In Tunisia, in the aftermath of the 2011 Revolution, many protected natural areas such as national and urban parks were severely degraded and vandalized. In parallel, in 2014, nature became a constitutional right and at the same time in the tourism sector, touristic offers more attuned to natural areas emerged. What do these contradictory behaviours tell us about Mankind/Nature relations in post-revolution Tunisian society? Our research focuses on the analysis of the social representations of nature, in particular "iconic" images, old and new, of nature (Part 1), the ambitions of public policies in terms of environmental protection that have followed one another since Independence, the environmental themes promoted by the actors of the post- revolution public debate (political, associative, media) (Part 2), as well as recent trends in Tunisian tourism and the new outdoor activities of the Tunisian people (Part 3). In the first part, our research highlights the persistence of certain images of nature. We can thus note the domination and the importance of images of a productive nature, a reservoir of resources but also for some of its components, images of paradise (gardens, oases). This transmission, from the pre-Christian era to the present day, has been possible thanks to various artistic media (mosaics, ceramics, poetry, painting.). Our research demonstrates both the persistence and the mobility of social representations of nature, as well as their diversity. Dissonances also appear between the representations of different groups of actors in Tunisian society, both ancient and contemporary (e. g. images and multiple representations of oases and the desert). In the second part, our research details the major stages of the process of institutionalization of nature initiated after the Independence of Tunisia and shows the predominance of an anthropocentric and eco-centred vision of nature. At that time the desire to protect nature prevailed both in the constitution and organisation of institutions and in the policies implemented by the Ministries of Agriculture and then of the Environment, which still share the task today. Our research also highlights the influence of international models of nature protection on the work of these two ministries, particularly in the creation of many protected areas such as national parks. The analysis of two nature areas (Ichkeul National Park and Nahli Urban Park) reveals many contradictions between the policies expressed by the institutions and the achievements on the ground. In the aftermath of the Revolution, these areas, considered as emblems of power, crystallized not only the discontent and oppositions of some Tunisians but also their disappointment and were subjected to acts of vandalism and degradation. Paradoxically, at the same time, nature was enshrined as a universal right in the new Tunisian constitution of 2014. This institutionalized nature corresponds to a nature which belongs to the Tunisian people and which the State must protect in order to transmit it to future generations. It is simultaneously seen as a reservoir of natural resources, an element of the Tunisian people's living environment, an entity with fragile equilibrium and a component of the nation's heritage. Our research also demonstrates, in the aftermath of the Revolution, the emergence in public debate of new actors, bringing new opinions on the state of nature and new visions on the relationship between man and nature. In ecological political parties, within the associative network or in the media, the Revolution allowed the circulation of new representations of nature that were often at odds with institutional practices in the pre-revolution period. Here again, our research highlights the contradictions between political agendas and actions. The third part emphasizes the different components of nature mobilized during the development of tourism in Tunisia since Independence, from the "clichés" that ensured the development of the dominant seaside model to the emergence, since the Revolution, of an alternative tourism offer driven by new actors, who offer new types of accommodation and leisure activities, and use new forms of communication mainly based on social networks. This different tourist offer enhances natural spaces, the land and local know-how. It is strongly influenced by the desire to encourage encounters and exchanges with the inhabitants and often falls under the category of "experiential tourism". For the majority of Tunisians, however, national and urban parks are essentially perceived as non-urbanized natural areas made available to them for family relaxation and recreation. ; En Tunisie, au lendemain de la Révolution de 2011, de nombreuses aires de nature protégées comme les parcs nationaux et les parcs urbains subissent de graves dégradations et actes de vandalisme. Parallèlement, en 2014, la nature devient un droit constitutionnel, et au même moment, dans le secteur du tourisme, s'affirme l'émergence d'une offre touristique plus proche des espaces naturels. Que nous disent ces comportements si contradictoires des relations homme/nature de la société tunisienne post-révolution ? C'est au travers de l'analyse des représentations sociales de la nature que notre recherche se concentre, en s'intéressant en particulier, aux images « iconiques », anciennes et récentes, de la nature (partie 1), aux ambitions des politiques publiques en matière de protection de l'environnement qui se sont succédées depuis l'Indépendance, aux thématiques environnementales portées par les acteurs du débat public post-révolution (politique, associatif, médias) (partie 2), ainsi qu'aux tendances récentes du tourisme tunisien et aux nouvelles pratiques de pleine nature des Tunisiens (partie 3). Dans une première partie, notre recherche met en évidence la persistance de certaines images de la nature. On relève ainsi la domination et la prégnance des images d'une nature productive, réservoir de ressources mais aussi pour certaines de ses composantes, les images du paradis (jardins, oasis). Cette transmission, de l'ère pré-chrétienne jusqu'à aujourd'hui, a notamment été possible grâce à différents supports artistiques (mosaïques, céramiques, poésies, peinture…). Notre recherche montre ici à la fois la persistance et la mobilité des représentations sociales de la nature, ainsi que leur diversité. Des dissonances apparaissent aussi entre les représentations de différents groupes d'acteurs de la société tunisienne ancienne et contemporaine (ex. : images et représentations multiples des oasis et du désert). Dans une deuxième partie, notre recherche détaille les étapes majeures du processus d'institutionnalisation de la nature initié à partir de l'Indépendance de la Tunisie et montre la prédominance d'une vision anthropocentrée et éco-centrée de la nature. C'est alors la volonté de protéger la nature qui a prévalu tant dans la constitution et l'organisation des institutions que dans les politiques mises en œuvre par les ministères de l'agriculture puis de l'environnement, qui s'en partagent encore la charge aujourd'hui. Notre recherche souligne également l'influence des modèles internationaux de protection de la nature dans l'action de ces deux ministères, en particulier dans la création de nombreux espaces protégés tels que les parcs nationaux. L'analyse de deux aires de nature (parc national d'Ichkeul et parc urbain de Nahli) révèle de nombreuses contradictions entre les politiques affichées par les institutions et les réalisations sur le terrain. Au lendemain de la Révolution, ces espaces considérés comme des emblèmes du pouvoir ont d'ailleurs cristallisé les mécontentements, les oppositions mais aussi les déceptions de certains Tunisiens, et ont connu des actes de vandalisme et de dégradation. Paradoxalement, dans le même temps, la nature a été consacrée en tant que droit universel dans la nouvelle constitution tunisienne de 2014. Cette nature institutionnalisée correspond à une nature appartenant au peuple tunisien, que l'État doit protéger pour la transmettre aux générations futures. Elle s'entend à la fois comme un réservoir de ressources naturelles, un élément du cadre de vie des Tunisiens, une entité aux équilibres fragiles et une composante du patrimoine de la nation. Notre recherche atteste également, au lendemain de la Révolution, de l'émergence dans le débat public de nouveaux acteurs, porteurs de nouvelles opinions sur l'état de la nature et de nouvelles visions sur les relations homme/nature. Dans les partis politiques écologistes, au sein du réseau associatif ou dans les médias, la Révolution a permis la circulation de nouvelles représentations de la nature souvent en rupture par rapport aux pratiques institutionnelles dans la période pré-révolution. Notre recherche met ici encore en lumière les contradictions entre les affichages politiques et les actes. La troisième partie insiste sur les différentes composantes de la nature mobilisées lors du développement de l'activité touristique en Tunisie dès l'Indépendance, des « clichés » qui ont assuré le développement du modèle balnéaire dominant à l'apparition, depuis la Révolution, d'une offre de tourisme alternative portée par de nouveaux acteurs, qui proposent de nouveaux types d'hébergements et d'activités de loisirs, et utilisent de nouvelles formes de communication essentiellement basées sur les réseaux sociaux. Cette offre touristique différente valorise les espaces naturels, le terroir, les savoir-faire, fortement empreinte de la volonté de favoriser les rencontres et les échanges avec les habitants, et relève souvent du « tourisme expérientiel ». Pour la majorité des Tunisiens, toutefois, parcs nationaux comme parcs urbains sont essentiellement perçus comme des espaces de nature non-urbanisés mis à leur disposition pour la détente et les loisirs en famille.
International audience ; The Jews of Algeria, who had been full French citizens since the « Crémieux decree » of October 24, 1870, were brutally relegated to the condition of simple "French subjects" by the Vichy regime's law of October 7, 1940 which repealed the decree which had originally collectively awarded them full citizenship. The Jews who were natives of the three districts of Algeria (the « departments » of Algiers, Oran and Constantine) remained French subjects whose civil rights, and effective and personal statuses remained dependent on French law But stripped of their French citizenship, their political rights were aligned on the lower status of Algerian Muslim natives. Those who resided in metropolitan France in 1940 were moreover victims of German decrees of exclusion in the directly German-administered areas of northern France, and of Vichy edicts in both the north and south of the country, aimed at excluding Jews from the national community. The measures of anti-Jewish legislation included a specific census of Jews, the special marking of their identity and rationing documents economic spoliation, the compulsory wearing of yellow stars, arrests, round-ups and internment. It is thus that Algerian Jews who had resided in metropolitan France for years, and sometimes for decades, or were simply caught up passing through there at the time, were among the six million Jews killed during the Shoah.According the historian Serge Klarsfeld, nearly 76,000 Jews then in France were deported, mostly to Auschwitz death camp. Only 3,860 survived. One should add that a further 3,000 Jews died in internment camps in France itself. Among these 80,000 victims, S. Klarsfeld estimated that there were 24,500 French Jews or French Jewish subjects, the rest being of other nationalities. Among the 24,500, there were about 1,500 natives of Algeria. Ever since the very first deportation convoy of March 27, 1942, French Jews and immigrants of other nationalities found themselves side-by-side in the same railway carriages. Among the internment records opened in their names in the "Fichiers juif" (listings of Jews), or on the lists of deportees, French Jews appear as "French subjects" (SF) or "Of French origin" (FO), or sometimes, as "French protégés." In Marseilles, many Jews were arrested during « Aktion Tiger », the code name given to the round-up carried out in the "old harbor" area of the city in January 1943. These Jews made up a majority (780 among 994 deportees) of the deportees sent by convoy number 52 to Sobibor death camp on March 23, 1943. Some 571 of these deportees held one of the multiple forms of legal attachment to French nationality: They were either born French or had opted to become French, or were French by marriage, or were naturalized or declared French, or were French protégés or French subjects. Some 212 of them, including 198 who were resident of, or refugees in, Marseille, were originally from Algeria. There were no survivors from this convoy.The total number of Jews deported who were from the Constantine district, ie the subject of this study, was 218 including 139 men, 58 women and 21 minors aged under 18 including some very young children. The highest number of deportees (86) was from the city of Constantine itself; 45 men, 30 women and 11 children. Just 13 survived. The number from other cities in the Constantine district were 30 from the city of Bône, 17 from Bougie, 12 from Sétif and 11 each from the towns of Aïn Beïda and Guelma. There were ten deportees each from the cities of Batna and Philippeville. Many individual records from the "listings of Jews" kept by the French National Archives at the Paris Shoah Memorial show that in a way, the victims sought to resist their fate: One sometimes reads "CA" (Married to an Aryan), "half-Jews," "says he (or she) is not Jewish", (Christian) "Orthodox", "Copt," "Muslim," "Ward of the Nation" or even "Spanish subject". All these self-descriptions concerning other nationalities or religions were aimed at avoiding deportation. Right to the end, the Jews of Constantine, of Algeria and of elsewhere did all they could, alas often without success, to defeat the exterminating logic of the Third Reich which was largely helped by the zealous leaders of the French (Vichy) state. Alas, only very few of the individual records carry at the top of them the word: "Escaped." ; Citoyens français depuis près d'un siècle, en vertu du décret Crémieux du 24 octobre 1870, les Juifs d'Algérie, où qu'ils vivent, se voient brutalement relégués à la condition de simples « sujets français » par la loi du 7 octobre 1940 qui abroge le décret de naturalisation collective. Les Juifs indigènes des trois départements restent des sujets français dont les droits civils, le statut réel ainsi que le statut personnel demeurent réglés par la loi française. Mais, déchus de leur citoyenneté française, leurs droits politiques sont désormais alignés sur ceux des indigènes musulmans algériens. Ceux d'entre eux qui vivent en France métropolitaine en 1940 ont, au surplus, été victimes, des mesures d'exclusion allemandes (en zone nord) et vichyssoises (dans les deux zones) visant à éliminer les Juifs de la communauté nationale : législation antijuive, recensement, marquage des papiers d'identité et d'alimentation, exclusions professionnelles, spoliation économique, port de l'étoile jaune, arrestations, rafles et internement. C'est ainsi qu'établis en France depuis plusieurs années, voire des décennies, ou simplement de passage, des Juifs d'Algérie s'inscrivent parmi les six millions de morts de la Shoah.Suivant les recherches entreprises par l'historien Serge Klarsfeld, près de 76 000 Juifs de France furent déportés, la plupart vers Auschwitz ; seuls 3 860 d'entre eux environ survécurent. Il faut y ajouter quelque 3 000 Juifs qui moururent dans les camps d'internement en France. Sur ces 80 000 victimes au total, S. Klarsfeld dénombre environ 24 500 Juifs français ou sujets français, dont environ 1 500 natifs d'Algérie. Dès le premier convoi de déportation, le 27 mars 1942, des Juifs français et immigrés se sont côtoyés dans les mêmes wagons. Sur les fiches d'internement établies à leurs noms dans les « Fichiers juifs » ou encore sur les listes de déportation, ils figurent comme « sujets français » (SF), « Français d'origine » (FO) ou parfois, « protégés français ». À Marseille, de nombreux Juifs sont arrêtés au cours de l'« Aktion Tiger », nom de code donné à la rafle du Vieux-Port de la fin janvier 1943. Ils constituent la grande majorité des déportés du convoi n° 52 parti le 23 mars 1943 vers le camp de Sobibór (780 sur 994). La plupart des déportés, soit 571, possédaient l'une des multiples formes juridiques de rattachement à la nationalité française : Français d'origine, Français par option, Français par mariage, Français naturalisé, Français par déclaration, protégé français, ou encore sujet français. 212 d'entre eux étaient natifs d'Algérie, dont 198 domiciliés ou réfugiés à Marseille. Aucun déporté de ce convoi n'est revenu.Le bilan de la déportation des Juifs originaires du Constantinois – objet de cette étude –, se monte à 218 personnes : 139 hommes, 58 femmes et 21 enfants de moins de 18 ans, parmi lesquels de très jeunes enfants. Le nombre de déportés (86) est le plus élevé pour Constantine-même : 45 hommes, 30 femmes et 11 enfants. Seuls 13 d'entre eux survécurent. Suivent les villes de Bône (30 déportés), de Bougie (17 déportés), de Sétif (12 déportés) puis les deux localités d'Aïn Beïda et de Guelma, avec chacune 11 déportés. Les villes de Batna et de Philippeville enregistrent respectivement 10 déportés. Nombreuses sont les fiches des « Fichiers juifs », conservées par les Archives nationales au Mémorial de la Shoah qui témoignent, à leur façon, de leurs tentatives de résistance : on y lit parfois sur leurs en-têtes, des mentions telles que "CA" (conjoint d'aryen), "demi Juif", "se dit non Juif(ve)", "orthodoxe", "copte", "musulman", ou "pupille de la nation", ou encore "citoyen espagnol" – autant de situations, autant de nationalités ou de confessions, censées les épargner de la déportation. Jusqu'au bout, les Juifs de Constantine, d'Algérie et d'ailleurs ont tout fait pour déjouer la logique exterminatrice impulsée par le Troisième Reich à laquelle ont largement collaboré les dirigeants zélés de l'État français, trop souvent, hélas, sans y réussir. Sur peu, trop peu de fiches, figure en en-tête, la mention "évadé".
This study rests on Agribiom, a simple world food-balance model in calories connecting land use and agricultural production to biomass consumption in various forms (food, feed, biofuel, etc.). This tool is used to revisit and discuss the 2012 revision of the "World Agriculture Towards 2030/50" of the Food and Agriculture Organization of the United Nations (FAO). Conversion and aggregation into calories of country-wise and product-wise detailed FAO data in tonnes (demand, production and trade) for 2005-07 and 2050 helps to synthesize the FAO projections and their assumptions for nine world regions, including "Europe" (EU27 plus Switzerland, Norway and Island), the focus of this study. Our regional FAO-based scenarios in calories are then compared and discussed with Agribiom historical estimates from 1961 to 2007 in various fields (cultivated area, yield, net trade, population and food diet, other uses of food biomass). In the last section, we question three critical points that challenge the projection of Europe in the global food system: the population projections, the conversion of plant food biomass into animal food products, the demand for biofuel. ; L'étude PluriAgriBiom (PAB), commanditée et financée par l'association française Pluriagri, vise à mieux cerner la place passée et future de l'Europe dans le système alimentaire mondial en mobilisant l'outil quantitatif rétro-prospectif Agribiom. Un premier volet, réalisé en 2011-12, était centré sur une vaste analyse rétrospective des productions, échanges et usages mondiaux de biomasses alimentaires (1961-2007). Ce deuxième volet, réalisé en 2013-14, est entièrement consacré à la consolidation et analyse d'un scénario mondial de référence PluriAgriBiom pour 2050 (PAB50) adossé aux projections 2012 de la FAO pour cet horizon. La première partie de ce rapport synthétise, pour neuf régions du monde dont une Europe à 30 pays (EU30 = EU27 + Suisse, Norvège et Islande), plusieurs centaines de milliers de données transmises par la FAO pour sa base historique 2006 (moyenne 2005-2007) et ses années de projection (2030 et 2050). Selon ces données, entre 2006 et 2050, la croissance démographique mondiale serait de +0,72% par an (dont +0,02% en EU30 seulement, le plus faible taux) pour avoisiner 9 milliards d'habitants en 2050, les trois-quarts basés en Asie (52%), Afrique et Moyen-Orient. La croissance économique générale de +4,1% par an (+3,2% en EU30 seulement, le plus faible taux) serait tirée par l'Asie (+5,1%), l'Amérique du Sud (+4,6%), l'Afrique et Moyen-Orient. Au plan agricole, les produits animaux seraient le moteur de la demande dans le secteur, directement (viandes, œufs, lait) ou indirectement (aliments pour animaux). En 2050, l'Asie consommerait alors près de la moitié des biomasses alimentaires, notamment 58% des œufs, 46% des viandes et 48% des oléagineux. A l'opposé, la demande annuelle mondiale en céréales ne croîtrait que de +0,8% malgré +1,1% pour le seul maïs. Pour répondre à cette demande, 100 millions nouveaux hectares seraient cultivés en Afrique subsaharienne et Amérique latine alors que la surface cultivée continuerait de diminuer en Europe, et les rendements des cultures croîtraient significativement en Afrique (notamment grâce à l'irrigation), plus modérément ailleurs. Au final, l'Afrique subsaharienne doublerait au moins l'essentiel de ses productions en 44 ans, ce qui ne l'empêcherait pas de rester largement déficitaire en 2050 pour la plupart des produits, notamment oléagineux. Pour EU30, ce serait aussi le cas pour les oléagineux, ainsi que pour le sucre, deux denrées que l'Amérique latine exporterait en abondance.Dans la seconde partie du rapport, ces données FAO sont converties en deux bilans Agribiom emplois-ressources (PAB06 et PAB50) pour les synthétiser et les analyser en équivalent calories, pour les comparer aussi aux bilans historiques Agribiom (1961-2007). Cela permet d'abord de montrer que c'est en Afrique subsaharienne que la croissance des disponibilités caloriques moyennes par habitant serait la plus forte pour atteindre, enfin, 3000 kcal/j en 2050. Mais la part des produits animaux dans ces disponibilités resterait extrêmement faible : moins de 200 kcal contre 550 en Asie par exemple. A l'opposé, EU30 deviendrait la 1ère consommatrice mondiale de calories animales par habitant (1350 kcal/j sur un total de 4130). Au final, entre 2006 et 2050, la demande calorique mondiale en biomasses alimentaires végétales augmenterait de +56%, une croissance bien inférieure aux 45 années précédentes en pourcentage (+178% entre 1961-2006) mais quasi identique en volume (+20 Tkcal/j entre 1961-2006 contre +18 entre 2006-2050). Cette croissance varierait de +18% pour l'Europe à +163% pour l'Afrique subsaharienne. Elle proviendrait d'une augmentation de +50% pour l'alimentation humaine directe, de +57% pour l'alimentation animale, de +49% pour les semences et usages industriels hors biocarburants, de +217% pour les biocarburants (1ère génération), et de +23% pour les pertes entre récolte et mise à disposition des unités de consommation. En 2050, les usages industriels non-alimentaires représenteraient alors 12% de la demande mondiale (dont 6% de biocarburants) contre 10% en 2006 (3% de biocarburants) et seulement 2% en 1961. Pour répondre à cette demande mondiale estimée à 50 Tkcal/j en 2050 (moins de 12 en 1961), la croissance des productions se ferait à 91% par une augmentation de +0,9% par an des rendements (+2% entre 1961 et 2006). C'est en Afrique subsaharienne et Amérique latine que la production de calories alimentaires végétales augmenterait le plus, et en EU30 le moins. En 2050, l'Europe représenterait alors moins de 8,5% de la production mondiale de calories végétales (contre 17% en 1961) et 14% de la production mondiale de calories animales (contre 34% en 1961). Elle creuserait son déficit net en calories végétales de 93% (son excédent net en calories animales diminuerait de 27%) et en importerait presque autant en 2050 que l'Asie, 2ème importatrice nette après la région Afrique-du-Nord/Moyen-Orient. Son degré général d'indépendance en calories alimentaires demeurerait néanmoins aux alentours de 90%, comme en 1961 et 2006. De l'autre côté de l'Atlantique, les Amériques resteraient quant-à elles largement autosuffisantes, à plus de 120% en 2050, et donc exportatrices nettes avec une très nette affirmation de l'Amérique latine.La troisième et dernière partie du rapport présente et discute trois points critiques du scénario de référence PAB50 adossés aux projections FAO. (1) Le premier est celui des projections démographiques, pour montrer en particulier qu'avec les dernières projections des Nations unies (« Rev. 2012 », scénario « fertilité moyenne »), l'Afrique subsaharienne compterait presque 400 millions d'habitants de plus en 2050 par comparaison avec les anciennes prévisions sur lesquelles s'était appuyée la FAO (« Rev. 2008 »). Toutes choses égales par ailleurs, cela pourrait conduire à ramener sa disponibilité calorique par habitant à celle de 2006 (2400 kcal/j), ou bien à multiplier par 3 son déficit en calories alimentaires végétales, ce qui en ferait alors la 1ère région importatrice. (2) Le second point est celui de la transformation des biomasses alimentaires végétales en animales, pour montrer par exemple que si on appliquait à l'Afrique subsaharienne les hypothèses de conversion faites par la FAO pour l'Asie, l'Afrique diminuerait ses importations nettes en biomasses alimentaires végétales de plus d'un tiers en 2050. (3) Enfin, selon les projections FAO, en 2050, les biocarburants de 1ère génération consommeraient 24% de la production mondiale de sucre, 10% des huiles végétales et 6% des céréales, soit au total l'équivalent de 6% des calories alimentaires végétales de PAB50, contre 3% en 2006. Dans ce scénario biocarburants qualifié de « limité » par la FAO au regard de politiques nationales qui pourraient être plus ambitieuses, EU30 multiplierait par plus de quatre sa consommation de matières premières végétales destinées à la production de biocarburants de 1ère génération entre 2006 (année d'encore très faible consommation) et 2050 (2020 en réalité puisque la FAO fait l'hypothèse d'une stagnation de la consommation de biocarburants à partir de 2020). En 2050, 15% des calories alimentaires végétales consommées par l'Europe seraient utilisées pour la production de biocarburants de 1ère génération, contre 4% en 2006. Par cette demande et surtout celle d'aliments pour animaux, à laquelle s'ajoute un recul relatif de sa production alimentaire en pourcentage de la production mondiale, l'Europe continuerait de jouer, via le marché international, un rôle central dans le système alimentaire mondial. Elle resterait au cœur des tensions et des arbitrages qui détermineront l'avenir du système alimentaire mondial et sa capacité à nourrir correctement et durablement une population qui pourrait atteindre 11 milliards d'habitants en 2100.
This study rests on Agribiom, a simple world food-balance model in calories connecting land use and agricultural production to biomass consumption in various forms (food, feed, biofuel, etc.). This tool is used to revisit and discuss the 2012 revision of the "World Agriculture Towards 2030/50" of the Food and Agriculture Organization of the United Nations (FAO). Conversion and aggregation into calories of country-wise and product-wise detailed FAO data in tonnes (demand, production and trade) for 2005-07 and 2050 helps to synthesize the FAO projections and their assumptions for nine world regions, including "Europe" (EU27 plus Switzerland, Norway and Island), the focus of this study. Our regional FAO-based scenarios in calories are then compared and discussed with Agribiom historical estimates from 1961 to 2007 in various fields (cultivated area, yield, net trade, population and food diet, other uses of food biomass). In the last section, we question three critical points that challenge the projection of Europe in the global food system: the population projections, the conversion of plant food biomass into animal food products, the demand for biofuel. ; L'étude PluriAgriBiom (PAB), commanditée et financée par l'association française Pluriagri, vise à mieux cerner la place passée et future de l'Europe dans le système alimentaire mondial en mobilisant l'outil quantitatif rétro-prospectif Agribiom. Un premier volet, réalisé en 2011-12, était centré sur une vaste analyse rétrospective des productions, échanges et usages mondiaux de biomasses alimentaires (1961-2007). Ce deuxième volet, réalisé en 2013-14, est entièrement consacré à la consolidation et analyse d'un scénario mondial de référence PluriAgriBiom pour 2050 (PAB50) adossé aux projections 2012 de la FAO pour cet horizon. La première partie de ce rapport synthétise, pour neuf régions du monde dont une Europe à 30 pays (EU30 = EU27 + Suisse, Norvège et Islande), plusieurs centaines de milliers de données transmises par la FAO pour sa base historique 2006 (moyenne 2005-2007) et ses années de projection (2030 et 2050). Selon ces données, entre 2006 et 2050, la croissance démographique mondiale serait de +0,72% par an (dont +0,02% en EU30 seulement, le plus faible taux) pour avoisiner 9 milliards d'habitants en 2050, les trois-quarts basés en Asie (52%), Afrique et Moyen-Orient. La croissance économique générale de +4,1% par an (+3,2% en EU30 seulement, le plus faible taux) serait tirée par l'Asie (+5,1%), l'Amérique du Sud (+4,6%), l'Afrique et Moyen-Orient. Au plan agricole, les produits animaux seraient le moteur de la demande dans le secteur, directement (viandes, œufs, lait) ou indirectement (aliments pour animaux). En 2050, l'Asie consommerait alors près de la moitié des biomasses alimentaires, notamment 58% des œufs, 46% des viandes et 48% des oléagineux. A l'opposé, la demande annuelle mondiale en céréales ne croîtrait que de +0,8% malgré +1,1% pour le seul maïs. Pour répondre à cette demande, 100 millions nouveaux hectares seraient cultivés en Afrique subsaharienne et Amérique latine alors que la surface cultivée continuerait de diminuer en Europe, et les rendements des cultures croîtraient significativement en Afrique (notamment grâce à l'irrigation), plus modérément ailleurs. Au final, l'Afrique subsaharienne doublerait au moins l'essentiel de ses productions en 44 ans, ce qui ne l'empêcherait pas de rester largement déficitaire en 2050 pour la plupart des produits, notamment oléagineux. Pour EU30, ce serait aussi le cas pour les oléagineux, ainsi que pour le sucre, deux denrées que l'Amérique latine exporterait en abondance.Dans la seconde partie du rapport, ces données FAO sont converties en deux bilans Agribiom emplois-ressources (PAB06 et PAB50) pour les synthétiser et les analyser en équivalent calories, pour les comparer aussi aux bilans historiques Agribiom (1961-2007). Cela permet d'abord de montrer que c'est en Afrique subsaharienne que la croissance des disponibilités caloriques moyennes par habitant serait la plus forte pour atteindre, enfin, 3000 kcal/j en 2050. Mais la part des produits animaux dans ces disponibilités resterait extrêmement faible : moins de 200 kcal contre 550 en Asie par exemple. A l'opposé, EU30 deviendrait la 1ère consommatrice mondiale de calories animales par habitant (1350 kcal/j sur un total de 4130). Au final, entre 2006 et 2050, la demande calorique mondiale en biomasses alimentaires végétales augmenterait de +56%, une croissance bien inférieure aux 45 années précédentes en pourcentage (+178% entre 1961-2006) mais quasi identique en volume (+20 Tkcal/j entre 1961-2006 contre +18 entre 2006-2050). Cette croissance varierait de +18% pour l'Europe à +163% pour l'Afrique subsaharienne. Elle proviendrait d'une augmentation de +50% pour l'alimentation humaine directe, de +57% pour l'alimentation animale, de +49% pour les semences et usages industriels hors biocarburants, de +217% pour les biocarburants (1ère génération), et de +23% pour les pertes entre récolte et mise à disposition des unités de consommation. En 2050, les usages industriels non-alimentaires représenteraient alors 12% de la demande mondiale (dont 6% de biocarburants) contre 10% en 2006 (3% de biocarburants) et seulement 2% en 1961. Pour répondre à cette demande mondiale estimée à 50 Tkcal/j en 2050 (moins de 12 en 1961), la croissance des productions se ferait à 91% par une augmentation de +0,9% par an des rendements (+2% entre 1961 et 2006). C'est en Afrique subsaharienne et Amérique latine que la production de calories alimentaires végétales augmenterait le plus, et en EU30 le moins. En 2050, l'Europe représenterait alors moins de 8,5% de la production mondiale de calories végétales (contre 17% en 1961) et 14% de la production mondiale de calories animales (contre 34% en 1961). Elle creuserait son déficit net en calories végétales de 93% (son excédent net en calories animales diminuerait de 27%) et en importerait presque autant en 2050 que l'Asie, 2ème importatrice nette après la région Afrique-du-Nord/Moyen-Orient. Son degré général d'indépendance en calories alimentaires demeurerait néanmoins aux alentours de 90%, comme en 1961 et 2006. De l'autre côté de l'Atlantique, les Amériques resteraient quant-à elles largement autosuffisantes, à plus de 120% en 2050, et donc exportatrices nettes avec une très nette affirmation de l'Amérique latine.La troisième et dernière partie du rapport présente et discute trois points critiques du scénario de référence PAB50 adossés aux projections FAO. (1) Le premier est celui des projections démographiques, pour montrer en particulier qu'avec les dernières projections des Nations unies (« Rev. 2012 », scénario « fertilité moyenne »), l'Afrique subsaharienne compterait presque 400 millions d'habitants de plus en 2050 par comparaison avec les anciennes prévisions sur lesquelles s'était appuyée la FAO (« Rev. 2008 »). Toutes choses égales par ailleurs, cela pourrait conduire à ramener sa disponibilité calorique par habitant à celle de 2006 (2400 kcal/j), ou bien à multiplier par 3 son déficit en calories alimentaires végétales, ce qui en ferait alors la 1ère région importatrice. (2) Le second point est celui de la transformation des biomasses alimentaires végétales en animales, pour montrer par exemple que si on appliquait à l'Afrique subsaharienne les hypothèses de conversion faites par la FAO pour l'Asie, l'Afrique diminuerait ses importations nettes en biomasses alimentaires végétales de plus d'un tiers en 2050. (3) Enfin, selon les projections FAO, en 2050, les biocarburants de 1ère génération consommeraient 24% de la production mondiale de sucre, 10% des huiles végétales et 6% des céréales, soit au total l'équivalent de 6% des calories alimentaires végétales de PAB50, contre 3% en 2006. Dans ce scénario biocarburants qualifié de « limité » par la FAO au regard de politiques nationales qui pourraient être plus ambitieuses, EU30 multiplierait par plus de quatre sa consommation de matières premières végétales destinées à la production de biocarburants de 1ère génération entre 2006 (année d'encore très faible consommation) et 2050 (2020 en réalité puisque la FAO fait l'hypothèse d'une stagnation de la consommation de biocarburants à partir de 2020). En 2050, 15% des calories alimentaires végétales consommées par l'Europe seraient utilisées pour la production de biocarburants de 1ère génération, contre 4% en 2006. Par cette demande et surtout celle d'aliments pour animaux, à laquelle s'ajoute un recul relatif de sa production alimentaire en pourcentage de la production mondiale, l'Europe continuerait de jouer, via le marché international, un rôle central dans le système alimentaire mondial. Elle resterait au cœur des tensions et des arbitrages qui détermineront l'avenir du système alimentaire mondial et sa capacité à nourrir correctement et durablement une population qui pourrait atteindre 11 milliards d'habitants en 2100.
This study rests on Agribiom, a simple world food-balance model in calories connecting land use and agricultural production to biomass consumption in various forms (food, feed, biofuel, etc.). This tool is used to revisit and discuss the 2012 revision of the "World Agriculture Towards 2030/50" of the Food and Agriculture Organization of the United Nations (FAO). Conversion and aggregation into calories of country-wise and product-wise detailed FAO data in tonnes (demand, production and trade) for 2005-07 and 2050 helps to synthesize the FAO projections and their assumptions for nine world regions, including "Europe" (EU27 plus Switzerland, Norway and Island), the focus of this study. Our regional FAO-based scenarios in calories are then compared and discussed with Agribiom historical estimates from 1961 to 2007 in various fields (cultivated area, yield, net trade, population and food diet, other uses of food biomass). In the last section, we question three critical points that challenge the projection of Europe in the global food system: the population projections, the conversion of plant food biomass into animal food products, the demand for biofuel. ; L'étude PluriAgriBiom (PAB), commanditée et financée par l'association française Pluriagri, vise à mieux cerner la place passée et future de l'Europe dans le système alimentaire mondial en mobilisant l'outil quantitatif rétro-prospectif Agribiom. Un premier volet, réalisé en 2011-12, était centré sur une vaste analyse rétrospective des productions, échanges et usages mondiaux de biomasses alimentaires (1961-2007). Ce deuxième volet, réalisé en 2013-14, est entièrement consacré à la consolidation et analyse d'un scénario mondial de référence PluriAgriBiom pour 2050 (PAB50) adossé aux projections 2012 de la FAO pour cet horizon. La première partie de ce rapport synthétise, pour neuf régions du monde dont une Europe à 30 pays (EU30 = EU27 + Suisse, Norvège et Islande), plusieurs centaines de milliers de données transmises par la FAO pour sa base historique 2006 (moyenne 2005-2007) et ses années de projection (2030 et 2050). Selon ces données, entre 2006 et 2050, la croissance démographique mondiale serait de +0,72% par an (dont +0,02% en EU30 seulement, le plus faible taux) pour avoisiner 9 milliards d'habitants en 2050, les trois-quarts basés en Asie (52%), Afrique et Moyen-Orient. La croissance économique générale de +4,1% par an (+3,2% en EU30 seulement, le plus faible taux) serait tirée par l'Asie (+5,1%), l'Amérique du Sud (+4,6%), l'Afrique et Moyen-Orient. Au plan agricole, les produits animaux seraient le moteur de la demande dans le secteur, directement (viandes, œufs, lait) ou indirectement (aliments pour animaux). En 2050, l'Asie consommerait alors près de la moitié des biomasses alimentaires, notamment 58% des œufs, 46% des viandes et 48% des oléagineux. A l'opposé, la demande annuelle mondiale en céréales ne croîtrait que de +0,8% malgré +1,1% pour le seul maïs. Pour répondre à cette demande, 100 millions nouveaux hectares seraient cultivés en Afrique subsaharienne et Amérique latine alors que la surface cultivée continuerait de diminuer en Europe, et les rendements des cultures croîtraient significativement en Afrique (notamment grâce à l'irrigation), plus modérément ailleurs. Au final, l'Afrique subsaharienne doublerait au moins l'essentiel de ses productions en 44 ans, ce qui ne l'empêcherait pas de rester largement déficitaire en 2050 pour la plupart des produits, notamment oléagineux. Pour EU30, ce serait aussi le cas pour les oléagineux, ainsi que pour le sucre, deux denrées que l'Amérique latine exporterait en abondance.Dans la seconde partie du rapport, ces données FAO sont converties en deux bilans Agribiom emplois-ressources (PAB06 et PAB50) pour les synthétiser et les analyser en équivalent calories, pour les comparer aussi aux bilans historiques Agribiom (1961-2007). Cela permet d'abord de montrer que c'est en Afrique subsaharienne que la croissance des disponibilités caloriques moyennes par habitant serait la plus forte pour atteindre, enfin, 3000 kcal/j en 2050. Mais la part des produits animaux dans ces disponibilités resterait extrêmement faible : moins de 200 kcal contre 550 en Asie par exemple. A l'opposé, EU30 deviendrait la 1ère consommatrice mondiale de calories animales par habitant (1350 kcal/j sur un total de 4130). Au final, entre 2006 et 2050, la demande calorique mondiale en biomasses alimentaires végétales augmenterait de +56%, une croissance bien inférieure aux 45 années précédentes en pourcentage (+178% entre 1961-2006) mais quasi identique en volume (+20 Tkcal/j entre 1961-2006 contre +18 entre 2006-2050). Cette croissance varierait de +18% pour l'Europe à +163% pour l'Afrique subsaharienne. Elle proviendrait d'une augmentation de +50% pour l'alimentation humaine directe, de +57% pour l'alimentation animale, de +49% pour les semences et usages industriels hors biocarburants, de +217% pour les biocarburants (1ère génération), et de +23% pour les pertes entre récolte et mise à disposition des unités de consommation. En 2050, les usages industriels non-alimentaires représenteraient alors 12% de la demande mondiale (dont 6% de biocarburants) contre 10% en 2006 (3% de biocarburants) et seulement 2% en 1961. Pour répondre à cette demande mondiale estimée à 50 Tkcal/j en 2050 (moins de 12 en 1961), la croissance des productions se ferait à 91% par une augmentation de +0,9% par an des rendements (+2% entre 1961 et 2006). C'est en Afrique subsaharienne et Amérique latine que la production de calories alimentaires végétales augmenterait le plus, et en EU30 le moins. En 2050, l'Europe représenterait alors moins de 8,5% de la production mondiale de calories végétales (contre 17% en 1961) et 14% de la production mondiale de calories animales (contre 34% en 1961). Elle creuserait son déficit net en calories végétales de 93% (son excédent net en calories animales diminuerait de 27%) et en importerait presque autant en 2050 que l'Asie, 2ème importatrice nette après la région Afrique-du-Nord/Moyen-Orient. Son degré général d'indépendance en calories alimentaires demeurerait néanmoins aux alentours de 90%, comme en 1961 et 2006. De l'autre côté de l'Atlantique, les Amériques resteraient quant-à elles largement autosuffisantes, à plus de 120% en 2050, et donc exportatrices nettes avec une très nette affirmation de l'Amérique latine.La troisième et dernière partie du rapport présente et discute trois points critiques du scénario de référence PAB50 adossés aux projections FAO. (1) Le premier est celui des projections démographiques, pour montrer en particulier qu'avec les dernières projections des Nations unies (« Rev. 2012 », scénario « fertilité moyenne »), l'Afrique subsaharienne compterait presque 400 millions d'habitants de plus en 2050 par comparaison avec les anciennes prévisions sur lesquelles s'était appuyée la FAO (« Rev. 2008 »). Toutes choses égales par ailleurs, cela pourrait conduire à ramener sa disponibilité calorique par habitant à celle de 2006 (2400 kcal/j), ou bien à multiplier par 3 son déficit en calories alimentaires végétales, ce qui en ferait alors la 1ère région importatrice. (2) Le second point est celui de la transformation des biomasses alimentaires végétales en animales, pour montrer par exemple que si on appliquait à l'Afrique subsaharienne les hypothèses de conversion faites par la FAO pour l'Asie, l'Afrique diminuerait ses importations nettes en biomasses alimentaires végétales de plus d'un tiers en 2050. (3) Enfin, selon les projections FAO, en 2050, les biocarburants de 1ère génération consommeraient 24% de la production mondiale de sucre, 10% des huiles végétales et 6% des céréales, soit au total l'équivalent de 6% des calories alimentaires végétales de PAB50, contre 3% en 2006. Dans ce scénario biocarburants qualifié de « limité » par la FAO au regard de politiques nationales qui pourraient être plus ambitieuses, EU30 multiplierait par plus de quatre sa consommation de matières premières végétales destinées à la production de biocarburants de 1ère génération entre 2006 (année d'encore très faible consommation) et 2050 (2020 en réalité puisque la FAO fait l'hypothèse d'une stagnation de la consommation de biocarburants à partir de 2020). En 2050, 15% des calories alimentaires végétales consommées par l'Europe seraient utilisées pour la production de biocarburants de 1ère génération, contre 4% en 2006. Par cette demande et surtout celle d'aliments pour animaux, à laquelle s'ajoute un recul relatif de sa production alimentaire en pourcentage de la production mondiale, l'Europe continuerait de jouer, via le marché international, un rôle central dans le système alimentaire mondial. Elle resterait au cœur des tensions et des arbitrages qui détermineront l'avenir du système alimentaire mondial et sa capacité à nourrir correctement et durablement une population qui pourrait atteindre 11 milliards d'habitants en 2100.
La littérature académique comme institutionnelle en matière de risques urbains a connu de substantiels développements au cours des dernières décennies, avec un changement progressif du regard porté sur la question des catastrophes « naturelles », notamment à la lumière du changement climatique. Ce phénomène simultanément planétaire, irréversible, et anthropogénique, qui multipliera et accentuera très vraisemblablement les événements catastrophiques d'origine météorologique tout autour de la planète, bouleverse profondément « l'archipel du danger » : après un stade de prise de conscience au tournant des 1990, marqué par le lancement de la Décennie Internationale de prévention des catastrophes naturelles (DIPCN) et du Groupe intergouvernemental d'experts sur le changement climatique (GIEC), un autre seuil a été franchi au tournant de ce siècle, caractérisé par le développement de risques systémiques d'une ampleur inégalée accompagnant la mondialisation des problèmes écologiques, sociaux, et économiques qui menacent gravement les posssibilités de développement durable. Du fait de ce bouleversement de perspectives, les travaux sur la question des risques naturels et climatiques, longtemps aléa-centrés, et par conséquent focalisés sur la question de l'atténuation des phénomènes eux-mêmes, se concentrentaujourd'hui davantage sur la question de l'atténuation des impacts et des vulnérabilités qu'ils révèlent. Beaucoup de travaux mettent alors l'accent sur les conditions biophysiques et socioéconomiques pouvant conduire à des situations de catastrophes et proposent donc le développement d'outils de diagnostic des vulnérabilités. Très peu, cependant, adoptent une approche territorialisée, centrée sur la ville, tentant de lier le fonctionnement et le développement urbain avec les vulnérabilités au changement climatique et les moyens de les réduire grâce à des stratégies d'adaptation adéquates.Face aux formes accentuées de risques que les sociétés urbaines contribuent à renforcer voire à créer en lien avec le changement climatique et ses impacts, c'est précisément ce manque d'attention accordé au couple vulnérabilité/adaptation que cette recherche s'est attachée à combler avec un triple objectif. En premier lieu, cette recherche revêt une dimension de théorisation et de conceptualisation visant à mieux définir et caractériser des notions fortement interdisciplinaires et transversales sur lesquelles les points d'achoppement scientifiques et les débats sont nombreux (vulnérabilité, résilience, adaptation, développement urbain durable…). En deuxième lieu, cette recherche vise à progresser dans la compréhension des impacts du changement climatique sur les systèmes anthropisés (vulnérabilité) et dans l'identification des facteurs qui déterminent la capacité de réponse des sociétés urbaines(résilience) face à ce méta-risque local qui redéfinit et redessine les autres risques et aléas. Enfin, en lien avec les objectifs écologiques, économiques et sociaux d'un développement urbain durable, cette recherche tente de formuler des pistes et propositions en vue de contribuer à l'émergence de stratégies d'adaptation et d'atténuation renouvelées, destinées à accroître la résilience urbaine face au changement climatique, en particulier des sociétés etdes territoires les plus vulnérables. L'enjeu est de participer à la construction des éléments qui composeront la ville durable de demain en proposant des éléments de réponse aux questions suivantes : A quelles conditions l'apparition ou l'exacerbation de vulnérabilités territoriales par le changement climatique peut-elle opérer comme un levier pour la prise en compte d'enjeux globaux dans l'action locale ? Comment penser les indispensables articulations, miseen cohérence, et coordination entre les actions d'atténuation et les actions d'adaptation dans une stratégie cohérente et intégrée aux préoccupations de développement urbain durable ? Comment adapter les dynamiques urbaines (formes, mobilité, planification, etc.) pour rendre les villes moins vulnérables aux évolutions climatiques et moins génératrices d'émissions de gaz à effet de serre (GES) ?Pour répondre à ces questions de recherche, les principales hypothèses formulées sont les suivantes :1) La question de l'articulation des différentes échelles spatio-temporelles (local/global, court terme/long terme) est une question particulièrement saillante dans l'étude des effets du changement climatique pour les territoires urbains et leur vulnérabilité (ou leur résilience) à ces impacts ;2) La perception des risques, leur acceptabilité sociale, la part des responsabilités globales (pressions anthropiques indirectes) et des responsabilités locales (pressions anthropiques directes) à des problèmes rencontrés sur les territoires, le gradient et la pertinence des réponses sont très variables suivant les interlocuteurs, les intérêts représentés, l'échelon territorial où l'on se situe ;3) L'amélioration de la résilience urbaine face aux évolutions climatiques passe par une meilleure compréhension de phénomènes complexes et interdépendants fondée sur une nouvelle approche, systémique et interdisciplinaire, de la ville et de la dialectique vulnérabilité/adaptation qui permette l'identification non seulement de l'ensemble des facteurs de vulnérabilité intrinsèques des systèmes urbains mais aussi de leurs interrelations en tenant compte notamment des effets de dominos, de seuils, et de rétroactions.Compte tenu des objectifs visés, la démarche adoptée dans cette recherche nous a conduits, en lien avec les enjeux de développement urbain durable, à envisager les concepts d'impacts du changement climatique et d'adaptation dans le cadre d'une analyse globale des vulnérabilités urbaines plus apte à comprendre la complexité des processus en question. Dans ce dessein, nous proposons une nouvelle vision des interactions entre les facteurs climatiqueset l'évolution des sociétés urbaines, fondée sur une approche interdisciplinaire en termes de vulnérabilité et de résilience/adaptation (capacités dynamiques de récupérer et de s'adapter face à un changement défavorable) et une représentation systémique afin d'éclairer les interdépendances complexes des systèmes sociaux, économiques et environnementaux et de mieux comprendre les différentes dynamiques qui participent à la fragilisation croissante dessociétés humaines. Cette recherche a ainsi été l'occasion d'explorer la façon dont les effets localisés du changement climatique se combinent sur les territoires aux autres dysfonctionnements, tensions et dégradations… et aux processus sociopolitiques pour donner aux politiques urbaines un caractère plus ou moins effectif, et en faire ou non un facteur d'accentuation de la vulnérabilité urbaine face aux risques climatiques. Car il ne suffit pas dedéfinir ou de constater la vulnérabilité urbaine pour en comprendre les ressorts. La vulnérabilité urbaine, qui est simultanément multidimensionnelle, multidisciplinaire et dynamique, n'est pas un concept simple à appréhender, surtout dans un contexte de changement climatique : d'une part, les impacts attendus des évolutions climatiques (et donc l'exposition future) sont marqués par une forte incertitude, surtout à l'échelle locale (évolution du climat moyen et/ou modification de la fréquence et de l'ampleur des événements extrêmes) ; d'autre part, il n'y a actuellement pas de consensus sur les déterminants de la résilience ou plus précisément de la capacité d'adaptation qui en est une des composantes, sachant que résilience et capacité d'adaptation sont largement contextuelles, ce qui freine les velléités de comparaison à grande échelle ; enfin, il n'y a pas davantage consensus sur la vulnérabilité elle-même et son lien à l'adaptation. Des limites des approches disciplinaires traditionnelles de représentation du couple vulnérabilité/adaptation fondées sur des relations de causalité linéaire, il nous est apparu indispensable de développer une approche interdisciplinaire et systémique pour réinterroger ce couple vulnérabilité/adaptation. On analyse ainsi comment le passage de la vulnérabilité urbaine au changement climatique aux réponses locales induit une chaîne de causalité complexe et non linéaire. Après avoir élaboré un schéma systémique du couple vulnérabilité/adaptation mettant en évidence des causalités circulaires et des boucles de rétroactions, nous montrons en quoi ce couple se situe d'emblée entre coévolution et incertitude. Ces questions théoriques ont des conséquences pratiques ou opérationnelles puisque les responsables locaux doivent composer avec les vulnérabilités de leur territoire au risque climatique, qui est devenu un nouvel enjeu pour la sécurité des biens et des personnes comme pour le devenir même des villes, et en tenir compte dans leurs politiques d'aménagement. La représentation du couple vulnérabilité/adaptation qu'ont en tête les responsables locaux n'esten effet pas sans incidence sur leur manière d'envisager leurs politiques locales de réponse au changement climatique. Il en est ressorti qu'une approche systémique était plus à même de contribuer à améliorer la résilience urbaine au travers de la formulation de stratégies d'adaptation et d'atténuation locales plus étroitement reliées et, qui plus est, intégrées à des politiques structurantes de développement urbain durable. Il apparaît toutefois, au vu des faits,que si le mot d'ordre de l'adaptation au changement climatique est de plus en plus intégré dans les discours des collectivités, il n'est encore que peu mobilisé dans les référentiels et stratégies d'actions. Bien que certaines incidences du changement climatique se manifestent déjà, la prise de conscience de la nécessité d'agir par les acteurs locaux commence à peine à s'opérer et les politiques en la matière n'en sont qu'à leurs balbutiements. C'est pourquoicette recherche, bien que volontairement focalisée sur la dimension d'« adaptation » au changement climatique, impliquait cependant de resituer les pratiques et stratégies d'adaptation dans le cadre d'une – éventuelle – « politique climat locale » et plus largement de développement urbain durable.
La littérature académique comme institutionnelle en matière de risques urbains a connu de substantiels développements au cours des dernières décennies, avec un changement progressif du regard porté sur la question des catastrophes « naturelles », notamment à la lumière du changement climatique. Ce phénomène simultanément planétaire, irréversible, et anthropogénique, qui multipliera et accentuera très vraisemblablement les événements catastrophiques d'origine météorologique tout autour de la planète, bouleverse profondément « l'archipel du danger » : après un stade de prise de conscience au tournant des 1990, marqué par le lancement de la Décennie Internationale de prévention des catastrophes naturelles (DIPCN) et du Groupe intergouvernemental d'experts sur le changement climatique (GIEC), un autre seuil a été franchi au tournant de ce siècle, caractérisé par le développement de risques systémiques d'une ampleur inégalée accompagnant la mondialisation des problèmes écologiques, sociaux, et économiques qui menacent gravement les posssibilités de développement durable. Du fait de ce bouleversement de perspectives, les travaux sur la question des risques naturels et climatiques, longtemps aléa-centrés, et par conséquent focalisés sur la question de l'atténuation des phénomènes eux-mêmes, se concentrentaujourd'hui davantage sur la question de l'atténuation des impacts et des vulnérabilités qu'ils révèlent. Beaucoup de travaux mettent alors l'accent sur les conditions biophysiques et socioéconomiques pouvant conduire à des situations de catastrophes et proposent donc le développement d'outils de diagnostic des vulnérabilités. Très peu, cependant, adoptent une approche territorialisée, centrée sur la ville, tentant de lier le fonctionnement et le développement urbain avec les vulnérabilités au changement climatique et les moyens de les réduire grâce à des stratégies d'adaptation adéquates.Face aux formes accentuées de risques que les sociétés urbaines contribuent à renforcer voire à créer en lien avec le changement climatique et ses impacts, c'est précisément ce manque d'attention accordé au couple vulnérabilité/adaptation que cette recherche s'est attachée à combler avec un triple objectif. En premier lieu, cette recherche revêt une dimension de théorisation et de conceptualisation visant à mieux définir et caractériser des notions fortement interdisciplinaires et transversales sur lesquelles les points d'achoppement scientifiques et les débats sont nombreux (vulnérabilité, résilience, adaptation, développement urbain durable…). En deuxième lieu, cette recherche vise à progresser dans la compréhension des impacts du changement climatique sur les systèmes anthropisés (vulnérabilité) et dans l'identification des facteurs qui déterminent la capacité de réponse des sociétés urbaines(résilience) face à ce méta-risque local qui redéfinit et redessine les autres risques et aléas. Enfin, en lien avec les objectifs écologiques, économiques et sociaux d'un développement urbain durable, cette recherche tente de formuler des pistes et propositions en vue de contribuer à l'émergence de stratégies d'adaptation et d'atténuation renouvelées, destinées à accroître la résilience urbaine face au changement climatique, en particulier des sociétés etdes territoires les plus vulnérables. L'enjeu est de participer à la construction des éléments qui composeront la ville durable de demain en proposant des éléments de réponse aux questions suivantes : A quelles conditions l'apparition ou l'exacerbation de vulnérabilités territoriales par le changement climatique peut-elle opérer comme un levier pour la prise en compte d'enjeux globaux dans l'action locale ? Comment penser les indispensables articulations, miseen cohérence, et coordination entre les actions d'atténuation et les actions d'adaptation dans une stratégie cohérente et intégrée aux préoccupations de développement urbain durable ? Comment adapter les dynamiques urbaines (formes, mobilité, planification, etc.) pour rendre les villes moins vulnérables aux évolutions climatiques et moins génératrices d'émissions de gaz à effet de serre (GES) ?Pour répondre à ces questions de recherche, les principales hypothèses formulées sont les suivantes :1) La question de l'articulation des différentes échelles spatio-temporelles (local/global, court terme/long terme) est une question particulièrement saillante dans l'étude des effets du changement climatique pour les territoires urbains et leur vulnérabilité (ou leur résilience) à ces impacts ;2) La perception des risques, leur acceptabilité sociale, la part des responsabilités globales (pressions anthropiques indirectes) et des responsabilités locales (pressions anthropiques directes) à des problèmes rencontrés sur les territoires, le gradient et la pertinence des réponses sont très variables suivant les interlocuteurs, les intérêts représentés, l'échelon territorial où l'on se situe ;3) L'amélioration de la résilience urbaine face aux évolutions climatiques passe par une meilleure compréhension de phénomènes complexes et interdépendants fondée sur une nouvelle approche, systémique et interdisciplinaire, de la ville et de la dialectique vulnérabilité/adaptation qui permette l'identification non seulement de l'ensemble des facteurs de vulnérabilité intrinsèques des systèmes urbains mais aussi de leurs interrelations en tenant compte notamment des effets de dominos, de seuils, et de rétroactions.Compte tenu des objectifs visés, la démarche adoptée dans cette recherche nous a conduits, en lien avec les enjeux de développement urbain durable, à envisager les concepts d'impacts du changement climatique et d'adaptation dans le cadre d'une analyse globale des vulnérabilités urbaines plus apte à comprendre la complexité des processus en question. Dans ce dessein, nous proposons une nouvelle vision des interactions entre les facteurs climatiqueset l'évolution des sociétés urbaines, fondée sur une approche interdisciplinaire en termes de vulnérabilité et de résilience/adaptation (capacités dynamiques de récupérer et de s'adapter face à un changement défavorable) et une représentation systémique afin d'éclairer les interdépendances complexes des systèmes sociaux, économiques et environnementaux et de mieux comprendre les différentes dynamiques qui participent à la fragilisation croissante dessociétés humaines. Cette recherche a ainsi été l'occasion d'explorer la façon dont les effets localisés du changement climatique se combinent sur les territoires aux autres dysfonctionnements, tensions et dégradations… et aux processus sociopolitiques pour donner aux politiques urbaines un caractère plus ou moins effectif, et en faire ou non un facteur d'accentuation de la vulnérabilité urbaine face aux risques climatiques. Car il ne suffit pas dedéfinir ou de constater la vulnérabilité urbaine pour en comprendre les ressorts. La vulnérabilité urbaine, qui est simultanément multidimensionnelle, multidisciplinaire et dynamique, n'est pas un concept simple à appréhender, surtout dans un contexte de changement climatique : d'une part, les impacts attendus des évolutions climatiques (et donc l'exposition future) sont marqués par une forte incertitude, surtout à l'échelle locale (évolution du climat moyen et/ou modification de la fréquence et de l'ampleur des événements extrêmes) ; d'autre part, il n'y a actuellement pas de consensus sur les déterminants de la résilience ou plus précisément de la capacité d'adaptation qui en est une des composantes, sachant que résilience et capacité d'adaptation sont largement contextuelles, ce qui freine les velléités de comparaison à grande échelle ; enfin, il n'y a pas davantage consensus sur la vulnérabilité elle-même et son lien à l'adaptation. Des limites des approches disciplinaires traditionnelles de représentation du couple vulnérabilité/adaptation fondées sur des relations de causalité linéaire, il nous est apparu indispensable de développer une approche interdisciplinaire et systémique pour réinterroger ce couple vulnérabilité/adaptation. On analyse ainsi comment le passage de la vulnérabilité urbaine au changement climatique aux réponses locales induit une chaîne de causalité complexe et non linéaire. Après avoir élaboré un schéma systémique du couple vulnérabilité/adaptation mettant en évidence des causalités circulaires et des boucles de rétroactions, nous montrons en quoi ce couple se situe d'emblée entre coévolution et incertitude. Ces questions théoriques ont des conséquences pratiques ou opérationnelles puisque les responsables locaux doivent composer avec les vulnérabilités de leur territoire au risque climatique, qui est devenu un nouvel enjeu pour la sécurité des biens et des personnes comme pour le devenir même des villes, et en tenir compte dans leurs politiques d'aménagement. La représentation du couple vulnérabilité/adaptation qu'ont en tête les responsables locaux n'esten effet pas sans incidence sur leur manière d'envisager leurs politiques locales de réponse au changement climatique. Il en est ressorti qu'une approche systémique était plus à même de contribuer à améliorer la résilience urbaine au travers de la formulation de stratégies d'adaptation et d'atténuation locales plus étroitement reliées et, qui plus est, intégrées à des politiques structurantes de développement urbain durable. Il apparaît toutefois, au vu des faits,que si le mot d'ordre de l'adaptation au changement climatique est de plus en plus intégré dans les discours des collectivités, il n'est encore que peu mobilisé dans les référentiels et stratégies d'actions. Bien que certaines incidences du changement climatique se manifestent déjà, la prise de conscience de la nécessité d'agir par les acteurs locaux commence à peine à s'opérer et les politiques en la matière n'en sont qu'à leurs balbutiements. C'est pourquoicette recherche, bien que volontairement focalisée sur la dimension d'« adaptation » au changement climatique, impliquait cependant de resituer les pratiques et stratégies d'adaptation dans le cadre d'une – éventuelle – « politique climat locale » et plus largement de développement urbain durable.
La littérature académique comme institutionnelle en matière de risques urbains a connu de substantiels développements au cours des dernières décennies, avec un changement progressif du regard porté sur la question des catastrophes « naturelles », notamment à la lumière du changement climatique. Ce phénomène simultanément planétaire, irréversible, et anthropogénique, qui multipliera et accentuera très vraisemblablement les événements catastrophiques d'origine météorologique tout autour de la planète, bouleverse profondément « l'archipel du danger » : après un stade de prise de conscience au tournant des 1990, marqué par le lancement de la Décennie Internationale de prévention des catastrophes naturelles (DIPCN) et du Groupe intergouvernemental d'experts sur le changement climatique (GIEC), un autre seuil a été franchi au tournant de ce siècle, caractérisé par le développement de risques systémiques d'une ampleur inégalée accompagnant la mondialisation des problèmes écologiques, sociaux, et économiques qui menacent gravement les posssibilités de développement durable. Du fait de ce bouleversement de perspectives, les travaux sur la question des risques naturels et climatiques, longtemps aléa-centrés, et par conséquent focalisés sur la question de l'atténuation des phénomènes eux-mêmes, se concentrentaujourd'hui davantage sur la question de l'atténuation des impacts et des vulnérabilités qu'ils révèlent. Beaucoup de travaux mettent alors l'accent sur les conditions biophysiques et socioéconomiques pouvant conduire à des situations de catastrophes et proposent donc le développement d'outils de diagnostic des vulnérabilités. Très peu, cependant, adoptent une approche territorialisée, centrée sur la ville, tentant de lier le fonctionnement et le développement urbain avec les vulnérabilités au changement climatique et les moyens de les réduire grâce à des stratégies d'adaptation adéquates.Face aux formes accentuées de risques que les sociétés urbaines contribuent à renforcer voire à créer en lien avec le changement climatique et ses impacts, c'est précisément ce manque d'attention accordé au couple vulnérabilité/adaptation que cette recherche s'est attachée à combler avec un triple objectif. En premier lieu, cette recherche revêt une dimension de théorisation et de conceptualisation visant à mieux définir et caractériser des notions fortement interdisciplinaires et transversales sur lesquelles les points d'achoppement scientifiques et les débats sont nombreux (vulnérabilité, résilience, adaptation, développement urbain durable…). En deuxième lieu, cette recherche vise à progresser dans la compréhension des impacts du changement climatique sur les systèmes anthropisés (vulnérabilité) et dans l'identification des facteurs qui déterminent la capacité de réponse des sociétés urbaines(résilience) face à ce méta-risque local qui redéfinit et redessine les autres risques et aléas. Enfin, en lien avec les objectifs écologiques, économiques et sociaux d'un développement urbain durable, cette recherche tente de formuler des pistes et propositions en vue de contribuer à l'émergence de stratégies d'adaptation et d'atténuation renouvelées, destinées à accroître la résilience urbaine face au changement climatique, en particulier des sociétés etdes territoires les plus vulnérables. L'enjeu est de participer à la construction des éléments qui composeront la ville durable de demain en proposant des éléments de réponse aux questions suivantes : A quelles conditions l'apparition ou l'exacerbation de vulnérabilités territoriales par le changement climatique peut-elle opérer comme un levier pour la prise en compte d'enjeux globaux dans l'action locale ? Comment penser les indispensables articulations, miseen cohérence, et coordination entre les actions d'atténuation et les actions d'adaptation dans une stratégie cohérente et intégrée aux préoccupations de développement urbain durable ? Comment adapter les dynamiques urbaines (formes, mobilité, planification, etc.) pour rendre les villes moins vulnérables aux évolutions climatiques et moins génératrices d'émissions de gaz à effet de serre (GES) ?Pour répondre à ces questions de recherche, les principales hypothèses formulées sont les suivantes :1) La question de l'articulation des différentes échelles spatio-temporelles (local/global, court terme/long terme) est une question particulièrement saillante dans l'étude des effets du changement climatique pour les territoires urbains et leur vulnérabilité (ou leur résilience) à ces impacts ;2) La perception des risques, leur acceptabilité sociale, la part des responsabilités globales (pressions anthropiques indirectes) et des responsabilités locales (pressions anthropiques directes) à des problèmes rencontrés sur les territoires, le gradient et la pertinence des réponses sont très variables suivant les interlocuteurs, les intérêts représentés, l'échelon territorial où l'on se situe ;3) L'amélioration de la résilience urbaine face aux évolutions climatiques passe par une meilleure compréhension de phénomènes complexes et interdépendants fondée sur une nouvelle approche, systémique et interdisciplinaire, de la ville et de la dialectique vulnérabilité/adaptation qui permette l'identification non seulement de l'ensemble des facteurs de vulnérabilité intrinsèques des systèmes urbains mais aussi de leurs interrelations en tenant compte notamment des effets de dominos, de seuils, et de rétroactions.Compte tenu des objectifs visés, la démarche adoptée dans cette recherche nous a conduits, en lien avec les enjeux de développement urbain durable, à envisager les concepts d'impacts du changement climatique et d'adaptation dans le cadre d'une analyse globale des vulnérabilités urbaines plus apte à comprendre la complexité des processus en question. Dans ce dessein, nous proposons une nouvelle vision des interactions entre les facteurs climatiqueset l'évolution des sociétés urbaines, fondée sur une approche interdisciplinaire en termes de vulnérabilité et de résilience/adaptation (capacités dynamiques de récupérer et de s'adapter face à un changement défavorable) et une représentation systémique afin d'éclairer les interdépendances complexes des systèmes sociaux, économiques et environnementaux et de mieux comprendre les différentes dynamiques qui participent à la fragilisation croissante dessociétés humaines. Cette recherche a ainsi été l'occasion d'explorer la façon dont les effets localisés du changement climatique se combinent sur les territoires aux autres dysfonctionnements, tensions et dégradations… et aux processus sociopolitiques pour donner aux politiques urbaines un caractère plus ou moins effectif, et en faire ou non un facteur d'accentuation de la vulnérabilité urbaine face aux risques climatiques. Car il ne suffit pas dedéfinir ou de constater la vulnérabilité urbaine pour en comprendre les ressorts. La vulnérabilité urbaine, qui est simultanément multidimensionnelle, multidisciplinaire et dynamique, n'est pas un concept simple à appréhender, surtout dans un contexte de changement climatique : d'une part, les impacts attendus des évolutions climatiques (et donc l'exposition future) sont marqués par une forte incertitude, surtout à l'échelle locale (évolution du climat moyen et/ou modification de la fréquence et de l'ampleur des événements extrêmes) ; d'autre part, il n'y a actuellement pas de consensus sur les déterminants de la résilience ou plus précisément de la capacité d'adaptation qui en est une des composantes, sachant que résilience et capacité d'adaptation sont largement contextuelles, ce qui freine les velléités de comparaison à grande échelle ; enfin, il n'y a pas davantage consensus sur la vulnérabilité elle-même et son lien à l'adaptation. Des limites des approches disciplinaires traditionnelles de représentation du couple vulnérabilité/adaptation fondées sur des relations de causalité linéaire, il nous est apparu indispensable de développer une approche interdisciplinaire et systémique pour réinterroger ce couple vulnérabilité/adaptation. On analyse ainsi comment le passage de la vulnérabilité urbaine au changement climatique aux réponses locales induit une chaîne de causalité complexe et non linéaire. Après avoir élaboré un schéma systémique du couple vulnérabilité/adaptation mettant en évidence des causalités circulaires et des boucles de rétroactions, nous montrons en quoi ce couple se situe d'emblée entre coévolution et incertitude. Ces questions théoriques ont des conséquences pratiques ou opérationnelles puisque les responsables locaux doivent composer avec les vulnérabilités de leur territoire au risque climatique, qui est devenu un nouvel enjeu pour la sécurité des biens et des personnes comme pour le devenir même des villes, et en tenir compte dans leurs politiques d'aménagement. La représentation du couple vulnérabilité/adaptation qu'ont en tête les responsables locaux n'esten effet pas sans incidence sur leur manière d'envisager leurs politiques locales de réponse au changement climatique. Il en est ressorti qu'une approche systémique était plus à même de contribuer à améliorer la résilience urbaine au travers de la formulation de stratégies d'adaptation et d'atténuation locales plus étroitement reliées et, qui plus est, intégrées à des politiques structurantes de développement urbain durable. Il apparaît toutefois, au vu des faits,que si le mot d'ordre de l'adaptation au changement climatique est de plus en plus intégré dans les discours des collectivités, il n'est encore que peu mobilisé dans les référentiels et stratégies d'actions. Bien que certaines incidences du changement climatique se manifestent déjà, la prise de conscience de la nécessité d'agir par les acteurs locaux commence à peine à s'opérer et les politiques en la matière n'en sont qu'à leurs balbutiements. C'est pourquoicette recherche, bien que volontairement focalisée sur la dimension d'« adaptation » au changement climatique, impliquait cependant de resituer les pratiques et stratégies d'adaptation dans le cadre d'une – éventuelle – « politique climat locale » et plus largement de développement urbain durable.
La littérature académique comme institutionnelle en matière de risques urbains a connu de substantiels développements au cours des dernières décennies, avec un changement progressif du regard porté sur la question des catastrophes « naturelles », notamment à la lumière du changement climatique. Ce phénomène simultanément planétaire, irréversible, et anthropogénique, qui multipliera et accentuera très vraisemblablement les événements catastrophiques d'origine météorologique tout autour de la planète, bouleverse profondément « l'archipel du danger » : après un stade de prise de conscience au tournant des 1990, marqué par le lancement de la Décennie Internationale de prévention des catastrophes naturelles (DIPCN) et du Groupe intergouvernemental d'experts sur le changement climatique (GIEC), un autre seuil a été franchi au tournant de ce siècle, caractérisé par le développement de risques systémiques d'une ampleur inégalée accompagnant la mondialisation des problèmes écologiques, sociaux, et économiques qui menacent gravement les posssibilités de développement durable. Du fait de ce bouleversement de perspectives, les travaux sur la question des risques naturels et climatiques, longtemps aléa-centrés, et par conséquent focalisés sur la question de l'atténuation des phénomènes eux-mêmes, se concentrentaujourd'hui davantage sur la question de l'atténuation des impacts et des vulnérabilités qu'ils révèlent. Beaucoup de travaux mettent alors l'accent sur les conditions biophysiques et socioéconomiques pouvant conduire à des situations de catastrophes et proposent donc le développement d'outils de diagnostic des vulnérabilités. Très peu, cependant, adoptent une approche territorialisée, centrée sur la ville, tentant de lier le fonctionnement et le développement urbain avec les vulnérabilités au changement climatique et les moyens de les réduire grâce à des stratégies d'adaptation adéquates.Face aux formes accentuées de risques que les sociétés urbaines contribuent à renforcer voire à créer en lien avec le changement climatique et ses impacts, c'est précisément ce manque d'attention accordé au couple vulnérabilité/adaptation que cette recherche s'est attachée à combler avec un triple objectif. En premier lieu, cette recherche revêt une dimension de théorisation et de conceptualisation visant à mieux définir et caractériser des notions fortement interdisciplinaires et transversales sur lesquelles les points d'achoppement scientifiques et les débats sont nombreux (vulnérabilité, résilience, adaptation, développement urbain durable…). En deuxième lieu, cette recherche vise à progresser dans la compréhension des impacts du changement climatique sur les systèmes anthropisés (vulnérabilité) et dans l'identification des facteurs qui déterminent la capacité de réponse des sociétés urbaines(résilience) face à ce méta-risque local qui redéfinit et redessine les autres risques et aléas. Enfin, en lien avec les objectifs écologiques, économiques et sociaux d'un développement urbain durable, cette recherche tente de formuler des pistes et propositions en vue de contribuer à l'émergence de stratégies d'adaptation et d'atténuation renouvelées, destinées à accroître la résilience urbaine face au changement climatique, en particulier des sociétés etdes territoires les plus vulnérables. L'enjeu est de participer à la construction des éléments qui composeront la ville durable de demain en proposant des éléments de réponse aux questions suivantes : A quelles conditions l'apparition ou l'exacerbation de vulnérabilités territoriales par le changement climatique peut-elle opérer comme un levier pour la prise en compte d'enjeux globaux dans l'action locale ? Comment penser les indispensables articulations, miseen cohérence, et coordination entre les actions d'atténuation et les actions d'adaptation dans une stratégie cohérente et intégrée aux préoccupations de développement urbain durable ? Comment adapter les dynamiques urbaines (formes, mobilité, planification, etc.) pour rendre les villes moins vulnérables aux évolutions climatiques et moins génératrices d'émissions de gaz à effet de serre (GES) ?Pour répondre à ces questions de recherche, les principales hypothèses formulées sont les suivantes :1) La question de l'articulation des différentes échelles spatio-temporelles (local/global, court terme/long terme) est une question particulièrement saillante dans l'étude des effets du changement climatique pour les territoires urbains et leur vulnérabilité (ou leur résilience) à ces impacts ;2) La perception des risques, leur acceptabilité sociale, la part des responsabilités globales (pressions anthropiques indirectes) et des responsabilités locales (pressions anthropiques directes) à des problèmes rencontrés sur les territoires, le gradient et la pertinence des réponses sont très variables suivant les interlocuteurs, les intérêts représentés, l'échelon territorial où l'on se situe ;3) L'amélioration de la résilience urbaine face aux évolutions climatiques passe par une meilleure compréhension de phénomènes complexes et interdépendants fondée sur une nouvelle approche, systémique et interdisciplinaire, de la ville et de la dialectique vulnérabilité/adaptation qui permette l'identification non seulement de l'ensemble des facteurs de vulnérabilité intrinsèques des systèmes urbains mais aussi de leurs interrelations en tenant compte notamment des effets de dominos, de seuils, et de rétroactions.Compte tenu des objectifs visés, la démarche adoptée dans cette recherche nous a conduits, en lien avec les enjeux de développement urbain durable, à envisager les concepts d'impacts du changement climatique et d'adaptation dans le cadre d'une analyse globale des vulnérabilités urbaines plus apte à comprendre la complexité des processus en question. Dans ce dessein, nous proposons une nouvelle vision des interactions entre les facteurs climatiqueset l'évolution des sociétés urbaines, fondée sur une approche interdisciplinaire en termes de vulnérabilité et de résilience/adaptation (capacités dynamiques de récupérer et de s'adapter face à un changement défavorable) et une représentation systémique afin d'éclairer les interdépendances complexes des systèmes sociaux, économiques et environnementaux et de mieux comprendre les différentes dynamiques qui participent à la fragilisation croissante dessociétés humaines. Cette recherche a ainsi été l'occasion d'explorer la façon dont les effets localisés du changement climatique se combinent sur les territoires aux autres dysfonctionnements, tensions et dégradations… et aux processus sociopolitiques pour donner aux politiques urbaines un caractère plus ou moins effectif, et en faire ou non un facteur d'accentuation de la vulnérabilité urbaine face aux risques climatiques. Car il ne suffit pas dedéfinir ou de constater la vulnérabilité urbaine pour en comprendre les ressorts. La vulnérabilité urbaine, qui est simultanément multidimensionnelle, multidisciplinaire et dynamique, n'est pas un concept simple à appréhender, surtout dans un contexte de changement climatique : d'une part, les impacts attendus des évolutions climatiques (et donc l'exposition future) sont marqués par une forte incertitude, surtout à l'échelle locale (évolution du climat moyen et/ou modification de la fréquence et de l'ampleur des événements extrêmes) ; d'autre part, il n'y a actuellement pas de consensus sur les déterminants de la résilience ou plus précisément de la capacité d'adaptation qui en est une des composantes, sachant que résilience et capacité d'adaptation sont largement contextuelles, ce qui freine les velléités de comparaison à grande échelle ; enfin, il n'y a pas davantage consensus sur la vulnérabilité elle-même et son lien à l'adaptation. Des limites des approches disciplinaires traditionnelles de représentation du couple vulnérabilité/adaptation fondées sur des relations de causalité linéaire, il nous est apparu indispensable de développer une approche interdisciplinaire et systémique pour réinterroger ce couple vulnérabilité/adaptation. On analyse ainsi comment le passage de la vulnérabilité urbaine au changement climatique aux réponses locales induit une chaîne de causalité complexe et non linéaire. Après avoir élaboré un schéma systémique du couple vulnérabilité/adaptation mettant en évidence des causalités circulaires et des boucles de rétroactions, nous montrons en quoi ce couple se situe d'emblée entre coévolution et incertitude. Ces questions théoriques ont des conséquences pratiques ou opérationnelles puisque les responsables locaux doivent composer avec les vulnérabilités de leur territoire au risque climatique, qui est devenu un nouvel enjeu pour la sécurité des biens et des personnes comme pour le devenir même des villes, et en tenir compte dans leurs politiques d'aménagement. La représentation du couple vulnérabilité/adaptation qu'ont en tête les responsables locaux n'esten effet pas sans incidence sur leur manière d'envisager leurs politiques locales de réponse au changement climatique. Il en est ressorti qu'une approche systémique était plus à même de contribuer à améliorer la résilience urbaine au travers de la formulation de stratégies d'adaptation et d'atténuation locales plus étroitement reliées et, qui plus est, intégrées à des politiques structurantes de développement urbain durable. Il apparaît toutefois, au vu des faits,que si le mot d'ordre de l'adaptation au changement climatique est de plus en plus intégré dans les discours des collectivités, il n'est encore que peu mobilisé dans les référentiels et stratégies d'actions. Bien que certaines incidences du changement climatique se manifestent déjà, la prise de conscience de la nécessité d'agir par les acteurs locaux commence à peine à s'opérer et les politiques en la matière n'en sont qu'à leurs balbutiements. C'est pourquoicette recherche, bien que volontairement focalisée sur la dimension d'« adaptation » au changement climatique, impliquait cependant de resituer les pratiques et stratégies d'adaptation dans le cadre d'une – éventuelle – « politique climat locale » et plus largement de développement urbain durable.
The training of teachers, particularly those of the first cycle of basic education is at theepicenter of educational issues that arise in Mali. Indeed, measures of macroeconomicadjustment in the 1980s led the country at that time to the closure of schools and teachertraining to early retirement of most experienced teachers. A decade later, theinternational community took a stand Jomtien Education for All (EFA). The pursuit of this objective has required the implementation of alternative strategiesincluding the opening of education to private and community and the use of contractteachers, under the Ten-Year Programme of Development of Education (PRODEC). Contract teachers are theoretically unemployed graduates of various training profiles.But there is also meeting with school leavers without qualifications. They receivetraining from 30 to 45 days before being poured into education. If they have theadvantage of being less expensive than professional teachers, they are also less welltrained. The proliferation of types of schools (public, private, community, basic schools, villageschools, etc.) Induced a policy of opening up education to private and communitycombined with the massive teaching staff with qualifications and skills is variable, andmost often very low, has undoubtedly helped accelerate the pace of enrollment in Mali.However, these measures have led to a de-professionalization of teachers and thesegmentation status of teachers, with the resulting low requirement with respect to thequality of teaching-learning situations. To address this problem, the Ministry of Education has developed and adopted in 2003a policy of initial and continuing training of teachers. This policy develops distancelearning and ICT integration in education as alternatives to the professionalization ofteachers in a relatively short time and at lower cost. Thus, through various partnerships,experiments have been initiated at the institutional level: the program of trainingteachers through Interactive Radio (FIER) with support from USAID in 2004 and theproject in 2006 from Cyber_Edu a partnership agreement between UNCTAD, the Canton of Geneva and the Ministry of Communication and New Technologies (MCNT)acting on behalf of the Government of Mali. The FIER program has positioned relative to the use of radio in the training of primaryteachers and their coaching staff and the integration of ICT in the faculty developmentoffering training to teachers in MFI to offer them opportunities for self-training throughthe use of ICT, as the project Cyber_Edu who has also chosen to promote ICT anddigital pedagogy in the training of teachers and trainers. These projects have undoubtedly saved the results in the pursuit of these goals, but if itremains questionable particularly as regards ICT integration and digital teaching andlearning in the professional practices of teachers. Indeed, the analysis shows that theseexperiments have not been without difficulties, difficulties that have marred the resultsto be achieved. Among the many difficulties that have hampered the operationalizationof one or other of these projects, the study pointed to the quality of the equipment,motivation of players and their effective involvement of beneficiaries, due to a poorlydefined political vision and level of preparation that has not taken sufficient account ofthe socio-economic field from the point of view of the technical architecture andeducational devices. Hence the gap between rhetoric and political stances in favor of the country'sintegration into the information society and knowledge economy in which the schoolshould be the crucible and the integration of this vision into policies and developmentplans in general and particularly in the development of sector education and training. Without the definition of a political vision sufficiently clear and coherent, the goldenage of the Distance Education (ADF) and the Information Technology andCommunication for Education (ICTE) in Mali is not for tomorrow. The first and maincontribution of this research, the second being really not, especially since it is acommonplace on the importation of all initiatives and development activities, withouthowever, that they are likely to spur a real momentum of development. The mainreason, as it appears in the analysis of the devices mentioned here, is that scientific rigorbefitting the establishment and implementation of such innovation is not the most oftenobserved in its principles and its conditionalities. This raises the need to rethink theNorth-South scientific cooperation in the direction of a true intellectual and financial involvement of countries likely to spread, and to the goals of development andempowerment. ; La formation continue des enseignants notamment, ceux du premier cycle del'enseignement fondamental est à l'épicentre des questions éducatives qui se posent auMali. En effet, les mesures d'ajustement macro-économique des années 1980 ontconduit à cette époque le pays à la fermeture des écoles de formation d'enseignants et àla mise à la retraite anticipée des enseignants les plus expérimentés. Une décennie plustard, la communauté internationale réunie à Jomtien prenait position pour l'Educationpour tous (EPT). La poursuite de cet objectif a nécessité la mise en œuvre de stratégies alternatives dontl'ouverture de l'enseignement à l'initiative privée et communautaire et le recours auxenseignants contractuels, dans le cadre du Programme décennal de développement del'éducation (PRODEC). Les enseignants contractuels sont théoriquement des diplômés sans emploi de diversprofils de formation. Mais, on y rencontre aussi des déscolarisés précoces sansqualification. Ils suivent une formation professionnelle de 30 à 45 jours avant d'êtreversés dans l'enseignement. S'ils présentent l'avantage d'être moins coûteux que lesenseignants professionnels, ils sont aussi moins bien formés. La multiplication des types d'écoles (publiques, privées, communautaires, écoles debase, écoles du village, etc.) induite d'une politique d'ouverture de l'enseignement àl'initiative privée et communautaire conjuguée à l'engagement massif de personnelenseignant disposant de qualifications et de compétences variables de fait, et le plussouvent très faibles, a sans doute, permis une accélération du rythme des scolarisationsau Mali. Cependant, ces mesures auront conduit à une déprofessionnalisation desenseignants et à la segmentation des statuts du personnel enseignant, avec commecorollaire une exigence peu élevée à l'égard de la qualité des situations d'enseignement-apprentissage. En vue de répondre à cette problématique, le Ministère de l'éducation nationale aélaboré et fait adopter en 2003 une politique de formation initiale et continue desenseignants. Cette politique conçoit la formation à distance et l'intégration des TIC dansl'éducation comme des alternatives à la professionnalisation des enseignants dans undélai relativement court et à moindre coût. Ainsi, dans le cadre de divers partenariats, des expériences ont été mises en chantier au plan institutionnel : le programme deFormation interactive des enseignants par la radio (FIER) avec l'appui de l'USAID en2004 et le projet Cyber_Edu en 2006 issu d'un accord de partenariat entre la CNUCED,le Canton de Genève et le Ministère de la communication et des nouvelles technologies(MCNT) agissant au nom du gouvernement du Mali. Le programme FIER s'est positionné par rapport à l'usage de la radio dans la formationdes enseignants du primaire et du personnel chargé de leur encadrement et l'intégrationdes TIC dans le perfectionnement des professeurs assurant la formation initiale desenseignants en IFM, en vue d'offrir à ceux-ci des opportunités d'auto-formation parl'utilisation des TIC, à l'instar du projet Cyber_Edu qui a, lui aussi, choisi depromouvoir les TIC et la pédagogie numérique dans la formation continue desenseignants et des formateurs. Ces projets ont, sans doute, enregistré des résultats dans la poursuite de ces objectifs,même si cela reste discutable notamment, en ce qui concerne l'intégration des TIC et dela pédagogique numérique dans les pratiques professionnelles des enseignants. En effet,l'analyse montre que ces expérimentations n'ont pas été sans difficultés, des difficultésqui ont entaché les résultats susceptibles d'être atteints. Parmi ces nombreusesdifficultés qui ont entravé l'opérationnalisation de l'un ou autre de ces projets, l'étude apointé du doigt la qualité des équipements, la motivation des acteurs bénéficiaires etleur implication effective, conséquence d'une vision politique mal définie et d'unniveau de préparation qui n'a pas suffisamment tenu compte des réalités socioéconomiques du terrain du double point de vue de l'architecture technique etpédagogique des dispositifs. D'où le fossé qui sépare les discours et prises de position politique en faveur del'insertion du pays dans la société de l'information et dans l'économie du savoir dontl'école devrait être le creuset et l'intégration de cette vision dans les politiques et plansde développement en général et, en particulier dans le développement du secteur del'éducation et de la formation. Sans la définition d'une vision politique suffisamment claire et cohérente, l'âge d'or dela Formation à distance (FAD) et des Technologies de l'information et de lacommunication pour l'éducation (TICE) au Mali n'est pas pour demain. C'est la première et la principale contribution de cette recherche ; la seconde n'étant vraimentpas une, d'autant qu'il s'agit d'un lieu commun relatif à l'importation de toutesinitiatives et actions de développement, sans pourtant que celles-ci soient enclines àimpulser une véritable dynamique de développement. La principale raison, comme ilapparaît dans l'analyse des dispositifs dont il est question ici, tient au fait que la rigueurscientifique qui sied à l'implantation et à la mise en œuvre de ce type d'innovation n'estpas le plus souvent observée dans ses principes et dans ses conditionnalités. Cela pose lanécessité de repenser la coopération scientifique Nord-Sud dans le sens d'une véritableimplication intellectuelle et financière du pays susceptible de faire tache d'huile etpermettant l'atteinte des objectifs de développement et d'autonomisation.
Under construction ; L'avènement des « musées de l'Europe » semble annoncer la disparition d'un modèle solidement institué d'outils de représentation symbolique de la nation (les musées d'ethnologie et d'histoire nationales) ou venir s'y ajouter, et engendrer, de ce fait, l'apparition d'instruments « identitaires » européens. En quoi ces musées incarnent une innovation, un changement de modèle ? Pourquoi et pour qui sont-ils ou non un problème, ici et maintenant ? Incarnent-ils une forme d'abolition ou détournée de sauvetage, de revalorisation d'un modèle d'institution culturelle nationale, dans la mesure où ils en sont les héritiers directs et dans la mesure où leurs acteurs réaffirment la croyance dans la force performative – identitaire – de l'institution muséale ? Visant à traiter ces interrogations, la thèse consiste en l'étude du processus, en cours, de production de musées de culture et d'histoire dédiés à l'Europe, abordé à travers nombre de questions corolaires qui nous ont permis d'avoir prise sur cet objet et ce terrain mouvant, multi-site et multi-temps. En quoi consistent ces musées, ouverts au public, restés à l'état de projet ou en cours de création ? Par qui sont-ils voulus, réalisés, financés ? Sur quoi reposent-ils en termes de collections, de « patrimoine » ? Qu'expose-t-il et que font-ils ? Pourquoi et comment les « musées de l'Europe » sont-ils au nombre de plusieurs ? Découlent-ils d'une volonté politique ou de plusieurs, et desquelles ? Quelles sont les stratégies d'action mises en oeuvre pour réaliser les projets ? En éclairant ces questions, nous renseignons sur les conditions sociales et institutionnelles d'une certaine forme d'européanisation – que nous avons appelée européanisation culturelle pour mieux l'interroger –, à travers l'étude empirique d'un cas spécifique : la transformation contemporaine de musées d'ethnologie et d'histoire nationales et la création ex nihilo de « musées de l'Europe », à l'œuvre dans plusieurs pays européens depuis la fin des années 1980. L'objet du questionnement est de comprendre comment, pourquoi et par qui est construite et tente d'être institutionnalisée cette (nouvelle ?) catégorie muséale qui se révèle être hautement problématique et floue. L'on sait que les responsables des institutions communautaires et européennes élaborent des outils, des programmes et des produits destinés à développer le sentiment d'appartenance à la " communauté imaginée " européenne, en privilégiant une action sur la culture, l'histoire et la mémoire. L'on pouvait donc logiquement penser, que les « musées de l'Europe » émergents relèvent de ce processus, de cette politique « d'identité » à l'échelle européenne. Nous avons voulu le vérifier. Ce faisant, nous nous sommes trouvé confrontée à un véritable chantier, dans les divers sens du terme. C'est sur ce chantier, matériel et symbolique, que nous avons évolué sur plusieurs années, en menant une enquête ethnographique et sociohistorique, rythmée par des observations et des participations in situ, des entretiens, un travail sur archives récentes et vivantes, la visite de musées et d'expositions, une veille médiatique permanente, afin d'identifier et de mettre en perspective les acteurs, les groupes, les processus, les activités, les opérations concrètes qui aspirent à « mettre l'Europe au musée » et à créer des institutions entièrement consacrées à cette fin. Mise en pratique de façon croisée et transversale, cette approche nous a permis de restituer et de comprendre la genèse, l'historicité et l'actualité de cette catégorie en formation, constitués par plusieurs musées ou projets de musées avortés ou en cours, unis par un même critère : être déclarés, par leurs acteurs, « musées de l'Europe » . Ces « musées », incomparables entre eux termes à termes, ont été appréhendés à travers leurs croisements et transferts plus que par stricte comparaison, afin de saisir la dynamique à l'œuvre à la fois dans sa dimension européenne (internationale et transnationale) et dans ses ancrages nationaux et locaux. A ce titre, une attention particulière a été accordée au « Réseau des musées de l'Europe », à ses membres et à ses non-membres, pour comprendre comment tente d'être structurée (organisée) et institutionnalisée cette catégorie muséale naissante. Dans la première partie (Sociogenèse des « musées de l'Europe »), nous nous intéressons aux facteurs endogènes et exogènes, macrosociologiques et microsociologiques, liés à l'émergence de l'idée de « mettre l'Europe au musée », sans postuler le primat d'un niveau sur l'autre, mais en entrecroisant les niveaux d'analyse. Cela nous permet d'en savoir plus sur la composition et les modalités de structuration de la catégorie naissante des « musées de l'Europe », que nous resituons dans les cadres temporels et spatiaux de son émergence. Ce faisant, nous comprenons que l'idée même est liée à des acteurs et à des institutions diverses, plus qu'à une politique muséale cohérente. Dans le premier chapitre (Au croisement de l'histoire muséale, de l'histoire des sciences et de l'histoire politique), nous revenons ainsi sur les conditions conjoncturelles qui ont favorisé l'impulsion et la prolifération, toutefois localisée dans le temps et dans l'espace, des projets de « musées de l'Europe ». Dans le deuxième chapitre (Pléthore de projets. Entre refondations et créations ex nihilo), nous découvrons qui sont les entrepreneurs de ces nouveaux musées (culturels, scientifiques, politiques, administratifs, économiques), en mettant au jour leurs positions et trajectoires sociales et professionnelles. Ici, nous marquons la distinction entre les cas de refondation et ceux de création ex nihilo, qui n'obéissent pas tout à fait aux mêmes règles. Dans la deuxième partie (Les images de l'Europe : la muséalisation en idées et en pratiques), nous nous intéressons à la mise en œuvre des projets de « musées de l'Europe » et aux modalités concrètes d'entrée de l'Europe au musée. Dans le troisième chapitre (La division sociale du travail de représentation de l'Europe au musée), nous expliquons pourquoi « l'Europe » peut être considérée, dans l'analyse, comme un objet muséal non identifié, en analysant notamment les divergences de vue et les facteurs agissant sur la production des images de « l'Europe ». Dans le quatrième chapitre (Plus que des musées, des centres d'interprétation de l'Europe. Simple question de terminologie ?), nous nous postons du point de vue des enjeux de collection, d'exposition et d'incarnation de l'Europe, en pénétrant dans les coulisses des musées et des équipes de conception.Dans la troisième partie (De l'illusion au désenchantement : les difficultés d'institutionnalisation), nous analysons les raisons des difficultés – ou de l'échec – des « musées de l'Europe » ; pour l'heure, cela s'entend au vu de l'actualité et de l'évolution quotidienne de l'objet. Dans le cinquième chapitre (Des « groupes d'intérêt » : entre désir d'influence et recherche des soutiens), le décryptage des montages opérationnels et des stratégies de justification, de communication et de séduction pour convaincre, qui accompagnent le désir d'institutionnalisation de ces nouveaux musées, permettent de voir quels registres, arguments et techniques de représentation sont utilisés pour « porter la voix » des « musées de l'Europe », de manière collective et individuellement, par projet. Dans le sixième chapitre (Entre absence de volonté politique et interventionnisme), en retraçant l'histoire des projets en regard des jeux politiques dans lesquels ils sont pris, nous montrons que les « musées de l'Europe » sont un objet politique problématique et chaud, à l'origine des difficultés que rencontrent leurs entrepreneurs. Cela tient aux enjeux symboliques, politiques, religieux, mais aussi économiques, inhérents à la muséalisation de « l'Europe », sur lesquels nous insistons dans ce chapitre.À l'issue de ce développement, nous comprenons que les difficultés d'institutionnalisation des « musées de l'Europe » tiennent à deux phénomènes, entrecroisés. D'une part, « l'Europe » semble être un objet inapproprié au musée, et d'autre part, le musée, en tant qu'institution culturelle, semble rivé à l'échelon national, notamment en termes de dépendance vis-à-vis des structures administratives et politiques nationales. Il apparaît, dans sa forme traditionnelle, inadapté pour représenter la nouvelle forme de pouvoir qu'incarne l'Union européenne et l'horizon culturel et civilisationnel que constitue, pour certains, « l'Europe ». Ainsi, les « musées de l'Europe » se révèlent être un signe, un symptôme, un instrument et un prisme d'observation et d'analyse privilégié de la « politique d'identité » européenne. Ils permettent de comprendre quelles formes elle prend, de manière non linéaire, au sein et en dehors du giron des institutions politiques européennes et communautaires, pour elles ou au contraire, contre elles. Ainsi, dans cette thèse, nous abordons concrètement la question de savoir ce que les notions et les registres de culture, de civilisation, d'histoire, de peuple et de mémoire, posent comme problème(s) aux champs culturels, politiques et administratifs, dès lors qu'on tente de les penser et de les représenter « au-delà » du seul prisme du national. Apportant une contribution à la sociologie de l'action publique dans le domaine culturelle, à la sociologie des institutions, à la sociologie de l'européanisation et à la sociologie des musées, cette thèse permet de comprendre pourquoi la culture est un objet particulier dans le processus identifié comme relevant de l'européanisation des politiques publiques et invite à remettre cette notion même en question. C'est, finalement, un processus de production d'images de « l'Europe de la culture » polymorphe et paradoxal du point de vue de l'action publique, que la thèse met au jour.
Durant la dernière décennie, plusieurs états des lieux et, en particulier, laconférence nationale de santé de 1997 ont attiré l'attention des pouvoirspublics sur la santé des enfants et des adolescents. Prenant acte de cettepriorité, la Caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes(Canam) a défini avec l'Inserm un programme d'expertises collectivesciblé sur les pathologies de l'enfant qui sont en augmentation (obésité, troublesmentaux, asthme{). À l'issue d'une analyse exhaustive des données de lalittérature au niveau international, les experts ont défini des recommandationspour améliorer le dépistage et la prévention de ces pathologies.La Canam a également sollicité l'Inserm pour un bilan des connaissances surles méthodes en matière d'éducation pour la santé utilisées auprès des jeunesdans le contexte national et international.Tirant profit de l'ensemble de ces travaux et de ceux menés à la demande de laMission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt),de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (Cnamts)et de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes) surles risques liés à la consommation d'alcool chez les jeunes, l'Inserm a récemmentproposé à la Canam un approfondissement des recommandations élaboréespar les groupes d'experts concernant la prévention de l'obésité, destroubles mentaux ainsi que du risque alcool chez les jeunes dans le but deproposer quelques actions bien définies de prévention et d'éducation pour lasanté.Sous l'égide de l'Inserm, un groupe de travail a été constitué, rassemblantplusieurs scientifiques des expertises citées ainsi que des acteurs des administrationset organismes ayant en charge l'élaboration des politiques publiques.Les troubles pris en considération par le groupe de travail représentent unepréoccupation de santé publique en raison d'une prévalence élevée qui tendencore à augmenter. Ainsi, une proportion non négligeable d'enfants etd'adolescents (environ 12 % en France) souffrent de troubles mentaux, c'està-dire de troubles qui interfèrent avec leur développement, freinent leursapprentissages scolaires et compromettent leur devenir par une répercussionsur la qualité de vie au quotidien. La prévalence de l'obésité est également de10-12 % chez les enfants de 5 à 12 ans. L'augmentation du nombre d'enfantstouchés est très rapide, et pose en termes de santé publique le problème descomplications susceptibles de compromettre leur santé à long terme. Concernantles conduites d'alcoolisation, environ 10 %des jeunes âgés de 15 à 19 ansauraient une consommation régulière d'alcool (c'est-à-dire qu'ils ontconsommé au moins dix fois une boisson alcoolique au cours des trente derniers jours) et 5 % connaissent des ivresses régulières (c'est-à-dire qu'ilsont été îvres au moins trois fois au cours des trente derniers jours)1.Des facteurs de risque comportementaux et environnementaux sont en jeudans les problématiques étudiées. Un certain nombre de ces facteurs sontaccessibles à une prévention. Cependant, l'étude des déterminants psychosociaux,la compréhension des aspects environnementaux et surtout la connaissancedes mesures de prévention efficaces restent lacunaires. La collectesystématique de données concernant les attitudes, savoirs, comportements etpréoccupations de santé est très récente en France.La distinction classique entre prévention primaire, secondaire et tertiaire estactuellement remplacée par les notions de prévention généralisée ou universelle,sélective et indiquée. Les interventions dites généralisées sont destinéesà la population générale ou tout du moins à des groupes qui n'ont pas étésélectionnés sur la base d'un risque défini. Les campagnes de vaccination et laprévention en milieu scolaire en sont des exemples. La prévention sélectivevise un sous-groupe d'individus ayant un risque significativement plus élevéque la moyenne de développer un trouble. La prévention indiquée s'adresseaux sujets qui ont des signes d'appel, en restant en deçà des critères diagnostiques.Si la notion de prévention est claire pour tous malgré des nuances apportéespar différents corps professionnels (la « prévention médicalisée » du médecin,la « prévention répressive » du gendarme), le concept d'éducation pour lasanté et plus largement celui de promotion de la santé font souvent l'objetd'interprétations diverses. Le caractère pluridisciplinaire et pluriprofessionnelde ces domaines fait que chacun y projette sa vision de la santé.L'éducation pour la santé recouvre un ensemble de pratiques pouvant contribuerà la prévention des maladies et des accidents et à la promotion de lasanté. Traditionnellement, l'éducation pour la santé consistait en des interventionséducatives qui visaient à apporter des informations et à inciter lesindividus à adopter des attitudes et des comportements favorables à leur santédans un objectif de prévention. Actuellement, l'éducation pour la santé estplus souvent considérée comme un processus créant avec les personnes et lesgroupes les conditions du développement de leurs capacités, valorisant leurautonomie et leur responsabilité, ceci dans un but de promotion de la santé.Le concept de promotion de la santé formalisé en 1986 dans la charted'Ottawa, qui reste la référence mondiale, a élargi la démarche éducative enmettant en avant la responsabilité collective. Il ne s'agit plus seulementd'éduquer les individus, mais aussi de favoriser les mobilisations et les changementscollectifs en prenant en compte les déterminants psychosociaux etsociétaux à l'origine des comportements et des attitudes défavorables à la santé. La promotion de la santé inclut l'éducation pour la santé, qui en resteune composante essentielle. Les principes évoqués pour la promotion de lasanté font appel à la notion de milieu et de cadre de vie. Les interventionsreposent sur une approche intersectorielle prenant en compte la multicausalitédes déterminants de santé. L'approche se veut accompagnatrice du développement,le but étant l'augmentation de la capacité des individus às'autogérer (notion d'empowerment).Concernant l'éducation pour la santé, l'école est reconnue comme le lieud'intervention privilégié. En effet, l'école permet d'atteindre la très grandemajorité d'une classe d'âge. Les jeunes y représentent une population captivefacile à informer dans le cadre des programmes d'enseignement. Mais surtout,de par sa mission éducative, l'école participe à la construction des individus.Cependant, le cercle familial conserve un rôle de premier plan et la participationdes parents dans les programmes d'éducation pour la santé est capitalepour le bon déroulement de ceux-ci. L'éducation pour la santé doit pouvoir sepoursuivre tout au long de la scolarité des élèves de la maternelle jusqu'ausecondaire. Les programmes doivent être mis en œuvre de manière progressiveen tenant compte des préocupations liées à l'âge. La cohérence et la continuitédes interventions, instaurées tout au long du cursus scolaire avec l'école,la famille et tous ceux qui interviennent auprès des jeunes est un gage deréussite. Des modes d'interventions diversifiés, adaptés aux publics et auxthèmes abordés, doivent permettre une participation active des jeunes etfavoriser le développement des compétences psychosociales.Les propositions d'actions réunies dans ce document se situent dans le registrede la prévention universelle, c'est-à-dire qu'elles s'adressent à tous les enfantset adolescents. Si l'éducation pour la santé sous-tend la plupart de ces actions,certaines se situent plus dans le champs de la création d'environnementsfavorables ou dans celui de la prévention des risques. L'objectif de ce travail estd'offrir aux décideurs, en fonction de leur rayon d'action (ministère, municipalité,établissement scolaire, classe{), quelques pistes d'actions bien ciblées2.En effet, ces propositions représentent des actions qui méritent d'être :• généralisées et développées : éducation nutritionnelle, activités physiques,prévention du risque alcool ;• réactivées : loi Évin, programme d'éducation physique ;• clarifiées : offre alimentaire en milieu scolaire ;• expérimentées et évaluées : programmes de gestion du stress et développementdes compétences psychosociales.Les conditions de mise en œuvre de ces projets sont fondamentales. Ainsi,l'enjeu majeur que représente la santé actuelle et future des jeunes nécessiteque ces projets soient conduits par des personnes formées. Les modes d'interventiondoivent avoir été validés et doivent reposer sur la reconnaissance des multiples facteurs individuels et collectifs qui déterminent les conditions dumaintien de la santé. L'examen de la littérature a conduit à constater la raretédes travaux français et des équipes universitaires françaises impliquées dans laconception et l'évaluation scientifique d'interventions éducatives de santé.C'est pourquoi le groupe de travail insiste sur la nécessité de développer larecherche et la formation en éducation pour la santé.Si le milieu scolaire est fortement sollicité pour la mise en œuvre d'actions, ilne faut pas oublier que les jeunes évoluent aussi dans d'autres milieux(familles, groupes de pairs, quartiers). Les actions de santé doivent tenircompte de la complexité et de l'intrication des déterminants des comportementset des modes de vie ; normes sociales, culturelles et familiales, constructionidentitaire des jeunes, contradictions entre incitations publicitaires etmessages sanitaires.Enfin, l'accès à la prévention et à l'éducation pour la santé pose encore enFrance des problèmes d'inégalités territoriales et sociales. À l'heure où larépartition des compétences en matière de santé publique et d'éducation esten réorganisation, cela peut être l'occasion de développer l'éducation pour lasanté autour de principes tels que l'équité géographique (accessibilité,schémas territorialisés), la pérennité et la continuité (actions continues plutôtque projets ponctuels) et la qualité (formation des intervenants, développementde la recherche).Ce document, qui porte sur des aspects fondamentaux de la santé physique etmentale des enfants et des adolescents, représente une nouvelle étape dans lamise à disposition des acquis de la recherche auprès des décideurs politiques etinstitutionnels.
L'ensemble des travaux présentés, réalisés entre 1990 et 2006, trouve sa cohérence dans un parcours qui se propose d'analyser les traitements, la place et le regard réservés par la société valencienne des XVe-XVIIe siècles à deux catégories de marginaux souvent associés dans les mentalités valenciennes d'alors et désignés conjointement sous le nom d'Innocents (Ignoscents dans l'ancien dialecte valencien): les fous et les orphelins. Nous avons analysé les traitements qui leur étaient réservés, tant en ce qui concerne les réalités historiques que les représentations sociales qui en étaient offertes. Enfin, nous nous sommes intéressée aux représentations littéraires du microcosme de l'hôpital des fous.Nos travaux comprennent quatre volets : -attitudes de diverses institutions face à la marginalité ;-représentations sociales des fous et des orphelins ;-représentations de l'hôpital des fous par Lope de Vega Carpio ;-représentations allégoriques sur le même thème.I.L'assistance aux fous et aux orphelins à Valence aux XVe-XVIIe siècles : les attitudes institutionnelles face à la marginalitéA. Les institutions d'assistanceUn premier groupe de travaux a été consacré à l'étude des deux institutions qui assistaient ces marginaux : d'une part, les fous, pris en charge par l'Hôpital des Innocents, fondé en 1409 et devenu en 1512, lors de la fondation de l'Hôpital général, Maisons des fous et des folles de ce dernier ; d'autre part, les orphelins, éduqués par le Collège des orphelins Saint-Vincent-Ferrier, également fondé au début du XVe siècle.Locura y sociedad, notre premier livre, publié à Valence (Espagne) en 1994, est l'adaptation à l'espagnol de notre thèse de doctorat, soutenue à l'Université de la Sorbonne Nouvelle (PARIS III) sous la direction du Professeur Augustin Redondo le 13 février 1993. Il en va de même pour les deux articles ci-dessous mentionnés. L'un est le texte de la communication que nous avons lue au Colloque qui s'est tenu à Valence en mai 1997 en Hommage à l'historien espagnol de la psychiatrie, le Dr. Vicente Peset Llorca. L'autre est le texte publié dans l'ouvrage collectif paru il y a quelques mois à Valence (2007) sur l'histoire de l'Hôpital des fous de cette ville. Conformément aux recommandations pour la constitution du dossier scientifique qui figurent sur le livret du Conseil scientifique de Paris III (Vade-mecum), nous n'avons inclus ni notre thèse, ni ces trois adaptations, qui en découlent très directement, dans la liste des travaux présentés en vue de l'obtention du diplôme d'Habilitation à Diriger des Recherches. Toutefois, les ayant utilisées pour rédiger notre document de synthèse (qui, toujours selon ces mêmes instructions, doit « retracer le parcours de recherche accompli par le candidat en y incluant par conséquent les recherches engagées dans le travail antérieur de doctorat »), nous les mentionnons également ici. Il s'agit de :Travaux réalisés dans le cadre de notre thèse et directement dérivés de cette dernière :1. LIVREHélène TROPÉ, Locura y sociedad en la Valencia de los siglos XV la XVII: los locos del Hospital de los Inocentes (1409-1512) y del Hospital General (1512-1699) [Traduit par l'auteur de : Folie et société à Valence (XVe-XVIIe siècles): les fous de l'Hôpital des Innocents (1410-1512) et de l'Hôpital général (1512-1699) (thèse de doctorat sous la direction du professeur Augustin Redondo), Paris: Université de la Sorbonne Nouvelle – Paris III, 723 p.], Valencia: Diputación de Valencia, Centre d'Estudis d'História Local, 1994. 433 p.2. ArticleHélène TROPÉ, «Locura y sociedad en la Valencia de los siglos XV al XVII: los locos del Hospital de los Inocentes (1409-1512) y del Hospital General (1512-1699)», en : La locura y sus instituciones (Actas de las II Jornadas de Historia de la Psiquiatría. Homenaje al Dr. Vicente Peset Llorca, Valencia, 9 y 10 de mayo de 1997), Valencia: Diputación de Valencia, 1997, pp. 141-154.3. Participation à un OUVRAGE COLLECTIFHélène TROPÉ, Del Hospital de los Inocentes (1409-1512) a la Casa de los locos del Hospital General (1512-1699), in : Lorenzo Livianos, Conxa Císcar, Ángeles García, Carlos Heimann, Miguel Ángel Luengo, Hélène Tropé, El manicomio de Valencia del siglo XV al XX, Paterna (Valencia) : Ajuntament de Valencia, colección « Científicos valencianos », n° 8, 2006, pp. 13-117.2) Le Collège des orphelinsNous avons consacré un livre et deux articles au Collège des Orphelins Saint-Vincent-Ferrier :LIVRE Hélène TROPÉ, La formation des orphelins à Valence: le cas du Collège Impérial Saint-Vincent-Ferrier de Valence (XVe-XVIIe siècles), Paris: Publications de la Sorbonne, Presses de la Sorbonne Nouvelle, Collection «Textes et documents du Centre de Recherche sur l'Espagne des XVIe et XVIIe siècles (CRES)», vol. VIII, 1998. 416 p.Article«La formation des orphelins au Collège Saint-Vincent-Ferrier de Valence aux XVIe-XVIIe siècles», in: A. REDONDO, [Études réunies et présentées par], La formation de l'enfant dans l'Espagne des XVIe-XVIIe siècles (Actes du Colloque International, Sorbonne-Collège d'Espagne, octobre 1995), Paris: Publications de la Sorbonne Nouvelle, collection «Travaux du Centre de Recherche sur l'Espagne des XVIe et XVIIe siècles» (CRES - Directeur: Augustin REDONDO), vol. XI, 1996, pp. 215-230.Article Hélène TROPÉ, « Le mystère médiéval de saint Christophe, passeur de gué, dans la Fête-Dieu de Valence (Espagne) », in : DELPECH, François [dir.], Imaginaire des espaces aquatiques, Paris, Presses de la Sorbonne Nouvelle, Collection «Textes et documents du Centre de Recherche sur l'Espagne des XVIe et XVIIe siècles (CRES)» (à paraître).Ce livre, ainsi que le premier des deux articles mentionnés, portent sur la formation des orphelins dans ce Collège. Nous avons commencé par y retracer l'historique de cette institution, exceptionnelle par sa longévité : créée en 1410, elle existe toujours. Par son histoire et ses finalités, elle est l'homologue d'autres institutions semblables de l'Europe moderne. Fondée par des ecclésiastiques, à partir de 1593, elle devient un établissement contrôlé par trois notables de la cité et passe donc dans les faits sous contrôle de la municipalité. En 1624, elle hérite des locaux du Collège impérial destiné jusqu'en 1609 à l'éducation des enfants morisques de la ville. Après l'expulsion de ces derniers, le Collège reprend, avec les biens de cet établissement, ses armes impériales. Le Collège était destiné aux enfants issus de mariages légitimes dont un ou les deux parents étaient décédés. Par contre, les enfants abandonnés, péjorativement dénommés borts (bâtards), dès lors qu'ils étaient présumés illégitimes, devaient se contenter de l'Hôpital général. Le Collège avait clairement pour mission d'intégrer les orphelins qu'il admettait dans l'espace de la cité tout en les protégeant des milieux délinquants. Il s'agissait donc de les récupérer comme main d'œuvre pour le commerce et l'artisanat, alors en pleine expansion. L'éducation religieuse, notamment l'apprentissage de la doctrine, était le moyen de les former aux valeurs dominantes. Le catéchisme était donc au fondement même de leur apprentissage. Seuls les garçons apprenaient à lire. Les filles, reçues en moins grand nombre que les garçons —sans doute parce qu'elles trouvaient à s'employer comme servantes dès leur plus jeune âge—, apprenaient seulement à prier et à réaliser des travaux ménagers. Une fois éduqués et instruits dans la doctrine, les garçons vers l'âge de 12 ans, étaient mis en apprentissage auprès des marchands et des artisans des corporations afin d'apprendre un métier. Quant aux collégiennes, elles étaient placées comme servantes auprès d'un maître. Vers l'âge de 20 ans, considéré comme adéquat pour le mariage, l'apprentissage prenait fin et le maître d'apprentissage des garçons, ou pour les filles, l'employeur, devaient leur verser un salaire, modeste, en général de 7 livres valenciennes, afin que garçons et filles puissent se faire confectionner un habit.Le second article mentionné porte sur le mystère médiéval valencien de saint Christophe qui le représente en passeur de gué. Ce mystère a été mis en scène à Valence depuis des temps très anciens, conjointement à d'autres mystères, dans le cadre de la fête du Corpus Christi. Nous avons effectué cette recherche car nous avions connaissance de la participation des orphelins du collège, au début du XVIIIe siècle, à sa représentation et nous désirions savoir s'ils y avaient participé antérieurement. Il semble que non. Néanmoins nous avons choisi de publier tout de même nos recherches sur ce mystère, qui constitue une autre manifestation théâtrale valencienne, religieuse cette fois, et offre donc un point de comparaison pour étudier l'univers du théâtre valencien examiné dans le versant littéraire de notre dossier. D'autre part, il a trait à la célébration du Corpus Christi et donc à cet aspect des fêtes célébrées dans la ville, également important dans notre dossier.B. La protection des rois et le contrôle de l'Inquisition1. Les rois d'Aragon accordent des privilèges aux fondateurs de l'Hôpital des InnocentsLe second volet de notre étude des attitudes institutionnelles vis-à-vis de ces marginaux a été consacré à l'examen des textes des privilèges accordés aux fondateurs de l'Hôpital des Innocents par les monarques aragonais. Il s'agit du texte de la communication que nous avons lue en septembre 1993 à Jaca au XVe Congrès d'Histoire de la Couronne d'Aragon.Hélène TROPÉ., «Poder real, locura y sociedad: la concepción de los locos en los privilegios fundacionales otorgados al Hospital de Inocentes de Valencia por los monarcas aragoneses (1409-1427)», in: Actas del XV Congreso de Historia de la Corona de Aragón (Jaca, 20-25 de sept. 1993), Zaragoza: Diputación General de Aragón, Departamento de Educación y Cultura, tomo I y volumen 5°, 1996, p. 307-318.Il ressort de cette étude que la première justification donnée par les monarques à l'assistance hospitalière aux fous a trait à l'affirmation selon laquelle ces derniers sont les pauvres du Christ et qu'il convient de leur porter secours. Les assister permet ainsi au chrétien de gagner la miséricorde divine. En second lieu, leur hospitalisation est envisagée comme une mesure d'ordre public destinée à préserver la cité des troubles et des dommages que ces derniers peuvent causer. En troisième lieu, ils sont comparés aux invalides, incapables de pourvoir à leurs besoins. Le Privilège de 1427 s'élève contre la croyance selon laquelle les « insensés » expieraient leurs fautes ou celles de leurs ancêtres et affirme qu'il n'en est rien : leur folie est une manifestation de la puissance divine. 2) Les inquisiteurs du Tribunal de Valence face à la folie des accusésDans un article pour l'Hommage à Pierre Vilar rendu par l'Association des Catalanistes de France à ce très grand historien, nous avons étudié les stratégies mises en œuvre et les enquêtes diligentées par les inquisiteurs valenciens face à a folie alléguée ou présumée des accusés : Hélène TROPÉ, «Folie et Inquisition à Valence (1580-1699)», in : Hommage à Pierre Vilar / Association Française des Catalanistes, Paris: Éditions Hispaniques - AFC, 1994, p. 171-185.Nous y exposons que lorsque la réalité de la folie de l'accusé au moment des faits délictueux était avérée, elle constituait devant les tribunaux inquisitoriaux une excuse absolutoire. Dans ce cas, le procès était suspendu et il était relâché s'il avait été arrêté. Diverses enquêtes étaient donc diligentées auprès de ses proches et des témoins des faits. La folie avérée au moment du délit était très certainement prise en compte comme circonstance atténuante tout simplement parce que les inquisiteurs étaient alors convaincus que l'accusé était irresponsable et donc, qu'il n'avait pas eu l'intention de porter atteinte à la foi. En le discréditant aux yeux des tiers, la folie « annulait » aussi la dangereuse portée des propos hérétiques qu'il avait tenus. L'affaire était dès lors classée : on l'absolvait et on le renvoyait à sa famille ou, lorsqu'il n'en avait pas, on l'adressait à l'hôpital des fous. Lorsque la folie de l'accusé n'était ni évidente ni notoire et qu'il était établi qu'il avait même joui d'un certain crédit auprès de la population, une peine pouvait tout de même être appliquée dans le but de le punir et de le discréditer. Dans les cas où les accusés devenaient fous dans les prisons de l'Inquisition, les faits étaient jugés mais l'on sursoyait à l'application de la peine, on les envoyait à l'hôpital des fous afin qu'ils y soient reclus et pris en charge et l'on attendait qu'ils guérissent afin de pouvoir les punir. Le second volet de nos travaux analyse l'ensemble des efforts réalisés par les Autorités de la ville afin de réintégrer ces marginaux, symboliquement cette fois, dans le corps social en les représentant de façon rassurante à la population comme des assistés pris en charge par la ville. Nous nous sommes donc intéressée aux représentations sociales. II. Les représentations sociales des fous et des orphelins : quêtes et fêtesLes Autorités de la ville, conscientes de l'image négative que ces marginaux —les fous en particulier— pouvaient avoir dans les mentalités, ont mis en œuvre diverses stratégies afin de modifier leurs représentations. Ils ont mis en scène fous, orphelins et, plus rarement, enfants exposés, comme des figures de l'Innocence.Nous avons consacré plusieurs travaux à l'étude de ces représentations. Et d'abord un article :Hélène TROPÉ, «Les relations entre hommes et femmes dans l'univers hospitalier valencien de la folie des XV-XVIIè siècles», in: A. REDONDO, [Études réunies et présentées par], Les relations entre hommes et femmes dans l'Espagne des XVIe-XVIIe siècles, Paris: Publications de la Sorbonne, collection «Travaux du Centre de Recherche sur l'Espagne des XVIe et XVIIe siècles » (CRES - Directeur Augustin REDONDO)», vol. IX, 1996, p. 105-116.Dans celui-ci, nous avons commencé par rappeler que les administrateurs avaient édicté une règle de stricte séparation des hommes et des femmes au sein de l'hôpital. Nous avons ensuite montré que tout au long de la période, cette règle a été transgressée comme le prouvent les enfants mis au monde par des folles depuis longtemps hospitalisées. Enfin, nous avons étudié les diverses mises en scène que les administrateurs de l'hôpital eux-mêmes ont effectuées des relations entre fous et folles à l'extérieur de l'établissement dans le cadre des processions festives, au XVIIe siècle en particulier. Puis, dans notre contribution à l'Hommage que le CRES a rendu au Professeur Augustin Redondo, nous avons analysé les représentations sociales des fous et des orphelins, d'abord à l'intérieur de leurs institutions d'assistance respectives, puis à l'extérieur :Hélène TROPÉ, «Fêtes et représentations des marginaux à Valence aux XVIe et XVIIe siècles», in: Écriture, pouvoir et société en Espagne aux XVIe et XVIIe siècles. Hommage du CRES au Professeur Augustin Redondo, Paris: Publications de la Sorbonne, Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2001, p. 347-363.Nous y avons notamment étudié comment chroniques, mémoires et journaux privés attestent qu'à l'occasion de diverses manifestations collectives publiques, festives ou expiatoires, les Autorités de la ville ont ainsi fait paraître en tête des processions au moins trois catégories de marginaux assistés dans les institutions évoquées, le plus souvent les fous de l'Hôpital général et les orphelins du Collège Saint-Vincent-Ferrier et, moins fréquemment, les enfants exposés de l'Hôpital général. Ces marginaux étaient chargés d'incarner des rôles, ce qui, symboliquement, permettait de les réinsérer dans le tissu social. Ils furent notamment convertis en figures de l'Innocence.Montrer sur les chars de la ville ces enfants ainsi « récupérés » et préservés de la délinquance, exhiber sous un jour drôle et plaisant les fous de l'Hôpital, grâce, finalement, à une efficace politique d'assistance municipale, ne devait pas manquer d'avoir un certain impact, sans doute voulu et même recherché, sur la population et devait constituer une sorte de publicité vivante à la louange du puissant patriciat gouvernant les affaires de la cité et qui montrait ainsi qu'il savait aussi réintégrer les marginaux dans le tissu social. Ces mises en scène des assistés contribuaient à rassurer le public et, en dernière instance, offraient l'image d'une société valencienne idéalement parfaite.Les deux volets suivants de notre dossier concernent le système de représentations littéraires suscité par l'existence de cet hôpital de Valence, et plus largement, les images littéraires de l'hôpital, notamment de fous, incurables, insensés, etc. Nous avons étudié exclusivement les images correspondant à la première des deux institutions étudiées car, à notre connaissance, aux XVe, XVIe et XVIIe siècles, ni les enfants exposés de l'Hôpital Général, ni les orphelins de Saint-Vincent-Ferrier n'ont fait l'objet de représentations littéraires. Concernant les représentations littéraires construites à partir du motif de l'hôpital, l'historicité des hôpitaux représentés permet de distinguer deux types de productions. D'une part, des œuvres où un hôpital de fous, explicitement nommé, sert de référent et de cadre à tout ou partie de l'action. C'est le cas en particulier de trois œuvres de Lope de Vega Carpio qui effectuent des variations sur ce thème.Elles font l'objet du troisième volet de notre dossier.III. L'hôpital des fous selon Lope : trois variations sur un même thèmeHélène TROPÉ, édition critique de Los locos de Valencia de LOPE DE VEGA CARPIO, Madrid, Castalia, « Clásicos castellanos » n° 275, 2003, 352 p. Hélène TROPÉ, Traduction française de Los locos de Valencia de Lope de Vega Carpio (à paraître).Hélène TROPÉ, « La representación dramática del hospital del microcosmos del Hospital de los locos en Los locos de Valencia de Lope de Vega », Anuario Lope de Vega V (1999), Prolope, Departament de Filologia Espanyola de la Universitat Autònoma de Barcelona, pp. 167-184.Hélène TROPÉ, « Menosprecio de Aragón y exaltación de Castilla en El loco por fuerza, comedia atribuida a Lope de Vega », comunication lue dans le cadre du Colloque International organisé par l'Universitá degli Studi di Parma et l'Université de la Sorbonne Nouvelle – Paris III (Parme, 2-3 mai 2002) sur El texto y su marco : La representación del espacio en el Siglo de Oro español, (à paraître dans Criticón), Après avoir réalisé l'édition critique de la comedia de Lope de Vega Los locos de Valencia, nous l'avons traduite en français. Dans ces deux livres, nous avons présenté le texte et nous l'avons très soigneusement annoté afin d'éclairer le sens de multiples allusions littéraires ou médicales qui peut échapper au lecteur contemporain. Nous nous sommes donc efforcée de rendre le texte accessible.Nous avons consacré un premier article à l'étude de la représentation dramatique de l'hôpital des fous par Lope de Vega Carpio. Nous y avons mis en regard les stylisations réalisées par cet auteur avec ce que nos études antérieures sur l'histoire de cet hôpital nous avaient appris. Nous avons conclu que la pièce Los locos de Valencia ressemble plus à l'image que les administrateurs offraient de leurs hospitalisés, lorsqu'ils les mettaient en scène sur les chars lors des grandes processions dans la ville, qu'à ce qu'a été au quotidien la Maison des fous et des folles. L'hôpital reflété dans Los locos de Valencia ne conserve qu'une ressemblance illusoire avec l'hôpital historique. Il s'agit plus en fait d'une pièce sur le théâtre construite sur la rencontre du topos érasmien de la folie universelle avec celui du Grand Théâtre du Monde. Dans l'article suivant « Menosprecio de Aragón… », nous avons étudié comment, selon la méthode de « l'argumentation casuistique » qui serait propre à Lope de Vega, ce dramaturge présenterait dans une comedia une solution opposée à celle proposée dans une autre œuvre ayant pourtant la même intrigue et comportant les mêmes personnages. C'est le cas des deux œuvres où Lope a représenté l'hôpital : Los locos de Valencia, El peregrino en su patria, ainsi que El loco por fuerza, pièce qui lui a été attribuée et dont nous pensons personnellement qu'elle est bien de lui. Il nous est apparu que la question du genre détermine les variations entre les trois pièces. Ainsi, logiquement, dans la comedia Los locos de Valencia, l'hôpital des fous devient le microcosme de la folie comique. Dans les scènes asilaires du roman byzantin, il est par contre un espace sinistre où la folie, tragique, signe l'accomplissement du destin dramatique des amants soumis à d'incessantes tribulations. Quant à El loco por fuerza, il s'agit d'un drama, mot que nous employons ici pour désigner, avec le professeur Joan Oleza, un macro-genre caractérisé par sa mission transcendante, son prosélytisme et son contenu panégyrique. Dans cette pièce, l'hôpital est tragi-comique. La question des genres présiderait donc bien à ces variations et les expliquerait.D'autre part, nous avons étudié comment cette pièce, probablement écrite par Lope de Vega entre 1597 et 1608, met en scène de très conflictuelles relations entre castillans et aragonais dans le cadre de la ville de Saragosse et de la montagne aragonaise. Nous l'avons analysée à la lumière du contexte historique des révoltes aragonaises de 1591 et avons émis l'hypothèse selon laquelle l'internement forcé du personnage principal pourrait peut-être renvoyer aux poursuites intentées par Philippe II contre son Secrétaire Antonio Pérez, accusé d'assassinat, lequel se réfugia à partir d'avril 1590 en Aragon où il provoqua deux soulèvements à Saragosse en mai et en septembre 1591. Enfin, concluant dans cet article sur l'ensemble du dossier des représentations de l'hôpital par Lope de Vega, nous avons proposé des hypothèses de lecture conjointe de El loco por fuerza et de Los locos de Valencia en rapport avec l'affaire Pérez et les Relaciones (éditions de 1594 et 1598) écrites par ce dernier. Nous avons tenté de montrer que Lope de Vega inverse radicalement les perspectives idéologiques favorables aux aragonais depuis lesquelles Pérez a écrit son texte. Dans El loco por fuerza, la Castille apparaît à travers les membres du couple d'amoureux originaires de Tolède comme une terre de vertu menacée par ce qui est montré dans la pièce comme perversion morale et politique aragonaise : exaltation de Castille et mépris d'Aragon. Le monarque qui rétablit l'ordre à la fin de l'œuvre est un parangon de justice. La pièce est orientée idéologiquement vers une exaltation de la Castille comme véritable centre de l'Empire et une condamnation des révoltes aragonaises.Si les « hôpitaux lopesques » se caractérisent par la forte illusion référentielle qu'ils génèrent en dépit de leur historicité finalement assez faible, d'autres représentations d'asiles n'autorisent plus du tout la moindre confusion du signe théâtral avec le simulacre de référent : ce sont les représentations allégoriques, objet du quatrième volet de nos travaux.IV. Les fous défilent. Représentations allégoriques de l'hôpital des fousLa tradition littéraire de « l'hôpital » paraît ancienne et elle est profuse. Dans la dernière partie de notre dossier, nous avons étudié deux de ces représentations allégoriques : la tragi-comédie de Charles Beys L'Hospital des fous (1635), modifiée en 1653 sous le titre Les illustres fous, et un texte attribué à Quevedo, mais qui serait en réalité du poète et musicien sévillan Melgarejo : La Casa de los locos de amor. Le texte d'origine est conservé dans un manuscrit du début du XVIIe siècle et a été publié, dans une version toutefois expurgée et fort édulcorée, dans l'édition des sueños de Quevedo parue à Saragosse en 1627, puis dans presque toutes les éditions successives. Dans la plupart de ces représentations allégoriques, dont nous avons offert un panorama (toutefois non exhaustif) dans notre synthèse, on observe un certain nombre d'éléments récurrents qui autorisent à considérer l'hypothèse selon laquelle ces représentations formeraient peut-être un sous-genre ou à tout le moins, une tradition : narrateur personnel en position de témoin, figures allégoriques correspondant aux membres de l'hôpital visité, défilé de fous.Le texte de la communication que nous avons lue au XIVe Congrès de l'Association Internationale des Hispanistes (New York, juillet 2001) est consacré à l'étude du procédé dans Los locos de Valencia et El peregrino en su patria de Lope de Vega :Hélène TROPÉ, « Desfiles de locos en dos obras de Lope de Vega : Los locos de Valencia y El peregrino en su patria », Actas del XIV Congreso de la Asociación Internacional de Hispanistas [Nueva York, 16-21, Julio, 2001], edición de Isaías Lerner, Robert Nival y Alejandro Alonso, Newark, Delaware, Juan de la Cuesta, col. « Hispanic Monographs », 2004, t. II, p. 555-564.Dans notre synthèse, nous avons exprimé qu'il nous semble que cette étude pourrait être étendue valablement et avec profit à d'autres représentations ; mais que l'extension du corpus conduirait probablement à un élargissement du point de vue. On serait alors probablement amené à conclure que le rire que suscite cette revue d'insensés dans les œuvres de Lope peut se transmuer en franche amertume et déboucher sur une vision désabusée du monde dans d'autres œuvres telles que La casa de los locos de amor. Lu au VIe Congrès de la Asociación internacional Siglo de Oro (AISO) à Burgos en juillet 2002, le texte de notre communication montre que cette dernière œuvre est un rêve allégorique parodique qui débouche sur une satire du mariage et de l'amour représentés comme folie. Dans la version manuscrite, La casa de los locos de amor est une censure sévère des mœurs dépravées et brosse un noir tableau de la société espagnole du temps. Paradoxalement, dans sa version expurgée et édulcorée parue avec d'autres textes de Quevedo dans les Sueños de 1627, son éloge du mariage lui aurait certainement valu d'être reniée par l'auteur des Sueños. Telles sont les conclusions qui ressortent du texte de l'article correspondant :Hélène TROPÉ, « Los 'Hospitales de locos' en la literatura española del siglo XVII: la representación alegórico-moral de la Casa de los locos de amor atribuida a Quevedo », en: Actas del VI Congreso de la Asociación internacional Siglo de Oro (AISO) [Burgos, Universidad de Burgos, 15-19 de julio de 2002], Madrid : Iberoamericana Vervuert.Enfin, dans l'article consacré à la tragi-comédie de Charles Beys L'Hospital des fous, publiée en 1635, reprise et modifiée en 1653, sous le titre Les Illustres fous, nous avons confronté l'image de la folie hospitalière, offerte respectivement par l'Italien Garzoni, l'Espagnol Lope de Vega et le Français Charles Beys, de ce même microcosme de la folie hospitalière et montré que les représentations de l'Italien et de l'Espagnol se rapprochent sur des points qui les opposent à celle du Français. L'hôpital représenté par Lope de Vega, comme celui de Garzoni, est un microcosme séparé du monde. L'hôpital de Beys, au contraire, dont les frontières s'étendent au fur et mesure de la représentation, a vocation à figurer tout l'univers et sa folie. D'autre part, dans l'hôpital des fous de l'Italien et de l'Espagnol, les frontières entre le personnel et les hospitalisés restent stables, plus hermétiques cependant chez le premier que chez le second, alors que dans l'hôpital du Français elles tendent peu à peu à s'effacer jusqu'à ce que soit révélé au spectateur que le Concierge, censé garder les fous, l'est autant qu'eux et que la pièce à la représentation de laquelle le spectateur est en train d'assister a même été écrite par lui. En conséquence, alors que ni la pièce du Phénix ni celle de Garzoni ne tendent jamais véritablement de miroir au spectateur afin qu'il s'y regarde et conclue qu'il est un fou parmi les fous mis en scène, chez le Français au contraire, le spectateur est explicitement invité à se reconnaître parmi les rôles de fous défilant devant lui. La folie est univoque et irréversible dans l'ouvrage de Garzoni. Elle l'est aussi en grande partie dans la pièce de Lope de Vega. Par contre, dans celle de Beys, elle est équivoque, ambiguë, constamment réversible et surtout elle est universelle :Hélène TROPÉ, « Variations dramatiques espagnoles et françaises sur le thème de l'hôpital des fous aux XVIe et XVIIe siècles : de Lope de Vega Carpio à Charles Beys », Bulletin Hispanique (à paraître).
Our long-term study of the Algerian political economy draws on the regulatory approach inspired by Bruno Amable and Stefano Palombarini's neo-realist analysis framework (2009) and Mushtaq Khan's neo institutionalist concepts (2000, 2009): it considers that Algeria's economic development is taking place in a given context of the distribution of power and various formal and informal institutions, which structure political agreements or balances on the basis of social groups supporting the ruling coalition and, in return, capture distributed annuities. The confluence or divergence of political and economic interests is a condition for the success or failure of economic and industrial policies conducive to growth and development. The institutions would play a fundamental role in the development process. ; Notre étude sur longue période de l'économie politique algérienne, prend appui sur l'approche régulationniste inspirée du cadre d'analyse néoréaliste de Bruno Amable et Stefano Palombarini (2009) et des concepts néo institutionnalistes de Mushtaq Khan (2000, 2009) : elle considère que le développement économique de l'Algérie s'opère dans un contexte donné de distribution du pouvoir et d'institutions variées formelles et informelles, qui structurent des accords ou équilibres politiques sur la base de groupes sociaux soutenant la coalition au pouvoir et captant en retour des rentes distribuées. La confluence ou divergence d'intérêts politiques et économiques conditionne la réussite ou l'échec de politiques économiques et industrielles favorables à la croissance et au développement. Les institutions joueraient dans le processus de développement un rôle fondamental.
L'atlas constitue un outil inédit sous forme d'indicateurs, cartes et graphiques. Il révèle les dynamiques à l'oeuvre au sein du monde rural africain et les recompositions territoriales du continent. L'atlas présente un état des lieux des recompositions rurales en Afrique, à la fois l'Afrique du nord et l'Afrique subsaharienne. Il croise des données de démographie, du peuplement, de l'urbanisation et de l'utilisation des ressources avec les dynamiques spatiales et économiques, à la fois à l'échelle continentale et au travers de quelques exemples régionaux. Outil à la fois original et inédit, il a pour objectif d'alimenter le débat sur les grands enjeux du développement régional et continental. Publié conjointement par le Cirad et le Nepad (Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique, organe de l'Union africaine), avec le soutien financier de l'AFD, il s'inscrit dans le cadre du nouveau programme Rural Futures du Nepad. Celui-ci vise à renforcer les dynamiques territoriales et les changements structurels pour un développement durable du continent. L'atlas offre une situation de référence pour des travaux ultérieurs qui permettront d'affiner les analyses sur les plans régional et thématique et de repérer les principales évolutions. Il sera régulièrement augmenté et mis à jour.