussi des impatiences et des espérances d'une population kanak désormais urbaine pour la moitié d'entre elle.
Sommaire :Déwé Gorodé Wëibë nî ! Wëibë nî ! Wëibë nî ! • Alban Bensa • Vers l'émancipation • Paul Néaoutyine L'indépendance au présent • Louis-José Barbançon Des accords de Matignon à l'accord d'Ouvéa • Michel Naepels L'ordre et la morale • Mélissa Nayral Les événements d'Ouvéa : parler ou se taire ? • Marie-Adèle Jorédié L'école populaire kanak trente ans après • Adrian Muckle & Benoît Trépied Les transformations de la question métisse • Samuel GorohunaInégalités ethniques sur le marché de l'emploi • Nidoïsh NaisselineInégalités sociales et incarcération • Christine Demmer De la diversité des enjeux du nickel • Christine Salomon L'emploi des femmes kanak à Vavouto • Sonia Grochain La constitution de l'identité VPK • Marie Salaün L'autochtonie kanak au miroir québécois • Mélissa Nayral Des femmes à la mairie • Nathalie Cartacheff La troupe du Wetr • François Bensignor Le Kaneka • Léonie Marin Les images de Kanaky sur Facebook • Tate LeFevre « Nous ne sommes pas des délinquants » • Paul Wamo Kanaky junior. ; International audience ; Depuis bientôt trois décennies bien des choses ont changé pour les Kanak : conséquences du rééquilibrageéconomique et social, la montée en puissance de l'industrie, l'essor de l'urbanisation, le niveau de diplômes et maintenant l'entrée dans la mondialisation et la connexion numérique généralisée ont bouleversé les habitudes de travail, les formes de vie, de communication et d'expression artistique dans un archipel du Pacifique par ailleurs en mouvement institutionnel depuis toujours. De la prise de possession du pays kanak en 1853 à l'accord de Nouméa en 1998, que de transformations ! L'emprise coloniale mortifère absolue (1853-1946), la renaissance par l'accès à la citoyenneté mais sous contrôle des Eglises (1946-1970), et depuis l'exigence de décolonisation ardemment défendue ont rebattu les cartes de la condition kanak avec tant de force que le curseur qui séparait le présent du passé, le moderne de l'ancien, n'a cessé de se déplacer. Ce numéro d'Ethnies, après avoir replanté le décor de la lutte kanak (ses conditions d'émergence, ses objectifs, les traces qu'elle a pu laisser parmi ses protagonistes), se consacre ensuite à des problématiques très contemporaines. Ecrits par des auteurs kanak et non kanak, les textes qui composent ce numéro permettent d'apprécier la part des héritages sociaux kanak tout en soulignant l'émergence de nouvelles attitudes sociales que les conditions de vie actuelles en Nouvelle-Calédonie ont rendues possibles. Au moment où se négocie une pleine souveraineté politique, il n'est pas sans intérêt de se pencher sur les volontés d'émancipation à l'échelle ordinaire des gens, celles dont témoignent de nouvelles pratiques et qui font naître des espérances jusqu'alors inédites. Tout particulièrement, ce volume témoigne d'aspirations la plupart inexprimées jusque-là et peu perceptibles avant les années 1980 mais qui font bouger les frontières des rapports sociaux de sexe et d'âge. Faut-il y voir des innovations radicales qui menaceraient l'édifice social tout entier ou bien des développements qui, comme les précédents, inscrivent résolument les Kanak dans une histoire longue ? Manifestement, à l'instar de toute société, celle des Kanak se transforme, sans entamer pour autant leur sentiment de posséder leur manière propre d'être au monde. Et cela ne bride pas non plus leur souci de l'exprimer. Loin des élaborations identitaires à visée juridique et politique, il n'est qu'à se tourner vers les manifestations artistiques kanak auxquelles le présent recueil rend hommage, pour prendre connaissance des certitudes et aussi des impatiences et des espérances d'une population kanak désormais urbaine pour la moitié d'entre elle.
In: Child abuse & neglect: the international journal ; official journal of the International Society for the Prevention of Child Abuse and Neglect, Band 34, Heft 9, S. 677-688
International audience ; The long-term consequences of violence against women are poorly documented within the context of political domination, economic inequalities and rapid social change of indigenous communities. Using data from the first population study on violence against women and their consequences on health in New Caledonia, South Pacific, this article investigates the association between childhood sexual abuse and binge drinking among 441 adult Kanak women. Face-to-face standardised interviews were conducted in 2002-2003, among women aged 18-54 years drawn from the electoral rolls. Childhood sexual abuse before 15 years of age was reported by 11.6% of respondents. Nearly all the perpetrators (96%) were known to the victims (63% being a close relative). The rate of frequent binge drinking amongst the women within the last 12 months was 34%. After controlling for social and demographic factors, an independent association was found between childhood sexual abuse and current binge drinking. This study is the first to analyse the contribution of childhood sexual abuse to the likelihood of later heavy alcohol use in an indigenous population in the South Pacific. The findings call for improving and giving priority to care for children who are victims of violence to prevent long-term health consequences and to develop prevention programs aimed at alcohol-related behaviour in women, while taking into account simultaneous individual and collective factors.
International audience ; The long-term consequences of violence against women are poorly documented within the context of political domination, economic inequalities and rapid social change of indigenous communities. Using data from the first population study on violence against women and their consequences on health in New Caledonia, South Pacific, this article investigates the association between childhood sexual abuse and binge drinking among 441 adult Kanak women. Face-to-face standardised interviews were conducted in 2002-2003, among women aged 18-54 years drawn from the electoral rolls. Childhood sexual abuse before 15 years of age was reported by 11.6% of respondents. Nearly all the perpetrators (96%) were known to the victims (63% being a close relative). The rate of frequent binge drinking amongst the women within the last 12 months was 34%. After controlling for social and demographic factors, an independent association was found between childhood sexual abuse and current binge drinking. This study is the first to analyse the contribution of childhood sexual abuse to the likelihood of later heavy alcohol use in an indigenous population in the South Pacific. The findings call for improving and giving priority to care for children who are victims of violence to prevent long-term health consequences and to develop prevention programs aimed at alcohol-related behaviour in women, while taking into account simultaneous individual and collective factors.
International audience ; The long-term consequences of violence against women are poorly documented within the context of political domination, economic inequalities and rapid social change of indigenous communities. Using data from the first population study on violence against women and their consequences on health in New Caledonia, South Pacific, this article investigates the association between childhood sexual abuse and binge drinking among 441 adult Kanak women. Face-to-face standardised interviews were conducted in 2002-2003, among women aged 18-54 years drawn from the electoral rolls. Childhood sexual abuse before 15 years of age was reported by 11.6% of respondents. Nearly all the perpetrators (96%) were known to the victims (63% being a close relative). The rate of frequent binge drinking amongst the women within the last 12 months was 34%. After controlling for social and demographic factors, an independent association was found between childhood sexual abuse and current binge drinking. This study is the first to analyse the contribution of childhood sexual abuse to the likelihood of later heavy alcohol use in an indigenous population in the South Pacific. The findings call for improving and giving priority to care for children who are victims of violence to prevent long-term health consequences and to develop prevention programs aimed at alcohol-related behaviour in women, while taking into account simultaneous individual and collective factors.
International audience ; The long-term consequences of violence against women are poorly documented within the context of political domination, economic inequalities and rapid social change of indigenous communities. Using data from the first population study on violence against women and their consequences on health in New Caledonia, South Pacific, this article investigates the association between childhood sexual abuse and binge drinking among 441 adult Kanak women. Face-to-face standardised interviews were conducted in 2002-2003, among women aged 18-54 years drawn from the electoral rolls. Childhood sexual abuse before 15 years of age was reported by 11.6% of respondents. Nearly all the perpetrators (96%) were known to the victims (63% being a close relative). The rate of frequent binge drinking amongst the women within the last 12 months was 34%. After controlling for social and demographic factors, an independent association was found between childhood sexual abuse and current binge drinking. This study is the first to analyse the contribution of childhood sexual abuse to the likelihood of later heavy alcohol use in an indigenous population in the South Pacific. The findings call for improving and giving priority to care for children who are victims of violence to prevent long-term health consequences and to develop prevention programs aimed at alcohol-related behaviour in women, while taking into account simultaneous individual and collective factors.
International audience ; The long-term consequences of violence against women are poorly documented within the context of political domination, economic inequalities and rapid social change of indigenous communities. Using data from the first population study on violence against women and their consequences on health in New Caledonia, South Pacific, this article investigates the association between childhood sexual abuse and binge drinking among 441 adult Kanak women. Face-to-face standardised interviews were conducted in 2002-2003, among women aged 18-54 years drawn from the electoral rolls. Childhood sexual abuse before 15 years of age was reported by 11.6% of respondents. Nearly all the perpetrators (96%) were known to the victims (63% being a close relative). The rate of frequent binge drinking amongst the women within the last 12 months was 34%. After controlling for social and demographic factors, an independent association was found between childhood sexual abuse and current binge drinking. This study is the first to analyse the contribution of childhood sexual abuse to the likelihood of later heavy alcohol use in an indigenous population in the South Pacific. The findings call for improving and giving priority to care for children who are victims of violence to prevent long-term health consequences and to develop prevention programs aimed at alcohol-related behaviour in women, while taking into account simultaneous individual and collective factors.